Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Comparutions

  1. M. C. R. : appelante
  2. Vanessa Luna : avocate de l’intimé
  3. Daren Lische : présent au nom de l’intimé

Décision

[1] Le Tribunal conclut que la contestation fondée sur la Charte n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, l’appel est rejeté de façon sommaire.

Introduction

[2] Les demandes de pension de survivant, d’enfant de survivant et de décès du RPC présentées par l’appelante ont été estampillées le 6 septembre 2011 par l’intimé. L’intimé a rejeté la demande initiale et la demande de révision, puis l’appelante a interjeté appel devant le Bureau du commissaire des tribunaux de révision (BCTR).

Question en litige

[3] Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès. Le paragraphe 53 (1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social exige que le Tribunal rejette de façon sommaire l’appel s’il est convaincu qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

[4] Même si l’expression « une chance raisonnable de succès » n’a pas encore été définie par un tribunal aux fins de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les décisions des tribunaux qui traitent de dispositions semblables dans d’autres contextes peuvent nous guider. Dans le cas d’une requête pour annuler un avis de mise en cause, la Cour suprême du Canada a déclaré dans R. c. Imperial Tobacco Ltd, 2011 CSC 42, au paragraphe 17, qu’une demande ne sera rejetée que s’il est évident et manifeste, dans l’hypothèse où les faits allégués seraient avérés, que la déclaration ne révèle aucune cause d’action raisonnable. La Cour suprême du Canada a offert d’autres directives pour l’application du critère aux paragraphes 19 et 20 :

Le pouvoir de radier les demandes ne présentant aucune possibilité raisonnable de succès constitue une importante mesure de gouverne judiciaire essentielle à l’efficacité et à l’équité des procès. Il permet d’élaguer les litiges en écartant les demandes vaines et en assurant l’instruction des demandes susceptibles d’être accueillies.

Ce faisant, il favorise deux conséquences positives, soit l’instruction efficace des litiges et le bien fondé des décisions sur ces demandes. La radiation des demandes n’ayant aucune possibilité raisonnable de succès favorise l’efficacité et fait épargner temps et argent. Les plaideurs peuvent se concentrer sur les demandes importantes et n’ont pas à consacrer des jours — parfois même des semaines — à la preuve et aux arguments de demandes vouées de toute façon à l’échec. Il en va de même pour les juges et les jurés, dont l’attention est portée là où il le faut, soit sur les demandes présentant une possibilité raisonnable de succès. Les gains d’efficacité découlant de cet élagage contribuent à leur tour à l’amélioration de l’administration de la justice. Plus la preuve et les arguments sont axés sur les vraies questions, mieux les thèses des parties à l’égard de ces questions et le bien fondé de l’affaire se dégageront de l’instruction du procès. 

[5] Le Tribunal s’est également fondé sur la décision de la Cour d’appel fédérale dans Fotinov et al c.  Banque royale du Canada, 2014 CAF 70 qui indique que le critère pour rejeter de façon préliminaire un appel doit être appliqué de façon rigoureuse et qu’il doit être évident que le fondement de l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès et qu’il est manifestement voué à l’échec. Le Tribunal s’est également fondé sur la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale dans Imperial Cabinet (1980) Co. Ltd c. Sa Majesté la Reine du chef du Canada,[1995] 1 CF 260 qui indique que pour avoir une chance raisonnable de succès « Il faut démontrer que la preuve est assez solide pour que, si le litige était poursuivi jusqu’au stade de l’instruction, il existe des chances réalistes que l’action soit accueillie. »

Droit et dispositions législatives applicables

[6] L’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012 prévoit qu’un appel qui a été présenté devant le BCTR avant le 1er avril 2013 et qui n’a pas été instruit par le BCTR est réputé avoir été présenté devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[7] Selon le paragraphe 53(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la division générale rejette de façon sommaire l’appel si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[8] L’article 22 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (le Règlement) dispose qu’avant de rejeter un appel de façon sommaire, la division générale doit aviser l’appelant par écrit et lui donner un délai raisonnable pour présenter des observations.

[9] Le paragraphe 3 (1) du Règlement prévoit que le Tribunal :

  1. a) veille à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent;
  2. b) peut, s’il existe des circonstances spéciales, modifier une disposition du présent règlement ou exempter une partie de son application.

[10] Le paragraphe 15 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés prévoit ce qui suit :

La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

[11] En vertu de l’alinéa 44(1)c) du Régime de pensions du Canada (la Loi) une prestation de décès doit être payée à la succession d’un cotisant qui a versé des contributions pendant au moins la période minimale d’admissibilité.

[12] En vertu de l’alinéa 44 (1)d) une pension de survivant doit être payée à la personne qui a la qualité de survivant d’un cotisant qui a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité.

[13] L’alinéa 44 (1)f) prévoit qu’une prestation d’orphelin doit être payée à chaque orphelin d’un cotisant qui a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité.

[14] Le paragraphe 44(3) indique que pour l’application des alinéas 44(1)c), d) et f), le cotisant n’est réputé avoir versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité que s’il a versé des cotisations au cours de sa période de cotisation :

  1. a) soit pendant au moins trois années, représentant au moins le tiers du nombre total d’années entièrement ou partiellement comprises dans sa période cotisable, celle-ci ne comprenant pas tout mois dans une année qui suit l’année où il atteint l’âge de soixante-cinq ans et à l’égard de laquelle ses gains non ajustés ouvrant droit à pension étaient égaux ou inférieurs à son exemption de base pour cette année;
  2. b) soit pendant au moins dix années.

[15] L’article 49 de la Loi prévoit que la période cotisable d’un cotisant est la période commençant soit le 1er janvier 1966, soit lorsqu’il atteint l’âge de dix-huit ans, selon le plus tardif de ces deux événements, et se termine le mois de son décès en excluant les mois qui, en raison d’une invalidité, sont exclus de la période cotisable de ce cotisant.

[16] Le paragraphe 107 (1) de la Loi prévoit que lorsque, selon une loi d’un pays étranger, des crédits sont affectés au paiement de prestations de vieillesse ou autres prestations, notamment des prestations aux survivants et des prestations d’invalidité, le ministre peut, au nom du gouvernement du Canada, conclure aux conditions qui peuvent être approuvées par le gouverneur en conseil un accord avec le gouvernement de ce pays prévoyant l’établissement d’arrangements réciproques relatifs à l’application ou à l’effet de cette loi et de la présente loi, et prévoyant, notamment, l’établissement d’arrangements concernant :

  1. a) l’échange des renseignements, recueillis en vertu de cette loi ou de la présente loi, qui peuvent être nécessaires pour donner effet à de semblables arrangements;
  2. b) l’administration des prestations payables selon la présente loi à des personnes qui résident dans ce pays, l’extension des prestations prévues par cette loi ou la présente loi à des personnes ou à leur égard et la modification du montant des prestations payables en vertu de cette loi ou de la présente loi à des personnes qui sont employées ou qui résident dans ce pays, et à leur égard;
  3. c) l’administration des prestations payables en vertu de cette loi à des personnes qui résident au Canada, l’extension des prestations prévues par cette loi ou la présente loi à des personnes ou à leur égard et la modification du montant des prestations payables en vertu de cette loi ou de la présente loi à des personnes qui sont employées ou qui résident au Canada […].

Question préliminaire

[17] Le Tribunal estime que l’article 22 du Règlement n’a pas été respecté puisqu’aucun avis écrit n’a pas été remis à l’appelante concernant l’intention du Tribunal de rejeter sommairement la demande d’appel. Le Tribunal est d’avis toutefois que, compte tenu du paragraphe 3(1) du Règlement, cette exigence procédurale pourrait faire l’objet d’une dispense. L’appelante a reçu signification de la requête de l’intimé demandant au Tribunal de rejeter sommairement l’appel et les documents à l’appui, et elle a eu l’occasion de présenter des documents de réponse. L’appelante a participé à la téléconférence et a fait des observations orales en réponse à la requête.

[18] Le Tribunal est d’avis que les exigences en matière d’équité et de justice naturelle ont été respectées, que l’appelante a été avisée suffisamment à l’avance de la requête visant le rejet de l’appel et qu’elle a eu l’occasion de répondre pleinement. Ainsi, conformément à l’article 22 du Règlement, les circonstances spéciales permettent de dispenser le Tribunal de son obligation d’envoyer un avis par écrit.

Contexte et éléments de preuve

[19] L’appelante est la veuve de feu M. O., né au Pérou en décembre 1961, et décédé dans un accident en août 2011. M. O. avait immigré au Canada en 2003. L’appelante et son mari ont trois enfants à charge, nés en 1997, en 1999 et en 2007. Le relevé d’emploi de M. O. indique qu’il a cotisé au RPC pendant sept ans, soit de 2005 à 2011.

[20] L’intimé a rejeté les demandes de l’appelante parce que M. O. avait cotisé pendant seulement sept ans et qu’un minimum de dix années de cotisation était requis. L’appelante a demandé un réexamen pour des motifs économiques et humanitaires. L’intimé a rejeté la demande de réexamen en indiquant que M. O. n’avait pas cotisé pendant le nombre d’années exigé au Canada et que l’on ne pouvait tenir compte de ses années d’emploi au Pérou parce que le Canada n’avait pas d’entente réciproque avec ce pays.

[21] Dans son avis d’appel, l’appelante a indiqué que son mari avait été victime d’un accident de la route fatal et inattendu à l’âge de 49 ans; qu’il avait immigré au Canada huit ans avant sa mort et que le nombre minimal d’années de cotisation obligatoire devait être réduit de façon à ne pas tenir compte de son dix-huitième anniversaire parce qu’il n’était pas Canadien à cet âge-là et qu’il n’existe aucune entente avec le Canada concernant ses cotisations.

[22] Le 19 octobre 2012, l’appelante a écrit au BCTR et a affirmé que les exigences en matière d’admissibilité prévues au paragraphe 44 (3) de la Loi violaient la Charte canadienne des droits et libertés en matière de discrimination fondée sur l’âge et que le paragraphe 107 (1) viole le droit garantissant la non-discrimination ethnique.

[23] Elle a affirmé qu’il y avait eu discrimination fondée sur l’âge parce que le nombre d’années requis n’était pas le même pour tout le monde et que c’était discriminatoire envers les personnes âgées. Elle a aussi fait valoir que le droit de ne pas faire l’objet de discrimination avait été violé parce que ce ne sont pas tous les pays d’origine des immigrants qui font partie des accords sociaux avec le RPC et que la liste des ententes réciproques montre une discrimination à l’égard des pays pauvres non européens. L’appelante a déclaré qu’il s’agissait d’une discrimination fondée sur le pays d’origine d’une personne et que pour éviter cette discrimination, les dispositions devraient exclure les années pendant lesquelles la personne n’était pas citoyenne canadienne, sans égard à son pays d’origine. Dans une lettre adressée au TSS datée du 25 juin 2013, l’appelante a réitéré sa position selon laquelle les dispositions contestées portent atteinte aux droits garantis par la Charte à l’égard de la discrimination fondée sur l’âge et l’origine ethnique. Elle a répété que le même nombre d’années devrait s’appliquer à tous en excluant les années pendant lesquelles la personne n’était pas citoyenne canadienne, sans égard à son pays d’origine.

[24] Le 17 octobre 2013, l’intimé a signifié un avis de demande en vertu de l’article 4 du Règlement pour que la demande fondée sur la Charte soit rejetée sommairement parce que la question avait déjà été tranchée dans la décision de la cour d’appel fédérale Lezau c. Canada (ministre du Développement social), 2008 CAF 99. Cette décision confirmait la décision de la Commission d’appel des pensions Elena Tan, Sukhwinder Bal, Joginder Dhaliwal, Eva K. Li, Siu Wan Ellen Tam et Elisabeta Lezau c. ministre du Développement social, CP20525, CP21817, CP22316, CP22452, CP22453 et CP23253, (8 décembre 2006) (C.A.P.).

[25] Le 10 octobre 2014, le Tribunal a envoyé un avis de conférence préparatoire, devant être tenue par téléconférence le 15 décembre 2014, pour la présentation des observations orales des parties relativement à l’avis de demande. Cet avis permettait à l’appelante de présenter des observations écrites en réponse, au plus tard le 30 novembre 2014. L’appelante n’a présenté aucune observation écrite en réponse.

Observations de l’intimé lors de la conférence préparatoire

[26] Mme Luna a déclaré que la décision de la Cour d’appel fédérale précitée Lezau est semblable au présent appel. Dans cette affaire, le cotisant décédé n’avait pas cumulé suffisamment d’années de cotisation et aucune entente réciproque avec la Roumanie n’était en place. Dans ce cas, une analyse de la Charte a été faite et le groupe de comparaison était composé d’immigrants venus de pays n’ayant pas signé d’entente et arrivés au Canada après leur 18e anniversaire. Le cotisant décédé et l’épouse survivante font tous deux partie de cette catégorie. Mme Luna a fait référence aux commentaires suivants de la Cour d’appel fédérale à propos de la décision de la Commission d’appel des pensions :

La Commission a indiqué que les règles de cotisation au Régime s’appliquent à tous les Canadiens, tant immigrants que non immigrants. Elle reconnaît que le Régime donne lieu à un traitement différent pour les cotisants qui ont suffisamment cotisé par rapport à ceux qui ne l’ont pas fait. Toutefois, elle a signalé, à juste titre, que c’est une caractéristique des lois relatives à l’aide sociale que d’exiger qu’une personne satisfasse à certains critères pour être admissibles à certains avantages.

En examinant le désavantage allégué par la demanderesse en l’espèce, elle a conclu que le désavantage n’avait pas été subi en raison d’une caractéristique personnelle ou d’un ciblage précis. Selon la Commission, il n’y a pas eu violation de la dignité humaine.

En outre, la Commission a examiné la proposition de la demanderesse selon laquelle la période de cotisation ne devrait débuter qu’après l’arrivée au Canada et elle a conclu qu’il « en résulterait que chaque immigrant serait traité différemment non seulement des non-immigrants mais également des autres immigrants qui peuvent arriver au Canada à un plus jeune âge qu’eux ».

Enfin, la Commission a conclu que la différence de traitement accordée aux cotisants au Régime ne constituait pas une discrimination au sens de l’article 15 de la Charte.

[27] Mme Luna a déclaré que dans la présente affaire, l’appelante tente d’avancer les mêmes arguments sur lesquels la Cour d’appel fédérale et la Commission d’appel des pensions ont déjà statué. Elle a ajouté que la doctrine du stare decisis s’applique et que le TSS est lié par la décision de la Cour d’appel fédérale dans Lezau.

[28] En ce qui a trait à l’article 107 de la Loi, Mme Luna a fait valoir que la disposition avait été examinée minutieusement dans la décision de la Commission d’appel des pensions et a attiré l’attention du Tribunal sur les paragraphes 29 à 31 de cette décision qui établissent quatre conditions essentielles devant être respectées avant de conclure une entente réciproque. La décision énonce les conditions suivantes :

On a souligné que les ententes internationales ne peuvent pas modifier les dispositions du Régime de pensions du Canada. Elles peuvent seulement élargir la protection en coordonnant les opérations du Régime avec les programmes de l’autre pays. En autorisant le ministre du Développement des ressources humaines à conclure des ententes de sécurité sociale internationales réciproques, le Parlement ne visait pas à créer des règles d’admissibilité spéciale. Les ententes internationales de sécurité sociale permettent aux personnes qui satisfont aux conditions minimales d’admissibilité établies dans la législation nationale d’additionner les périodes de cotisation au Régime et aux programmes comparables de l’autre pays afin de satisfaire aux exigences de cotisations du Régime de pensions du Canada.

[29] Mme Luna a également renvoyé le Tribunal au paragraphe 54 de la même décision :

Si, comme l’ont proposé les appelantes et l’intimée Bal, on mettait en marche l’horloge de cotisation seulement lorsque les immigrants arrivent au Canada, le résultat net serait que chaque immigrant serait traité différemment non seulement des non-immigrants mais aussi des autres immigrants qui auraient pu arriver au Canada à un plus jeune âge qu’eux. Par exemple, un immigrant qui a immigré au Canada à l’âge de 30 ans pourrait prétendre qu’il est traité différemment d’un immigrant qui a immigré au Canada à l’âge de 40 ans, et ainsi de suite. Les étudiants qui ont retardé leur entrée sur le marché du travail afin de poursuive leurs études universitaires sont sujets à la même règle de début de 18 ans et pourraient alléguer qu’ils sont traités différemment des immigrants dont le temps de départ dépend de l’âge d’entrée. De la même façon, les personnes qui n’ont pas travaillé pendant de longues périodes, ou qui étaient malades, pourraient prétendre qu’elles sont traitées différemment des immigrants. Et enfin, les immigrants qui sont venus au Canada d’un pays avec lequel nous avons une entente, et qui sont entrés sur le marché du travail à un âge plus tardif, pourraient faire valoir qu’ils ont fait l’objet d’une différence de traitement comparativement aux immigrants qui sont venus au Canada à partir d’un pays avec lequel nous n’avons pas d’entente. Selon moi, les règles de cotisation n’engendrent pas de différence de traitement entre les cotisants non immigrants et les cotisants immigrants.

[30] Mme Luna a déclaré que bien que la cause de l’appelante inspire la sympathie, le RPC est un régime contributif et non un programme d’aide sociale et donc, pour être en mesure de recevoir des prestations, il faut avoir payé les cotisations requises par les dispositions de la Loi.

[31] Mme Luna a déclaré que dans cette affaire, l’appelante tente d’avancer les mêmes arguments sur lesquels la Cour d’appel fédérale et la Commission d’appel des pensions avaient déjà statué. Elle a ajouté que la doctrine du stare decisis s’applique et que le TSS est lié par la décision de la Cour d’appel fédérale dans Lezau.

[32] Mme Luna a fait référence au paragraphe 53 (1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et a conclu que l’appel doit être rejeté sommairement parce qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

Observations de l’appelante lors de la conférence préparatoire

[33] L’appelante a déclaré que les affaires sur lesquelles l’intimé a fondé ses arguments sont différentes parce qu’aucune d’elles ne fait état de la discrimination fondée sur l’âge. Elle a précisé que ces cas étaient uniquement fondés sur le nombre insuffisant d’années de cotisation, et ne tenaient pas compte du fait que les formules utilisées créaient de la discrimination du fait qu’elles traitaient les gens différemment selon leur âge. Elle a ajouté que si deux personnes arrivaient au Canada le même jour et qu’elles travaillaient le même nombre d’années, l’une d’elles pourrait recevoir des prestations alors que l’autre non, en raison uniquement de son âge, c’est-à-dire parce que l’une serait plus vieille que l’autre. L’appelante a suggéré que les circonstances sont différentes pour les personnes qui sont nées au Canada et qui veulent faire des études plus longtemps, car il s’agit alors d’un choix personnel. La situation des immigrants, qui n’ont aucun contrôle sur leur date d’arrivée au Canada, est différente parce qu’ils doivent satisfaire aux exigences en matière d’immigration. 

[34] Elle a indiqué que les ententes réciproques créaient une discrimination ethnique à l’égard des personnes qui venaient de pays pauvres et qu’il n’existe qu’une seule entente avec un pays de l’Amérique du Sud et aucune avec l’Afrique. Elle a affirmé que le RPC ne peut pas dire aux gens qu’ils ne doivent pas mourir avant un certain temps s’ils veulent être admissibles, ni aux immigrants qu’ils doivent attendre avant de pouvoir mourir. Les dispositions contestées vont à l’encontre des droits de la personne et tout ce qu’elle réclame c’est que justice soit faite. 

Analyse

[35] Pour trancher cette affaire, le Tribunal doit tenir compte du fait qu’il s’agit d’une demande préliminaire de rejet avant l’audience complète sur le fond. Comme il est indiqué aux paragraphes 3 à 5 ci-dessus, le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès, dans l’hypothèse où les faits allégués par l’appelante sont véridiques.

[36] L’appelante reconnaît que M. O. ne satisfait pas aux exigences minimales de cotisations établies par la Loi. Cependant, elle est d’avis que ces dispositions enfreignent la Charte parce qu’elles sont source de discrimination fondée sur l’ethnie et l’âge. Il semble évident que cette question est très chère à l’appelante et qu’elle estime sincèrement avoir été victime de discrimination parce que feu son mari a immigré du Pérou, un pays sans entente réciproque.

[37] La difficulté à laquelle fait face l’appelante (un obstacle que le Tribunal juge insurmontable) vient du fait que les questions qu’elle soulève par rapport à la Charte ont déjà été invoquées et rejetées par la Cour d’appel fédérale dans Lezau, et le Tribunal est lié par cette décision. Bien que l’appelante estime que la question de la discrimination fondée sur l’âge n’a pas été étudiée, il est clair que la Commission d’appel des pensions l’a soigneusement examinée dans sa décision (voir paragraphe 29 ci-dessus) que la Cour d’appel fédérale a confirmée.

[38] Le Tribunal s’est également fondé sur la décision de la Commission d’appel des pensions Inderjit Sahota c. ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences (21 novembre 2011) CP22317 (CAP). Dans cette affaire la Commission d’appel des pensions a confirmé qu’elle était liée par la décision de la Cour d’appel fédérale Lezau et a rejeté la demande de l’appelante selon laquelle les articles 44 et 49 de la Loi étaient discriminatoires et contraires au paragraphe 15 (1) de la Charte en ce qui a trait à l’âge et à l’origine nationale du cotisant décédé.

[39] En conséquence, le Tribunal estime que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[40] La demande de l’intimé visant le rejet sommaire par le Tribunal de la contestation constitutionnelle est accueillie.

[41] par conséquent l’appel est rejeté de façon sommaire.

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