Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Motifs et décision

Comparutions

Représentant de l'appelante :  D. H.

Introduction

[1] À la fin de 2011, le représentant de l'appelante a présenté cinq demandes de Supplément de revenu garanti (SRG) au nom de l'appelante. Les demandes couvraient les périodes de 2007-2008 à 2011-2012. L'intimé a accordé le versement dans deux demandes reçues dans les 11 mois des périodes de versement respectives et a rejeté les trois demandes reçues plus de 11 mois après les périodes de versement respectives. Le représentant de l'appelante a demandé la révision des demandes. À la suite de la révision, l'intimé a décidé de maintenir sa décision originale. Le représentant de l’appelante a porté la décision découlant de la révision en appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR), et cet appel a été transféré au Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) en avril 2013.

[2] L’audience a été tenue par voie de téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. Il manque de l’information au dossier où il est nécessaire d’obtenir des clarifications.
  2. Le mode d’audience respecte les exigences du Règlement du Tribunal de la sécurité sociale à savoir qu’il doit procéder de façon la plus informelle et expéditive que le permettent les circonstances, l’équité et la justice naturelle.

Questions préliminaires

[3] D. H. est le fils de l'appelante. Il a participé à l'audience à titre de représentant de l'appelante. Par conséquent, il n'a pas été prêté serment à titre de témoin en l'espèce. Les renseignements qu'il a fournis au Tribunal sont résumés dans la section des observations de la présente décision.

[4] L'une des questions ayant fait l'objet d'une discussion au cours de l'audience était l'absence de preuve médicale à l'appui de l'argument relatif à l'incapacité. Le représentant de l'appelante a expliqué qu'il avait interprété que la révision du 20 juin 2012 par l'intimé signifiait que la question de l'incapacité de l'appelante n'était pas en litige étant donné que l'intimé a reconnu que l'appelante était frappée d'incapacité et qu'elle ne pouvait plus s'occuper de ses affaires. Après que la nature nouvelle du processus d'appel a été expliquée au représentant de l'appelante, celui-ci a demandé la possibilité de verser une preuve médicale à l'appui de l'argument relatif à l'incapacité. Le membre du Tribunal a accordé 30 jours au représentant de l'appelante afin qu'il puisse présenter une preuve médicale et il lui a expliqué que la preuve médicale versée à l'appui d'un argument relatif à l'incapacité comprend généralement une déclaration d'incapacité, formulaire disponible par l'intermédiaire de l'intimé qui établit le critère juridique concernant l'incapacité afin que le professionnel de la santé remplissant le formulaire connaisse le critère à propos duquel il est en train de formuler un commentaire.

[5] À la suite de l'audience, le représentant de l'appelante a produit une preuve comprenant un certificat d'incapacité rempli par le Dr Eugene J. Cahill le 5 juin 2015 et une lettre datée du 20 juin 2015 d’E. M. Cette preuve a ensuite été transmise à l'intimé par lettre datée du 13 juillet 2015, et celui-ci a eu jusqu'au 13 août 2015 pour répondre à la preuve s'il choisissait de le faire. Le Tribunal n'a reçu aucune observation de la part de l'intimé.

Droit applicable

[6] Conformément à l’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012, les appels déposés devant le BCTR avant le 1er avril 2013 et qui n’ont pas été instruits par le BCTR sont considérés comme ayant été déposés auprès de la division générale du Tribunal.

[7] Le paragraphe 11(2) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse (Loi sur la SV) prévoit que, sauf si le ministre a dispensé le pensionné de l'obligation de présenter une demande, le supplément n'est versé que sur demande agrégée du pensionné.

[8] L'alinéa 11(7)a) de la Loi sur le SV prévoit qu'aucun supplément n'est versé pour tout mois antérieur de plus de 11 mois à celui de la réception de la demande, de l’octroi de la dispense de demande ou de la présentation présumée de la demande.

[9] Le paragraphe 28.1(1) de la Loi sur la SV prévoit que, dans le cas où il est convaincu, sur preuve présentée par une personne ou quiconque de sa part, qu’à la date à laquelle une demande de prestation a été faite, la personne n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation, le ministre peut réputer la demande faite au cours du mois précédant le premier mois au cours duquel le versement de la prestation en question aurait pu commencer ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité de la personne a commencé.

Question en litige

[10] Le Tribunal doit déterminer si l'appelante a doit à une rétroactivité supplémentaire de SRG que celle accordée par l'intimé.

Preuve

[11] L’appelante est née en juin 1927. Elle a présenté une demande de pension de la SV en mars 1992, et sa demande a été approuvée; la date d'entrée en vigueur du versement a été établie en juillet 1992.

[12] Le 16 novembre 2004, l'intimé a écrit au représentant de l'appelante (à savoir le fils de celle-ci) et il a expliqué que l'intimé était incapable de localiser l'appelante. Il a été demandé au représentant de l'appelante de communiquer avec l'intimé pour l'informer de la façon de communiquer avec l'appelante ou, de façon subsidiaire, de faire en sorte que l'appelante communique directement avec l'intimé.

[13] La preuve comprend des notes rédigées par l'intimé qui font état de ce qui suit : (1) le 27 avril 2004, les prestations de la SV de l'appelante ont été suspendues parce que l'intimé était incapable de localiser l'appelante; (2) le 16 novembre 2004, l'intimé a envoyé une lettre au fils de l'appelante pour lui demander son aide pour localiser l'appelante; (3) le 6 décembre 2004, le fils de l'appelante a appelé l'intimé et il l'a informé qu'il a obtenu une procuration et qu'il enverrait le document de procuration à l'intimé; (4) le 7 mars 2005, l'intimé a laissé un message à l'intention du fils de l'appelante pour l'informer qu'il n'avait pas encore reçu le document de procuration; (5) le 3 août 2005, l'intimé a suspendu la pension aux termes du Régime de pensions du Canada (RPC) de l'appelante parce que l'intimé n'avait pas été capable de localiser l'appelante et qu'il avait fait plusieurs vaines tentatives pour joindre le fils de l'appelante; (6) le 29 juillet 2011, le fils de l'appelante a présenté le document de procuration et un changement de nom légal pour lui-même et il a informé l'intimé que sa mère (à savoir l'appelante) vit dans un foyer d'accueil privé en Alberta; (7) le 20 ou 21 octobre 2011, le fils de l'appelante a appelé l'intimé pour se renseigner sur l'état des prestations de sa mère. Au cours de cet appel, il a informé l'intimé de l'adresse de l'appelante; (8) le 26 octobre 2011, le fils de l'appelante a présenté cinq demandes de SRG; (9) le 31 octobre 2011, l'intimé a communiqué avec le foyer d'accueil en Alberta pour confirmer que l'appelante y vivait.

[14] Au moyen d'une lettre datée du 20 août 2011, le représentant de l'appelante a écrit à l'intimé et il l'a informé qu'il avait récemment appris que sa mère n'avait pas reçu de prestations de la SV ou du RPC depuis 2004. Il a expliqué que sa mère avait perdu la capacité de régler des questions administratives et monétaires et qu'elle avait déménagé dans un foyer d'accueil. Il a fourni les nouvelles coordonnées de sa mère et il a demandé que la correspondance écrite lui soit envoyée directement étant donné qu'il était autorisé à agir au nom de sa mère étant donné qu'il avait une procuration.

[15] La preuve comprend une brève note [traduction] « à qui de droit » datée du 24 octobre 2011 produite par E. M., exploitante du foyer. La note n’est pas signée, et il n’y a pas d’en-tête officiel. Elle fait état que l'appelante est prise en charge par le foyer d'accueil depuis le 30 juin 2003. Celui-ci est lié par contrat aux services de santé aux aînés, Services de santé de l'Alberta.

[16] Le 2 novembre 2011, l'intimé a estampillé comme étant reçues cinq demandes de SRG présentées par  D. H. au nom de l'appelante. Les demandes couvraient les périodes de 2007-2008 à 2011-2012.

[17] Le 8 décembre 2011, l'intimé a écrit à l'appelante sous le soin de D. H. et il l'a informée que sa pension de RPC avait été rétablie à partir d'avril 2004 et que, par conséquent, l'intimé lui devait 45 510,37 $ pour la période d'avril 2004 à octobre 2011. En ce qui concerne le SRG, l'intimé a expliqué qu'il avait reçu cinq demandes pour les années de revenu de 2006 à 2010. Les demandes de SRG pour les deux dernières années de revenu (à savoir 2009 et 2010) ont été approuvées avec une date d'entrée en vigueur de versement en octobre 2010, soit 11 mois avant la date de réception des demandes. Les demandes de SRG pour les trois premières années de revenu (à savoir 2006 à 2008) ont été refusées parce que les périodes de versement auxquelles elles s'appliquaient étaient supérieures à la période de 11 mois précédant la réception des demandes.

[18] Au moyen d'une lettre datée du 6 janvier 2012, une demande de révision de la décision de l'intimé datée du 8 décembre 2011 a été présentée. La lettre (à savoir celle du 6 janvier 2012) a été prétendument écrite par D. H.; cependant celle versée dans le dossier d'appel n'est pas signée et ne précise pas l'auteur. La lettre explique que l'appel porte sur la décision de refuser le SRG pour les années de revenu de 2006 à 2008 en raison de ce qui semble être une omission dans la décision de l'intimé, à savoir que celui-ci ne semble pas avoir tenu compte du fait que l'appelante n'était capable de décision depuis 2003. D. H. a expliqué que l'appelante n'était pas capable de savoir que ses versements avaient été suspendus. En ce qui concerne les formulaires de demande de SRG, D. H. a déclaré que les formulaires nécessaires n'ont pas été mis à sa disposition pour les périodes antérieures à la période de paiement de 2007-2008 et que, par conséquent, aucun formulaire pour la période d'avril 2004 à juin 2006 n'a pu être présenté. Il a soutenu qu'on doit du SRG à l'appelante depuis avril 2004.

[19] Le 20 juin 2012, l'intimé a écrit à l'appelante sous le soin de D. H. et il a expliqué que, après avoir réexaminé sa décision de refuser les demandes de SRG de l'appelante pour 2006, 2007 et 2008, il a décidé de maintenir la décision originale parce que les demandes ont été reçues trop tard. Sous forme de contexte, l'intimé a expliqué ce qui suit : (1) il avait suspendu la pension de la SV le 27 mars 2004 parce que l'intimé n'était pas capable de localiser l'appelante; (2) l'intimé avait envoyé une lettre à D. H. le 27 mars 2004 pour l'informer qu'il n'était pas capable de localiser et lui demander son aide pour localiser; (3) au cours d'une conversation téléphonique le 6 décembre 2005 [sic], D. H. a informé l'intimé que l'était le procureur perpétuel de l'appelante et qu'il enverrait les documents à l'intimé afin que celui-ci puisse mettre à jour le dossier de l'appelante. Cependant, l'intimé n'a pas reçu les documents de D. H. et, malgré les efforts déployés par l'intimé, celui-ci n'est pas parvenu à communiquer avec  D. H. après cette conversation; (4)  D. H. a communiqué avec l'intimé et il a fourni les documents relatifs à la procuration perpétuelle le 29 juillet 2011; (5) l'intimé a écrit à  D. H. le 8 décembre 2011 et il l'a informé qu'il avait restauré la pension de la SV de sa mère pour la période d'avril 2004 à octobre 2011, qu'il avait traité les demandes d'octobre 2010 à décembre 2011 et qu'il avait rejeté les demandes de SRG pour 2006, 2007 et 2008 parce qu'elles avaient été reçues trop tard. En ce qui concerne l'argument relatif à l'incapacité, l'intimé a écrit qu'elle a compris que l'appelante était inapte et qu'elle ne pouvait pas s'occuper de ses affaires, mais que l'allégation relative à l'incapacité de D. H. ne s'appliquait pas à cette situation parce que l'incapacité de sa mère n'était plus pertinente étant donné qu'il a été nommé procureur pour s'occuper de ses affaires. L'intimé a déclaré que, en tant que procureur perpétuel de sa mère,  D. H. avait la responsabilité de veiller au bien-être de sa mère.

[20] Le 5 juin 2015, le Dr Eugene J. Cahill, omnipraticien, a rempli le formulaire du certificat d'incapacité dans lequel il a déclaré ce qui suit : (1) il connaît l'appelante depuis le 3 juillet 2003; (2) il ne considère pas l'appelante comme capable de gérer ses affaires et il ne s'attend pas à des améliorations à cet égard; (3) l'appelante a reçu un diagnostic de démence, et cette déficience a commencé au moins le 10 janvier 2002; (4) l'état de santé de l'appelante s'est détérioré depuis au moins janvier 2002; (5) l'état de santé de l'appelante a entraîné une incapacité à demeurer sans supervision depuis janvier 2002. Le formulaire du certificat d'incapacité pose cinq questions à répondre par oui ou non. Les réponses du Dr Cahill à ces questions démontrent ce qui suit : (1) l'appelante n'avait pas une bonne connaissance générale en ce qui concerne son argent ou ses investissements; (2) l'appelante n'avait pas une connaissance suffisante du concept du temps afin de payer les facteurs de façon ponctuelle; (3) l'appelante n'avait pas suffisamment de mémoire pour faire le suivi des transactions et des décisions financières; (4) l'appelante n'avait pas la capacité de balancer les comptes et les factures; (5) l'appelante avait une déficience importante en matière de jugement en raison de fonctions intellectuelles altérées.

[21] Le 20 juin 2015, E. M., exploitante de résidence, a informé que l'appelante avait été sous le soin de la résidence de soins familiaux depuis le 30 juin 2003 sous contrat avec les Services de santé de l'Alberta, Santé des aînés. Mme E. M. a expliqué qu'elle était infirmière autorisée avant de commencer a exploité la résidence de soins familiaux, ce après quoi elle a laissé son autorisation périmer en 2002 et a quitté le collège et l'association du personnel infirmier autorisé de l'Alberta. Elle a expliqué que, au cours de la période où les soins de l'appelante lui ont été confiés, elle avait besoin d'aide afin de gérer ses affaires en raison de l'incapacité de l'appelante a préparer ses repas et à organiser ses affaires administratives et financières. Mme E. M. a expliqué que l'appelante : (1) oubliait de prendre ses médicaments sans une personne pour l'aider et l'inciter; (2) n'était pas capable de payer ses factures de façon autonome et fiable; (3) ne connaissait pas sa situation financière globale; (4) n'avait pas une mémoire fiable et avait besoin de rappels toutes les cinq à 15 minutes pour des choses telles que la raison pour laquelle elle se prépare à quitter la maison, le besoin de porter des vêtements adaptés aux conditions météorologiques ainsi que le moment où elle reviendra à la maison et la façon dont elle s'y prendra. Mme E. M. a déclaré ensuite qu'elle n'était persuadée que l'appelante aurait été apte à gérer sérieusement ses finances, à payer ses factures, à tenir à jour ses livrets de transactions ou à prendre des décisions importantes sans aide. Elle a déclaré qu'elle triait régulièrement le courrier de l'appelante pour la protéger et veiller à ce qu'elle ne prenne pas de décisions financières inappropriées en raison de son jugement déficient.

Observations

[22] Le représentant de l'appelante a soutenu que le SRG devrait être versé de manière rétroactive jusqu'en 2004 pour les raisons suivantes :

  1. Après avoir reçu la lettre du 16 novembre 2004 de l'intimé, il a appelé la personne-ressource désignée dans cette lettre et il lui a fourni les coordonnées mises à jour de l'appelante. Bien qu'il ait mentionné durant cette conversation qu'il avait une procuration et qu'il ait accepté d'envoyer les documents à l'intimé s'il les trouvait, il croyait que, en raison du fait que l'intimé possédait les coordonnées mises à jour de l'appelante, celui-ci avait tout ce dont il avait besoin pour rétablir les versements à l'appelante.
  2. Le représentant de l'appelante n'a pas fourni la procuration avant juillet 2011 pour les raisons suivantes :
    1. Il ne pouvait pas trouver le document, ce qui pourrait être dû au fait qu'il n'avait pas reçu une copie après que la procuration a été donnée ou, s'il avait reçu une copie, qu'elle était rangée dans une boîte parce qu'il avait déménagé plusieurs fois avant novembre 2004. En ce qui concerne la possibilité d’accéder au document à partir d’une autre source, le représentant de l’appelante a déclaré qu'une copie de la procuration n'a pas été présentée auprès de la résidence de soins familiaux à l'admission de l'appelante en 2003 et qu'il ne croyait pas que la banque de l'appelante possédait une copie du document.
    2. Il n'a pas reçu de messages téléphoniques de suivi de la part de l'intimé. Il se peut qu'il ait reçu des messages vocaux discrets pour un « D. » D. H. mais il n'a pas rappelé, car il croyait que ces messages ne s'adressaient pas à lui (le représentant de l’appelante a renvoyé aux pages GT1-55 et GT1-57 pour prouver que l’intimé l’a identifié à tort comme étant « D. » au lieu de « D. H. »).
    3. Il n'a pas reçu de lettres de suivi après la lettre du 16 novembre 2014.
    4. C'est l'appelante qui a éventuellement trouvé le document de procuration. Elle l’a trouvé dans une poche d’un vêtement qu’elle n’avait pas porté depuis assez longtemps. Elle cherchait ce document parce que la résidence de soins familiaux faisait l’objet d’une vérification et qu’il avait été constaté que le document de procuration de l’appelante ne figurait pas dans le dossier.
  3. Entre la conversation téléphonique de novembre 2004 avec l'intimé et juillet 2011, moment où l'intimé a reçu la procuration, le représentant de l'appelante n'était pas au courant du fait que les prestations de celle-ci n'avaient pas été rétablies. Il a parlé avec l'appelante dans la première moitié de 2011 et il a appris qu'elle avait été transportée à la banque et qu'elle avait découvert beaucoup moins de fonds que prévu.
  4. Il a présenté les cinq demandes de SRG à la fin de 2011 pour les périodes de 2007-2008 à 2011-2012.
  5. Les demandes de SRG pour les périodes de versement avant 2007-2008 n'ont pas été présentées parce que les formulaires n'ont pas été mis à sa disposition.
  6. L'appelante est inapte depuis le 30 juin 2003, à savoir la date où elle a déménagé dans la résidence de soins familiaux, comme le prouve la lettre du 24 octobre 2011 d’E. M. Cette résidence de soins particulière est réservée aux personnes qui sont atteintes d'Alzheimer ou qui sont appelées à être atteintes de cette maladie.
  7. Il croyait que l'intimé avait enquêté sur l'incapacité de l'appelante auprès de la résidence de soins familiaux parce qu'il savait que l'intimé avec communique directement avec la résidence.

[23] L'intimé n'a fourni aucune observation à l'appui de sa position en l'espèce. Néanmoins, la correspondance versée au dossier démontre que l'appelante n'est pas admissible à des versements rétroactifs supplémentaires de SRG pour les raisons suivantes :

  1. Parmi les cinq demandes de SRG reçues en 2011, l'intimé a seulement pu en approuver deux parce que les trois autres ont été reçues trop tard (à savoir plus de 11 mois après les périodes de versement respectives).
  2. Aucune demande de SRG n'a été reçue pour les périodes de versement antérieures à 2007-2008.
  3. La disposition en matière d’incapacité n’est pas applicable parce que le fils de l’appelante a obtenu la procuration pour gérer les affaires de celle-ci. Par conséquent, il est chargé de veiller au bien-être de sa mère.

Analyse

Demandes requises

[24] Le représentant de l’appelante a déclaré dans sa lettre du 6 janvier 2012 qu’on devait à l’appelante des versements de SRG rétroactifs depuis avril 2004. Cependant, la période de versement la plus éloignée pour laquelle une demande a été présentée est celle de juillet 2007 à juin 2008. Sans les demandes pour les périodes de versement avant 2007-2008, le Tribunal n’a pas la compétence d’examiner l’admissibilité de l’appelante au SRG pour cette période (à savoir de 2004 à juin 2007). Autrement dit, le Tribunal a seulement la compétence de tirer des conclusions relatives à une demande qui fait l’objet d’un appel devant le Tribunal après que cette demande a été révisée par l’intimé. En l’espèce, les demandes qui ont fait l’objet d’un appel sont les demandes de 2011. Le fait qu’un argument relatif à l’incapacité a été soulevé en l’espèce ne change pas la compétence du Tribunal, car l’article 28.1 de la Loi sur la SV prévoit clairement qu’une demande doit être présentée avant qu’une conclusion relative à l’incapacité puisse être tirée en ce qui concerne cette demande.

[25] Le Tribunal tient compte de l'argument du représentant de l'appelante selon lequel les formulaires nécessaires n'ont pas été mis à sa disposition pour les périodes de versement antérieures à 2007-2008. Néanmoins, le Tribunal n'a pas le pouvoir de déroger à une exigence légale afin qu'une demande puisse être présentée. Le Tribunal tient à ajouter qu'aucune preuve de demande supposément présentée par le représentant de l'appelante ne lui a été présentée dans le but d'obtenir les formulaires nécessaires, ou de toute tentative qu'aurait pu faire le représentant de l'appelante pour présenter à l'intimé les renseignements nécessaires au renouvellement du SRG pour les périodes de versement antérieures à 2007-2008.

[26] Compte tenu ce qui précède, la compétence du Tribunal est limitée à la période commençant en juillet 2007 (à savoir le début de la première période de versement pour laquelle une demande a été présentée).

Versements rétroactifs faits par l'intimé

[27] Même si les cinq demandes de SRG sont estampillées comme ayant été reçues en novembre 2011, les notes de l'intimé précisent que le représentant de l'appelante a présenté les demandes en personne le 26 octobre 2011. Selon la lettre de décision de l'intimé datée du 8 décembre 2011, le SRG de l'appelante a été rétabli en octobre 2010, soit 11 mois avant la date des demandes de SRG. Si les demandes ont été reçues en octobre 2011, les 11 mois précédents nous ramènent en novembre 2010, et non en octobre 2010. Par conséquent, le SRG de l'appelante aurait dû être rétabli en novembre 2010, conformément à l'alinéa 11(7)a) de la Loi sur la SV.

Argument relatif à l'incapacité

[28] La disposition relative à l'incapacité est prévue à l'article 28.1 de la Loi sur la SV et il s'agit d'une exception aux règles relatives à la rétroactivité maximale pour le versement d'une prestation au titre de la Loi sur la SV. Cette disposition permet à une demande d'être réputée avoir été présentée à une date antérieure à celle où il a été déposé s'il est possible de démontrer que la personne visée par la demande était incapable de former ou d'exprimer l'intention de faire une demande de prestations.

[29] L'intimé a soutenu que la disposition relative à l'incapacité n'est pas applicable en l'espèce parce que l'appelante avait nommé un procureur. Le Tribunal n'accepte pas cet argument. L'article 28.1 de la Loi sur la SV ne soustrait pas expressément à son application les personnes qui ont nommé un procureur. De plus, la formulation de l'article 28.1 est telle qu'elle comprend les demandes présentées au nom d'une personne atteinte d'incapacité. Les personnes présentant les demandes au nom d'une personne inapte comprennent assurément les procureurs.

[30] Pour en venir maintenant à l'argument relatif à l'incapacité, le Tribunal estime qu'il n'y a pas suffisamment d'éléments de preuve pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que le critère relatif à l'incapacité n'a pas été respecté. La seule preuve médicale présentée à l'appui de l'argument relatif à l'incapacité est le certificat d'incapacité qui a été rempli par le Dr Cahill. Malheureusement, il semble que le représentant de l'appelante a peut-être demandé au Dr Cahill de remplir le mauvais formulaire. Le formulaire pertinent relativement à un argument d'incapacité au titre de l'article 28.1 de la Loi sur la SV est la déclaration d'incapacité, et non un certificat d'incapacité. Le formulaire de déclaration d'incapacité est utile pour un décideur parce que le document fait état expressément du critère juridique sur lequel un praticien doit formuler des commentaires (c'est-à-dire, si la personne était incapable de former ou d'exprimer l'intention de présenter une demande) et exige que le praticien fournisse une copie des conclusions cliniques pertinentes confirmant l'incapacité. Cela étant dit, l'absence d'un formulaire de déclaration d'incapacité en soi n'empêche pas de conclure qu'une personne souffre d'une incapacité. Cependant, cela pourrait rendre le processus décisionnel plus difficile, particulièrement si la preuve médicale fournie ne mentionne pas précisément la capacité de la personne à former ou à exprimer l'intention de présenter une demande opportune.

[31] Les renseignements fournis par le Dr Cahill sont énoncés dans un formulaire de deux pages et ils ne comprennent aucune conclusion médicale objective, comme des tests ou des résultats découlant d'examens. Les renseignements fournis dans le rapport sont propres à la question de savoir si l'appelante était jugée incapable de gérer ses affaires. la question de savoir si une personne est incapable de gérer ses affaires n'est pas la même que celle de savoir si une personne est incapable de former ou d'exprimer l'intention de présenter une demande. Il ne fait aucun doute que ces deux questions sont liées, mais elles ne sont pas la même. La capacité de gérer ses affaires est plus englobante que la capacité de former ou d'exprimer l'intention de présenter une demande. Il est concevable qu'une personne puisse être jugée incapable de gérer ses affaires, mais qu'elle soit réputée capable de former ou d'exprimer l'intention de présenter une demande. Réduit à sa forme la plus simple, le critère relatif à l'incapacité selon l'article 28.1 concerne la question de savoir si un appelant peut décider par elle-même, que ce soit par sa propre initiative ou en réponse à un choix qui lui est offert, qu'elle souhaite présenter une demande pour une prestation. Le fait qu’un appelant puisse avoir un manque de connaissances relativement à son admissibilité à une prestation (Tatsiopoulos c. MDS (17 décembre 2004), CP 21976 (CAP)), qu’il pourrait être incapable de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande (Canada (Procureur général) c. Danielson, 2008 CAF 78) ou qu’il pourrait être incapable de composer avec les conséquences d’une demande (Canada (Procureur général) c. Poon, 2009 CF 654) est sans importance.

[32] Le Tribunal n'a aucune preuve médicale démontrant que l'appelante respecte le critère relatif à l'incapacité selon la définition fournie au paragraphe 28.1 de la Loi sur la SV. Autrement dit, la preuve médicale qui a été présentée au Tribunal n'aborde pas la question de savoir si l'appelante était incapable de former ou d'exprimer l'intention de présenter une demande. De plus, le Tribunal souligne que la preuve laisse entendre que l'appelante a fait preuve d'un fonctionnement cognitif au cours de la période en litige. Par exemple, le représentant de l'appelante a déclaré que l'appelante a trouvé le document de procuration en raison du fait que la résidence de soins familiaux en aurait besoin pour ses dossiers. Une copie du document a été ensuite envoyée au représentant de l'appelante, ce qui démontre une certaine compréhension de la nature du document et de la nécessité pour le fils de l'appelante d'en avoir une copie. De plus, et probablement plus important encore, le représentant de l'appelante a déclaré que la procuration n'a pas été présentée à la résidence de soins familiaux lorsque l'appelante a été admise en juin 2003, ce qui laisse entendre que la résidence de soins familiaux ne jugeait pas nécessaire que l'appelante ait un procureur pour prendre les décisions à sa place, comme des décisions concernant le consentement à des traitements/examens médicaux ou des décisions de nature financière. Finalement, le fait que le représentant de l'appelante n'était pas au courant jusqu'à un moment donné dans la première moitié de 2011 que les prestations de l'appelante n'avaient pas été rétablies est révélateur du fait que l'appelante ne dépend pas de son procureur pour gérer ses affaires financières.

[33] Le Tribunal a examiné la lettre du 20 juin 2015 rédigée par E. M., mais elle lui a accordé peu de poids. Tout d'abord, bien que Mme E. M. puisse avoir une formation médicale, elle n'est pas la praticienne traitante de l'appelante. Ensuite, la lettre ne porte pas sur la capacité de l'appelante à former ou à exprimer l'intention de présenter une demande. Finalement, selon la lettre, Mme E. M. filtre régulièrement le courrier de l'appelante afin de protéger celle-ci et de veiller à ce qu'elle ne fasse pas de décisions financières inappropriées. Cette déclaration laisse entendre que l'appelante exerce toujours un certain contrôle sur ses finances et qu'elle ne dépend pas de son procureur pour prendre ces décisions en son nom.

[34] Pour les motifs susmentionnés, le Tribunal estime que l'appelante n'a pas droit à un versement rétroactif de SRG supérieur à ce qui a déjà été versé par l'intimé.

Conclusion

[35] L’appel est rejeté.

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