Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] Au nom de la succession de sa mère, l’appelant a présenté une demande de prestation de décès en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC). Sa demande avait été rejetée au stade initial ainsi qu’au stade de révision, et il a interjeté appel devant le Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal). Le 26 mai 2015, un membre de la division générale du Tribunal a rejeté de façon sommaire son appel, retenant que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès puisque la cotisante décédée n’avait pas cumulé suffisamment d’années de cotisation à sa période minimale d’admissibilité (PMA) pour justifier le versement d’une prestation de décès. L’appelant interjette appel de la décision de la division générale.

Motifs de l’appel

[3] L’appelant n’a pas démontré en quoi ses observations souscrivaient à l’un des moyens d’appel prévus par l’article 58 du RPC. Il a plutôt plaidé que ses observations présentées au cours des précédents appels avaient été ignorées et qu’elles l’étaient encore. Il a maintenu son avis qu’il avait présenté à la division générale : les années que sa mère a passées à éduquer ses enfants devaient compter dans le nombre d’années de cotisation au RPC. Il a dénoncé le recours aux dispositions légales et, ce qu’il voyait comme étant l’omission d’appliquer des circonstances d’ordre humanitaire à son cas. Il a aussi questionné qui a droit aux prestations du RPC.

Droit applicable

[4] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit trois moyens d’appel. Ceux-ci sont : une erreur de droit, une erreur de fait ou un manquement à la justice naturelle ou encore un refus de la division générale d’exercer sa compétence.Note de bas de page 1 L’alinéa 44(1)c) et le paragraphe 44(3) du RPC régissent le versement d’une prestation de décès. Ces articles régissent le moment où une prestation de décès sera versée. Le paragraphe 44(3) traite des cotisations qui doivent avoir été versées pour donner droit à la prestation de décès.

[6] L’article 53 de la Loi sur le MEDS prescrit que la division générale rejette un appel de façon sommaire si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

Norme de contrôle

[7] En ce qui concerne la norme de contrôle applicable de la décision de la division générale, l’intimé soutient que la division d’appel devrait revoir la décision de la division générale selon la norme de la décision raisonnable. Le représentant de l’intimé a fait valoir que la norme de la décision raisonnable était la norme de contrôle appropriée à appliquer parce que la question principale de l’appel en est une mixte de fait et de droit. L’appelant n’a présenté aucune observation sur ce point.

[8] La division d’appel souscrit à ce que le représentant de l’intimé soutient jusqu’ici parce que ses observations concernent l’ensemble de la décision. La question dont est saisie la division générale implique une précédente conclusion de fait, à savoir si la mère de l’appelant répondait aux exigences de contributions, suivie par l’application du droit applicable. Alors, la décision devrait être revue selon la norme de la décision raisonnable. Toutefois, en ce qui concerne la pure question de droit soulevée par la décision de la division générale de rejeter sommairement l’appel, la division d’appel est d’avis qu’elle devrait être revue selon la norme de contrôle de la décision correcte. La division d’appel se tourne vers DunsmuirNote de bas de page 2 pour appuyer sa position.

Question en litige

[9] La division d’appel formule les questions en litige de la façon suivante :

  1. La division générale a-t-elle commis une erreur en concluant que la mère de l’appelant n’avait pas versé de cotisations suffisantes pour donner droit au versement d’une prestation de décès du RPC?
  2. La division générale a-t-elle commis une erreur en rejetant l’appel de façon sommaire?

Observations

[10] Lorsqu’il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre d’une décision de rejeter de façon sommaire un appel, l’article 36 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité socialeNote de bas de page 3 autorise les parties, dans les 45 jours suivant le dépôt de l’appel, à présenter des observations ou à aviser le Tribunal qu’elles n’ont aucune observation à présenter. Les deux parties ont présenté des observations. Dans ses observations, l’appelant a réaffirmé son avis : les années que sa mère a passées à éduquer ses enfants devaient compter dans le calcul pour faire en sorte qu’elle réponde au critère sur la période de contribution minimale. Autrement, l’appelant a demandé que le versement de la prestation de décès soit calculé au prorata sur les neuf années de cotisations valides.

[11] Le représentant de l’intimé a fait valoir que le régime législatif ne permet pas d’accorder les demandes de l’appelant. Dans les observations de l’intimé, la division générale a correctement appliqué la loi, et la décision de rejeter l’appel de l’appelant était juste.

Analyse

La division générale a-t-elle commis une erreur en concluant que la mère de l’appelant n’avait pas versé de cotisations suffisantes pour donner droit au versement d’une prestation de décès du RPC?

[12] Pour les raisons qui suivent, la division d’appel conclut que la division générale n’a pas commis d’erreur en concluant que la mère de l’appelant n’avait pas versé de cotisations suffisantes pour donner droit au versement d’une prestation de décès du RPC. Premièrement, l’appelant n’a pas présenté d’observations qui se rapportent à un moyen d’appel. Malgré cette omission de l’appelant, la division d’appel a tout de même évalué si la division générale avait, en effet, commis une erreur permettant à la division d’appel d’intervenir.

[13] La division d’appel conclut que la division générale n’a pas commis d’erreur en ce qui a trait à la première question sur laquelle elle aurait à intervenir. Le membre de la division générale a correctement énoncé le droit applicable régissant le versement d’une prestation de décès du RPC.Note de bas de page 4 De plus, la division d’appel conclut que la division générale était juste dans son interprétation et son application des dispositions législatives pertinentes. Selon la conclusion de la division d’appel, l’alinéa 44(1)c) et le paragraphe 44(3) du RPC ne permettent pas d’inclure les années passées à éduquer ses enfants dans le nombre d’années de cotisation d’un cotisant pour le versement d’une prestation de décès. De même, la division d’appel ne trouve aucune erreur commise par la division générale en ce qui concerne sa conclusion que le RPC ne permet pas le versement d’une prestation de décès selon un calcul au prorata.

[14] Afin que sa succession se qualifie pour le versement d’une prestation de décès du RPC, il n’est pas contesté que la mère de l’appelant devait avoir dix années de cotisations valides. Il n’est pas plus contesté qu’elle a versé des cotisations valides pendant neuf ans seulement. Ses contributions n’étaient pas atteintes à raison d’une année. L’appelant conteste le refus d’intégrer à sa période cotisable les années que sa mère a passées à éduquer ses enfants. Il a dénoncé la manière dont il a perçu que la division générale a appliqué le droit au cas de sa mère.

[15] Malgré son mécontentement, la division générale est assujettie à la compétence qui lui est conférée par la loi. Ni le RPC ni la Loi sur le MEDS ne confère au Tribunal le pouvoir d’ordonner le versement d’une prestation de décès selon un calcul au prorata ou l’inclusion d’années passées à élever ses enfants dans le calcul du RPC d’un cotisant décédé. En ce qui a trait à ce dernier élément, le sous-alinéa 44(2)b)(iv) exclut expressément de la période cotisable d’un cotisant un mois relativement auquel il était bénéficiaire d’une allocation familiale.Note de bas de page 5 Il n’est pas contesté que la mère de l’appelant était sans emploi pendant les années en cause. En fait, il a admis d’emblée ce fait, donc elle était visée par l’application du paragraphe 44(2).

[16] De plus, le Tribunal a été créé en vertu de la législation. Alors, le Tribunal n’a que les pouvoirs que la loi lui confère; une position clairement énoncée par la Cour suprême du Canada dans R. c. Conway, 2010 CSC 22.

[17] Dans l’arrêt ConwayNote de bas de page 6, la CSC a clairement statué qu’un tribunal ne peut accorder que les réparations que sa loi constitutive l’habilite à accorder. La juge Abella, s’exprimant au nom de la CSC, après avoir conclu que la Commission ontarienne d’examen (Commission) était un tribunal compétent pour ce qui est d’accorder des réparations au titre de l’article 24 de la Charte canadienne des droits et libertés, a refusé à M. Conway les réparations qu’il demandait. La juge Abella a fait la conclusion suivante [traduction] :

[101] « Conclure que la Commission peut accorder à M. Conway une libération inconditionnelle même si elle estime qu’il représente un risque important pour la sécurité du public, ou ordonner au CTSM de lui prodiguer un traitement particulier irait manifestement à l’encontre de l’intention du législateur. Compte tenu du régime législatif et des considérations d’ordre constitutionnel, la Commission ne peut accorder pareilles réparations à M. Conway. »

[18] Donc, la division générale était contrainte de conclure, comme elle l’a fait, qu’une prestation de décès, calculée au prorata ou autrement, ne pouvait pas être versée.

Décision de rejeter sommairement l’appel

[19] En répondant à la question à savoir « si la division générale a commis une erreur en rejetant sommairement l’appel de l’appelant », la division d’appel a considéré si la division générale, en rejetant l’appel de façon sommaire, a commis un manquement au principe de justice naturelle ou commis une erreur susceptible de contrôle en vertu de l’article 58 de la Loi sur le MEDS. Pour les raisons qui suivent, le Tribunal répond à cette question par la négative.

[20] L’article 53 de la Loi sur le MEDS prescrit que la division générale rejette un appel de façon sommaire si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès. La question, bien sûr, est donc : comment un décideur détermine-t-il ce qui représente une chance raisonnable de succès? Dans l’affaire Canada (ministre du Développement des Ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, la Cour d’appel fédérale a assimilé une chance raisonnable de succès au fait d’avoir une cause défendable.Note de bas de page 7 Plus récemment, les membres de la division d’appel ont exprimé en ces termes le critère à appliquer aux cas de rejet sommaire : « Est-il évident et manifeste, sur la foi du dossier, que l’appel est voué à l’échec? » M.C. c. Commission de l’emploi du Canada, 2015 TSSDA 237.

[21] Bien qu’il n’ait pas eu de prise de position définitive sur le critère à appliquer pour le rejet sommaire, il est de mon avis que pour les situations où les faits ne sont pas contestés, que le droit applicable est clair, et que, sur ces faits non contestés, la loi établit qu’une décision claire n’est pas en faveur de l’appelant; alors c’est une situation où l’appel n’aurait aucune chance raisonnable de succès. Dans un tel cas, il serait approprié que la division générale rejette de façon sommaire l’appel comme prescrit par l’art. 53 de la Loi sur le MEDS. La division d’appel mentionne qu’il s’agit aussi de l’avis du représentant de l’intimé selon lequel c’est le cas pour cet appel.

[22] En application de la norme de la décision correcte à la décision de la division générale de rejeter sommairement l’appel, la division d’appel conclut que la division générale a dûment énoncé et appliqué les dispositions législatives applicables aux faits de cette affaire. Donc, sa décision de rejeter l’appel de façon sommaire était fondée.

Conclusion

[23] L’appelant a interjeté appel à l’encontre de la décision de la division générale de rejeter de façon sommaire son appel. À la lumière des faits, de la preuve et du droit présentés à la division générale, la division d’appel estime que la division générale a correctement déterminé que l’appelant ne pourrait pas recevoir une prestation de décès du RPC. La division d’appel conclut aussi que la division générale a correctement déterminé que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès. Donc, la décision de rejeter l’appel de façon sommaire était fondée. Par ailleurs, la division d’appel conclut que la division générale a présenté un fondement clair et rationnel pour sa décision, et que sa décision répondait aux critères de justification, de transparence et d’intelligibilité établis dans Dunsmuir.

[24] L’appel est rejeté.

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