Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Motifs et décision

Comparutions (par vidéoconférence)

Appelante : M. M., accompagnée par J. M.

Intimé : Christine Singh (représentante)

Personne mise en cause : J. E. et Todd Brayer (représentant)

Aperçu

[1] Cet appel porte sur la décision d’un tribunal de révision du Régime de pensions du Canada datée du 23 mai 2012. Le tribunal de révision a conclu qu’une pension de survivant du Régime de pensions du Canada n’était pas payable à l’appelante, comme il n’était pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le cotisant décédé et l’appelante « ont, par leurs actions et leur conduite, démontré une intention mutuelle de vivre ensemble dans une relation semblable au mariage d’une certaine permanence ».

[2] L’une des questions dont j’étais saisie avait pour but de déterminer quel mode d’audience l’on devrait privilégier pour cet appel, c.-à-d. une audience de novo ou non, puisque le mode pourrait influencer sur le résultat. Une audience de novo est tenue comme si aucune audience n’avait eu lieu devant le tribunal de révision et est réputée être une nouvelle audience. Si je conclus que l’appel n’est pas instruit de novo et qu’il est limité par les moyens établis au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), l’appelante doit démontrer que le tribunal de révision a commis une erreur en vertu du paragraphe 58(1) de la LMEDS, plutôt que de démontrer son admissibilité à une pension de survivant.Si tel est le cas, alors l’appelante devrait démontrer que le tribunal de révision a enfreint un principe de justice naturelle, a rendu une décision entachée d’une erreur de droit ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Contexte

[3] Le cotisant est décédé le 3 février 2007. Le 27 mars 2007, l’appelante a présenté une demande pour une pension de survivant au titre du Régime de pensions du Canada. Elle affirme avoir été la conjointe du cotisant. Le 18 avril 2007, la personne mise en cause a aussi présenté une demande de pension de survivant. Elle était séparée du cotisant à la date de son décès.

[4] L’intimé a d’abord rejeté la demande de l’appelante et a approuvé celle de la personne mise en cause pour une pension de survivant. Toutefois, l’intimé est ensuite revenu sur sa décision, a incité la personne mise en cause à interjeter appel devant un tribunal de révision du Régime de pensions du Canada, lequel a finalement conclu qu’une pension de survivant était payable à la personne mise en cause.

[5] L’appelante a sollicité une permission d’en appeler à la Commission d’appel des pensions. La permission d’en appeler a été accordée le 14 janvier 2013. Conformément à la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, cet appel a été transféré au Tribunal de la sécurité sociale. La division d’appel a instruit l’appel le 6 mai 2014, en l’absence de la personne mise en cause, parce que cette dernière a été mal informée à propos de son admissibilité à participer à l’audience. De façon significative, ma collègue a instruit une audience de novo puisqu’elle a déterminé que l’appelante avait une « attente légitime » que l’appel soit instruit sur ce fondement au moment où elle a présenté sa demande de permission d’en appeler auprès de la Commission d’appel des pensions.

[6] La personne mise en cause a présenté une demande de contrôle judiciaire devant la Cour d’appel fédérale. Le 29 mai 2015, la Cour d’appel fédérale a accueilli la demande de contrôle judiciaire et, par consentement des parties, a ordonné que l’affaire soit renvoyée devant le Tribunal de la sécurité sociale, la division d’appel, pour un nouvel examen.

[7] Le 18 janvier 2016, le Tribunal de la sécurité sociale a rédigé à l’appelante pour l’informer que le Tribunal de la sécurité sociale était gouverné par la LMEDS et que la législation ne permettait pas de tenir des audiences de novo devant la division d’appel. Le Tribunal de la sécurité sociale a soulevé que les seuls moyens d’appel étaient ceux mentionnés sous le paragraphe 58(1) de la LMEDS. Le Tribunal de la sécurité sociale s’est référé à l’affaire Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100, et a soulevé que les questions dont le Tribunal de la sécurité sociale était saisi sont assujetties à la nouvelle loi, même si l’appel concernait une décision d’un tribunal administratif (comme le tribunal de révision) qui n’existe plus.

[8] Le représentant de la personne mise en cause a transmis des observations supplémentaires le 1er mars 2016, où l’on traitait des moyens d’appel en vertu du paragraphe 58(1) de la LMEDS (AD7). Ni l’appelante ni l’intimé n’ont présenté des observations écrites sur les moyens d’appel au titre du paragraphe 58(1) de la LMEDS. L’appel a été instruit le 30 mars 2016.

[9] Suite à l’audience de l’appel, j’ai accordé la permission à l’appelante de transmettre des observations écrites en ce qui concerne les moyens d’appel, et d’identifier les documents qui ont été ignorés par le tribunal de révision, selon elle. Dans l’ensemble, l’appelante n’a pas traité directement des questions soulevées dans l’appel. Elle a remis des copies de documents, dont certains n’avaient pas été présentés au tribunal de révision.

Questions en litige

[10] Les questions dont je suis saisie sont les suivantes :

  1. En tant que question préliminaire, comment cet appel devrait-il être instruit, quel mode d’audience devrait-on privilégier pour cet appel?
  2. Puis-je tenir compte des nouveaux éléments de preuve présentés par l’appelante à la suite de l’audience de l’appel?
  3. Si l’appel n’est pas admissible à une nouvelle audience, et que l’appel est limité par les moyens énoncés sous le paragraphe 58(1) de la LMEDS, le tribunal de révision a-t-il omis d’observer un principe de justice naturelle, commis une erreur de droit ou fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?
  4. Quelle est la décision appropriée pour cet appel?

Première question en litige : Type d’appel

[11] Dans Alves, la cour fédérale a établi qu’il serait une erreur d’instruire un appel en se fondant sur les attentes d’un appelant au moment de la présentation de la demande de permission d’en appeler. La cour fédérale a donc suggéré qu’il serait inapproprié de tenir un appel de novo, parce que les parties n’auraient pas l’occasion d’appeler des témoins et de présenter de nouveaux éléments de preuve.Alors, l’appel est limité aux moyens d’appel du paragraphe 58(1) de la LMEDS.

[12] Comme elle a renvoyé l’affaire à la division d’appel, la Cour d’appel fédérale n’a pas traité de la question du caractère approprié du type d’appel choisi par ma collègue. Toutefois, il est clair que l’appelante continuait espérer une audience de novo par rapport à l’instance dont je suis saisie. Après tout, son appel était issu de la Commission d’appel des pensions, et l’affaire avait été instruite en tant qu’audience de novo devant la division d’appel en mai 2014. Elle a emmené un témoin et s’appuie sur les affirmations du témoin et continue d’affirmer que la division d’appel devrait déterminer si elle est admissible à une pension de survivant.

[13] La représentante de l’intimé est du même avis, dans la mesure où, compte tenu de l’historique et des circonstances exceptionnelles de cet appel et de son renvoi à la division d’appel, une audience de novo est justifiée, autrement un manquement au principe de justice naturelle pourrait être soulevé. Elle soutient qu’une audience de novo devrait convenablement être tenue devant la division générale, puisque le champ d’application de la compétence de la division d’appel est limité par la LMEDS. Elle affirme que la LMEDS n’accorde pas à la division d’appel le pouvoir de tenir des audiences de novo.

[14] Sans surprise, la personne mise en cause s’oppose à ce que l’instruction de l’affaire soit entendue lors d’une audience de novo, devant la division d’appel ou devant la division générale. Le représentant de la personne mise en cause m’invite à rejeter la doctrine des attentes légitimes, particulièrement en raison du fait que les parties ont reçu des avis de la part du Tribunal de la sécurité sociale au début de 2016 pour les informer que l’appel ne serait pas instruit de novo.

[15] Dans Alves, la cour fédérale a clairement énoncé qu’il n’y a aucune place pour la doctrine des attentes légitimes et, en vertu du paragraphe 58(1) de la LMEDS, il y a maintenant seulement trois moyens d’appel : un, ne pas observer un principe de justice naturelle; deux, une erreur de droit; trois, une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire. Par conséquent, l’audience de cet appel dont je suis saisie a été tenue sur le fondement que l’appelante devait prouver l’un de ces trois moyens.

Deuxième question en litige : Nouveaux éléments de preuve

[16] L’appelante a présenté des éléments de preuve supplémentaires à la suite de l’audience de l’appel.

[17] Comme la Cour fédérale l’a statué dans la décision Canada (Procureur général) c. O’Keefe, 2016 CF 503, au paragr. 28, un appel devant la division d’appel ne permet pas la présentation de nouveaux éléments de preuve et l’appel est limité aux trois moyens énoncés au paragraphe 58(1). Il n’y a pas de fondement selon lequel je peux évaluer de nouveaux éléments de preuve, sauf s’ils concernent spécifiquement les moyens d’appel. Je ne considère pas que ce soit le cas d’après les affirmations de l’appelante.

Troisième question en litige : Moyens d’appel

[18] L’appelante soutient que le tribunal de révision a commis plusieurs erreurs : un, il a omis de tenir compte de certains éléments de preuve; deux, il a omis de tenir compte du droit en évaluant si elle était dans une union de fait avec le cotisant; trois, il a tiré des conclusions défavorables à son égard en concluant qu’elle ne pouvait pas être crédible parce qu’elle n’était pas prête à expliquer pourquoi elle et le cotisant possédaient plusieurs adresses. (Elle explique maintenant que le cotisant était impliqué dans des activités qui nécessitaient différentes adresses.) Sinon, elle soutient que la preuve appuyait de manière évidente le fait qu’elle était dans une union de fait avec le cotisant.

i. Examen de la preuve

[19] L’appelante soutient que le tribunal de révision a omis de tenir compte des éléments suivants :

  1. relevé de prestations de membre du Boilermakers’ National Benefit Funds (Canada);
  2. déclaration de conjoint transmise au Boilermakers’ National Benefit Funds, où il était indiqué qu’elle et le cotisant étaient en union de fait depuis le 4 janvier 2005;
  3. documents du Boilermakers’ National Benefit Funds (Canada), où il était indiqué qu’ils étaient en union de fait.

[20] Ces éléments de preuve ont été présentés au tribunal de révision et l’on s’y réfère au paragraphe 16 de la décision.

[21] L’appelante s’est aussi appuyée sur d’autres documents pour démontrer son affirmation d’avoir été en union de fait avec le cotisant. L’appelante semblait s’être largement appuyée sur ces documents principaux, mais le tribunal de révision ne s’est pas référé à ces documents dans son analyse, à l’exception d’une mention générale que [traduction] « le cotisant décédé a dit de l’appelante qu’elle était sa conjointe de fait ou sa femme dans certains documents ».

[22] En droit, il existe une présomption générale qu’un décideur est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve dont il dispose. Comme la cour fédérale l’a indiqué dans Singer c. Canada (Procureur général), 2010 FC 607 au paragr. 20, les tribunaux n’envisageront la possibilité d’écarter cette présomption « que lorsque la valeur probante des éléments de preuve qui n’ont pas été expressément discutés est telle que ces éléments de preuve auraient dû être discutés ». Pour déterminer la valeur probante des éléments de preuve, il faut évaluer la force de la preuve, à quel point la preuve présentée soutient les conclusions qui en sont tirées et à quel point les questions que la preuve sert à prouver sont en litige dans l’instance : Cammack c. Martins Estate, 2002 CanLII 11072 (ON SC).

[23] Un relevé de prestations de membre pour la période (pour laquelle les dépôts ont été reçus) du 1er février 2005 au 31 juillet 2005 nomme l’appelante comme étant la conjointe du cotisant (page 6-19 du dossier d’audience). Une des lettres du Boilermakers’ National Benefit Funds indique que l’appelante n’était pas désignée comme bénéficiaire, mais qu’elle était tout de même nommée comme conjointe de fait à la date du décès du cotisant (page 6-32). Les documents générés par le Boilermakers’ National Benefit Funds auraient été préparés et fondés selon la déclaration du cotisant. Le 9 juin 2005, le cotisant avait déclaré que l’appelante était sa conjointe de fait, et qu’ils vivaient ensemble depuis le 4 janvier 2005. Ces documents – en particulier la déclaration signée et datée du cotisant - possédaient certainement une valeur probante qui méritait plus qu’une simple allusion. Ces documents nécessitaient une certaine discussion et une analyse par le tribunal de révision.

[24] En dépit de la valeur probante évidente de ces documents, le tribunal de révision n’a pas évalué ou expliqué l’un de ces documents où l’appelante était désignée comme conjointe de fait du cotisant. À cet égard, le tribunal de révision a commis une erreur.

ii. Cohabitation en vertu du paragraphe 2(1) du Régime de pensions du Canada

[25] L’appelante soutient que le tribunal de révision a commis une erreur de droit parce qu’il n’a pas déterminé si elle et le cotisant étaient en union de fait, et a plutôt conclu qu’ils ne pouvaient pas avoir cohabité, compte tenu de leur [traduction] « relation tumultueuse » et des « problèmes psychiatriques » du cotisant. Le tribunal de révision avait aussi certaines « réserves » à propos de la crédibilité de l’appelante. En tenant compte de ces considérations, le tribunal de révision a conclu que l’appelante et le cotisant n’avaient pas, « par leurs actions et leur conduite, démontré une intention mutuelle de vivre ensemble dans une relation semblable au mariage d’une certaine permanence ».

[26] Dans l’affaire Hodge c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [2004] 3 CSC 357, la Cour suprême du Canada a révisé la définition de conjoint de fait prévue par le paragraphe 2(1) du Régime de pensions du Canada.Elle a établi que la cohabitation dans le contexte d’une union de fait n’est pas synonyme de corésidence, et que deux personnes peuvent cohabiter même si elles ne vivent pas sous le même toit. Il pourrait y avoir des périodes de séparation physique s’il existe une intention commune de continuer.

[27] Le tribunal de révision a reconnu qu’il n’est pas essentiel pour les parties de partager une résidence commune pour une période d’une année. De toute façon, le tribunal a conclu que leur relation était chaotique et qu’ils ne pouvaient pas avoir été en union de fait. Le tribunal de révision a décrit certains de ces exemples de chaos au paragraphe 38. Alors, il me semble clair que le tribunal de révision a négligé le fait que l’appelante doit avoir cohabité ou résidé avec le cotisant sur sa ferme pendant cette période. Autrement, il n’aurait aucune raison ou logique pour le cotisant d’être ordonné de ne pas se rendre à sa propre ferme dans un rayon d’un kilomètre si l’appelante ne résidait pas là aussi.

[28] L’autre lacune dans le raisonnement du tribunal de révision concerne la conclusion que l’appelante et le cotisant ne pouvaient pas avoir cohabité dans une union de fait, en grande partie parce que leur relation était tumultueuse. Toutefois, le tribunal de révision a accepté qu’ils avaient cohabité à la ferme depuis au moins août 2006 jusqu’au décès du cotisant, le 3 février 2007, au moment où leur relation était « chaotique ».

[29] Le tribunal de révision n’a pas appliqué les bonnes considérations pour déterminer si l’appelante et le cotisant cohabitaient dans une union de fait, puisqu’il a largement déterminé l’état de leur relation sur le fondement de la présence ou de l’absence de tumulte. Dans l’affaire McLaughlin c. Canada (Procureur générale), 2012 CF 556, la Cour fédérale a reconnu qu’un décideur ne devrait pas évaluer la qualité d’une relation entre deux individus pour déterminer si leur relation correspond à la définition d’une « union de fait ».

[30] Le tribunal de révision a identifié l’affaire Canada (ministre du Développement social) c. Pratt, 2006 CP 22323 (CAP), où les critères d’une relation conjugale sont établis. Au paragraphe 42, la Commission d’appel des pensions a mentionné plusieurs facteurs comme indicateurs d’une relation conjugale. McLaughlin soulève que la Cour suprême du Canada a confirmé ces facteurs dans M. c. H., 1999 CanLII 686 au paragr. 59, quoique dans le contexte du droit de la famille, que « les caractéristiques généralement acceptées de l’union conjugale ... incluent le partage d’un toit, les rapports personnels et sexuels, les services, les activités sociales, le soutien financier, les enfants et aussi l’image sociétale du couple ». Le tribunal de révision ne connaissait pas certaines de ces informations parce que l’appelante avait négligé de répondre aux demandes écrites, et parce que le tribunal n’a pas entrepris d’explorer ces facteurs lors de l’audience. Néanmoins, il semble, d’après sa conclusion finale au paragraphe 44, que le tribunal de révision s’en est tenu à la « relation tumultueuse » (et aux problèmes psychiatriques du cotisant) plutôt que de déterminer si l’appelante et le cotisant répondaient aux critères pour établir une relation conjugale comme dans Pratt et dans M. c. H. Il s’agit d’une erreur de droit.

iii. Crédibilité et conclusions défavorables

[31] L’appelante soutient que le tribunal de révision a tiré des conclusions défavorables à son égard en concluant qu’elle n’était pas crédible, alors qu’elle n’était pas prête à expliquer pourquoi elle et le cotisant possédaient plusieurs adresses.

[32] Toutefois, le tribunal de révision a conclu que l’appelante manquait de crédibilité principalement parce que sa preuve ne concordait pas avec celle de la fille de la personne mise en cause. Le tribunal de révision a écrit ce qui suit :

Les éléments de preuve [de l’appelante] sur le fait qu’elle aurait vécu avec le défunt depuis la fin de 2004, ou au début de 2006, et son déni de résidence dans une habitation ne concordaient pas avec la preuve (plus spécifiquement la preuve de [la fille de la personne mise en cause] et n’est simplement pas crédible.

[33] Je suis normalement réticente à interférer avec les conclusions de crédibilité d’un décideur, mais en l’espèce, je trouve déconcertant que le tribunal de révision aurait préféré la preuve de la fille de la personne mise en cause plutôt que celle de l’appelante, et s’est en partie fondé sur cette preuve pour conclure que l’appelante n’était pas crédible. D’abord, il existait une preuve de la part du propriétaire du cotisant – une partie désintéressée à l’instance – qui corroborait la position de l’appelante d’avoir vécu avec le cotisant environ une année avant son décès. Les éléments de preuve avaient été obtenus de façon indépendante par la personne mise en cause. Toutefois, cette affirmation n’a pas été considérée. Puis, la fille de la personne mise en cause n’a pas témoigné, et son témoignage écrit n’était donc pas sujet à un contre-interrogatoire. Finalement, de manière plus inquiétante, la fille de la personne mise en cause n’a de fait pas vécu avec le cotisant ou l’appelante pour la presque totalité de l’année 2006. En effet, elle vivait dans une autre province complètement, et n’aurait donc pas pu observer ou indiquer personnellement si l’appelante et le cotisant cohabitaient possiblement dans le cadre d’une union de fait. Tout élément de preuve qu’elle aurait transmis en ce qui concerne l’habitation de l’appelante avant juillet ou août 2006 était purement fondé sur des ouï-dire ou constituait des spéculations.

[34] La fille de la personne mise en cause a vu l’appelante déménager certains de ses biens de l’habitation à la ferme et a spéculé que l’appelante et le cotisant ne pouvaient donc pas avoir cohabité avant août 2006. Aucune preuve, s’il y en a, n’indique quels biens de l’appelante auraient déjà été déménagés à la ferme ni ce qui était déménagé sur une base hebdomadaire vers la ferme. Si le tribunal de révision était pour fonder la crédibilité de l’appelante selon le témoignage écrit de la fille de la personne mise en cause, il aurait dû au moins permettre à l’appelante de répondre aux préoccupations précises qui ressortaient des observations personnelles de la fille de la personne mise en cause. Il ne semble pas l’avoir fait.

[35] Finalement, il se peut que l’appelante n’ait pas été très ouverte avec sa preuve, comme l’aurait voulu le tribunal de révision, mais d’après la preuve présentée, le tribunal de révision aurait au moins pu être sensible aux inquiétudes légitimes de l’appelante concernant le risque de divulgation qui pourrait mettre en péril sa sécurité personnelle et celle de sa famille.

Quatrième question en litige : Décision

[36] Le paragraphe 59(1) de la LMEDS précise les pouvoirs de la division d’appel. La division générale, comme principal juge des faits, est dans la meilleure position pour apprécier la preuve qui lui est présentée et pour déterminer si l’appelante cohabitait avec le cotisant dans une relation conjugale pendant une période continue d’au moins un an, jusqu’au décès du cotisant.

Conclusion

[37] Suite aux erreurs commises par le tribunal de révision, l’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée à la division générale pour une nouvelle audience.

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