Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demande présentée par l’appelant pour une prestation d’enfant de cotisant invalide (PECI) relativement à S. J. et R. J. a été estampillée par l’intimé le 22 février 2016. La demande a été approuvée et devait prendre effet en mars 2015, date correspondant à la rétroactivité maximale pouvant être accordée par application de l’alinéa 74)(2)b) du Régime de pensions du Canada (RPC).

[2] L’appelant a demandé une révision de la date de prise d’effet, prétendant que le versement de la prestation devait prendre effet en janvier 2011, date où les enfants ont commencé à être sous sa garde et sa surveillance. L’intimé a rejeté la demande de révision de l’appelant, et l’appelant a interjeté appel devant le Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) le 15 juillet 2016.

Question en litige

[3] Le Tribunal doit déterminer si l’appel doit être rejeté de façon sommaire.

Droit applicable

[4] Conformément au paragraphe 53(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), la division générale rejette de façon sommaire l’appel si elle est convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succès.

[5] L’article 22 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement) prévoit que la division générale avise l’appelant par écrit et lui donne un délai raisonnable pour présenter des observations avant de rejeter de façon sommaire l’appel.

[6] Conformément à l’alinéa 74(2)b) du RPC, une prestation d’enfant de cotisant invalide est payable pour à compter du dernier en date des mois suivants : le mois à compter duquel une pension d’invalidité est payable au cotisant, ou le mois qui suit celui où l’enfant est né ou est devenu de quelque autre manière l’enfant du cotisant. Toutefois, ce mois ne peut en aucun cas être antérieur au douzième précédant le mois suivant celui où la demande a été reçue.(mis en évidence par le soussigné)

[7] La seule exception à la règle de la rétroactivité maximale se trouve aux paragraphes 60(8) à 60(11) du RPC : il faut ne pas avoir eu la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande en son nom avant la date à laquelle la demande a réellement été faite.

[8] Aux termes de l’alinéa 20(1)a) duRèglement, lorsque la validité, l’applicabilité ou l’effet, sur le plan constitutionnel, d’une disposition du RPC est mis en cause devant le Tribunal, la partie qui soulève la question dépose auprès du Tribunal un avis qui contient la disposition visée et toutes observations à l’appui de la question soulevée.

Possible contestation fondée sur la charte

[9] Dans la déclaration solennelle appuyant ses observations, qu’il a soumise le 11 janvier 2017 (GD9- 2, paragraphe 9), l’appelant a présenté les observations suivantes, lesquelles soulevaient une possible contestation fondée sur la Charte :

[traduction]

Ainsi, la décision du ministre de refuser toute prestation rétroactive aux enfants de l’appelant constitue une violation au Régime de pensions du Canada, à la Charte canadienne des droits et libertés et à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[10] Le 1er mars 2017, le Tribunal a informé l’appelant qu’il devait, s’il souhait invoquer une contestation fondée sur la Charte devant le Tribunal, déposer un avis conformément à l’alinéa 20(1)a) du Règlement, au plus tard le 5 avril 2017. Une de cette disposition (voir le paragraphe 8, supra) figurait dans l’avis.

[11] L’avis informait également l’appelant que, s’il ne déposait pas l’avis requis au plus tard à cette date, son appel serait instruit comme un appel ordinaire et aucune question constitutionnelle ne pourrait être soulevée dans le cadre du processus d’appel.

[12] Cet avis se trouvait dans la même lettre qui signalait à l’appelant que le membre du Tribunal envisageait de rejeter son appel de façon sommaire.

[13] Même si l’appelant a soumis, le 31 mars 2017, une réponse à l’avis d’intention de rejet sommaire, il n’a pas déposé l’avis requis conformément à l’alinéa 20(1)a) du Règlement.

[14] Le 10 avril 2017, l’intimé a soumis des observations au Tribunal, réclamant que cet appel soit instruit comme un appel ordinaire et que l’appelant ne soit pas autorisé à invoquer une contestation fondée sur la Charte. L’intimé a soutenu que la réponse fournie par l’appelant ne soulève aucune question constitutionnelle et ne précise pas la disposition du RPC qu’il conteste.

[15] Après avoir examiné attentivement la réponse de l’appelant (GD-13) à l’avis d’intention de rejet sommaire, le Tribunal partage l’opinion qu’a exprimée l’intimé dans ses observations, voulant que l’appelant ne s’était pas conformé aux exigences prévues à l’alinéa 20(1)a) du Règlement.

[16] Le Tribunal a déterminé qu’il n’a été saisi d’aucune question constitutionnelle en bonne et due forme et que l’appelant ne peut donc invoquer aucune question fondée sur la Charte dans le cadre de cet appel.

[17] L’appel sera donc instruit comme un appel ordinaire.

Contexte

[18] L’appelant prétend que la date de prise d’effet du versement devrait être janvier 2011 comme il avait la garde et la surveillance des enfants à partir de cette date. Il se fonde sur les dispositions relatives à l’incapacité prévues aux paragraphes 60(8) et 60(9) du RPC et affirme qu’il n’avait pas eu la capacité de faire une demande au nom des enfants avant février 2012 en raison de ses problèmes médicaux. Il a déposé une déclaration d’incapacité (GD4-2) signée par le docteur Hamlet en date du 14 octobre 2016, précisant qu’il était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande depuis janvier 2014. La déclaration expliquait qu’une dépression majeure était la source de l’incapacité de l’appelant. L’appelant a également soumis des rapports médicaux qui, selon lui, prouvent son incapacité.

Observations

[19] Voici les observations de l’appelant :

  1. Dans son avis d’appel (GD1-4), l’appelant a soutenu que son état de santé était la principale raison qui l’avait empêché de présenter une demande de prestations pour les enfants en temps voulu;
  2. Dans sa réponse à l’avis d’intention de rejet sommaire, l’appelant a énuméré 64 sujets. Plusieurs des sujets qu’il a soulevés sont répétitifs; cependant, ses observations portent principalement sur sa propre incapacité à présenter une demande plus tôt en raison de son état de santé et sur l’incapacité des enfants à faire cette demande comme ils avaient seulement quatre et trois ans en date du 31 janvier 2011;
  3. Il a soutenu que s’il existe une lacune dans la loi qui permet à son incapacité de porter préjudice au droit de ses enfants à une prestation, le Tribunal devrait combler cette lacune et autoriser une rétroactivité à janvier 2011, date à laquelle les enfants ont commencé à habiter avec lui;
  4. Il a également soutenu que cette affaire est unique et particulière et que le Tribunal ne devrait pas rejeter l’appel de façon sommaire.

[20] Voici les observations de l’intimé :

  1. Le RPC autorise une rétroactivité maximale de 11 mois dans le cas d’une PECI à partir de la date à laquelle la demande de prestation est reçue;
  2. Aucune disposition du RPC ne permet au ministre d’accorder une plus longue rétroactivité que ce qui est prévu par la loi;
  3. Conformément à la disposition du RPC relative à l’incapacité, le requérant doit être incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande en son propre nom à une date antérieure à celle où la demande a réellement été faite. Cette disposition n’englobe pas les demandes pour les enfants de la personne. Ainsi, déterminer si l’appelant avait l’incapacité de faire une demande n’a aucune pertinence comme la loi ne permet pas de réputer une demande de PECI comme ayant été reçue à une date antérieure à celle où elle l’a été.

Analyse

[21] Comme l’exige l’article 22 du Règlement, le Tribunal a avisé l’appelant par écrit de son intention de rejeter son appel de façon sommaire et lui a accordé un délai raisonnable pour présenter des observations. L’appelant a répondu à cet avis le 31 mars 2107 [sic]. (GD-13)

[22] La demande a été reçue en février 2016. L’alinéa 74(2)b) prévoit explicitement que le mois à compter duquel la PECI est payable ne peut en aucun cas être antérieur au douzième précédant le mois suivant celui où la demande a été reçue. L’intimé a conclu à juste titre que mars 2015 était le mois le plus antérieur à compter duquel le versement de la prestation pouvait prendre effet.

[23] L’intimé a soulevé la question d’incapacité et soutenu qu’il n’avait pas eu la capacité de faire une demande au nom de ses enfants avant février 2016.

[24] Cependant, l’incapacité dont il est question aux paragraphes 60(8) et 60(9) du RPC est seulement applicable à la personne au nom de laquelle la demande est faite et non à la personne qui fait la demande. La demande en l’espèce est présentée au nom des enfants et l’incapacité en jeu est une incapacité médicale et non une incapacité juridique : (Statton 2006 CAF 370); MDS c. Statton (21 avril 2005) CP22564 (CAP); DesRosiers c. MDS (4 janvier 2006) CP22965 (CAP); et MDRH c. H.H. (21 mai 2010) CP25537 (CAP).

[25] Le Tribunal est d’accord avec l’intimé que la question de savoir si l’appelant avait une incapacité n’a aucune pertinence comme la loi ne permet pas qu’une demande de PECI soit réputée comme ayant été reçue à une date antérieure à celle où elle l’a été. Même si l’appelant parvenait à prouver son incapacité, ceci ne permettrait pas de prolonger la période de rétroactivité de la PECI.

[26] Même s’il peut sembler sévère et déraisonnable que des enfants se trouvent pénalisés parce qu’un parent n’a pas présenté une demande plus tôt qu’il ne l’a fait, le Tribunal (sujet à la réussite d’une contestation fondée sur Charte relative aux dispositions applicables) est lié par les dispositions du RPC. Il n’est pas habilité à exercer un pouvoir équitable dans le cadre des appels dont il est saisi. À titre de décideur, le Tribunal est tenu d’interpréter et d’appliquer les dispositions telles qu’elles sont énoncées dans le RPC : MDS c. Kendall (7 juin 2004), CP 21690 (CAP). Le Tribunal n’a pas le pouvoir de déroger aux dispositions du RPC ni de rendre des décisions en se fondant sur l’équité, la compassion ou des circonstances atténuantes.

[27] Par conséquent, le Tribunal conclut que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] L’appel est rejeté de façon sommaire.

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