Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demande de pension de survivant du Régime de pensions du Canada (RPC) présentée par l’appelante a été estampillée par l’intimé le 7 février 2013. La demande de pension de survivant de la mise en cause a été estampillée le 22 janvier 2013. La demande de l’appelante a été rejetée étant donné que l’intimé avait également reçu une demande de la mise en cause, qui prétendait être la conjointe de fait du cotisant. L’appelante a demandé la révision de la décision de l’intimé. L’intimé a maintenu sa position originale, et l’appelante a interjeté appel de la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[2] Cet appel a été tranché sur la foi des documents et des observations présentés pour les raisons suivantes :

  1. l’information au dossier est complète et ne nécessite aucune clarification;
  2. ce mode d’instruction est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Droit applicable

[3] L’article 44(1)(d) du RPC prévoit ce qui suit :

une pension de survivant doit être payée à la personne qui a la qualité de survivant d’un cotisant qui a versé des cotisations de base pendant au moins la période minimale d’admissibilité, si le survivant :

  1. (i) soit a atteint l’âge de soixante-cinq ans,
  2. (ii) soit, dans le cas d’un survivant qui n’a pas atteint l’âge de soixante-cinq ans :
    1. a) ou bien avait au moment du décès du cotisant atteint l’âge de trente-cinq ans,
    2. b) ou bien était au moment du décès du cotisant un survivant avec enfant à charge,
    3. c) ou bien est invalide;

[4] Le terme « survivant » est défini de la façon suivante à l’article 42(1) du RPC :

« survivant » s’entend :

  1. a) à défaut de la personne visée à l’alinéa b), de l’époux du cotisant au décès de celui-ci;
  2. b) du conjoint de fait du cotisant au décès de celui-ci.

[5] Le RPC définit un conjoint de fait à l’article 2 :

« conjoint de fait » La personne qui, au moment considéré, vit avec un cotisant dans une relation conjugale depuis au moins un an.Il est entendu que, dans le cas du décès du cotisant, « moment considéré » s’entend du moment du décès.

Question en litige

[6] La question que doit trancher le Tribunal en l’espèce est celle de savoir si l’appelante est admissible à une pension de survivant.

[7] En l’espèce, le fardeau de la preuve incombe à la conjointe de fait, à savoir la mise en cause. Comme il est prévu dans Betts c Shannon (22 octobre 2001), CP 11654 (CAP), lorsqu’il existe des intérêts opposés entre la veuve légalement mariée d’un cotisant décédé et une conjointe de fait présumée, il existe une présomption prima facie selon laquelle la prestation est accordée à la veuve légitime. Par conséquent, il incombera à la présumée conjointe de fait de prouver qu’elle vivait avec le cotisant décédé dans une relation conjugale au moment du décès du cotisant et qu’elle a vécu avec le cotisant décédé dans une relation conjugale pendant une période d’au moins un an.

Preuve

Preuve de l’appelante

[8] Dans sa demande de pension de survivant estampillée le 7 février 2013, l’appelante a déclaré qu’elle était l’épouse légale du cotisant et qu’elle était avec lui depuis 12 jours au moment de son décès.

[9] D’après la preuve, le cotisant est décédé le 9 décembre 2012.

[10] L’appelante a épousé le cotisant le 16 décembre 1978. Ils ont eu trois enfants.

[11] Selon une entente de séparation, l’appelante et le cotisant se sont séparés le 15 août 1992.

[12] Selon une lettre de l’appelante datée du 18 juillet 2013, le cotisant et elle ont vécu des moments difficiles, elle a pris soin de lui pendant 10 jours dans une clinique lorsqu’il était malade, et il est décédé six (6) jours plus tard.

[13] Selon un affidavit de l’appelante daté du 18 février 2014, le cotisant est allé au Pérou en novembre 2012 afin de commencer une nouvelle vie. Il est tombé malade et il a été hospitalisé. L’appelante et sa fille sont allées au Pérou et ont pris soin du cotisant pendant 10 jours. Celui-ci est décédé le 9 décembre 2012. L’appelante affirme également que le cotisant est décédé avant la fin du processus de divorce. Le 8 janvier 2013, elle a obtenu une copie de son certificat de mariage du greffe, et le document prouvait qu’elle était encore l’épouse légale du cotisant.

[14] Le certificat de mariage a été produit à titre de preuve et il est daté du 8 janvier 2013.

[15] D’après la preuve au dossier, un jugement de divorce a été prononcé le 12 janvier 2012. Toutefois, la preuve semble laisser croire que le divorce a été annulé à une date ultérieure.

[16] De plus, le cotisant a vendu sa part de la maison familiale à la mise en cause le 6 septembre 2012 ou vers cette date; le 23 novembre 2012, le nom de la bénéficiaire désignée d’une police d’assurance de Canada-Vie que possédait le cotisant a été changé pour passer de la mise en cause à la fille du cotisant. Il existe également une preuve selon laquelle la fille a fait le dépôt pour l’enterrement du cotisant (réception du dépôt du cimetière au Pérou datée du 20 décembre 2012) et selon laquelle les cendres du cotisant ont été livrées à sa fille.

[17] Il y a plusieurs lettres au dossier faisant état des déclarations du cotisant au sujet de la fin de sa relation avec la mise en cause. Les déclarations dans les lettres donnent à penser que la relation entre le cotisant et la mise en cause avait pris fin quelques années auparavant et que ceux-ci n’étaient que de simples colocataires dans les années précédant le décès du cotisant :

  • Selon une lettre d’une collègue de la mise en cause datée du 26 avril 2013, cette dernière lui a dit que le cotisant et elle s’étaient séparés il y a quelques années, qu’ils vivaient toujours ensemble pour des raisons financières, qu’il était davantage une figure paternelle pour elle, qu’ils étaient séparés depuis bon nombre d’années et qu’il avait déménagé et décidé d’aller vivre au Pérou.
  • Selon une autre lettre d’un collègue du cotisant datée du 27 avril 2013, il connaissait la mise en cause depuis plus de 12 ans. Le cotisant lui a dit que, lorsqu’il allait mourir, il aimerait laisser tous ses biens à ses enfants. Il a également déclaré que la mise en cause et le cotisant étaient séparés depuis au moins deux (2) ans.
  • Selon une lettre du frère du cotisant envoyée par télécopie le 20 novembre 2013, le cotisant et la mise en cause vivaient dans la résidence de la mère du cotisant dont celui-ci avait hérité. Ils étaient séparés depuis bon nombre d’années et ils vivaient dans la même maison, mais ils avaient des chambres séparées. Pendant les dernières années de sa vie, le cotisant était très triste. La mise en cause le considérait comme un [traduction] « père », et cela le fâchait. Après qu’il est tombé malade en 2005, elle ne l’a plus jamais considéré comme son partenaire. Il était plutôt un simple [traduction] « colocataire ». Elle l’a clairement dit à beaucoup de personnes dans la collectivité, y compris ses collègues. À un certain point, lorsque le cotisant est renté de ses vacances au Pérou, le petit ami de la mise en cause vivait avec elle pendant l’absence du cotisant Le cotisant et la mise en cause ont par la suite décidé d’officialiser leur séparation. Elle a acheté sa part de la maison au cotisant, et celui-ci a transféré la maison à son nom. En septembre, soit trois mois avant son décès, le cotisant a reçu sa part de la maison.
  • Selon une lettre d’un ami datée du 12 mai 2016, il a rencontré le cotisant en octobre ou novembre 2005, ce dernier était déprimé, et il lui a dit que la mise en cause ne voulait pas rester avec lui, qu’elle avait emménagé avec un autre homme et qu’elle avait obtenu ce qu’elle désirait relativement à son héritage et à sa maison.
  • Selon une lettre non datée d’un partenaire d’affaires du cotisant, la mise en cause a beaucoup voyagé et elle lui a dit en 2008 que le cotisant et elle étaient séparés et qu’elle vivait avec lui à des fins de commodité seulement.
  • Selon une autre lettre non datée d’une membre de la collectivité, elle a croisé le cotisant à la fin de novembre 2012, et celui-ci lui a dit qu’il faisait du magasinage de dernière minute en vue de son voyage au Pérou. Il a mentionné qu’il déménageait au Pérou pour une période indéfinie dans le cadre de sa retraite et qu’il prévoyait lancer une entreprise. Elle lui a demandé si la mise en cause partait avec lui, et il a répondu par la négative et que même si elle était Péruvienne et qu’il l’avait rencontrée dans ce pays, elle n’avait jamais voyagé avec lui au Pérou. Elle préférait voyager par elle-même dans des endroits comme l'Europe et visiter des amis masculins qu’elle avait rencontrés sur Internet. Il lui a dit que même s’ils vivaient dans la même maison, ils étaient séparés depuis bon nombre d’années. Il avait déménagé et avait décidé de déménager seul au Pérou. Il espérait que son fils aîné se rende prochainement au Pérou afin de l’aider dans son entreprise.

Preuve de la mise en cause

[18] La demande de pension de survivant de la mise en cause a été estampillée le 22 janvier 2013. Elle a déclaré qu’elle était la conjointe de fait du cotisant et qu’ils ont vécu ensemble du 5 juillet 2002 jusqu’au décès du cotisant. Elle a donné les mêmes renseignements dans sa déclaration solennelle de l’union de fait estampillée le 13 février 2013.

[19] D’après la preuve, le cotisant et la mise en cause ont participé à une cérémonie de mariage le 27 juin 2002.

[20] D’après la déclaration de revenus de la mise en cause pour 2012, elle était dans une union de fait.

[21] Selon une lettre datée du 5 novembre 2012 et produite par la province de la Colombie-Britannique au sujet du crédit de TVH du cotisant, il était marié ou il vivait en union de fait, et son adresse semblait être la même adresse que celle de la mise en cause.

[22] La mise en cause a également fourni des copies de relevés bancaires selon lesquels le cotisant et elle avaient un compte bancaire conjoint en octobre, novembre et décembre 2012.

[23] Selon la preuve, le cotisant s’est rendu au Pérou le 20 novembre 2012. La mise en cause ne l’a pas accompagné. Dans un affidavit daté du 7 février 2014, la mise en cause a déclaré qu’elle vivait dans une relation semblable à un mariage avec le cotisant, qu’ils avaient décidé de lancer une entreprise au Pérou et qu’elle prévoyait rejoindre le cotisant au Pérou ultérieurement en 2013.

[24] La mise en cause a fourni la preuve de tierces parties afin d’étayer sa position selon laquelle elle vivait dans une relation semblable à un mariage avec le cotisant avant son décès :

  • Selon une lettre d’une collègue datée du 30 avril 2013, elle a rencontré la mise en cause quatre (4) ans auparavant et elle a vu le cotisant la conduire au travail, la reconduire et faire l’épicerie, et le couple avait l’intention de déménager au Pérou et d’y acheter une maison afin d’y passer l’hiver et d’ouvrir une petite entreprise. Il a eu un accident en décembre 2012 et il est décédé peu de temps après. Le régime d’assurance de la Croix Bleue était censé rembourser les coûts associés à l’hospitalisation et à la chirurgie du cotisant.
  • Selon une lettre d’un ami datée du 1er janvier 2016, la mise en cause et le cotisant entretenaient une relation maritale. Il a rencontré le cotisant à la fin de 1990 dans son entreprise satellite, il l’a emmené au Pérou et il a rencontré sa petite amie (la mise en cause). Il avait une ex-épouse, également originaire du Pérou, mais ils étaient séparés depuis 1992, ils avaient une entente de séparation depuis cette année-là, et ils ont obtenu le divorce par la suite. Son ex-épouse et ses enfants vivaient à Edmonton, et le cotisant vivait à X avec sa mère. En juillet 2002, elle a déménagé à X afin d’entamer une union de fait avec le cotisant jusqu’au jour où il est décédé le 9 décembre 2012.

[25] La mise en cause a également produit une facture des dépenses relatives aux funérailles du cotisant.

Observations

[26] L’appelante a soutenu qu’elle est admissible à la pension de survivant parce qu’elle était l’épouse légale du cotisant au moment du décès le 9 décembre 2012. Elle était auprès du cotisant au moment de son décès et avant celui-ci, alors qu’il était malade. La mise en cause n’était ni la conjointe de fait ni dans une relation conjugale avec le cotisant au moment de son décès, car elle ne vivait pas avec lui de façon continue depuis au moins un (1) an et qu’elle n’entretenait pas une relation conjugale depuis deux (2) ou trois (3) ans (ou plus) avant son décès.

[27] L’intimé a soutenu que l’appelante n’est pas admissible à une pension de survivant pour les raisons suivantes :

  1. L’appelante est l’épouse séparée du cotisant et elle était encore mariée avec celui-ci au moment du décès. La définition d’un survivant exclut l’époux séparé et marié si une autre personne est déclarée comme étant le conjoint de fait aux termes de l’article 42(1) du RPC.
  2. Dans sa demande de pension de survivant, l’appelante déclare que le cotisant et elle ont décidé de déménager au Pérou afin de vivre ensemble. L’appelante déclare qu’elle était avec le cotisant au Pérou alors qu’il était malade, qu’elle prenait soin de lui, et qu’ils avaient fait des plans ensemble pour l’avenir. L’appelante déclare que, après le décès du cotisant, elle est retournée à Edmonton.
  3. La mise en cause a présenté une demande de pension de survivant dans laquelle elle prétend être la conjointe de fait du défunt au moment du décès. La définition d’un conjoint de fait dans le RPC prévoit que la cohabitation doit avoir existé depuis au moins un an immédiatement avant le décès du cotisant.
  4. L’appelante a prétendu que le cotisant et la mise en cause ne vivaient pas ensemble de façon continue depuis au moins un an immédiatement avant le décès du cotisant. Toutefois, lorsque la pension de survivant a été octroyée à la mise en cause, une preuve suffisante a été produite à l’appui de la période d’union de fait.

Analyse

[28] Conformément à l’article 44(1)(d) du RPC, une pension de survivant doit être versée au survivant d’un cotisant décédé. Un « survivant » est défini à l’article 42(1) du RPC comme étant une personne mariée au cotisant au moment du décès de celui-ci s’il n’y avait aucun conjoint de fait ou une personne qui était le conjoint de fait du cotisant au moment du décès. Le RPC définit à l’article 2 le « conjoint de fait » comme étant la personne qui, au moment considéré, vit avec un cotisant dans une relation conjugale depuis au moins un an.

[29] La question pertinente en l’espèce est celle de savoir si le cotisant et la personne qui habitait avec lui au moment de son décès vivaient en union de fait depuis au moins un an avant le décès. Si, au décès du cotisant, celui-ci n’avait pas de conjoint de fait, la personne qui était mariée au cotisant à ce moment-là est alors considérée comme son survivant.

[30] Dans McLaughlin c Canada (Procureur général), 2012 CF 556, la Cour fédérale a énoncé que les facteurs démontrant l’existence d’une union de fait incluent ce qui suit :

  1. 1) le partage d’un toit, notamment le fait que les parties vivaient sous le même toit ou partageaient le même lit ou le fait que quelqu’un d’autre habitait chez elles;
  2. 2) les rapports sexuels et personnels, notamment le fait que les parties avaient des relations sexuelles, étaient fidèles l’une à l’autre, communiquaient bien entre elles sur le plan personnel, prenaient leurs repas ensemble, s’entraidaient face aux problèmes ou à la maladie ou s’offraient des cadeaux;
  3. 3) les services, notamment le rôle des parties dans la préparation des repas, le lavage, les courses, l’entretien du foyer et d’autres services ménagers;
  4. 4) les activités sociales, notamment le fait que les parties participaient ensemble ou séparément aux activités du quartier ou de la collectivité et leurs rapports avec les membres de la famille de l’autre;
  5. 5) l’image sociétale, notamment l’attitude et le comportement de la collectivité envers chacune des parties, considérées en tant que couple;
  6. 6) le soutien, notamment les dispositions financières prises par les parties pour ce qui était de fournir les choses nécessaires à la vie et la propriété de biens;
  7. 7) l’attitude et le comportement des parties à l’égard des enfants.

[31] Le cotisant est décédé le 9 décembre 2012.

[32] D’après la preuve, même si l’appelante et le cotisant se sont séparés le 15 août 1992, comme il est prévu dans l’entente de séparation datée du 15 août 1992, ils n’ont jamais obtenu le divorce. Un jugement de divorce a été rendu le 12 janvier 2012, mais, selon la preuve, le divorce a été annulé à une date ultérieure. Le 8 janvier 2013, l’appelante a obtenu une copie de son certificat de mariage du greffe, et ce document démontrait qu’elle était encore l’épouse légale du cotisant. Le certificat de mariage a été versé à titre de preuve et il est daté du 8 janvier 2013.

[33] En ce qui concerne la relation de la mise en cause avec l’appelant, le Tribunal estime qu’elle n’était pas la conjointe de fait du cotisant pendant au moins un an avant le décès. Le Tribunal a tenu compte du fait que le cotisant a vendu sa part de la maison familiale à la mise en cause le 6 septembre 2012 ou vers cette date; le 23 novembre 2012, la personne nommée à titre de bénéficiaire de la police d’assurance de Canada-Vie du cotisant a été modifiée, passant de la mise en cause à la fille du cotisant. Il y a également une preuve selon laquelle la fille a fait le dépôt pour l’enterrement du cotisant (reçu du dépôt pour le cimetière au Pérou daté du 20 décembre 2012), et ses cendres ont été livrées à sa fille. Cette preuve ne démontre pas que le cotisant entretenait une union de fait avec la mise en cause au moment du décès et pendant au moins un an auparavant.

[34] La preuve démontre également que le cotisant s’est rendu au Pérou le 20 novembre 2012 et que la mise en cause ne l’a pas accompagné.

[35] Même si la mise en cause a présenté une preuve selon laquelle la déclaration de revenus pour 2012 indiquait que son état matrimonial était une union de fait, qu’une lettre datée du 5 novembre 2012 et produite par la province de la Colombie-Britannique au sujet du crédit de TVH du cotisant indiquait qu’il était marié ou qu’il vivait en union de fait, et que son adresse semblait être la même que celle de la mise en cause, que des copies de relevés bancaires indiquaient que le cotisant et la mise en cause avaient un compte bancaire conjoint en octobre, novembre et décembre 2012, cette preuve confirme seulement les déclarations faites par plusieurs personnes qu’elle vivait avec le cotisant, mais cette preuve ne démontre pas qu’elle entretenait une union de fait avec le cotisant depuis au moins un an avant le décès.

[36] La mise en cause n’a pas produit une preuve selon laquelle le cotisant et elle avaient des relations sexuelles, qu’ils étaient fidèles l’un à l’autre, qu’ils s’entraidaient face aux problèmes ou pendant la maladie, qu’ils effectuaient l’entretien du foyer et d’autres services ménagers, qu’ils se soutenaient, ce qui comprend des dispositions financières prises par les parties pour fournir les choses nécessaires à la vie et à l’acquisition et la propriété de biens.

[37] Au contraire, il y a plusieurs lettres de personnes déclarant que le cotisant leur a dit qu’il avait mis fin à sa relation avec la mise en cause il y a quelques années et que dans les dernières années, ils n’étaient que de simples colocataires à des fins de commodité. Ces lettres appuient la preuve versée au dossier selon laquelle la mise en cause et le cotisant vivaient sous le même toit, mais qu’ils n’entretenaient pas une union de fait. Plus précisément, la lettre datée du 26 avril 2013 et produite par une collègue de la mise en cause selon laquelle cette dernière lui a dit que le cotisant et elle étaient séparés depuis quelques années, qu’ils vivaient encore ensemble pour des raisons financières, qu’il était davantage une figure paternelle pour elle, qu’ils étaient séparés depuis bon nombre d’années, qu’il avait déménagé et décider d’aller vivre au Pérou; la lettre d’un collègue du cotisant datée du 27 avril 2013 selon laquelle il connaissait la mise en cause depuis plus de 12 ans, que le cotisant lui avait dit qu’il voulait tout laisser à ses enfants à sa mort, et que la mise en cause et le cotisant étaient séparés depuis au moins deux (2) ans; la lettre du frère du cotisant datée du 20 novembre 2013 selon laquelle le cotisant et la mise en cause étaient séparés depuis bon nombre d’années et vivaient dans la même maison, mais dans des chambres séparées. La mise en cause le considérait comme un [traduction] « père ». Après qu’il est tombé malade en 2005, elle ne le considérait plus comme son partenaire. Il n’était plus qu’un [traduction] « colocataire ». Elle l’a clairement fait savoir à bon nombre de personnes dans la collectivité, y compris ses collègues. Le cotisant et la mise en cause ont ensuite décidé d’officialiser leur séparation. Elle a acheté sa part de la maison et il a transféré la maison à son nom en septembre (trois mois avant son décès), il a reçu sa part de la maison; selon une lettre d’un ami datée du 12 mai 2016, il avait rencontré le cotisant en octobre ou en novembre 2005, il était déprimé et il lui avait dit que la mise en cause ne voulait pas rester avec lui, qu’elle avait emménagé chez un autre homme et qu’elle avait obtenu ce qu’elle souhaitait relativement à l’héritage et à la maison du cotisant; selon une lettre non datée d’un partenaire d’affaires du cotisant, la mise en cause avait beaucoup voyagé et en 2008, elle lui a dit que le cotisant et elle étaient séparés et qu’elle vivait avec lui à des fins de commodité seulement; selon une autre lettre non datée d’une membre de la collectivité, elle a croisé le cotisant à la fin de novembre 2012, et celui-ci lui a dit qu’il faisait du magasinage de dernière minute en vue de son voyage au Pérou. Il a mentionné qu’il déménageait au Pérou pour une période indéfinie afin de prendre sa retraite et qu’il prévoyait lancer une entreprise par lui-même. Elle lui a demandé si la mise en cause l’accompagnait, et il a répondu par la négative et que, même si elle était Péruvienne et qu’il l’avait rencontré dans ce pays, elle ne s’était jamais rendue au Pérou avec lui. Elle préférait plutôt voyager seule dans des endroits comme l’Europe, afin de rendre visite à des amis masculins qu’elle avait rencontrés sur Internet. Il avait déménagé et il avait décidé de s’installer seul au Pérou.

[38] D’après ces lettres et les actions du cotisant de septembre à novembre 2012, à savoir la période pendant laquelle il a vendu sa part de la maison familiale à la mise en cause le 6 septembre 2012 ou vers cette date, le changement de bénéficiaire pour la police d’assurance de Canada-Vie, passant de la mise en cause à sa fille le 23 novembre 2012 et le fait qu’il s’est rendu seul au Pérou et que l’appelante est allée au Pérou pour aider le cotisant alors qu’il était malade avant son décès, le Tribunal estime que la mise en cause n’était pas la conjointe de fait du cotisant selon l’article 2 du RPC.

[39] L’intimé a soutenu que, lorsque la pension de survivant a été octroyée à la mise en cause, on avait produit une preuve suffisante à l’appui de la période d’union de fait. De plus, l’intimé a fait valoir que la mise en cause a présenté des documents supplémentaires. Les documents comprenaient les déclarations personnelles ainsi que des dossiers de l’Agence de revenu du Canada pour le cotisant et elle, des dossiers de la Banque Royale du Canada pour le cotisant et elle, l’entente de séparation entre l’appelante et le cotisant, une traduction du jugement de divorce entre l’appelante et le cotisant, des documents juridiques supplémentaires, deux lettres d’appui à la mise en cause, des copies de cartes de soins de santé de la Croix Bleue, et une copie du formulaire d’admission du cotisant à l’hôpital de X. Toutefois, le Tribunal estime que cette preuve à elle seule confirme seulement les déclarations de plusieurs personnes selon lesquelles la mise en cause vivait avec le cotisant, et non qu’elle entretenait une union de fait avec celui-ci pendant au moins un an avant le décès. En ce qui concerne le jugement de divorce présenté par la mise en cause, d’après la preuve versée au dossier, le divorce semble avoir été annulé à une date ultérieure.

[40] L’appelante est d’avis qu’elle est admissible à la pension de survivant, au titre du RPC puisqu’elle était encore mariée légalement au cotisant au moment du décès. Il n’est pas contesté que l’appelante était légalement mariée au cotisant au moment du décès. Étant donné que le RPC prévoit précisément qu’une personne mariée au cotisant au moment du décès est le survivant du cotisant s’il n’existe aucune union de fait et qu’un conjoint de fait est une personne qui cohabitait avec le cotisant dans le cadre d’une relation conjugale à la période visée pendant une période continue d’au moins un an, le Tribunal estime que la mise en cause n’entretenait plus une union de fait avec le cotisant au moment du décès, et que la relation a pris fin plus d’un an avant le décès du cotisant.

[41] Par conséquent, conformément aux articles 2, 42(1) et 44(1)(d) du RPC, le Tribunal estime que, au moment du décès du cotisant le 9 décembre 2012, l’appelante était l’épouse légale du cotisant et qu’elle est admissible à la pension de survivant à titre de survivante du cotisant.

Conclusion

[42] L’appel est accueilli.

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