Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est accueilli et le dossier est renvoyé à la division générale pour un nouvel examen.

Aperçu

[2] W. L. (prestataire) et sa femme se sont séparés en 1986, puis ont divorcé en 2005. En 2005, Mme L. a demandé et obtenu un partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension pour la période pendant laquelle elle et le prestataire étaient mariés. Cela a réduit le montant de la pension de retraite du prestataire. Mme L. est décédée en 2015. Le prestataire a demandé le remboursement des crédits de pension qui avaient été divisés. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a refusé la demande.

[3] Le prestataire a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal. La division générale du Tribunal a tenu une conférence préparatoire à l’audience par téléphone. Après la tenue de la conférence préparatoire à l’audience, la division générale a rejeté les arguments du prestataire selon lesquels ses droits aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés avaient été violés et a rejeté sommairement son appel sur le fond. L’appel est accueilli parce que la division générale a enfreint les principes de justice naturelle en procédant par téléconférence malgré la déficience auditive du prestataire et en rejetant sommairement son appel sans préavis.

Questions en litige

[4] La division générale a-t-elle enfreint un principe de justice naturelle en rejetant sommairement la demande du prestataire sans l’aviser au préalable de son intention?

[5] La division générale a-t-elle enfreint un principe de justice naturelle en tenant la conférence préparatoire à l’audience par téléphone malgré la déficience auditive du prestataire?

Analyse

[6] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) régit le fonctionnement du Tribunal. Elle prévoit les trois seuls moyens d’appel qui peuvent être pris en considération. Ces moyens d’appel sont les suivants : la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 1.

[7] Les principes de justice naturelle visent à assurer aux parties d’un appel qu’elles ont une occasion suffisante de présenter leurs arguments, de prendre connaissance des arguments contre elles et de leur répondre, et à faire en sorte que la décision soit rendue par un décideur impartial.

[8] Les parties ont reconnu que la division générale n’a pas observé les principes de justice naturelle pour les raisons suivantes, et j’en suis convaincue.

Rejet sommaire

[9] La Loi sur le MEDS prévoit que le Tribunal doit rejeter sommairement une demande si elle n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 2. Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit que, avant de rejeter sommairement un appel, le Tribunal doit aviser le prestataire de son intention et donner aux parties la possibilité de présenter des observationsNote de bas de page 3. Le prestataire soutient que la division générale ne l’a pas avisé de son intention de rejeter sommairement sa demande et qu’elle ne lui a pas donné l’occasion de présenter des observations par rapport à cette question. Il soutient qu’il s’agissait d’un manquement à la justice naturelle.

[10] La décision de la division générale précise que :

[traduction] Vu que l’appelant a été informé de la requête visant le rejet et a eu la chance de répondre tant à l’écrit qu’à l’oral, le Tribunal estime qu’il y a des circonstances spéciales. L’article 3(1)b) du Règlement sur le Tribunal prévoit que ce dernier peut dispenser l’exigence de l’avis d’intention de rejeter sommairement l’appel conformément à l’article 22 du Règlement sur le Tribunal.

Comme l’appelant ne soulève pas d’autres questions en appel, la demande devrait être rejetée sommairementNote de bas de page 4.

La division générale n’a pas avisé le prestataire que sa demande serait rejetée sur le fond. Elle n’a fourni aucune explication quant à ce qui constituait des circonstances spéciales ou sur la façon dont des circonstances spéciales pouvaient être invoquées pour dispenser de l’avis selon lequel l’appel du prestataire serait rejeté sur le fond. Par conséquent, le prestataire n’a pas eu l’occasion de répondre aux arguments contre lui. C’est un manquement à la justice naturelle. L’appel doit être accueilli sur cette base.

Audience par téléconférence

[11] Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit que le Tribunal peut tenir des audiences selon l’un ou plusieurs des modes suivants : au moyen de questions et réponses écrites, par téléconférence, vidéoconférence ou tout autre moyen de télécommunication ou par comparution en personne des partiesNote de bas de page 5. La division générale a tenu la conférence préparatoire à l’audience par téléconférence. Cependant, la prestataire a une déficience auditive et porte des prothèses auditives. Il a précisé dans le formulaire de renseignements en matière d’audience, document qu’il a préparé avec la division générale, qu’il ne pourrait pas participer à une téléconférence parce qu’il doit lire sur les lèvres et recourir à des signaux visuels, et qu’il a de la difficulté à discuter au téléphoneNote de bas de page 6. Par conséquent, le fait de tenir une téléconférence a nui à la capacité du prestataire d’entendre et de comprendre la conférence préparatoire à l’audience. Cela a nui à sa capacité de participer à cette audience. Il s’agit également d’un manquement à la justice naturelle en l’espèce. L’appel doit également être accueilli sur cette base.

Conclusion

[12] L’appel est accueilli.

[13] La Loi sur le MEDS prévoit les réparations qui peuvent être accordées en appelNote de bas de page 7. En l’espèce, il convient que l’affaire soit renvoyée à la division générale pour un nouvel examen parce que le prestataire n’a pas eu l’occasion d’examiner le bien-fondé de sa demande.

[14] Étant donné que le prestataire a une déficience auditive, qu’il doit lire sur les lèvres et recourir à des signaux visuels, et qu’il porte des prothèses auditives, il est à propos que toute audience orale se déroule en personne. Le décalage entre la lecture sur les lèvres et l’audition de ce qui est dit cause des ennuis au prestataire.

[15] Le prestataire a également demandé que l’appel soit entendu par un autre membre de la division générale parce qu’il a difficulté à entendre les voix douces et que toutes les communications lui soient envoyées par courriel.

 

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 19 juin 2018

Téléconférence

W. L., appelant

Marie-Andrée Richard, avocate de l’intimé

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