Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Contenu de la décision



Décision

[1] Le requérant n’est pas admissible à une pension de survivant du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le ministre a reçu la demande de pension de survivant du RPC du requérant le 17 novembre 2015. Le Ministre a rejeté cette demande initialement et après révision. Le requérant a interjeté appel de la décision issue de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Le requérant a marié G. C. (la cotisante) le XNote de bas de page 1. Toutefois, le 20 janvier 2015, le juge Trimble a prononcé le divorce du requérant et de la cotisante, avec le divorce prenant effet 31 jours après la date de l’ordonnance (ordonnance de divorce)Note de bas de page 2. Le 20 février 2015, semble être le 31e jour après l’ordonnance de divorce. La cotisante est décédée le 20 février 2015, créant ainsi une admissibilité potentielle pour une pension de survivant du RPCNote de bas de page 3. Bien que le requérant ait initialement déclaré, au moment du décès de la cotisante, l’avoir divorcée, il fait valoir maintenant qu’il est admissible à sa pension de survivant du RPC, car ils étaient toujours mariés au moment de sa mort.

Question préliminaire

[4] L’affaire a été instruite par voie de questions et réponses écrites. Tant le requérant que le Ministre ont dû répondre aux deux mêmes questions relativement au moment de la mort de la cotisante et de la possibilité d’une union de fait au moment de sa mort. Les réponses devaient avoir été reçues au plus tard le vendredi 24 août 2018 : les parties avaient été avisées que le membre du Tribunal pourrait potentiellement rendre une décision sur le dossier sans tenir compte de toutes réponses reçues après cette date. Les questions arrivées en retard seraient prises en compte uniquement à la discrétion du membre du Tribunal.

[5] Les réponses du requérant (idexées GD6) ont été reçues le 9 août 2018, avant l’échéance de réponse. Les réponses du Ministre (indexées GD7) étaient datées du 23 août 2018, mais ne sont pas parvenues au Tribunal avant 8 h 54, le lundi 27 août 2018. Par conséquent, les réponses GD7 ne peuvent seulement être prises en compte qu’à ma discrétion.

[6] Il n’est pas clair pourquoi la réponse du Ministre datée du jeudi 23 août 2018 n’a pas été reçue par le Tribunal avant le début de la matinée du lundi suivant. Toutefois, pour ce qui est des heures normales de bureau, le document GD7 n’a été reçu que quelques minutes trop tard. Je n’avais pas commencé à préparer la décision dans cette affaire avant que le document GD7 ne soit reçu. Le seul élément de preuve nouveau indiquait que la réponse précédente du requérant était que l’heure de la mort de la cotisante était inconnue et qu’il n’y avait pas de preuve que la cotisante étant en union de fait au moment de sa mort. Je note aussi que cet appel en est principalement un « d’interprétation » et les évènements clés sont survenus il y a plus de trois ans. Finalement, je suis conscient de mon obligation d’instruire cette affaire de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettentNote de bas de page 4.

[7] Après avoir considéré ces facteurs, j’ai choisi de recevoir le document GD7. J’estime que l’élément de preuve GD7 est très pertinent, car il contenait les réponses aux deux mêmes questions qui avaient été posées au requérant. Je juge qu’aucun préjudice n’est causé par le retard extrêmement mineur. En effet, c’est seulement le timbre dateur sur les documents qui m’a alerté de leur retard. J’estime qu’aucun préjudice n’a été causé par le fait que j’ai reçu ces réponses, car le requérant a aussi eu la chance de répondre à ces questions. En fait, les réponses en GD7 reflètent essentiellement celles déjà reçues du requérant.

[8] J’ai aussi déterminé qu’il n’est pas nécessaire accorder une autre occasion aux parties de répondre aux documents GD6 et GD7, car chaque partie a déjà répondu aux mêmes questions et il n’y avait pas de différence importante dans les réponses substantielles reçues.

Question en litige

[9] La cotisante avait-elle un conjoint de fait lorsqu’elle est décédée?

[10] À quelle date et à quelle heure l’ordonnance de divorce a-t-elle pris effet?

[11] À quelle heure la cotisante est-elle décédée le 20 février 2015?

[12] Selon les réponses à ces questions, le requérant est-il admissible à une pension de survivant du RPC en lien avec la cotisante?

Analyse

[13] La pension de survivant du PRC est payable au survivant d’un cotisant décédé qui a versé des cotisations au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilitéNote de bas de page 5. Un « survivant » peut inclure une personne qui était le conjoint de fait de la cotisante au décès de celle-ci. Une union de fait doit avoir existé pendant une période continue d’au moins une année au moment du décès de la cotisante. Toutefois, s’il n’y a pas de conjoint de fait, un « survivant » est la personne qui était mariée au cotisant au moment de la mort de celui-ciNote de bas de page 6.

[14] Il n’est pas contesté que la cotisante a versé les cotisations requises pendant au moins la période minimale d’admissibilité. Je dois maintenant déterminer si la cotisante avait un conjoint de fait lorsqu’elle est décédée.

La cotisante avait-elle un conjoint de fait lorsqu’elle est décédée?

[15] Ni le requérant ni le Ministre ne suggèrent que la cotisante était en union de fait lorsqu’elle est décédéeNote de bas de page 7. Quand le requérant a initialement fait la demande d’une pension de survivant, il a indiqué que l’état matrimonial de la cotisante était divorcé, plutôt que « mariée » ou « épouse ou conjointe de fait survivante ». Il a ajouté qu’il n’était plus marié au moment du décès de la cotisante. À ce moment, la témoin à la déclaration du requérant a indiqué qu’elle était en union de fait avec le requérantNote de bas de page 8.

[16] Finalement, tant le certificat de décès que la déclaration de décès indiquent que la cotisante était divorcée lorsqu’elle est décédéeNote de bas de page 9. Aux fins de cet appel, ces documents n’ont pas un rôle déterminant pour établir si la cotisante était « divorcée » lorsqu’elle est décédée, car c’est une question complexe que je dois élucider moi-même sur le fond de tous les faits et du droit en l’espèce. Toutefois, il est correct de dire que ces documents appuient une conclusion que la cotisante n’était pas en union de fait lorsqu’elle est décédée.

[17] Compte tenu des éléments de preuve susmentionnés, j’estime que le requérant n’était pas en union de fait avec la cotisante lorsqu’elle est décédée. Je ne suis aussi pas persuadé que la cotisante était en union de fait avec quelqu’un d’autre lorsqu’elle est décédée. Par conséquent, le requérant ne serait admissible à une pension de survivant du RPC que s’il peut établir qu’il était toujours marié avec la cotisante au moment de son décès. Le requérant a fourni des éléments de preuve contradictoire sur cette question, car il avait initialement déclaré être divorcé de la cotisante au moment de sa mort, seulement pour ensuite affirmer qu’il était toujours marié avec elle à ce moment-là. Pour répondre à cette question définitivement, je dois premièrement déterminer à quelles date et heure exactes l’ordonnance de divorce a pris effet.

Quand l’ordonnance de divorce a-t-elle pris effet?

[18] L’ordonnance de divorce est de première importance. Il a clairement été signé le 20 janvier 2015. Il indique aussi clairement que le requérant et la cotisante seront divorcés, et que leur divorce « prendra effet 31 jours après la date de cette ordonnance ». L’ordonnance de divorce ne mentionne pas expressément à quel moment dans la journée le divorce prendra effetNote de bas de page 10.

[19] La première étape est de déterminer le 31e jour après le 20 janvier 2015. Je n’ai pas de problème à conclure que la première journée après le 20 janvier 2015 est le 21 janvier 2015. Comme janvier à 31 jours, un compte simple des jours au calendrier révèle que le 20 février 2015 est le 31e jour après le 20 janvier 2015. Bien que le requérant ait prétendu à un moment donné que le 21 février 2015 était le 31e jour après le 20 janvier 2015, je n’accepte pas cette interprétationNote de bas de page 11. De toute façon, le requérant a modifié sa position dans des observations subséquentes, admettant que le 20 février 2015 était le 31e jour après le 20 janvier 2015Note de bas de page 12. Je conclus que le 20 février 2015 est en fait le 31e jour après le 20 janvier 2015. Par conséquent, je conclus que l’ordonnance de divorce a pris effet le 20 février 2015. Ceci est conforme avec les observations les plus récentes des parties.

[20] Toutefois, les parties ne s’entendent pas sur le moment de la journée où l’ordonnance de divorce a pris effet le 20 février 2015. Cette ordonnance n’a pas spécifié un temps particulier de la journée où elle a pris effet. Le requérant fait valoir qu’elle avait pris effet à 23 h 59Note de bas de page 13. Le Ministre fait valoir qu’elle a pris effet à 0 h 1Note de bas de page 14. Ces temps sont réellement des approximations par souci de clarté, car l’intention est simplement d’identifier le moment le plus hâtif ou tardif de cette journée.

[21] Si l’ordonnance de divorce a « pris effet » à une date particulière, je ne vois pas comment elle aurait pris effet au moment le plus tardif de cette journée. Plutôt, si quelque chose prend effet à une date, elle doit prendre effet au moment le plus tôt possible de cette date. Ceci ne devrait pas être différent, par exemple, du moment où un nouveau mois ou une nouvelle année « débutent ». Personne ne dirait que la nouvelle année débute à 23 h 59 le 1er janvier, ou qu’un nouveau mois débute à 23 h 59 la première journée de ce mois. Plutôt, une nouvelle année débute au moment le plus tôt possible le 1er janvier. Ce moment serait même plus tôt que 0 h 1 : au plus tard, ça serait une fraction de seconde infinitésimale et non mesurable après le coup exact de minuit.

[22] Mon interprétation est entièrement conforme à une décision de 2006 rendue par la Commission d’appel des pensions (décision Riddell)Note de bas de page 15. Bien que les décisions de la Commission d’appel des pensions ne sont que consultatives ou non contraignantes pour moi, j’estime que la décision Riddell est logique et fondée sur des facteurs similaires.

[23] Dans l’affaire Riddell, les époux avaient obtenu un jugement en divorce qui avait pris effet le 15 décembre 2001. Le 15 décembre 2001 était le trente et unième jour après que le jugement en divorce ait été rendu. Son époux est décédé à 5 h le 15 décembre 2001. La Commission d’appel des pensions a noté qu’une période d’appel de 30 jours est prévue dans la Loi sur le divorce : lorsque cette période expire, le divorce est finalNote de bas de page 16. Ceci serait après la fin du trentième jour, ce qui coïncide avec le début du trente et unième jour. La Commission a conclu que le divorce Riddell est devenu final au premier coup de minuit marquant la transition entre le 14 décembre et le 15 décembre 2001 et l’épouse était une personne divorcée instantanément ensuite. Même si l’époux dans l’affaire Riddell est décédé le 15 décembre 2001 (le trente et unième jour après le jugement du divorce), l’épouse n’était plus mariée avec lui lorsqu’il est décédé à 5 h ce jour-là.

[24] Je note aussi que l’ordonnance en divorce en l’espèce contient plusieurs sections « réimprimées ». Une de ces sections indique clairement que 31 jours est la période par défaut pour que les divorces prennent effetNote de bas de page 17. Ceci est aussi conforme à la période d’appel de 30 jours prévue dans la Loi sur le divorce, et suggère que le moment clé est l’expiration du trentième jour (plutôt que l’expiration du trente et unième jour).

[25] Je ne suis pas convaincu que l’ordonnance de divorce devrait prendre effet juste avant minuit (étant juste avant le début du 21 février 2015) le 20 février 2015. J’estime plutôt que l’ordonnance de divorce en l’espèce a pris effet au moment le plus tôt après le début du 20 février 2015. Je dois maintenant déterminer, si possible, l’heure exacte du décès de la cotisante.

À quelle heure la cotisante est-elle décédée le 20 février 2015?

[26] Il n’y a pas d’élément de preuve qui précise l’heure exacte de la mort de la cotisante. Ni le Ministre ni le requérant ne peuvent prouver le moment précis du décèsNote de bas de page 18. De plus, ni la déclaration de décès ni le certificat de décès ne fournissent l’heure du décèsNote de bas de page 19. Dans ces circonstances, je conclus que l’heure du décès de la cotisante le 20 février 2015 est inconnue.

[27] Selon mes conclusions relativement au moment du décès ainsi que le temps réel et la date de l’ordonnance de divorce, je dois maintenant déterminer si ces conclusions créent une admissibilité à la pension de survivant pour le requérant en lien avec la cotisante.

Le requérant est-il admissible à une pension de survivant en lien avec la cotisante?

[28] De manière à ce que le requérant soit admissible à une pension de survivant, il doit prouver que la cotisante est décédée avant que l’ordonnance de divorce ait pris effet. Toutefois, j’ai conclu que l’ordonnance de divorce a pris effet au moment le plus tôt au début du 20 février 2015. J’ai aussi conclu que l’heure du décès de la cotisante à cette date est inconnue.

[29] Le fardeau de la preuve incombe au requérant. Il doit prouver le bien-fondé de sa cause, selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, il doit être plus probable qu’improbable que la cotisante soit morte avant que l’ordonnance de divorce ait pris effet. Compte tenu de mes conclusions, ceci exigerait toutefois que la cotisante soit morte le 20 février 2015, mais avant le moment le plus tôt au début de cette journée. Ceci est logiquement impossible. Même s’il pourrait être établi que la cotisante est morte une millionième de seconde après le début du 20 février 2015, il pourrait être débattu que l’ordonnance de divorce a pris effet une milliardième de seconde après le début du 20 février 2015.

[30] Ce que le requérant pourrait faire de mieux, théoriquement, serait de prouver que la cotisante est décédée au moment précis où la date est changée du 19 février 2015 au 20 février 2015. Ceci nécessiterait un niveau de précision du temps qui n’existe simplement pas en l’espèce. De toute façon, il n’y a pas d’élément de preuve qui appuie cette proposition théorique. Selon la prépondérance des probabilités, je dois conclure que la cotisante est décédée le 20 février 2015, mais après le moment précis où la date est changée du 19 février 2015 au 20 février 2015.

[31] Il en suit que le divorce de la cotisante et du requérant a pris effet avant la mort de la cotisante le 20 février 2015. Quand la cotisante est décédée, elle était déjà divorcée du requérant. Ceci signifie que le requérant ne peut établir une admissibilité à une pension de survivant du RPC en lien avec la cotisante : il n’était plus marié avec elle, et n’était pas non plus son conjoint de fait au moment de sa mort.

Conclusion

[32] L’appel est rejeté.

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