Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelant, O. M., est né aux Philippines où il a passé des décennies à travailler comme enseignant. Il réside maintenant au Canada et il est âgé de 79 ans.

[3] En juin 2017, l’appelant a présenté une demande de prestations au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada (RPC), en invoquant l’Accord sur la sécurité sociale entre le Canada et la République des Philippines (Accord). L’appelant a mentionné qu’il avait résidé aux Philippines jusqu’en mai 2017, quand il est entré au Canada en tant que résident permanent.

[4] En juillet 2017, l’intimé, le ministre de l’Emploi et du Développement social, a rejeté la demande de pension de retraite du RPC de l’appelant parce que ce dernier n’avait versé aucune cotisation au Régime de pensions du Canada. Le ministre n’a pas répondu à la demande de pension de la sécurité de la vieillesse présentée parallèlement par l’appelant.

[5] L’appelant a demandé au ministre de réviser sa position et a fait valoir que les clauses de l’Accord s’appliquaient dans son cas parce qu’il avait versé des cotisations au système d’assurance du service du gouvernement (SASG) des Philippines pendant plus de 42 ans.

[6] En février 2018, le ministre a maintenu sa décision de refuser une pension de retraite du RPC à l’appelant. Celui-ci a porté cette décision en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, affirmant qu’il était admissible à la pension de retraite du RPC selon l’article III de l’Accord parce qu’il était « assujett[i] à la législation du Canada ou de la République des Philippines ». Il a déclaré qu’il était employé comme gardien d’enfants au Canada depuis juin 2017 et qu’il avait gagné 8 250 $ en échange de ses services, même s’il a reconnu qu’il ne pouvait pas verser de cotisations à partir de ses gains parce qu’il était âgé de plus de 70 ans.

[7] Dans une décision datée du 1er août 2018, la division générale a rejeté l’appel de façon sommaire puisqu’elle n’était pas convaincue qu’il avait une chance raisonnable de succès. La division générale a notamment estimé que l’appelant n’avait jamais été assujetti à la législation du Canada au sens du RPC et de l’Accord. Elle a également fait référence à l’article X de l’Accord, qui prévoit que les personnes ayant accumulé des périodes admissibles qui totalisent moins d’un an selon la législation de l’un ou l’autre des pays ne sont pas admissibles.

[8] L’appelant, qui reproche à la division générale d’avoir erré, interjette maintenant appel de son rejet sommaire devant la division d’appel du Tribunal. Il a insisté sur le fait que l’Accord le rend admissible à une pension de retraite du RPC. Il a soutenu que, peu importe s’il était ou non « assujett[i] à la législation du Canada », la division générale a commis une erreur en ne tenant pas compte des articles III et VI de l’Accord qui disent que toute personne qui a été assujettie à la législation du Canada ou des Philippines est admissible aux prestations du RPC.

[9] Il n’est pas nécessaire de demander la permission d’interjeter appel au titre de l’article 53(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS), car un rejet sommaire de la part de la division générale peut faire l’objet d’un appel de plein droit.

[10] J’ai décidé qu’il n’était pas nécessaire de tenir une audience de vive voix et que l’appel pouvait être instruit sur la foi du dossier, comme celui-ci ne présente pas de lacunes et ne nécessite pas de clarifications.

Questions en litige

[11] Aux termes de l’article 58 de la LMEDS, les seuls moyens d’appel à la division d’appel sont les trois suivants : i) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle; ii) elle a commis une erreur de droit; iii) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] Les questions en litige dont je suis saisi sont les suivantes :

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle appliqué le bon critère pour un rejet sommaire?

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur dans son interprétation du RPC et de l’Accord?

Analyse

Question en litige no 1 : La division générale a-t-elle appliqué le bon critère pour un rejet sommaire?

[13] Je suis convaincu que la division générale a eu recours au mécanisme approprié pour statuer sur l’appel de l’appelant. Au paragraphe 3 de sa décision, la division générale a invoqué l’article 53(1) de la LMEDS en énonçant correctement la disposition législative qui lui permet de rejeter de façon sommaire un appel qui n’a aucune chance raisonnable de succès. Je reconnais cependant que le simple fait de citer la loi ne suffit pas si la loi n’est pas aussi appliquée correctement aux faits.

[14] La décision de rejeter un appel de façon sommaire repose sur un critère préliminaire. Il ne convient pas d’examiner l’affaire sur le fond en l’absence des parties, puis de conclure que l’appel ne peut pas réussir. Dans l’arrêt Fancy c CanadaNote de bas de page 1, la Cour d’appel fédérale a établi qu’une chance raisonnable de succès est comparable à une cause défendable en droit. La Cour s’est également penchée sur la question du rejet sommaire dans le contexte de son propre cadre législatif, et a conclu que le seuil relatif au rejet sommaire est élevéNote de bas de page 2. Le décideur doit déterminer s’il est évident et manifeste sur la foi du dossier que l’appel est voué à l’échec. Il ne s’agit pas de déterminer si le décideur doit rejeter l’appel après un examen des faits, de la jurisprudence et des arguments des parties. La question est plutôt de savoir si l’appel est voué à l’échec indépendamment de la preuve et des arguments qui pourraient être avancés durant l’audience.

[15] En l’espèce, selon le dossier, l’appelant reçoit une pension au titre du SASG, mais il n’a jamais versé de cotisation valide au RPC. La division générale a employé à juste titre un critère rigoureux et a estimé que l’appel n’avait [traduction] « pas de chance raisonnable de succès » parce que l’appelant n’avait jamais été assujetti à la législation du Canada au sens du RPC et de l’Accord. Pour les raisons que je m’apprête à expliquer, il était évident et manifeste sur la foi du dossier que les arguments de l’appelant étaient voués à l’échec.

Question en litige no 2 : La division générale a-t-elle commis une erreur dans son interprétation du RPC et de l’Accord?

[16] J’ai examiné la décision de la division générale et j’estime qu’elle ne contient aucune erreur qui commanderait une intervention.

[17] L’article 44(1)(a) du RPC prévoit qu’une pension de retraite doit être payée à un cotisant qui a atteint l’âge de 60 ans. L’appelant admet n’avoir jamais été un cotisant au Régime de pensions du Canada. Aux termes des articles 2 et 49, la période cotisable s’étend tout au plus du 18e anniversaire du cotisant à son 70e anniversaire. L’appelant avait 78 ans lorsqu’il a travaillé comme gardien d’enfants et qu’il a tenté de verser des cotisations au RPC en tant que travailleur autonome; ses cotisations lui ont été dûment remboursées.

[18] Malgré cela, l’appelant fait valoir que l’Accord permet de faire compter les cotisations qu’il a versées au SASG pendant 42 ans pour une pension de retraite du RPC en plus de la pension qu’il reçoit vraisemblablement déjà des Philippines. Il ne me semble pas que cette conclusion soit juste et, de fait, cette pratique est interdite par l’article X de l’Accord, qui prévoit que :

Nonobstant toute autre disposition du présent Accord, si la durée totale des périodes admissibles accumulées par une personne aux termes de la législation d’une Partie est inférieure à une année, l’institution compétente de ladite Partie n’est pas tenue, aux termes du présent Accord, d’accorder des prestations à ladite personne au titre desdites périodes.

[19] Je remarque que l’appelant n’a pas mentionné l’article X dans ses observations. Le terme « nonobstant » indique qu’il annule toutes les autres clauses de l’Accord qui pourraient avantager l’appelant. Étant donné que l’appelant a accumulé moins d’un an de périodes admissibles au titre du RPC (en fait, il n’en a accumulé aucune), le ministre, en tant qu’« institution compétente » canadienne, n’est aucunement tenu de lui accorder une pension de retraite. Selon moi, la division générale s’est correctement fondée sur cette clause pour rejeter sommairement l’appel de l’appelant.

[20] Il est possible que l’appelant estime que cette clause est injuste, mais la division d’appel, tout comme la division générale, doit se conformer au libellé de la loi. Nous ne pouvons exercer que les pouvoirs qui nous ont été confiés par nos lois habilitantes et nous n’avons pas le pouvoir discrétionnaire d’offrir de réparation pour des motifs humanitaires. Notamment, l’arrêt Canada c TuckerNote de bas de page 3 a conclu que les tribunaux administratifs ne sont pas des cours de justice, mais des décideurs établis par la loi et qu’ils n’ont donc pas le pouvoir d’accorder toute forme de réparation équitable.

Conclusion

[21] L’appelant n’a pas démontré son admissibilité à une pension de retraite du RPC ni n’a démontré la façon dont la division générale avait incorrectement appliqué la loi.

[22] L’appel est donc rejeté.

Mode d’instruction :

Représentants :

Sur la foi du dossier

O. M., non représenté

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