Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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Contenu de la décision

Décision

[1] La requérante et J. B. ne vivaient pas en union de fait au moment où il est décédé. Elle n’a pas droit à la pension de survivant au titre du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le mariage de la requérante et de J. B. a eu lieu en avril 1966. Le couple s’est séparé en juin 1990 et a divorcé en septembre 1994. La requérante affirme qu’elle et J. B. étaient dans une union de fait de 2010 jusqu’à son décès en décembre 2015. En février 2016, la requérante a demandé la pension de survivant du RPC. Le ministre a rejeté sa demande une première fois, puis une autre fois après révision. La requérante a porté la décision en appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[3] En mars 2019, la division générale a conclu que la requérante avait abandonné son appel. La requérante a fait appel à la division d’appel. En juillet 2019, la division d’appel a accueilli l’appel et renvoyé l’affaire à la division générale pour qu’une audience sur le fond se déroule en personne.

Question en litige

[4] Je dois décider si la requérante et J. B. vivaient en union de fait au moment où il est décédé.

Analyse

[5] La requérante doit établir qu’il est plus probable qu’improbable (qu’il y a plus de chances) qu’elle vivait avec J. B. dans une union de fait au moment de son décès et que les deux avaient ainsi habité ensemble pendant au moins un an.

La position de la requérante

[6] Même après leur divorce, la requérante et J. B. ont continué de s’aimer et passaient toutes les fins de semaine ensemble. Comme les deux étaient catholiques, leur mariage était éternel et le couple était [traduction] « toujours marié ». Elle s’est occupée de J. B. quand il est tombé malade.

La position du ministre

[7] Même si la requérante et J. B. étaient toujours en bons termes après leur divorce, le couple ne vivait pas en union de fait. Chaque personne vivait dans une résidence séparée jusqu’à ce que J. B. soit admis à l’hôpital en octobre 2012. Par la suite, il a vécu à l’hôpital ou dans des foyers de soins infirmiers, et la requérante vivait ailleurs. Le ministre reconnaît que la requérante s’est occupée par procuration des biens et des soins personnels de J. B. Toutefois, cela n’établit pas une union de fait.

Principes juridiques

[8] La Cour fédérale a déclaré que les facteurs suivants dénotent une relation de faitNote de bas de page 1 :

  1. 1) le partage d’un toit, notamment le fait que les parties vivaient sous le même toit ou partageaient le même lit ou le fait que quelqu’un d’autre habitait chez elles;
  2. 2) les rapports sexuels et personnels, notamment le fait que les parties avaient des relations sexuelles, étaient fidèles l’une à l’autre, communiquaient bien entre elles sur le plan personnel, prenaient leurs repas ensemble, s’entraidaient face aux problèmes ou à la maladie ou s’offraient des cadeaux;
  3. 3) les services, notamment le rôle des parties dans la préparation des repas, le lavage, les courses, l’entretien du foyer et d’autres services ménagers;
  4. 4) les activités sociales, notamment le fait que les parties participaient ensemble ou séparément aux activités du quartier ou de la collectivité et leurs rapports avec les membres de la famille de l’autre;
  5. 5) l’image sociétale, notamment l’attitude et le comportement de la collectivité envers chacune des parties, considérées en tant que couple;
  6. 6) le soutien, notamment les dispositions financières prises par les parties pour ce qui était de fournir les choses nécessaires à la vie et la propriété de biens;
  7. 7) l’attitude et le comportement des parties à l’égard des enfants.

[9] Je vais maintenant examiner chacun des facteurs mentionnés plus haut.

Le partage d’un toit

[10] La requérante a déclaré qu’après leur divorce en 1994, J. B. et elle vivaient dans des logements différents du même immeuble. Elle vivait avec leur fils dans un appartement subventionné par le gouvernement. J. B. vivait dans un appartement non subventionné. En 2002, les trois ont déménagé en Colombie-Britannique parce qu’on y trouvait de meilleurs programmes pour leur fils. Les trois vivaient ensemble dans le même appartement.

[11] En 2004, ils sont revenus à Toronto. Son fils et elle ont emménagé dans un appartement subventionné au centre-ville de Toronto. J. B. a emménagé dans un appartement à Scarborough. J. B. vivait dans un autre logement, car il ne pouvait pas préparer ses papiers et ses cours parce que leur fils criait toujours.

[12] La situation a perduré jusqu’en octobre 2012, lorsque J. B. a été admis à l’hôpital. Par la suite, la requérante allait le voir tous les jours et prenait des décisions au sujet des soins qu’il recevait. Il a d’abord été hospitalisé au Mount Sinai Hospital. Une semaine plus tard, il a été transféré au Toronto Western Hospital. En mai 2013, il a été transféré dans un foyer de soins infirmiers. En mai 2015, la requérante et J. B. ont redéménagé en Colombie. Il vivait dans un foyer de soins infirmiers, et elle vivait dans l’appartement de son frère. En novembre 2015, J. B. a été transféré à l’hôpital, où il est décédé en décembre 2015.

Les rapports sexuels et personnels

[13] En 2010, la requérante et J. B. ont commencé à se voir de plus en plus souvent et sont [traduction] « retombés en amour ». Ils avaient des relations sexuelles. Ni elle ni lui n’avaient de relation avec une autre personne. Ils n’ont pas emménagé dans le même appartement parce qu’elle aurait perdu son logement subventionné. De plus, J. B. ne pouvait pas travailler dans le même logement à cause de leur fils.

[14] La requérante et J. B. s’échangeaient des cadeaux à leurs anniversaires et à Noël. Il a invité un groupe musical à chanter à l’occasion de leur anniversaire. Elle a déclaré qu’elle et lui ont renouvelé leurs vœux de mariage à l’église en 2012. Le couple s’est échangé des bagues et a invité 50 personnes. Par contre, elle a déposé des photographies datant de leur mariage en avril 1966Note de bas de page 2, mais elle n’a déposé aucune photographie de la cérémonie de renouvellement des vœux de mariage. Elle a d’abord dit que J. B. avait perdu les photographies dans un accident en Colombie-Britannique, mais les deux n’étaient plus dans cette province depuis 2004. De plus, elle n’a déposé aucune lettre ni aucun autre document établissant le moment où le couple a renouvelé ses vœux de mariage. Même si j’accepte le fait que la requérante et J. B. ont renouvelé leurs vœux de mariage, je ne suis pas convaincu que cela se soit produit en 2012, ni à aucun moment après 2010.

Les services et les activités sociales

[15] Après 2010, la requérante et J. B. étaient toujours ensemble durant la fin de semaine. Les fins de semaine, les deux magasinaient et mangeaient ensemble. Le couple allait à l’église toutes les fins de semaine. Elle s’est arrangée pour qu’une personne s’occupe de leur fils et s’est rendue avec lui à des conférences à Montréal et en République dominicaine. Les deux assistaient à des fêtes et participaient à des activités religieuses ensemble. Ils voyageaient pendant une journée et durant la fin de semaine ensemble.

Le soutien et les dispositions financières

[16] Après leur divorce, la requérante et J. B. n’ont pas conclu d’arrangement financier précis parce qu’elle recevait des prestations gouvernementales et avait un logement subventionné. La requérante a déclaré : [traduction] « Parfois, il faisait des paiements pour notre fils, et d’autres fois, il n’en faisait pas. » La requérante et J. B. n’avaient pas de biens communs. Ni l’une ni l’autre n’avait de testament ni d’assurance-vie. En novembre 2011, J. B. a donné une procuration à la requérante pour qu’elle s’occupe à la fois de ses biens et de ses soins personnelsNote de bas de page 3.

L’attitude et le comportement à l’égard des enfants

[17] La requérante a lu un rapport médical rédigé par le médecin de famille de son fils. Le médecin a déclaré que leur fils avait reçu un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme, qu’il dépendait entièrement de la requérante pour ses activités quotidiennes et qu’il était incapable de prendre des décisions.

Mes constatations

[18] La mesure dans laquelle les différents facteurs d’une union de fait doivent être pris en compte varie selon les circonstances de chaque affaireNote de bas de page 4. Je dois garder à l’esprit la nature infiniment variable du mariage dans notre société et évaluer les circonstances particulières pour vérifier si la requérante et J. B. avaient une relation semblable au mariageNote de bas de page 5.

[19] Même si une union de fait implique habituellement une résidence commune, chaque affaire doit être traitée en fonction des faits qui lui sont propresNote de bas de page 6.

[20] Dans la présente affaire, le défaut de maintenir une résidence commune est déterminant. La requérante a décidé de rester dans une autre résidence que celle de J. B. après 2010, moment où, selon ses dires, leur union de fait a commencé. Cette décision a peut-être été motivée par la crainte de perdre le bénéfice du logement subventionné, mais c’est le choix qu’elle a fait. La requérante et J. B. partageaient les dépenses seulement quand ils étaient ensemble la fin de semaine.

[21] La requérante a reconnu dans son témoignage de vive voix que dans ses demandes de prestations de retraite du RPC, de pension de la Sécurité de la vieillesse et de Supplément de revenu garanti, elle a déclaré que son état matrimonial était [traduction] « divorcée » et [traduction] « célibataire », plutôt que « vivant en union de faitNote de bas de page 7 ». Elle ne devrait pas avoir le droit de dire au gouvernement qu’elle ne vivait pas en union de fait dans le but d’obtenir des prestations et déclarer plus tard qu’elle vivait en union de fait dans le but d’obtenir la pension de survivant du RPC.

[22] Je reconnais que la requérante et J. B. ont continué d’entretenir une relation étroite, mais une relation de fin de semaine n’est pas une union de fait. Après octobre 2012, la requérante a assumé la responsabilité principale de la prise de décisions concernant les soins de J. B. Elle lui rendait visite tous les jours et elle l’a ramené en Colombie en mai 2015. Ces gestes sont louables, mais ils n’établissent pas une union de fait.

[23] La requérante n’a pas réussi à établir qu’il y a plus de chances que J. B. et elle vivaient en union de fait au moment où il est décédé.

Conclusion

[24] La requérante n’a pas droit à la pension de survivant du RPC.

[25] L’appel est rejeté.

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