Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : B. B. c Ministre de l’Emploi et du Développement social et D. B., 2020 TSS 802

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-775

ENTRE :

B. B.

Demandeur

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Défendeur

et

D. B.

Mise en cause


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


Décision relative à une demande de
permission d’en appeler rendue par :
Neil Nawaz
Date de la décision : Le 22 septembre 2020

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Motifs et décision

Décision

[1] J’ai décidé de ne pas accorder au demandeur la permission d’en appeler parce que je ne pense pas qu’il ait une cause défendable.

Contexte

[2] Le demandeur et la mise en cause se sont mariés en 1988 et se sont séparés en 2017. En août 2018, la mise en cause a demandé le partage de leurs crédits du Régime de pensions du Canada (RPC)Note de bas page 1. Le ministre a approuvé le partage des crédits, ce qui a entraîné une diminution du montant mensuel de la pension de retraite du RPC du requérant. La mise en cause avait 55 ans à l’époque et ne recevait pas encore une pension du RPC.

[3] Le demandeur a demandé au ministre de retarder le partage des crédits, et la réduction de sa pension, jusqu’à ce que la mise en cause soit admissible au versement de sa pension de retraite du RPC. Le ministre a rejeté cette demande.

[4] Le demandeur a porté le rejet du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Il a fait valoir qu’il ne devrait y avoir aucune diminution de sa pension de retraite sans que la mise en cause constate une augmentation correspondante de ses prestations. Puisque la mise en cause ne toucherait pas une pension de retraite avant plusieurs années, le cas échéant, le demandeur était d’avis que le gouvernement tirait injustement profit du partage des crédits. La mise en cause a exprimé son appui à la position du demandeur.

[5] La division générale a tenu une audience par téléconférence et, dans une décision datée du 25 juin 2020, a rejeté l’appel. Elle a jugé que la loi ne fournit aucun moyen de retarder le partage des crédits une fois qu’une demande est faite.

[6] Le 11 septembre 2020, le demandeur a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal. Il a fait les observations suivantes :

  • La division générale a conclu à tort qu’il n’existait pas d’entente entre les conjoints pour la renonciation au partage des crédits;
  • La division générale a conclu à tort qu’il était impossible de retarder un partage des crédits selon la loi;
  • La division générale a ignoré le fait que la mise en cause était d’accord avec sa demande pour retarder le partage des crédits;
  • La division générale n’a pas tenu compte du fait qu’il était inéquitable de diminuer sa pension sans accorder à la mise en cause l’avantage correspondant;
  • La division générale a rejeté son appel sans faire preuve d’équité ou de compassion.

Question en litige

[7] Il n’y a que trois moyens d’appel devant la division d’appel. Une demanderesse ou un demandeur doit démontrer que la division générale a agi de manière inéquitable, qu’elle a mal interprété le droit ou qu’elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas page 2.

[8] Il ne peut être interjeté appel à la division d’appel que si la permission d’en appeler est accordéeNote de bas page 3. À ce stade, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas page 4. Il s’agit d’un critère assez facile à satisfaire, et cela signifie que la partie demanderesse doit présenter au moins une cause défendableNote de bas page 5.

[9] Je dois décider si le demandeur a une cause défendable.

Analyse

[10] Pour qu’une partie requérante puisse avoir gain de cause à la division d’appel, elle doit faire plus que simplement contester la décision de la division générale. Une partie requérante doit également soulever des erreurs précises commises par la division générale au moment de rendre sa décision et expliquer comment ces erreurs, le cas échéant, relèvent d’au moins un des trois moyens d’appel prévus par la loi.

[11] Pour les raisons ci-dessous, j’ai estimé qu’aucune des raisons d’appel du demandeur ne soulève une cause défendable.

Il n’existe aucune cause défendable selon laquelle la division générale a ignoré une entente entre conjoints

[12] Le demandeur laisse entendre que la division générale a conclu à tort que les parties n’avaient pas renoncé aux dispositions relatives au partage des crédits. Je constate que cet argument est sans fondement. En effet, le demandeur a joint à sa demande de permission d’en appeler une partie d’une lettre de l’avocate de la mise en cause pour le divorce refusant précisément de renoncer à son droit à un partage des créditsNote de bas page 6. La lettre souligne également que, même s’il existait un argument en faveur d’une telle renonciation, la Loi sur le droit de la famille de l’Ontario ne permettrait pas cela. À mon avis, ceci traduit une compréhension exacte de l’article 55.2 du Régime de pensions du Canada.

Il n’existe aucune cause défendable selon laquelle la division générale a erré en droit en ne trouvant aucun moyen de retarder le partage des crédits

[13] La division générale a rejeté l’appel du demandeur parce que [traduction] « le partage des crédits est obligatoire et permanent dans la plupart des circonstances une fois que le ministre reçoit une demande et la valide à l’aide des documents prescrits ». À partir de cette affirmation, je ne vois aucune cause défendable selon laquelle la division générale a mal compris ou mal appliqué la loi. L’article 55.1 du Régime de pensions du Canada prévoit qu’« il doit y avoir partage des crédits. . .  à la suite de l’approbation par le ministre d’une demande faite par l’un ou l’autre des époux ou pour son compte » s’ils ont vécu séparément pendant une période d’au moins un an. Dans le présent cas, il ne faisait aucun doute que les parties s’étaient séparées ou que le ministre avait approuvé la demande de la mise en cause. L’emploi du terme « doit » donne à croire que le ministre n’a aucun pouvoir discrétionnaire pour retarder ou annuler le partage, même si le Régime de pensions du Canada prévoit une exception lorsque le ministre est convaincu que le montant des « deux prestations » diminueraitNote de bas page 7. Aucune circonstance de ce genre n’est présente en l’espèce et, même si c’était le cas, il reviendrait au ministre, selon son bon vouloir, de décider d’annuler ou non le partage des crédits.

Il n’existe aucune cause défendable selon laquelle la division générale a ignoré la position de la mise en cause

[14] Je ne vois aucune cause défendable selon laquelle la division générale a ignoré les dires de la mise en cause. Dans sa décision, la division générale a reconnu l’appui de la mise en cause à l’endroit du demandeur :

[traduction]

« La mise en cause a déclaré qu’elle n’était pas d’accord avec le fait que le gouvernement réduise la pension [du requérant]. Elle pensait qu’il était injuste pour le gouvernement de profiter de son mariage avec le [requérant]. Elle était prête à retirer sa demande pour le PGNAP et à présenter une demande plus tard. Elle a affirmé que ma décision ne devrait pas influer sur sa pension du RPC lorsqu’elle prendra sa retraiteNote de bas page 8 ».

Cependant, la division générale a finalement décidé que l’appui de la mise en cause à l’endroit du demandeur n’était pas pertinent en l’absence d’un mécanisme juridique pour le report du partage des crédits. À mon avis, il relevait de la compétence de la division générale de conclure que la loi avait préséance sur toutes autres considérations.

Il n’existe aucune cause défendable selon laquelle la division générale aurait pu retarder le partage des crédits pour des motifs humanitaires

[15] Je ne vois aucune cause défendable selon laquelle la division générale a agi de façon injuste en rejetant l’appel du demandeur. La division générale n’a pas le pouvoir de prendre en considération des situations particulières ou de fonder une décision sur des motifs de compassion d’ordre humanitaire. Bien que la division générale n’ait peut-être pas rendu la décision privilégiée par le demandeur, elle ne pouvait pas ignorer la règle de droit et décréter tout simplement ce qui, selon elle, était un résultat équitable. Ce type de pouvoir, appelé « équité », est traditionnellement réservé à l’usage des tribunaux, et même eux y ont recours uniquement dans les circonstances les plus exceptionnelles.

Conclusion

[16] Le demandeur n’a soulevé aucun moyen d’appel qui aurait une chance raisonnable de succès en appel. Ainsi, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

B. B., non représenté

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