Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : WJ c Ministre de l’Emploi et du Développement social et AA, 2021 TSS 235

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-493

ENTRE :

W. J.

Appelant (requérant)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre

et

A. A.

Mise en cause


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Pierre Vanderhout
Date de l’audience par vidéoconférence : Le 21 avril 2021
Date de la décision : Le 29 avril 2021

Sur cette page

Décision

[1] La mise en cause a droit à un partage des crédits du Régime de pensions du Canada en raison de sa cohabitation avec le requérant entre septembre 1976 et novembre 1986. Toutefois, le partage des crédits ne s’applique qu’à la période allant de janvier 1976 à décembre 1985.

Aperçu

[2] W. J. est le requérant et A. A. est la mise en cause dans cet appel. Ils ont commencé à cohabiter en septembre 1976. Ils ont signé un contrat de mariage le 2 août 1977Note de bas de page 1 et se sont mariés le 6 août 1977. Ils ont cessé de cohabiter en novembre 1986. Une ordonnance judiciaire relative à leur séparation a été rendue le 20 novembre 1986Note de bas de page 2 . Un jugement de divorce a été rendu le 21 septembre 1989, mais il ne traite pas des questions liées aux biens du mariageNote de bas de page 3 . L’ordonnance de novembre 1986 traite de ces questions.

[3] Le 5 juin 2017, la mise en cause a demandé un partage des crédits du Régime de pensions du Canada (aussi appelé un partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension). Elle voulait que les crédits soient partagés pendant sa période de cohabitation avec le requérantNote de bas de page 4 . Si la demande était accordée, les crédits accumulés par la mise en cause et le requérant pendant leur cohabitation seraient partagés également entre eux. Un partage serait favorable à la mise en cause, mais pas au requérant, puisque ce dernier a accumulé plus de crédits du Régime de pensions du Canada que la requérante pendant la période pertinente. Le ministre a accueilli la demande initialement et après révision. Le requérant a porté la décision de révision en appel au Tribunal.

[4] Le ministre dit qu’il doit effectuer un partage des crédits du Régime de pensions du Canada lorsqu’il reçoit une copie d’un jugement de divorce et certains autres renseignementsNote de bas de page 5 . Il affirme qu’il n’y a que deux exceptions à cette règle, mais qu’elles ne s’appliquent pas à la situation du requérantNote de bas de page 6 . Le requérant n’est pas d’accord avec l’interprétation que fait le ministre du Régime de pensions du Canada et soulève plusieurs autres arguments en réponse. Le ministre n’a pas assisté à l’audience. La mise en cause a assisté à l’audience, mais n’a pas témoigné. Le requérant a assisté à l’audience et a témoigné.

Questions en litige

[5] Le ministre avait-il raison d’accueillir la demande de partage des crédits de la mise en cause?

[6] Dans l’affirmative, le requérant a-t-il soulevé des motifs suffisants pour empêcher le partage des crédits du Régime de pensions du Canada?

Analyse

[7] Les faits dans cette affaire ne sont pas vraiment contestés. Le requérant accepte la conclusion du ministre selon laquelle il a cohabité avec la mise en cause de septembre 1976 à novembre 1986. En fait, cette conclusion était fondée en grande partie sur la preuve du requérant, car les documents de la mise en cause ne reflétaient pas fidèlement la période de cohabitation. Les dates des ordonnances judiciaires et du contrat de mariage de 1977 ne sont pas non plus contestées. Le véritable argument du requérant porte sur la façon dont la loi s’applique aux faits.

Le ministre avait-il raison d’accueillir la demande de partage de crédits de la mise en cause?

[8] Pour les raisons énoncées dans les paragraphes suivants, je conclus que le ministre avait raison d’autoriser le partage des crédits. Bien que le ministre ait établi que la période de cohabitation aux fins du partage des crédits s’échelonne de septembre 1976 à novembre 1986, je ne suis pas certain qu’il ait utilisé les bons mois lorsqu’il a effectué le partage des crédits.

[9] Le Régime de pensions du Canada régit les partages des crédits. Cette loi prévoit que le ministre doit effectuer un partage des crédits lorsqu’il reçoit une copie d’un jugement de divorce et les « renseignements prescritsNote de bas de page 7  ». Bien que la mise en cause n’ait pas initialement fourni ces renseignements, elle l’a finalement faitNote de bas de page 8 .

[10] Le requérant affirme que la loi n’est entrée en vigueur que le 1er janvier 1987 et qu’elle ne devrait donc pas s’appliquer à une séparation survenue en novembre 1986. Toutefois, le partage obligatoire des crédits s’applique aux jugements rendus après le 1er janvier 1987 accordant un divorce ou la « nullité de mariageNote de bas de page 9  ». Les parties ont divorcé en 1989. Le requérant laisse également entendre que l’ordonnance de novembre 1986 était une « annulation » parce qu’il ne vivait plus avec la mise en cause. Je n’accepte pas cette interprétation. On entend par « nullité de mariage » l’invalidation d’un mariage qui était nul dès le départNote de bas de page 10 . Il s’agit d’une situation rare qui ne se produit habituellement que lorsqu’il y a absence de consentement ou de capacité de se marier au départ. Cette conclusion ne se trouve pas dans l’ordonnance de novembre 1986 ni dans le jugement de divorce de septembre 1989.

[11] Le requérant soutient également qu’un délai de prescription de 36 mois s’applique aux demandes de partage des crédits. Il dit que cela empêche la mise en cause de présenter sa demande, parce que celle-ci survient 28 ans après leur divorce. Bien qu’un tel délai de prescription existe, il ne s’applique qu’aux jugements accordant un divorce ou la « nullité de mariage » rendus avant le 1er janvier 1987Note de bas de page 11 . Les parties n’ont divorcé qu’en 1989. Aucun jugement en nullité de mariage n’a jamais été rendu. Par conséquent, le délai de prescription de 36 mois ne s’applique pas.

[12] Le partage obligatoire des crédits n’est généralement assujetti qu’aux exceptions prévues dans le Régime de pensions du Canada. Les exceptions qui peuvent s’appliquer sont le pouvoir discrétionnaire du ministre et un contrat conclu entre les conjointsNote de bas de page 12 . Je vais examiner ces deux exceptions.

L’exception du pouvoir discrétionnaire du ministre

[13] Le ministre peut refuser d’effectuer un partage des crédits si celui-ci diminue le montant des prestations payées aux deux personnesNote de bas de page 13 . Toutefois, dans la présente affaire, le partage des crédits entraîne une augmentation de la pension du Régime de pensions du Canada de la mise en cause. Le ministre a confirmé cela dans sa décision initialeNote de bas de page 14 , et personne ne laisse entendre que la pension du Régime de pensions du Canada de la mise en cause a diminué en raison du partage des crédits. Par conséquent, le ministre ne peut pas appliquer cette exception.

L’exception du contrat conclu entre les conjoints

[14] Deux contrats potentiels entre les conjoints pourraient avoir une incidence sur le partage des crédits : le contrat de mariage de 1977 et l’ordonnance de novembre 1986. Toutefois, j’examinerai le contrat de mariage de 1977 séparément, car je considère que l’exception du contrat conclu entre les conjoints ne s’applique potentiellement qu’à l’ordonnance de novembre 1986.

[15] L’ordonnance de novembre 1986 est fondée sur un accord conclu entre les parties à la suite de leur séparation plus tôt ce mois-làNote de bas de page 15 . Dans le cas des contrats écrits ou des ordonnances judiciaires rendues le 4 juin 1986 ou après cette date, le ministre peut effectuer un partage des crédits seulement si les quatre conditions suivantes sont réunies :

  1. a) le contrat contient une disposition qui fait expressément mention du Régime de pensions du Canada et exprime l’intention des conjoints de ne pas faire de partage des crédits;
  2. b) la disposition en question du contrat est expressément autorisée selon le droit provincial applicable au contrat;
  3. c) le contrat a été conclu avant que ne soit rendu un jugement de divorce ou un jugement en nullité de mariage;
  4. d) le contrat n’a pas été annulé aux termes d’une ordonnance judiciaireNote de bas de page 16 .

[16] L’ordonnance de novembre 1986 respecte les deux dernières conditions. Elle a précédé le jugement de divorce de septembre 1989 et je ne vois aucune preuve qu’une ordonnance judiciaire ultérieure l’ait invalidéNote de bas de page 17 . Toutefois, l’ordonnance de novembre 1986 ne respecte pas les deux premières conditions. Elle ne mentionne pas précisément le Régime de pensions du Canada. De plus, je ne vois aucune loi ontarienne qui autorise expressément un contrat visant à empêcher un partage des crédits du Régime de pensions du Canada. Les lois de l’Ontario s’appliquent dans la présente affaire puisque c’est dans cette province que le mariage a eu lieu et que l’ordonnance de novembre 1986 a été rendueNote de bas de page 18 . Par conséquent, l’exception du contrat conclu entre les conjoints ne s’applique pas à l’ordonnance de novembre 1986. Je vais maintenant examiner le contrat de mariage de 1977.

Le contrat de mariage de 1977

[17] Le contrat de mariage de 1977 est entré en vigueur bien avant le 4 juin 1986. Cela signifie que l’exception du contrat conclu entre les conjoints prévue dans le Régime de pensions du Canada ne s’applique pas à celui-ci. Le Régime de pensions du Canada n’empêche pas nécessairement le contrat de s’appliquer non plus.

[18] Le requérant a affirmé que le contrat de mariage de 1977 était dû à plusieurs raisons. Il a confirmé qu’il possédait une propriété, bien qu’elle était hypothéquée à l’époque. Il avait aussi établi un partenariat d’affaires. La mise en cause attendait un héritage important. Les deux parties avaient leurs propres comptes bancaires. Elles souhaitaient protéger ces actifs en cas de séparation ou de dissolution du mariageNote de bas de page 19 .

[19] Dans la décision Preece de 1983, la Commission d’appel des pensions a déclaré que les contrats de mariage (du moins ceux conclus avant le 4 juin 1986) pouvaient empêcher un ex‑conjoint d’obtenir un partage des crédits. La Commission a dit que les parties ne devaient pas être autorisées à avoir recours à une loi pour éviter le contrat qu’elles avaient concluNote de bas de page 20 . La décision Preece s’appuyait sur la jurisprudence de la Cour suprême du CanadaNote de bas de page 21 . Comme cette jurisprudence ne peut être ignorée, il semble que la décision Preece ait finalement conduit à des modifications au Régime de pensions du Canada.

[20] J’accepte que la décision Preece puisse soutenir la position du requérant, selon la teneur du contrat de mariage de 1977. Cependant, il existe une distinction importante entre les contrats dans l’affaire Preece et le contrat de mariage de 1977. Les contrats dans l’affaire Preece n’étaient pas des contrats de mariage conclus au début d’un mariage : il s’agissait plutôt d’accords de séparation, de procès-verbaux de règlement et de jugements de divorce. Ces contrats visaient spécifiquement à résoudre toutes les éventuelles revendications de propriété entre les conjoints. Ce n’était pas l’objectif du contrat de mariage de 1977. Ce dernier ne fait pas référence au Régime de pensions du Canada ni à un partage des crédits. Il ne fait parle pas non plus de la résolution de toutes les éventuelles revendications entre les parties. Il vise uniquement à protéger certains biens acquis avant le mariage.

[21] Le requérant m’invite à adopter une interprétation large du contrat de mariage de 1977. Il insiste en particulier sur les paragraphes 3 et 4 de ce contrat. Selon lui, ces paragraphes empêchent les parties de faire des revendications l’une contre l’autre en cas de séparation ou de dissolution du mariage. Cependant, le libellé de ces paragraphes ne concerne que le partenariat d’affaires du requérant (paragraphe 3) et leurs comptes bancaires personnels respectifs (paragraphe 4). Il serait déraisonnable que j’interprète ces dispositions comme s’appliquant à tous les biens potentiels du mariage.

[22] Je conclus que le contrat de mariage de 1977 ne peut empêcher le partage des crédits du Régime de pensions du Canada. Je vais maintenant examiner si le ministre a utilisé les bons mois lorsqu’il a effectué le partage des crédits.

Le ministre a-t-il utilisé les bons mois lorsqu’il a effectué le partage des crédits?

[23] Je suis d’accord qu’un partage des crédits doit être effectué à la lumière de la période de cohabitation des parties de septembre 1976 à novembre 1986. Toutefois, il n’est pas clair que le ministre a utilisé les bons mois au moment d’effectuer le partage des crédits.

[24] Selon le Régime de pensions du Canada et le Règlement sur le Régime de pensions du Canada, les partages des crédits ne s’appliquent qu’aux années civiles complètes. Dans la présente affaire, la période de cohabitation commence et se termine par des années civiles partielles. Le Règlement précise clairement que le partage des crédits commence au mois de janvier de l’année où la cohabitation a commencé. Toutefois, le partage des crédits se termine immédiatement avant l’année où la cohabitation a cesséNote de bas de page 22 . Par conséquent, le partage des crédits dans la présente affaire ne s’applique qu’à la période allant de janvier 1976 à décembre 1985.

[25] Je ne peux pas dire si le ministre a appliqué le partage des crédits à la période allant de janvier 1976 à décembre 1985. Les premières lettres du ministre au dossier du Tribunal dans lesquelles il accorde le partage des crédits n’énoncent pas de montants précis. Ces lettres précisent que la période de cohabitation s’échelonne de septembre 1976 à novembre 1986, mais pas les mois visés par le partage des créditsNote de bas de page 23 . La décision de révision, qui confirme la décision initiale du ministre, est également silencieuse sur les mois utilisés pour le calcul du partage des créditsNote de bas de page 24 .

[26] Le ministre doit revoir le partage des crédits pour s’assurer qu’il ne s’applique qu’à la période allant de janvier 1976 à décembre 1985. Ses observations laissent entendre que c’est la période de partage des crédits qu’il a utilisé, mais ses décisions ne sont pas claires sur ce pointNote de bas de page 25 . Je vais maintenant examiner d’autres motifs soulevés par le requérant que l’analyse ci-dessus n’aborde pas.

Le requérant a-t-il soulevé des motifs suffisants pour empêcher le partage des crédits du Régime de pensions du Canada?

[27] Le requérant soutient que la Loi de 2002 sur la prescription des actions de l’Ontario lie la mise en cause. Il affirme que cette loi prévoit un délai de prescription maximal de 15 ans pour faire une « réclamation » (revendication). Au sens de cette loi, une revendication vise à « obtenir réparation de préjudices, de pertes ou de dommages survenus par suite d’un acte ou d’une omissionNote de bas de page 26  ». Quoiqu’il en soit, cette loi est provinciale. Le Régime de pensions du Canada est une loi fédérale. Les lois fédérales ont préséance sur les lois provinciales et ne peuvent être modifiées par ces dernières. Le Régime de pensions du Canada exige que le ministre procède à un partage des crédits lorsqu’il reçoit une copie d’un jugement de divorce rendu le 1er janvier 1987 ou après cette date. Les ex-conjoints peuvent demander un partage des crédits à tout moment par la suite. Il n’y a pas de limite de tempsNote de bas de page 27 .

[28] Le requérant fait également valoir que le Régime de pensions du Canada prévoit des pénalités pour les déclarations fausses ou trompeuses. Il affirme que les dates de cohabitation fournies par la mise en cause dans sa demande étaient incorrectes. Il les a déjà qualifiées de frauduleusesNote de bas de page 28 . Je reconnais que le Régime de pensions du Canada prévoit une pénalité pour les déclarations fausses ou trompeusesNote de bas de page 29 . Toutefois, le Tribunal est une entité juridique et il a seulement les pouvoirs que lui confère sa loi constitutive. Il n’a pas le pouvoir d’imposer des pénalités pour des déclarations fausses ou trompeuses. Ce pouvoir appartient au ministre. De plus, le ministre n’a imposé aucune pénalité à la mise en cause. Le Tribunal ne peut pas aborder des questions à moins qu’elles ne figurent dans la décision de révision. Pour ces raisons, le Tribunal ne peut pas se prononcer sur la question de savoir si la mise en cause a fait des déclarations fausses ou trompeuses dans sa demande.

Les termes employés dans l’ordonnance de novembre 1986

[29] Le requérant renvoie au paragraphe 7 de l’ordonnance de novembre 1986. On peut y lire que [traduction] «  les parties renoncent à tout droit d’obtenir une pension alimentaire de l’autre partie, et à revendiquer une part de la succession de l’autre partie, en particulier en ce qui concerne l’article 6 de la Loi sur le droit de la familleNote de bas de page 30  ». On retrouve des termes semblables au paragraphe 3 de l’ordonnance de novembre 1986. Ce paragraphe établit la répartition de divers actifs, qu’il qualifie de [traduction] « partage complet et définitif des biens familiaux nets ». On mentionne également au paragraphe 3 que [traduction] « chaque partie a le droit de conserver en sa possession tous les biens qu’elle détient actuellement, libre de toute revendication de la part de l’autre partie ». La liste des biens attribués au requérant comprend [traduction] « sa pension actuelle », qu’il conservera « libre de toute revendication de la part de la [mise en cause] ».

[30] À première vue, l’ordonnance de novembre 1986 semble pouvoir protéger le requérant contre un partage des crédits. Cette ordonnance vise de façon générale à éviter toute autre revendication entre les parties. Plus spécifiquement, elle vise à éviter toute autre revendication à l’égard de la « pension actuelle » du requérant. Cela pourrait bien avoir été une tentative de décrire les cotisations du requérant au RPC jusqu’à ce moment-là. Cependant, tel que noté précédemment, le Régime de pensions du Canada ne permet pas cette interprétation. Dans la présente affaire, le ministre doit effectuer le partage des crédits à moins que l’ordonnance judiciaire ne fasse spécifiquement référence au Régime de pensions du Canada et que les lois de l’Ontario permettent d’éviter le partage des crédits en vertu de cette ordonnance judiciaire. Aucune de ces conditions ne s’applique dans le cas présent. L’ordonnance de novembre 1986 ne mentionne pas spécifiquement le Régime de pensions du Canada et il est impossible pour le requérant dans la position où il se trouve d’éviter le partage des crédits en OntarioNote de bas de page 31 .

[31] Plusieurs des observations du requérant portent sur l’iniquité apparente de la loi. Cela est tout à fait compréhensible. Le requérante et la mise en cause ont conclu un accord qui a mené à l’ordonnance de novembre 1986. Il semble qu’ils aient tous deux obtenu des conseils juridiques et que la Cour de district de l’Ontario ait mis en œuvre leur accord. Le requérant s’attendait à ce que toutes ses obligations envers la mise en cause aient été satisfaites. Il avait la garde de leurs deux jeunes filles et il a décrit les nombreuses difficultés qu’il a rencontrées pour obtenir l’aide financière dont il avait besoin de la part de la mise en cause au fil des ans. Il dit avoir dépensé plus d’un million de dollars pour élever et éduquer leurs enfants, soit plus de 95 % du coût total. Il affirme avoir consacré la majeure partie de sa vie adulte à ses enfants et à sa seconde épouse (à laquelle il est maintenant marié depuis environ 30 ans)Note de bas de page 32 . Aucun élément de preuve ne contredit ses affirmations.

[32] Le requérant m’a exhorté à rendre une décision fondée sur des motifs moraux. Cependant, le Tribunal doit appliquer la loi : il ne peut pas offrir de réparations morales ni invoquer les principes d’équité. Je note que le requérant est loin d’être la première personne à faire face à un partage inattendu des crédits du Régime de pensions du Canada longtemps après la fin d’une relation. En 1998, la Cour d’appel fédérale a commenté les dispositions du Régime de pensions du Canada sur les partages des crédits et leur apparente sévérité :

[Traduction]

« Je peux comprendre la colère et la frustration ressenties par [le requérant], qui avait passé un contrat avec [la mise en cause]t afin de régler définitivement les conséquences de leur rupture. Il n’est pas le premier ni le dernier à être contrarié par la rigueur [du Régime de pensions du Canada]. Cependant, il est clair que l’intention du législateur était d’instaurer un régime obligatoire de partage des droits afin de protéger les conjoints ou anciens conjoints après la rupture de leur mariage ou de leur union de fait […] Note de bas de page 33  »

[33] Les termes employés par la Cour d’appel fédérale en 1998 semblent tout aussi pertinents aujourd’hui. Malgré le caractère définitif apparent de l’ordonnance de novembre 1986, le partage des crédits ne peut être évité.

Conclusion

[34] L’appel est accueilli en partie. Le ministre doit veiller à ce que le partage des crédits ne s’applique qu’à la période allant de janvier 1976 à décembre 1985.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.