Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : BB c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 482

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : B. B. (requérante)
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentant : Rebekah Ferriss

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 21 juillet 2021 (GP-21-1181)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 15 septembre 2021
Numéro de dossier : AD-21-253

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale n’a pas fait d’erreurs lorsqu’elle a décidé que la requérante (i) ne pouvait pas annuler sa pension de retraite en faveur d’une pension d’invalidité du Régime des pensions du Canada (RPC) et (ii) qu’elle était inadmissible à la prestation d’invalidité après-retraite.

Aperçu

[2] La requérante est une ancienne caissière de 63 ans. Elle a commencé à recevoir une pension de retraite du RPC en mai 2018.

[3] En décembre 2020, la requérante a demandé une pension d’invalidité du RPC. Le ministre a refusé sa demande parce que la requérante recevait déjà une pension de retraite. En même temps, le ministre a décidé que la requérante n’était pas admissible à la prestation d’invalidité après-retraite parce qu’elle n’avait pas suffisamment cotisé au RPC.

[4] La requérante a fait appel de la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Le 21 juillet 2021, la division générale a sommairement rejeté l’appel de la requérante parce qu’on n’était pas convaincu que l’appel avait une chance raisonnable de succès.

[5] La requérante fait maintenant appel du rejet sommaire devant la division d’appel du TribunalFootnote 1. Dans ses arguments écrits, elle a fait les remarques suivantes :

  • Lorsqu’elle a demandé une pension de retraite, elle ne savait pas que cela affecterait son droit de recevoir une pension d’invalidité;
  • Il se trouve qu’elle a seulement eu une invalidité grave après avoir commencé à recevoir sa pension de retraite;
  • À ce moment-là, cela faisait plusieurs années qu’elle ne travaillait plus, donc elle ne pouvait pas cotiser au RPC;
  • Elle n’avait pas l’intention de présenter en retard sa demande de pension d’invalidité. Elle estime aussi que la compassion devrait avoir un rôle à jouer dans la décision d’accorder des prestations.

[6] Je ne vois pas la nécessité de procéder à une audience orale. Les questions, les faits pertinents et la loi applicable sont clairs. Cette décision est fondée sur ma révision des documents du dossier — les arguments de la requérante, ainsi que l’information dont disposait la division générale.

Questions en litige

[7] Il existe quatre motifs d’appel devant la division d’appel. La partie requérante doit démontrer que la division générale a agi de l’une ou l’autre des façons suivantes :

  • n’a pas procédé de manière équitable;
  • a commis une erreur de compétence;
  • a commis une erreur de droit;
  • a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteFootnote 2.

[8] Voici les questions en litige telles que je les conçois :

Question 1 : La division générale a-t-elle appliqué le bon critère pour un rejet sommaire?

Question 2 : Est-ce que les motifs d’appel de la requérante sont fondés?

Analyse

La division générale a appliqué le bon critère pour un rejet sommaire

[9] À mon avis, la division générale a employé le critère juridique approprié en rejetant l’appel de la requérante. Au huitième paragraphe de sa décision, la division générale a eu raison d’affirmer qu’elle peut rejeter sommairement un appel qui n’a aucune chance raisonnable de succèsFootnote 3. J’estime que la division générale comprenait le critère juridique et l’a bien appliqué aux faits.

[10] Le critère pour les rejets sommaires est exigeantFootnote 4. Il ne suffit pas de considérer le fondement d’une affaire en l’absence des parties et ensuite décider que l’appel ne peut pas être accueilli. La personne qui prend la décision doit décider s’il est clair et évident sur la foi du dossier que l’appel est voué à l’échecFootnote 5. Il ne s’agit pas pour la personne qui prend la décision de décider si elle rejette l’appel après avoir considéré tous les faits, la jurisprudence, et les arguments des parties. Il s’agit plutôt de décider si l’appel est voué à l’échec, en dépit des preuves ou arguments qui pourraient être présentés lors de l’audience.

[11] Dans ce cas-ci, l’appel de la requérante a été rejeté pour deux raisons :

  • Premièrement, la date d’invalidité de la requérante prévue par la loi était au plus tôt en septembre 2019, soit 15 mois avant la date de sa demande d’invalidité du RPC. C’est donc bien après novembre 2018, la date qui marque la fin du délai de six mois pour annuler sa pension de retraite en faveur d’une pension d’invalidité.
  • Deuxièmement, la requérante n’avait pas suffisamment cotisé au RPC pour être admissible à la prestation d’invalidité après-retraite. La partie requérante qui demande la prestation d’invalidité après-retraite et qui a accumulé plus de 25 années de gains et de cotisations valides doit avoir au moins trois années de cotisations au cours des six années civiles précédant sa demande. La requérante n’avait qu’une seule année.

[12] En prenant ces décisions, la division générale a bien appliqué un critère exigeant pour conclure que l’appel n’avait « aucune chance raisonnable de succès ». Je vais expliquer plus en détail qu’il était clair et évident sur la foi du dossier que les arguments de la requérante étaient voués à l’échec.

Les motifs d’appel de la requérante n’ont pas de fondement

[13] J’estime que la division générale n’a pas commis d’erreurs en rendant sa décision. La division générale a révisé le dossier et a conclu que la requérante, qui recevait déjà une pension de retraite du RPC, n’avait pas le droit de recevoir la pension d’invalidité du RPC et la prestation d’invalidité après-retraite. Je ne vois aucune raison d’intervenir dans son raisonnement.

La requérante n’avait aucun moyen d’annuler sa pension de retraite en faveur d’une pension d’invalidité

[14] D’après la loi, il est inutile de connaître le moment où une personne qui demande une pension d’invalidité du RPC est effectivement devenue invalide, si cette personne reçoit déjà depuis 15 mois (ou plus) une pension de retraite. Selon l’article 44(1)(b) du Régime de pensions du Canada, une personne qui demande une pension d’invalidité ne peut pas être en train de recevoir une pension de retraiteFootnote 6.

[15] Il existe une exception à cette disposition. L’article 66.1 du Régime de pensions du Canada permet au bénéficiaire d’annuler une prestation jusqu’à six mois après le début des versements. Si une personne n’annule pas sa pension de retraite après six mois, on ne peut l’annuler en faveur d’une pension d’invalidité que si la personne est réputée invalide avant le mois au cours duquel la pension de retraite est devenue payable. Mais on doit prendre en compte cette disposition en conjonction avec l’article 42(2)(b), qui énonce qu’une personne peut être réputée invalide au plus tôt 15 mois avant la date où le ministre reçoit la demande d’invalidité.

[16] Comme l’a noté à juste titre la division générale, cela signifie qu’il est en réalité impossible d’annuler une pension de retraite en faveur d’une pension d’invalidité lorsque la demande d’invalidité est présentée 15 mois (ou plus) après le début des versements de la pension de retraite.

[17] Dans ce cas-ci, la requérante aurait pu être réputée invalide au plus tôt en septembre 2019 — c’est-à-dire 15 mois avant d’envoyer sa demande d’invalidité du RPC. À ce moment-là, la requérante recevait sa pension de retraite depuis plus d’un an, donc il était impossible d’annuler sa pension de retraite dans l’espoir de la remplacer par une pension d’invalidité.

La requérante n’était pas couverte pour la prestation d’invalidité après-retraite

[18] La prestation d’invalidité après-retraite est une prestation relativement nouvelle qui a été conçue pour fournir une protection en cas d’invalidité aux personnes de moins de 65 ans qui reçoivent une pension de retraite du RPC. Afin de recevoir la prestation d’invalidité après-retraite, la personne qui en fait la demande doit établir une période minimale d’admissibilité (PMA) en démontrant qu’elle a versé des cotisations pertinentes au RPC au cours des six années civiles précédant la date de la demandeFootnote 7. Puisque la requérante avait 25 années de gains admissibles, elle devait démontrer qu’elle avait cotisé pendant trois des six années civiles qui précédaient immédiatement la date de sa demande de décembre 2020, c’est-à-dire 2014, 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019.

[19] La division générale a bien appliqué les dispositions législatives et la jurisprudence pertinenteFootnote 8 régissant la prestation d’invalidité après-retraite. Elle a décidé que la requérante n’avait pas établi une PMA. Je ne vois pas comment la division générale aurait pu commettre une erreur sur ce point : le registre de gains de la requérante montre clairement que sa dernière année de gains admissibles était en 2014, ce qui lui donne seulement une année sur six avant sa demandeFootnote 9.

La division générale et la division d’appel doivent respecter la loi

[20] La requérante soutient qu’elle ne connaissait pas les règles d’admissibilité du RPC et ne devrait pas être pénalisée parce qu’elle a déposé sa demande d’invalidité en « retard ».  

[21] Malheureusement, cet argument ne peut pas lui donner gain de cause.

[22] Je suis certain que, lorsqu’elle a accepté de recevoir sa pension de retraite anticipée du RPC, la requérante ne s’était pas rendu compte qu’elle nuisait à ses chances d’être admissible plus tard à la pension d’invalidité. Je crois aussi que si la requérante avait su à l’époque ce qu’elle sait aujourd’hui, elle aurait demandé une pension d’invalidité bien plus tôt. Cela dit, je ne vois pas de recours qui lui serait offert par la loi. La division générale n’avait pas le droit de considérer des circonstances atténuantes concernant la demande de la requérante, et moi non plus. On ne peut pas simplement ignorer les dispositions du Régime de pensions du Canada et donner à la requérante ce qu’elle veut, peu importe à quel point on sympathise avec elleFootnote 10.

Conclusion

[23] La requérante n’a pas démontré que la division générale a commis une erreur en décidant qu’elle était inadmissible à la pension d’invalidité du RPC et à la prestation d’invalidité après-retraite.

[24] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.