Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

Informations sur la décision

Résumé :

RPC – pension de survivant – meurtre au premier degré annule l’admissibilité à la pension – effet rétroactif de la législation sur les régimes de retraite

Après le décès de son époux, la requérante a demandé de multiples prestations, dont la pension de survivant du Régime de pensions du Canada (RPC). Le ministre a accordé la pension et les versements ont commencé en 2001. La requérante a reçu des prestations pendant cinq ans, jusqu’à ce qu’un tribunal la déclare coupable de meurtre au premier degré. La requérante a embauché une personne pour assassiner son mari. En 2006, le ministre a mis fin à la pension et a demandé à la requérante de rembourser l’argent qu’elle avait déjà reçu. En 2013, à la suite d’un appel, un tribunal l’a de nouveau condamnée pour meurtre. Elle n’était pas d’accord avec la décision du ministre de mettre fin à la pension de survivant. En 2015, le gouvernement a intégré une nouvelle règle dans la législation relative au RPC indiquant qu’un requérant ne peut pas recevoir une pension de survivant s’il a assassiné son conjoint.

En 2017, la requérante a fait appel à la division générale (DG) pour contester la décision du ministre sur la pension de survivant et les prestations de survivant de la Sécurité de la vieillesse (SV). Dans une décision connexe mais différente (dossier no GP-20-186), la DG a conclu que la demande portant sur les prestations de la SV avait été présentée à la DG trop tard et elle a rejeté l’appel. La requérante a porté la décision en appel à la division d’appel (DA). Dans la décision AD-20-625, la DA s’est dite d’accord avec le ministre et la requérante que la DG avait commis une erreur lorsqu’elle a ignoré le fait que la requérante voulait que le ministre examine son appel concernant la pension de survivant du RPC et qu’elle a omis d’en parler dans sa décision. La DA a renvoyé l’appel à la DG pour qu’une ou un autre membre tranche la question de la pension de survivant du RPC.

En 2020, le ministre a finalement rendu une « décision de révision » qui confirmait que la requérante devait rembourser au ministre les versements de la pension de survivant qu’elle avait reçus.

Devant une nouvelle membre de la DG, dans le dossier no GP-20-1009, la requérante a de nouveau fait valoir qu’elle ne devrait pas avoir à rembourser les prestations parce que la loi de 2015 ne s’appliquait pas à sa situation, car le ministre avait pris sa décision en 2003, avant que la loi ne s’applique. Pour sa part, le ministre a soutenu que la DG devait « rejeter sommairement » l’appel parce que celui-ci n’avait aucune chance raisonnable de succès.

La membre de la DG a rejeté l’argument du ministre. Depuis 2017, la requérante plaide cette affaire devant des membres de la DG et à la DA, mais le ministre n’a jamais dit croire qu’elle n’avait aucune chance raisonnable de succès. La membre de la DG a interprété la loi, plus précisément l’article 44.1 du RPC et elle a rejeté l’argument de la requérante. La loi permettait au ministre de modifier sa décision. De plus, l’article 44.1 du RPC mentionne explicitement que le ministre doit appliquer la nouvelle disposition introduite au même article lorsqu’une condamnation est portée à son attention avant ou après l’entrée en vigueur de la loi. La DG a conclu que la requérante n’avait pas droit à la pension de survivant et qu’elle devait rembourser les prestations qu’elle avait reçues pendant quatre ans.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : MS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 546

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, Section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : M. S. (requérante)
Représentante : L. F. (fille de la requérante)
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentant : Ian McRobbie

Décision portée en appel : Décision de révision rendue par le ministre de l’Emploi et
du Développement social le 12 mars 2020 (communiquée
par Service Canada)

Membre du Tribunal : Anne S. Clark
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 juin 2021
Personnes présentes à l’audience : Requérante
Représentant du ministre
Observatrices et observateur pour le compte du ministre
Date de la décision : Le 30 août 2021
Numéro de dossier : GP-20-1009

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La requérante, M. S., n’a pas droit à une pension de survivant duRégime de pensions du Canada. La présente décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appel porte sur des faits, des processus de demande et une procédure d’appel qui remontent à de nombreuses années. Le tout peut sembler compliqué. Il est donc important de fournir un historique clair des faits et des procédures pour aider à expliquer les positions des parties et les motifs de ma décision. Les faits et l’historique des procédures ne sont pas contestés.

Faits

  • F. F. (cotisant) était marié à la requérante.
  • 7 août 2001 – Le cotisant est assassiné.
  • 28 décembre 2001 – La requérante a demandé une pension de survivant du Régime de pensions du Canada. Sa demande été approuvée et la pension était payable à compter de septembre 2001.
  • Mai 2006 – La requérante a été déclarée coupable du meurtre au premier degré du cotisant.
  • Mai 2006 – Le ministre a mis fin au versement de la pension de survivant et a demandé à la requérante de rembourser les versements qu’elle a reçus de septembre 2001 à mai 2006.
  • Juin 2011 – La requérante a fait appel de la déclaration de culpabilité, qui a été annulée.
  • Octobre 2013 – La requérante a subi un nouveau procès. Elle a été de nouveau déclarée coupable du meurtre au premier degré du cotisant. Elle purge encore sa peine pour cette condamnation.
Processus de demande et procédure d’appel

[4] Après mai 2006, la requérante a contesté pendant bon nombre d’années la décision du ministre de mettre fin à la pension de survivant et d’exiger le remboursement des sommes versées de septembre 2001 à mai 2006. Voici un résumé des décisions et des appels déposés à la division générale et à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale.

  • 1er octobre 2017 – La requérante a demandé au ministre de réviser la décision qu’il a rendue en mai 2006 et qui a mis fin à la pension de survivant du Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 1. C’est seulement en mars 2020 que le ministre a révisé la décision de mai 2006.
  • 21 janvier 2020 – La requérante a fait appel à la division générale pour faire rétablir la pensionNote de bas de page 2.
  • 11 mars 2020 – La division générale a rejeté l’appel de la requérante en déclarant qu’elle n’avait pas droit à plus de temps pour appeler d’une décision relative à une allocation au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse. La décision de la division générale n’a pas abordé le droit de la requérante à une pension de survivant du Régime de pensions du Canada.
  • 12 mars 2020 – Le ministre a produit une lettre de décision sur la révision du droit de la requérante à une pension de survivant du Régime. Le ministre a confirmé la décision de mettre fin à la pension de survivant en mai 2006 et d’exiger que la requérante rembourse toutes les sommes qu’elle a reçues à titre de survivante du cotisantNote de bas de page 3.
  • 4 mai 2020 – La requérante a demandé la permission de porter la décision en appel à la division d’appelNote de bas de page 4.
  • 3 juillet 2020 – La division d’appel a accordé à la requérante la permission de faire appel et elle a accueilli l’appel de la décision que la division générale a rendue le 11 mars 2020. La requérante et le ministre ont convenu que la division générale avait commis une erreur parce qu’elle n’avait pas tenu compte des prestations du Régime que la requérante avait mentionnées dans son appel. La division d’appel a accepté l’accord conclu entre les parties et a renvoyé l’affaire à la division générale pour qu’elle se penche sur le droit de la requérante à une pension de survivant du Régime et, plus précisément, qu’elle examine la décision rendue par le ministre le 12 mars 2020.

Instance de la division générale après la décision de la division d’appel

[5] La requérante n’était pas représentée à l’audience. Sa fille est sa représentante désignée, mais elle n’a pas assisté à l’audience. La requérante a témoigné des difficultés qu’elle a eues à obtenir des éléments de preuve et à déposer des observations pour appuyer sa positionNote de bas de page 5. J’ai organisé des conférences préparatoires pour permettre aux parties de discuter des procédures à suivre et des exigences à remplir lors de l’appel. J’ai également accordé plus de temps à la requérante pour lui permettre de poser des questions sur le droit et la procédure d’appel et de préparer ses éléments de preuve et ses observations.

[6] La requérante a d’abord affirmé vouloir contester la loi au titre de la Charte canadienne des droits et libertés. Après avoir assisté aux conférences préparatoires pour discuter des conditions à remplir pour déposer une contestation fondée sur la Charte, elle a dit qu’elle n’était pas en mesure de présenter une telle contestation et qu’elle voulait que son appel soit traité selon la procédure régulièreNote de bas de page 6.

[7] L’appel a été instruit comme un appel régulier et la requérante y a participé en son nom. Le ministre avait un représentant. Trois autres membres du personnel du ministère ont assisté à l’audience pour observer la procédure.

Les parties ont convenu des questions à trancher dans le cadre de l’appel

[8] Les parties étaient d’accord sur le fait que je devais trancher deux questions :

  1. Le ministre avait-il le pouvoir de cesser le versement de la pension de survivant du Régime à la requérante et de recouvrer les sommes déjà versées?
  2. La requérante a-t-elle droit à la pension de survivant au titre du Régime?

[9] Selon la requérante, je dois accueillir son appel parce que le ministre n’avait pas le pouvoir légal de [traduction] « récupérer » les prestations qu’elle a reçues de septembre 2001 à mai 2006. Elle affirme que la loi sur laquelle le ministre s’appuie n’existait pas avant 2015 et que le ministre ne peut pas s’en servir pour justifier la décision de mai 2006.

[10] La requérante a ajouté qu’elle devrait avoir droit à la pension de survivant parce qu’il s’agit d’une prestation contributive et non d’un bien matrimonial. Elle dit que le Régime de pensions du Canada est financé par les personnes qui y cotisent et non par le grand public. Ainsi, puisqu’elle a été tenue responsable des dettes du cotisant, elle croit qu’elle doit également bénéficier des cotisations qu’il a versées au Régime.

[11] Le ministre soutient que la requérante n’a pas droit à une prestation du Régime qui résulte du meurtre du cotisant.

[12] Selon le ministre, le Régime de pensions du Canada donne au ministre le pouvoir de refuser la pension de survivant parce que la requérante a été déclarée coupable du meurtre au premier degré du cotisant en 2006 ainsi qu’en 2013. Le ministre affirme qu’en 2006, la loi permettait au ministre de cesser le versement des prestations à la requérante pour qu’elle ne puisse pas tirer profit de son acte criminel. Quoi qu’il en soit, le ministre dit que la loi actuelle est rétroactive et s’applique aux décisions rendues avant l’entrée en vigueur de la loi actuelle. Le ministre fait valoir que la loi actuelle autorise le ministre à modifier une décision antérieure et l’oblige à recouvrer les sommes versées à la requérante à titre de prestation de survivant.

Questions que je dois examiner en premier

L’appel ne permettra pas de répondre à toutes les questions de la requérante

[13] La requérante a posé des questions qui dépassent les limites du présent appel. Je ne peux donc pas y répondre ni la conseiller sur la façon de procéder. Elle a soulevé des questions au sujet du calendrier de remboursement. J’ai expliqué qu’il ne s’agit pas d’une question en litige dans le présent appel. J’ai noté que le ministre l’a encouragée à communiquer avec le ministère pour discuter du remboursement. De plus, le calendrier de remboursement relève de la compétence exclusive du ministre.

[14] La requérante a demandé ce qu’il adviendrait du trop-payé si elle déclarait faillite ou si elle faisait de nouveau annuler la condamnation. Je lui ai expliqué que je ne peux pas parler de l’issue possible d’événements futurs ni des répercussions qu’ils pourraient avoir sur son admissibilité aux prestations du Régime.

J’ai rejeté la demande du ministre de rejeter sommairement l’appel

[15] Le 14 avril 2021, le ministre a fait valoir que la loi exclut la requérante du bénéfice des prestations de survivant parce qu’elle a été déclarée coupable du meurtre de son époux. Le ministre a expliqué que la rétroactivité de la loi est illimitée et que l’appel de la requérante n’a aucune chance raisonnable de succès. Par conséquent, selon le ministre, je dois rejeter l’appel de façon sommaireNote de bas de page 7.

[16] Je n’ai pas rejeté l’appel de façon sommaire. Le dossier a fait l’objet d’un appel à la division d’appel. Les parties ont conclu un accord, que la division d’appel a accepté. En conséquence, la division d’appel a renvoyé l’appel à la division générale pour qu’elle examine l’admissibilité de la requérante à une pension de survivant du Régime.

[17] Je suis obligée de rejeter sommairement un appel si je suis convaincue qu’il n’a aucune chance raisonnable de succèsNote de bas de page 8. Pour décider si un appel a une chance raisonnable de succès, je dois me demander s’il est clair et évident sur la foi du dossier que l’appel est voué à l’échec, peu importe les éléments de preuve ou les arguments que la requérante pourrait présenter lors d’une audienceNote de bas de page 9.

[18] Après avoir examiné le dossier, je juge qu’il n’est ni clair ni évident que l’appel est voué à l’échec. La requérante soulève la question de savoir s’il est équitable et légal que le ministre revienne en arrière et modifie une décision qu’il a rendue. Elle conteste également le pouvoir du ministre de l’obliger à rembourser les prestations auxquelles elle avait droit au moment où elles ont été versées. Je juge qu’il n’est ni clair ni évident à la lecture du dossier que l’appel est voué à l’échec.

[19] De plus, le ministre a accepté l’appel de la requérante à la division d’appel et une personne le représentait aux conférences préparatoires de la division générale. La requérante avait toutes les raisons de croire qu’une audience aurait lieu parce que les parties avaient convenu qu’il y en aurait une et que la division d’appel avait accueilli l’appel en fonction de l’accord conclu entre les parties. Le ministre n’a pas soulevé la question d’un rejet sommaire durant le processus de règlement à la division d’appel ni lors des conférences préparatoires de la division générale. Nos discussions portaient sur la façon dont l’appel se déroulerait comme un appel régulier. Ainsi, il aurait été injuste de rejeter l’appel sans tenir d’audience. Le présent appel a franchi de nombreuses étapes et il est parvenu devant la division générale avec l’accord des parties. Par souci d’équité et de justice naturelle, j’ai décidé qu’une audience par téléconférence devait avoir lieu dans cet appel et que les parties devaient présenter des observations écrites.

Motifs de ma décision

[20] Le ministre a fait valoir qu’il existait un pouvoir légal permettant de modifier la décision d’accorder à la requérante une pension de survivant lorsqu’elle a été déclarée coupable de meurtre au premier degré en mai 2006. Le ministre s’est fondé sur le principe juridique « ex turpa causa officio », qui signifie qu’une personne ne peut pas tirer profit de ses crimes.

[21] Le ministre a également fait valoir que le Régime de pensions du Canada lui donne maintenant de façon claire le pouvoir de modifier rétroactivement la décision d’accorder une pension de survivant à la requérante parce qu’elle a été déclarée coupable du meurtre du cotisantNote de bas de page 10.

Le Régime de pensions du Canada donne-t-il au ministre le pouvoir de modifier sa décision?

[22] Pour les motifs ci-dessous, je juge que le Régime donne clairement au ministre le pouvoir de réviser et de modifier une décision sur l’admissibilité. Je conclus également que, comme la requérante a été déclarée coupable du meurtre au premier degré du cotisant, le Régime exige que le ministre recouvre les prestations versées à la requérante, peu importe quand la condamnation ou les versements ont eu lieu.

[23] Comme le ministre a clairement le pouvoir de modifier rétroactivement la décision antérieure, il n’est pas nécessaire d’examiner la loi qui existait en 2006, y compris le principe d’« ex turpa causa officio ».

Interprétation des lois

[24] Le Tribunal a été créé par une loi. Par conséquent, je dois suivre les règles énoncées dans le Régime. Je dois également voir si les décisions rendues par le Tribunal dans d’autres appels s’appliquent au présent appel. Je ne suis pas obligée de suivre les décisions des autres membres du Tribunal, mais je dois tenir compte de leur approche et décider si elle s’applique à l’affaire dont je suis saisie. Je suis tenue de suivre les décisions des cours comme la Cour fédérale, la Cour d’appel fédérale et la Cour suprême du Canada.

[25] Il y a des décisions judiciaires qui disent que les personnes qui rendent les décisions doivent lire les mots de la loi et leur accorder un sens ordinaire pour que la loi réponde à l’objectif visé par le Parlement. Autrement dit, je dois interpréter le texte du Régime dans son sens ordinaire. De plus, si le texte est clair, je ne dois pas présumer qu’il a un autre sens qui serait incompatible avec l’objet de la loi. Le sens que je donne aux mots qui figurent dans le Régime doit concorder avec l’objet visé par le Régime. Je dois tenir compte de ce que le Parlement avait l’intention de régler ou d’accomplir grâce à la loi. La Loi d’interprétation exige que mon interprétation de la loi soit large et équitable pour s’assurer que le sens que je donne à un mot ou à un article permet à la loi d’atteindre son objectifNote de bas de page 11.

Le Régime donne au ministre le pouvoir de mettre fin à la pension de la requérante

[26] Aux termes du Régime, dans certaines circonstances, le ministre a le pouvoir explicite de réviser et de modifier des décisions antérieures. Par exemple, le ministre peut annuler ou modifier une décision antérieure en fonction de faits nouveauxNote de bas de page 12.

[27] La Cour fédérale a confirmé que le ministre pouvait modifier une décision sur l’admissibilité à une pension d’invalidité du RégimeNote de bas de page 13. Toutefois, le ministre pouvait mettre fin à une pension d’invalidité seulement à compter de la dernière décisionNote de bas de page 14 qui a confirmé l’admissibilité.

[28] Comme je l’ai mentionné plus haut, le Régime donne également au ministre le pouvoir explicite de refuser des prestations à une personne qui est reconnue coupable du meurtre au premier ou au deuxième degré ou de l’homicide involontaire coupable d’une personne ayant cotisé au Régime. Toute somme reçue à la suite du décès de la personne est considérée comme une dette et doit être remboursée. Cette règle s’applique à tous les paiements, y compris ceux versés avant la condamnationNote de bas de page 15 et avant l’entrée en vigueur de la loiNote de bas de page 16.

[29] La requérante a soutenu qu’après tant d’années, il serait injuste que le ministre modifie une décision et l’oblige à rembourser les prestations qu’elle a reçues. Elle a également avancé qu’elle devrait avoir droit à des prestations à la suite du décès du cotisant parce qu’elle a été tenue responsable de ses dettes. Toutefois, le Régime précise clairement que, malgré les autres articles qui donnent droit aux prestations, la requérante n’a pas droit au bénéfice des prestations parce qu’elle a été déclarée coupable du meurtre au premier degré du cotisantNote de bas de page 17.

Les principes énoncés par la division d’appel dans la décision BR ne s’appliquent pas au présent appel

[30] Dans des décisions récentes, la division d’appel a regardé si le ministre a le pouvoir de réviser et de modifier des décisions antérieures au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada. La première décision portait sur la Loi sur la sécurité de la vieillesse et quelques décisions ultérieures ont appliqué les mêmes principesNote de bas de page 18.

[31] Il y a des différences importantes entre les faits et le droit dans la décision BR et ceux dans le présent appel. Dans la décision BR, la division d’appel n’a pas pu repérer un pouvoir clairement accordé par la Loi sur la sécurité de la vieillesse qui aurait permis au ministre de modifier des décisions de façon rétroactive et ainsi de créer une dette pour les requérantes et les requérants. De plus, la division d’appel a conclu que les règles d’interprétation d’un texte de loi ne lui permettaient pas de conclure que l’objet et l’intention de la loi étaient de donner au ministre le pouvoir de réviser et de modifier des décisions antérieures.

[32] Je juge que le ministre avait clairement le pouvoir de réviser et de modifier la décision d’accorder une pension de survivant à la requérante.

[33] Je dois suivre les règles du Régime qui permettent de déterminer l’admissibilité d’une personne à la pension de survivant. Aux termes du Régime, la requérante n’a pas droit et n’a jamais eu droit au bénéfice des prestations à la suite du décès du cotisant parce qu’elle a été déclarée coupable de son meurtre au premier degré. Le texte actuel de la loi est très clair. Le Régime interdit à la requérante de toucher des prestations à la suite du décès du cotisant et l’oblige à rembourser tout l’argent qu’elle a reçu.

[34] La requérante a avancé que la loi ne permet pas au ministre de [traduction] « récupérer » les prestations que le ministre lui a versées de septembre 2001 à mai 2006. Elle dit que je dois fonder ma décision sur la loi qui existait lorsque le ministre lui versait la pension, et non sur la loi actuellement en vigueur. Je ne suis pas d’accord avec la requérante.

[35] Le Régime précise qu’une pension de survivant n’est pas payable à une personne reconnue coupable du meurtre au premier ou au deuxième degré ou de l’homicide involontaire coupable de la cotisante ou du cotisantNote de bas de page 19. Le ministre a l’obligation de recouvrer les sommes versées à la personne déclarée coupable même si elles lui ont été versées avant la déclaration de culpabilitéNote de bas de page 20. Enfin, la règle s’applique aussi aux condamnations prononcées avant l’entrée en vigueur de cette règleNote de bas de page 21. Par conséquent, selon la loi, une personne reconnue coupable de meurtre au premier ou au deuxième degré ou d’homicide involontaire coupable à l’endroit d’une cotisante ou d’un cotisant ne peut pas recevoir de prestations ni conserver celles qu’elle a reçues à la suite du décès.

Conclusion

[36] Je conclus que la requérante n’a pas droit à une pension de survivant au titre du Régime de pensions du Canada et que le ministre a le pouvoir de recouvrer les sommes qui ont été versées à la requérante avant la déclaration de culpabilité en mai 2006, plus précisément les prestations versées de septembre 2001 à mai 2006.

[37] Par conséquent, l’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.