Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : AM c Ministre de l’Emploi et du Développement social et SR, 2021 TSS 796

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : A. M.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Partie mise en cause : S. R.

Décision portée en appel : Décision de révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 13 août 2020 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lianne Byrne
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 1er novembre 2021
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 2 décembre 2021
Numéro de dossier : GP-20-1242

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension (aussi appelé partage des crédits) du Régime de pensions du Canada ne peut pas être annulé. Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] Le requérant, A. M., et la mise en cause, S. R., se sont mariés en mai 1974. Ils se sont séparés en février 1997 et ont divorcé en février 2002.

[4] La mise en cause a demandé un partage des crédits du Régime en juillet 2019. Elle a par la suite fourni une copie de leur jugement de divorce. En janvier 2020, elle a demandé à retirer sa demande. Toutefois, le ministre a effectué le partage des crédits en janvier 2020 au motif qu’il était obligatoire dans les circonstances de la présente affaire.

[5] Le requérant affirme que le partage des crédits du Régime devrait être annulé. L’accord de séparation conclu par le requérant et la mise en cause contient une disposition concernant le partage des crédits. De plus, la mise en cause a demandé de retirer sa demande. Le requérant et la mise en cause ont signé une lettre disant qu’ils ne souhaitent pas procéder au partage des crédits. Leur volonté devrait être respectée. Le requérant dépend de sa pension pour subvenir aux besoins de sa famille.

[6] La mise en cause n’a pas assisté à l’audience ni présenté d’observations écrites. Elle a toutefois écrit dans sa plus récente lettre au Tribunal datée du 15 juillet 2021 qu’elle souhaitait retirer sa demande de partage des crédits du Régime.

[7] Le ministre affirme que le partage des crédits du Régime est obligatoire dans les cas de divorce après le 1er janvier 1987. Même si le requérant et la mise en cause ont demandé le retrait de la demande de la mise en cause, le ministre était tenu d’effectuer le partage des crédits après avoir reçu une preuve suffisante qu’un divorce avait eu lieu. L’accord de séparation conclu par le requérant et la mise en cause a été signé en Ontario. L’Ontario n’a pas adopté de loi permettant la renonciation au partage des crédits du Régime.

La question en litige dans le présent appel

[8] Je dois décider si le partage des crédits du Régime effectué par le ministre doit être annulé. Pour rendre cette décision, je dois examiner si la mise en cause pouvait retirer sa demande après qu’elle ait été présentée et si l’accord de séparation conclu par le requérant et la mise en cause empêche le partage des crédits.

Motifs de ma décision

Le témoignage du requérant à l’audience et les documents pertinents au dossier

[9] Le requérant a fait valoir à l’audience que le partage des crédits du Régime devrait être annulé. Il a dit que la mise en cause l’avait demandé par erreur. Elle pensait que sa pension augmenterait sans diminuer la pension du requérant. Elle a tenté de retirer sa demande en appelant Service Canada et en envoyant plusieurs lettres. Le requérant soutient que leur volonté devrait être respectée.

[10] Le requérant soutient également que leur accord de séparation empêche le partage des crédits du Régime. Il affirme que la mise en cause a reçu plus que sa juste part dans l’accord qu’ils ont conclu lorsqu’ils ont divorcé, y compris une mise de fonds pour une maison et une voiture.

[11] J’ai pris en considération tous les documents au dossier, et en particulier les suivants :

  • un accord de séparation daté du 8 août 2001 prévoyant que [traduction] « aucune des parties ne demandera (et les deux parties conviennent qu’il n’y aura pas) de partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension […] que le droit de demander un partage des crédits du Régime de pensions du Canada puisse faire l’objet ou non d’une renonciation, chaque partie convient de ne pas faire une telle demande et est tenue par l’honneur de ne rien faire qui puisse entraîner un tel partageNote de bas de page 1 . »;
  • un jugement de divorce de la Cour supérieure de justice de l’Ontario daté du 18 janvier 2002 indiquant que le requérant et la mise en cause se sont mariés le 5 mai 1974 et que leur divorce prend effet le 18 février 2002Note de bas de page 2 ;
  • la demande de partage des crédits faite par la mise en cause le 3 juillet 2019, indiquant que le requérant et la mise en cause se sont mariés le 5 mai 1974, se sont séparés en février 1997 et ont divorcé le 18 février 2002;
  • une lettre datée du 30 décembre 2019 signée par la mise en cause indiquant qu’elle veut retirer sa demande de partage des crédits;
  • une lettre datée du 15 janvier 2020 signée par le requérant et la mise en cause indiquant qu’ils conviennent que leur succession et leurs actifs ont fait l’objet d’un partage équitable au moment de leur séparation. Ils ont tous deux demandé dans cette lettre le retrait de la demande de partage des crédits faite par la mise en cause;
  • une lettre datée du 15 juillet 2021 signée par la mise en cause indiquant qu’elle souhaite toujours retirer sa demande de partage des crédits parce qu’elle avait commis une erreur.

Le partage des crédits du Régime était obligatoire et ne peut pas être annulé

[12] Le requérant a expliqué à l’audience que la mise en cause avait commis une erreur en demandant le partage des crédits du Régime et qu’elle voulait retirer sa demande. Les documents au dossier appuient ce qu’il dit. En particulier, les lettres datées du 30 décembre 2019, du 15 janvier 2020 et du 15 juillet 2021 indiquent toutes que la mise en cause a changé d’avis et voulait retirer sa demande.

[13] Cependant, j’ai examiné les dispositions pertinentes du Régime de pensions du Canada et du Règlement sur le Régime de pensions du Canada. Je suis d’accord avec le ministre que le partage des crédits du Régime était obligatoire dans ce cas-ci et qu’il ne peut être annulé.

[14] Le ministre est tenu par le Régime d’effectuer un partage des crédits à la suite d’un jugement de divorce après avoir été informé du jugement et avoir reçu les renseignements prescritsNote de bas de page 3 . Les renseignements prescrits sont énoncés dans le Règlement. Ils comprennent des renseignements comme le nom, l’adresse et le numéro d’assurance sociale des anciens conjoints, la date et le lieu du mariage, la date et le lieu de la dissolution du mariage, une copie du jugement de divorce, la date à laquelle les anciens conjoints ont commencé à vivre séparément et une copie de tout accord écritNote de bas de page 4 .

[15] Le ministre a reçu les renseignements requis, y compris une copie du jugement de divorce. Par conséquent, même si la mise en cause a changé d’avis par la suite, le ministre était tenu d’effectuer le partage des crédits. Aucune disposition du Régime ne permet au ministre d’accepter le retrait d’une demande une fois qu’il a été informé du jugement de divorce et qu’il a reçu les renseignements requis.

[16] J’ai également tenu compte du fait que les parties ont conclu un accord de séparation qui prévoit qu’elles ne demanderont pas de partage des crédits du Régime.

[17] Le ministre est lié par un accord conclu entre des conjoints le 4 juin 1986 ou après cette date :

  1. 1) si cet accord contient une disposition qui fait expressément mention du Régime de pensions du Canada et qui exprime l’intention des parties de ne pas faire la partage des crédits;
  2. 2) si cet accord a été conclu avant qu’un divorce ne se produise;
  3. 3) si la disposition en question de l’accord n’a pas été annulée aux termes d’une ordonnance d’un tribunal;
  4. 4) si la disposition en question de l’accord est expressément autorisée selon le droit provincial applicable à cet accordNote de bas de page 5 .

[18] Les conditions requises pour renoncer au partage des crédits n’ont pas été remplies. En particulier, l’Ontario ne permet pas expressément la renonciation au partage des crédits du Régime dans le cadre d’un accord entre conjoints. À l’heure actuelle, une telle renonciation n’est permise qu’au Québec, en Saskatchewan, en Alberta et en Colombie-Britannique. Par conséquent, le requérant et la mise en cause ne pouvaient renoncer au partage des crédits dans un accord entre conjoints.

[19] Le requérant a soutenu que la mise en cause avait demandé le partage des crédits par erreur. Il soutient également que leur volonté devrait être respectée.

[20] Bien que je sois sensible à la situation du requérant et de la mise en cause, le Tribunal est créé par une loi. Cela signifie qu’il ne dispose que des pouvoirs qui lui sont conférés par sa loi habilitante. Je suis tenue d’interpréter et d’appliquer les dispositions telles qu’elles figurent dans le Régime de pensions du Canada. Je ne peux pas trancher les appels en me fondant sur l’équité ou des circonstances atténuantes.

[21] Le ministre était tenu au titre du Régime de pensions du Canada d’effectuer un partage des crédits dans ce cas.

Conclusion

[22] Je conclus que le partage des crédits du Régime effectué par le ministre était obligatoire et ne peut être annulé.

[23] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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