Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : TF c Ministre de l’Emploi et du Développement social et LG, 2022 TSS 188

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : T. F.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Partie mise en cause : L. G.

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 12 août 2020 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Pierre Vanderhout
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 17 février 2022
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Partie mise en cause
Date de la décision : Le 21 février 2022
Numéro de dossier : GP-20-1397

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante, T. F., n’est pas admissible à la prestation de décès du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette conclusion s’applique également à l’appelante dans son rôle d’administratrice de la succession du défunt J. G. (cotisant). La présente décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelante vit à Calgary. Elle vivait en union de fait avec le cotisant lorsqu’il est décédé le 29 avril 2016. Cependant, sa fille, L. G. (partie mise en cause), a organisé et payé ses funérailles. La partie mise en cause a demandé la prestation de décès du cotisant au RPC en mai 2016 et l’a reçue plus de 60 jours après le décès du cotisant.

[4] L’appelante n’a pas présenté de demande de prestation de décès du RPC avant août 2019. Le ministre a rejeté sa demande. Le ministre a dit qu’il avait déjà versé la prestation de décès du cotisant au RPC à quelqu’un d’autre. Cependant, en juillet 2017, l’appelante a demandé d’être l’administratrice de la succession du cotisant. La Cour a approuvé sa demande en février 2018. La partie mise en cause ne s’est pas opposée à la demande.

[5] L’appelante affirme qu’il n’y a pas de délai pour demander la prestation de décès du RPC. Elle ajoute que le ministre n’aurait pas dû verser la prestation de décès du RPC à la partie mise en cause parce que celle-ci n’était pas l’administratrice de la succession. Elle laisse entendre que la partie mise en cause a représenté faussement son pouvoir d’obtenir la prestation de décès du RPC. De plus, elle déclare que la partie mise en cause a été impliquée dans une fraude importante contre le cotisant. Elle affirme également que le ministre était au courant des fraudes de la partie mise en cause.

[6] L’appelante ajoute que la partie mise en cause devrait recevoir une sanction pécuniaire administrative (avec intérêts) ou être accusée d’une infraction. Enfin, l’appelante dit que la succession ne devrait pas payer d’impôt sur la prestation de décès du RPC, car la succession n’a jamais reçu cette prestation.

[7] Le ministre affirme que l’appelante n’a pas reçu la prestation de décès du RPC parce qu’elle avait déjà été versée à une autre demanderesse admissible. Une prestation de décès du RPC ne peut être versée à plus d’une partie demanderesse. Le ministre a dit que l’appelante n’avait pas présenté de demande dans les 60 jours suivant le décès du cotisant, de sorte que le ministre pouvait alors verser la prestation à une autre partie demanderesse qui satisfaisait aux exigences réglementaires.

Ce que l’appelante doit prouver

[8] Pour que l’appelante obtienne gain de cause, elle doit prouver que le ministre n’était pas autorisé à verser la prestation de décès du RPC à la partie mise en cause. Subsidiairement, elle doit prouver que la succession du cotisant a fait l’objet d’une demande dans les 60 jours suivant le décès du cotisant.

Motifs de ma décision

[9] Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’appelante n’avait pas droit à la prestation de décès du RPC.

[10] Le ministre peut seulement verser la prestation de décès du RPC à une partie demanderesse. Après avoir versé la prestation à une partie demanderesse admissible, le ministre n’est pas tenu de la verser de nouveau à une autre partie demanderesseNote de bas de page 1. Je vais maintenant décider si la partie mise en cause était admissible à la prestation de décès du cotisant au RPC.

La partie mise en cause était-elle admissible à la prestation de décès du RPC?

[11] Le cotisant est décédé le 29 avril 2016Note de bas de page 2. La partie mise en cause a demandé la prestation de décès du RPC en mai ou en juin 2016Note de bas de page 3. La partie mise en cause avait organisé et payé les frais funéraires du cotisant, dont le coût s’est élevé à 3 176,28 $Note de bas de page 4. Cela dépassait le montant de la prestation de décès du RPCNote de bas de page 5.

[12] Je conclus que la partie mise en cause était admissible à la prestation de décès du RPC.

[13] Le ministre peut verser les prestations du RPC à une personne qui a payé les frais funéraires du cotisant décédé, ou qui en est responsable. Je suis convaincu que la partie mise en cause a satisfait à cette exigenceNote de bas de page 6. Ce paiement peut être versé si la succession du cotisant décédé ne demande pas la prestation de décès du RPC dans les 60 jours suivant le décès du cotisantNote de bas de page 7. Je vais maintenant tenir compte du moment de la demande de la succession.

La succession a-t-elle fait une demande dans les 60 jours suivant le décès du cotisant?

[14] Je conclus que la succession n’a pas demandé la prestation de décès du RPC dans les 60 jours suivant le décès du cotisant.

[15] Le ministre a reçu la demande de prestation de décès du RPC de l’appelante le 22 août 2019Note de bas de page 8. Elle semblait faire sa demande à la fois à titre personnel et à titre d’administratrice de la succession du cotisantNote de bas de page 9. Je ne vois aucune preuve qu’elle a présenté une demande avant cette date. Elle a dit s’être renseignée au sujet de la prestation de décès du RPC à l’été 2016. Elle a expliqué qu’une employée ou un employé du ministre lui avait dit qu’une autre personne avait déjà reçu la prestation de décès du RPC. Par conséquent, elle n’a pas présenté de demande à ce moment-là. À titre d’administratrice de la succession, elle a reçu un reçu officiel à l’été 2019 pour la prestation de décès du RPCNote de bas de page 10. Elle a ensuite décidé de demander la prestation de décès du RPC. Elle a fait une demande parce qu’elle estimait que la succession ne devrait pas payer de l’impôt sur quelque chose qu’elle n’avait pas reçu.

[16] La preuve confirme que la succession n’a pas fait sa demande dans les 60 jours qui ont suivi le décès du cotisant. Je vais maintenant examiner les observations de l’appelante que l’analyse ci-dessus n’aborde pas directement.

Qu’en est-il des allégations de fraude et de manque de pouvoir faites par l’appelante?

[17] L’appelante a allégué que la partie mise en cause avait eu une conduite frauduleuse et inappropriée. Si cela est vrai, ces allégations sont très troublantes. Cependant, si elles sont fausses, ces allégations reflèteraient de façon tout aussi négative sur l’appelante. La fraude est une allégation très grave. Toutefois, dans les circonstances, les allégations n’ont aucune incidence sur la prestation de décès du RPC.

[18] Lorsque le cotisant est décédé, la partie mise en cause a pensé qu’elle s’occuperait de sa successionNote de bas de page 11. Quoi qu’il en soit, lorsque la partie mise en cause a demandé et reçu la prestation de décès du RPC, elle n’était pas tenue de le faire au nom de la succession du cotisant. Toute personne ayant payé les frais funéraires du cotisant aurait été admissibleNote de bas de page 12. Je ne vois aucune fraude relativement à ces dépenses. Personne ne laisse entendre que la partie mise en cause ne les a pas payés.

[19] L’appelante a également laissé entendre que le ministre n’avait pas le pouvoir de payer la partie mise en cause. Je ne vois aucune preuve que le ministre a mal agi lorsqu’il a reçu et approuvé la demande de la partie mise en cause. Il s’agit d’un élément important parce que le ministre ne peut pas tenir compte d’un facteur non pertinent, ignorer un facteur pertinent, agir de façon discriminatoire, agir de mauvaise foi ou agir dans un but ou pour un motif irrégulierNote de bas de page 13.

[20] La preuve montre que le salon funéraire a présenté une demande de prestations de décès du RPC, accompagnée de documents à l’appui, au ministre au nom de la partie mise en cause. La preuve montre également que la partie mise en cause était responsable des frais funéraires du cotisant et les a payés rapidement moins d’un mois après le décès du cotisantNote de bas de page 14. Les funérailles ont eu lieu avant que le ministre ne reçoive la demande de la partie mise en cause. La loi dit de façon très claire que les frais funéraires peuvent déclencher le versement de la prestation de décès du RPC à une personne autre que la succession de la défunte ou du défuntNote de bas de page 15. À son tour, le ministre a soutenu qu’il avait reçu les documents nécessaires et qu’il avait attendu l’expiration du délai de 60 jours avant de verser la prestation à la partie mise en causeNote de bas de page 16. Compte tenu de ces événements, je ne considère pas que le ministre s’est conduit de façon répréhensible lorsqu’il a accordé la prestation de décès du RPC à la partie mise en cause.

Qu’en est-il du feuillet d’impôt envoyé à la succession?

[21] L’appelante affirme que la succession ne devrait pas payer d’impôt sur la prestation de décès du RPC, car la succession n’a jamais reçu cette prestation. Cette question se pose parce que la ministre semble avoir provoqué l’émission d’un feuillet T4A(P) de l’Agence du revenu du Canada (ARC) en 2019. Ce feuillet concernait la prestation de décès du RPC versée à la partie mise en cause en 2016Note de bas de page 17.

[22] La raison pour laquelle ce feuillet d’impôt a été émis à la succession en 2019 n’est pas claire. La partie mise en cause a déclaré avoir reçu un feuillet d’impôt pour la prestation de décès du RPC en 2016. Elle a dit que cela avait fait partie de sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2016. C’est son comptable qui a préparé cette déclarationNote de bas de page 18.

[23] En principe, l’observation de l’appelante est logique. La partie mise en cause devrait payer de l’impôt sur la prestation de décès. Toutefois, le Tribunal n’a pas le pouvoir de rendre des décisions concernant le revenu imposable. L’appelante doit soulever cette question auprès de l’ARC. Le Tribunal ne peut pas l’aider. Quoi qu’il en soit, l’appelante a dit que la succession ne paierait pas d’impôt sur la prestation de décès du RPC reçue par la partie mise en causeNote de bas de page 19.

L’appelante affirme qu’il n’y a pas de délai pour demander la prestation de décès du RPC.

[24] Je suis d’accord. Il n’y a pas de date limite pour présenter une demande de prestations de décès du RPCNote de bas de page 20.

[25] Toutefois, comme il a été mentionné ci-dessus, le ministre peut seulement verser la prestation de décès du RPC une fois pour chaque cotisant. Une fois que le ministre l’a payée, les parties demanderesses subséquentes ne peuvent pas recevoir la prestationNote de bas de page 21. Cela récompense les personnes qui agissent rapidement en période difficile. Bien que cela puisse sembler injuste, la loi permet à une personne de recevoir la prestation de décès du RPC si elle en fait la demande après avoir payé les frais funéraires d’un cotisant. Cette personne n’a pas à agir pour la succession. Toutefois, la succession d’un cotisant dispose également de 60 jours pour demander la prestation de décès. Même si une autre personne présente une demande en premier, la succession a toujours la priorité si elle fait sa demande dans ce délai de 60 joursNote de bas de page 22.

[26] Si la partie mise en cause n’avait pas demandé la prestation de décès du RPC à l’égard des frais funéraires, la succession (ou l’appelante, à titre personnel) aurait quand même pu avoir droit à cette prestation.

Autres questions entre les parties

[27] Je commenterai brièvement les circonstances difficiles sous-jacentes du présent appel.

[28] J’ai vu un conflit considérable entre l’appelante et la partie mise en cause. Ce conflit semble dater d’avant le décès du cotisant. J’ai même vu une référence à une poursuiteNote de bas de page 23.

[29] Je tiens à souligner que rien dans la présente décision n’appuie ou ne critique quelque partie que ce soit. La compétence du Tribunal se limite à la question étroite de savoir si la prestation de décès du RPC est payable à l’appelante. Ce pouvoir découle de la loi et de la décision découlant d’une révision d’août 2020Note de bas de page 24. J’ai tranché la question en examinant la loi applicable ainsi que certains faits qui ne sont pas raisonnablement contestés. Je ne peux résoudre aucun autre problème entre les parties. De la même façon, je ne peux pas imposer de pénalités ou intenter des poursuites contre une personne ou une entité.

Conclusion

[30] Je conclus que l’appelante (soit à titre personnel ou au nom de la succession du cotisant) n’est pas admissible à la prestation de décès du RPC. Elle n’a pas présenté de demande de prestation dans les 60 jours suivant le décès du cotisant, après quoi le ministre a versé la prestation à une autre partie demanderesse admissible.

[31] Par conséquent, l’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.