Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : PN c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 235

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale - Section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : P. N.
Représentante ou représentant : Rajinder Johal
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 30 juillet 2020 (transmise par Service Canada)

Membre du Tribunal : Jean Lazure
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 octobre 2021
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Représentant de la partie appelante
Date de la décision : Le 11 novembre 2021
Numéro de dossier : GP-20-1129

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le requérant, P. N., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] Le requérant avait 61 ans à la date de l’audience. Il a terminé sa 10e année. Il a immigré au Canada en 1990.

[4] Depuis son arrivée au Canada, le requérant a occupé divers postes d’opérateur de machine à commande numérique par ordinateur.

[5] Il a reçu un diagnostic d’affection des artères coronaires en juin 2018. Il a arrêté de travailler à ce moment-là et n’a pas retravaillé depuis.

[6] Le requérant a demandé une pension d’invalidité du RPC le 13 décembre 2019, date à laquelle le ministre a reçu sa demandeNote de bas de page 1. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. Le requérant a fait appel de la décision du ministre à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[7] Le requérant soutient que compte tenu de son état physique, son invalidité est grave, prolongée et d’une durée indéfinie, et qu’il est incapable de travailler.

[8] Le ministre affirme que l’état cardiaque du requérant est stable et que la preuve ne révèle aucun problème cardiaque important. Le ministre fait valoir que bien qu’il [traduction] « soit admis que M. N. ait quelques limitations physiques, en l’absence d’une pathologie grave, une participation à des activités professionnelles convenables n’est pas contre-indiquée sur le plan médicalNote de bas de page 2 ».

Ce que le requérant doit prouver

[9] Pour avoir gain de cause, le requérant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date de l’audienceNote de bas de page 3.

[10] Le RPC définit les adjectifs « grave » et « prolongée ».

[11] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 4.

[12] Pour décider si l’invalidité du requérant est grave, je dois examiner l’effet global de ses problèmes de santé sur sa capacité de travail. Je dois aussi tenir compte de facteurs, incluant son âge, son niveau d’éducation, son expérience de travail et son expérience personnelle. Ces facteurs me font voir sa situation de façon réaliste. Ils m’aident à décider si son invalidité est grave. Si le requérant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[13] Une invalidité est prolongée si elle dure pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraînera vraisemblablement le décèsNote de bas de page 5.

[14] Autrement dit, aucun rétablissement ne doit être prévu. Pour être prolongée, l’invalidité de l’appelant doit l’obliger à quitter le marché du travail pendant très longtemps.

[15] Le requérant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il n’est pas invalide.

Motifs de ma décision

[16] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date de l’audience.

L’invalidité du requérant est-elle grave?

[17] J’estime que l’invalidité du requérant n’est pas grave. J’ai fondé ma conclusion sur plusieurs facteurs. Les voici.

[18] Le requérant affirme avoir une affection des artères coronaires. Cependant, je ne peux pas concentrer mon attention sur les diagnostics de ce dernierNote de bas de page 6. Je dois plutôt voir si des limitations fonctionnelles l’empêchent de gagner sa vieNote de bas de page 7. Pour ce faire, je dois tenir compte de tous les problèmes de santé du requérant (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité de travaillerNote de bas de page 8.

[19] Je juge que le requérant n’a pas de limitations fonctionnelles suffisantes pour le rendre régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

Le requérant affirme qu’il ne peut pas travailler

[20] À l’audience, le requérant a donné les raisons suivantes pour lesquelles il ne peut pas travailler :

  • il a arrêté de travailler en juin 2018 parce qu’il avait de la douleur;
  • il a subi une chirurgie (une angioplastie) à peu près au même moment et on lui a posé des endoprothèses;
  • il n’a pas travaillé depuis juin 2018;
  • son employeur ne lui a pas proposé de tâches légères, car il n’y en avait pas de disponibles;
  • il n’aurait pas été capable de faire des tâches légères si on le lui avait demandé;
  • il peut seulement marcher un peu parce qu’il se sent fatigué;
  • lorsqu’on lui a demandé qui s’occupait des tâches ménagères à la maison, il a répondu qu’il ne pouvait faire que des travaux légers et qu’il aidait simplement son épouse;
  • il ne peut pas soulever ou transporter des objets, et il affirme que s’il soulève quelque chose, il a des maux de tête et des douleurs;
  • il peut conduire, mais il ne conduit pas pendant de longues périodes;
  • il a régulièrement des rendez-vous avec son médecin de famille et son cardiologue;
  • ses gains de 18 776 $ étaient une indemnité de départ, il n’a jamais travaillé en 2019.

Je n’ai pas été convaincu que les problèmes de santé du requérant l’ont empêché de travailler, et la preuve médicale n’appuie pas les affirmations du requérant

[21] Je n’ai pas été convaincu que les problèmes de santé du requérant le rendent effectivement régulièrement incapable de détenir une quelconque occupation véritablement rémunératrice.

[22] Je n’ai pas trouvé le témoignage du requérant particulièrement exhaustif ou convaincant quant à savoir s’il peut travailler ou non. Je n’ai tout simplement pas trouvé que le requérant en a dit assez dans son témoignage pour me convaincre qu’il ne peut pas travailler et pourquoi il en serait ainsi.

[23] De plus, le requérant doit fournir une preuve médicale qui démontre que ses limitations fonctionnelles affectent sa capacité de travailler avant la date de l’audience. Je ne trouve pas que la preuve médicale est convaincante à cet effet.

[24] Le médecin de famille du requérant, le Dr Y. J. Lin, a déposé un rapport daté du 13 décembre 2019Note de bas de page 9. Il y a précisé que le diagnostic du requérant était une affection des artères coronaires. Il a recommandé au requérant d’arrêter de travailler dès juin 2018. Il n’était pas certain que le requérant puisse retourner occuper un quelconque type de travail à l’avenir.

[25] Les rapports de son cardiologue, le Dr Ram Aggarwal, qui figurent au dossier semblent tous parler d’un état cardiaque stable et d’un malaise atypique qui survient non pas pendant l’effort, mais le lendemain ou les jours suivants. Voici des extraits des différents rapports du Dr Aggarwal :

  • Le 22 août 2019, le Dr Aggarwal a écrit : [traduction] « Depuis sa dernière visite à la clinique, il est stable sur le plan symptomatique et continue d’avoir quelques épisodes d’inconfort thoracique atypique qui peuvent durer plusieurs jours. Il n’a qu’un effet occasionnel à l’effort, mais principalement de nature atypique. Il décrit également un essoufflement occasionnel en montant des escaliersNote de bas de page 10 »;
  • Le 13 octobre 2020, le Dr Aggarwal a écrit : [traduction] » P. N. déclare qu’en ce qui concerne sa capacité fonctionnelle, il peut marcher 30 minutes consécutives sans se plaindre ouvertement de douleurs thoraciques ou de dyspnée. Il affirme que le lendemain de l’exercice, il ressent un certain inconfort, mais qu’il n’est manifestement pas lié à un quelconque effortNote de bas de page 11 »;
  • Dans le même rapport daté du 13 octobre 2020, le Dr Aggarwal a écrit : [traduction] « En résumé, l’état de P. N. semble relativement stable d’un point de vue cardiaque, sans aucun symptôme manifeste d’ischémie, d’insuffisance cardiaque ou d’arythmie. Il présente un inconfort thoracique atypique qui n’est pas lié à l’effortNote de bas de page 12 »;
  • Le 11 juin 2011, le Dr Aggarwal a écrit : [traduction] « Au cours des deux dernières années, il a eu des épisodes d’inconfort atypique. Il déclare qu’en faisant de l’activité, il n’a pas de réel malaise. Cependant, le jour suivant, il a un épisode d’inconfort thoracique et un mal de tête, puis ses symptômes durent une semaine. Il n’y a pas d’exacerbation nette attribuable à l’effort dans ce cas. Je l’ai encore une fois prévenu que ses symptômes sont tout à fait atypiques dans le sens où cela se produit le lendemain et non pendant l’effortNote de bas de page 13 »;
  • Le Dr Aggarwal a déposé un rapport final après avoir fait subir au requérant une écho d’effort, le 15 juillet 2021 : [traduction] « Il se plaint d’un inconfort atypique, survenant habituellement le lendemain après un effort. Il ne se produit pas au moment de l’effort. À l’heure actuelle, je l’ai informé que ses symptômes sont atypiques et que son écho d’effort était relativement secondaire au niveau de l’effort obtenuNote de bas de page 14 ».

[26] Je constate qu’il est difficile de concilier ces rapports avec l’incapacité régulière de détenir une occupation véritablement rémunératrice. J’estime que les mots utilisés par le Dr Aggarwal ne correspondent tout simplement pas à ceux que l’on utilise habituellement pour décrire une personne tellement invalide qu’elle ne peut essentiellement pas travailler.

[27] Par exemple, je note que le Dr Aggarwal ne parle pas de douleur, mais plutôt d’inconfort, et qu’il dit même « un certain inconfort ». Les mots sont importants, et je suis d’avis qu’il y a une différence entre la douleur et l’inconfort. Le Dr Aggarwal note aussi que l’état du requérant est stable.

[28] Lorsque je compare cette preuve médicale et le témoignage du requérant, je trouve qu’il est difficile de conclure qu’il est invalide. Il y avait peu d’éléments de preuve de la fréquence de cet inconfort ou de cette douleur, de ses effets sur le requérant, de la façon dont ce dernier y fait face et de la raison exacte pour laquelle il ne peut pas travailler malgré cet inconfort ou cette douleur.

[29] Je note également que cet inconfort survient seulement après l’effort et non pendant l’effort. Il existe de nombreux emplois que le requérant pourrait exercer sans se dépenser et qui ne lui causeraient pas d’inconfort. Dans son témoignage, le requérant a précisé qu’il est capable de faire des travaux légers : [traduction] « Je peux seulement faire des travaux légers ».

[30] Compte tenu de ce qui précède, j’estime que la preuve, et plus particulièrement la preuve médicale, ne démontre pas que le requérant a des limitations fonctionnelles qui affectent sa capacité de travailler à la date de l’audience. Par conséquent, il n’a pas prouvé qu’il a une invalidité grave.

[31] Finalement, pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, il faut généralement tenir compte de ses caractéristiques personnelles. Sa capacité de travailler est ainsi évaluée sous un angle réalisteNote de bas de page 15.

[32] Il n’est pas nécessaire de le faire dans cette affaire parce que je ne crois pas que les limitations fonctionnelles du requérant le rendent régulièrement incapable de détenir une quelconque occupation véritablement rémunératrice. Cela signifie qu’il n’a pas prouvé que son invalidité était grave à ce moment‑làNote de bas de page 16.

Conclusion

[33] J’estime que le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC parce que son invalidité n’est pas grave. Étant donné que j’ai conclu que son invalidité n’est pas grave, je n’ai pas besoin d’examiner la question de savoir si elle est prolongée.

[34] Cela signifie que l’appel est rejeté.

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