Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : FH c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 327

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante/requérante : F. H.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision datée du 20 septembre 2013 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Pierre Vanderhout
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 24 mars 2022
Numéro de dossier : GP-14-324

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] F. H., le requérant, n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (« RPC »). Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] Le requérant est âgé de 72 ans. Son dernier emploi a pris fin le 24 octobre 2010, le jour où X l’a licencié. Il travaillait en tant que mécanicien de locomotive. Il a présenté une demande de pension de retraite anticipée du RPC le 19 novembre 2010, alors qu’il avait 60 ans. Il a commencé à recevoir sa pension de retraite du RPC en décembre 2010.

[4] Le requérant a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 26 mars 2013. Il a dit qu’il était invalide en raison d’une dépression chronique et de la fibromyalgie. Son médecin de famille a confirmé ces diagnosticsNote de bas de page 1. Le ministre de l’Emploi et du Développement social Canada (le « Ministre) a dit que le requérant a trop attendu pour présenter une demande de pension d’invalidité du RPC, car il recevait déjà une pension de retraite du RPC depuis plus de 15 mois. Le requérant a porté la décision du Ministre en appel à la division générale (« DG ») du Tribunal.

[5] L’appel du requérant dure depuis plus de huit ans. Le dernier membre de la DG du Tribunal au dossier a permis au requérant de procéder sur la base d’un argument constitutionnel (une « demande relative à la Charte »). Cependant, le ministre a porté cette décision en appel à la division d’appel (« DA ») du Tribunal. Le 20 novembre 2018, la DA a conclu que le requérant n’avait pas répondu aux exigences d’une demande relative à la Charte et a renvoyé le requérant à la DG pour un examen de l’appel sur le fond (la « décision de la DA »). Le requérant a ensuite présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision de la DA à la Cour d’appel fédérale (« CAF »).

[6] Il semblerait que l’affaire a stagné à la CAF. Enfin, la CAF a rejeté la demande du requérant le 28 septembre 2021Note de bas de page 2. La décision de la DA est ainsi considérée comme définitive et l’affaire est de nouveau devant la DG. Bien que la demande relative à la Charte ne puisse pas aller de l’avant, la DG peut toujours examiner les autres aspects de la demande initiale du requérant.

[7] Le requérant affirme qu’il était invalide et incapable de travailler le 24 octobre 2010. Il affirme qu’à l’époque, il ne connaissait pas la pension d’invalidité du RPC. Il affirme que le retard de sa demande était dû à un oubli. Autrement, il affirme qu’il n’avait pas la capacité de présenter une demande avant celle de mars 2013.

[8] Le ministre affirme que l’appel du requérant doit être rejeté, car il a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC plus de 15 mois après qu’il a commencé à recevoir sa pension de retraite du RPC. Le ministre affirme aussi que le requérant ne répondait pas aux exigences relatives à l’incapacité du RPC avant de présenter une demande de pension d’invalidité en mars 2013. Par conséquent, la date de sa demande ne peut pas être modifiée.

Ce que le requérant doit prouver

[9] Le requérant doit ultimement prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2013. Cette date est fondée sur ses contributions au RPCNote de bas de page 3.

[10] Cependant, le requérant doit aussi répondre aux autres exigences du Régime de pensions du Canada. Selon celui-ci, une personne ne peut pas recevoir une pension de retraite du RPC et une pension d’invalidité du RPC en même tempsNote de bas de page 4. Le Régime de pensions du Canada dit aussi qu’une pension de retraite du RPC peut être annulée et remplacée par une pension d’invalidité uniquement si la partie demanderesse est réputée invalide avant que la pension de retraite du RPC devienne payableNote de bas de page 5.

[11] Par conséquent, l’appel du requérant peut uniquement être accueilli s’il est réputé invalide avant décembre 2010. S’il ne peut pas être réputé invalide avant décembre 2010, je n’ai pas besoin d’examiner la question de savoir s’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2013.

Motifs de ma décision

[12] J’estime que le requérant ne peut pas être réputé invalide avant le début de sa pension de retraite en décembre 2010. Sa demande de pension d’invalidité du RPC a été présentée trop en retard pour que la date à laquelle il peut être réputé invalide soit avant décembre 2010. Il ne peut pas non plus modifier la date de sa demande grâce à la disposition relative à l’incapacité du RPC.

Quelle est la première date à laquelle le requérant peut être réputé invalide?

[13] La première date à laquelle le requérant peut être réputé invalide est en décembre 2011. Je vais maintenant expliquer comment j’en suis arrivé à cette date.

–     La date de la demande du requérant détermine la première date à laquelle il peut être réputé invalide

[14] Selon le Régime de pensions du Canada, une partie demanderesse de la pension d’invalidité du RPC ne peut pas être réputée invalide plus de 15 mois avant la date de la demandeNote de bas de page 6. Le requérant ne conteste pas le fait qu’il a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC en mars 2013. Le Dr Sivapalan (médecin de famille) a confirmé cette dateNote de bas de page 7. Cela signifie que le requérant ne peut pas être réputé invalide avant décembre 2011.

[15] Le requérant peut faire antidater sa demande seulement s’il répond aux exigences relatives à l’incapacité du RPCNote de bas de page 8.

–     Le requérant ne peut pas faire antidater sa demande grâce à la disposition relative à l’incapacité

[16] Le requérant a soutenu que ses problèmes de santé ont fait en sorte qu’il n’avait pas la capacité de présenter une demande de pension d’invalidité du RPC avant la date où il l’a fait. S’il peut prouver qu’il satisfait au critère du RPC relatif à l’incapacité, il serait alors possible de modifier la date de la demandeNote de bas de page 9.

[17] L’énoncé du requérant pose quelques problèmes. Le critère du RPC relatif à l’incapacité n’est pas le même que le critère du RPC relatif à l’invalidité. Le critère relatif à l’incapacité est beaucoup plus strict. Une partie demanderesse doit démontrer qu’elle « n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle celle-ci a réellement été faite » [mis en évidence par le soussignéNote de bas de page 10.]

[18] Ce critère ne prend pas en compte la capacité du requérant de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations d’invaliditéNote de bas de page 11. Il pourrait avoir la capacité de présenter une demande en vertu du Régime de pensions du Canada même s’il ne peut pas remplir le formulaire de demande.

[19] De même, il ne suffit pas de démontrer que l’idée de présenter une demande de pension d’invalidité n’est pas venue au requérant. La question n’est pas de savoir si une personne connaît la pension d’invalidité du RPC. La question est de savoir si le requérant avait la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire la demandeNote de bas de page 12.

[20] La capacité de former l’intention de faire une demande de prestations est similaire à la capacité de former l’intention de faire d’autres choix dans la vieNote de bas de page 13. Cela signifie que je peux examiner les autres activités du requérant pendant la période en question. Je constate qu’il a rempli une demande pour sa pension de retraite du RPC en novembre 2010. Il est notamment allé aux États-Unis en avril 2012 pour donner une formation dans une entreprise ferroviaireNote de bas de page 14. Cela démontre une capacité de réflexion et une capacité d’exercer des activités beaucoup plus élevée que le seuil de capacité établi par le RPC. Je note également qu’il aurait planifié cette activité avant avril 2012.

[21] Il semblerait que le requérant a rempli sa demande de pension d’invalidité du RPC par lui-même en mars 2013. Il avait toujours la capacité de conduire à ce momentNote de bas de page 15. La Cour fédérale a confirmé que des activités telles que la conduite demandent une « intention précise d’accomplir des actions précises », donc elles pourraient démontrer une capacité pour l’application du Régime des pensions du CanadaNote de bas de page 16.

[22] Je ne vois pas quoi que ce soit dans les dossiers médicaux du requérant qui pourrait prouver qu’il a atteint le niveau de déficience profonde nécessaire à démontrer une incapacité aux termes du RPC entre novembre 2010 et mars 2013. Il avait peut-être des problèmes de concentration, de mémoire et de motivation, mais cela ne suffit pasNote de bas de page 17. En effet, son psychiatre à l’époque a refusé de lui remplir une « déclaration d’incapacité ». Son psychiatre a affirmé qu’il n’a jamais été question d’incapacité pendant son traitementNote de bas de page 18.

[23] Je conclus que le requérant n’a pas établi le niveau d’incapacité qu’exige le Régime de pensions du Canada. Il avait des déficiences et aurait même pu être réputé « invalide » aux termes du RPC, mais ces déficiences n’étaient pas assez importantes pour antidater sa demande de pension d’invalidité du RPC. Par conséquent, la date de sa demande demeure le 26 mars 2013 et sa (première) date réputée d’invalidité est en décembre 2011.

Conclusion

[24] Je conclus que le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC parce que la première date à laquelle il peut être réputé invalide est un an après qu’il a commencé à recevoir sa pension de retraite du RPC. Par conséquent, il ne peut pas annuler sa pension de retraite du RPC pour la remplacer par une pension d’invalidité du RPC. Par ailleurs, comme il ne peut pas recevoir les deux pensions du RPC en même temps, il ne pourrait simplement pas être admissible à la pension d’invalidité du RPC.

[25] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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