Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : LP c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 335

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : L. P.
Représentant : Paul Sacco
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 4 mai 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Michael Medeiros
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 16 février 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelante

Date de la décision : Le 8 mars 2022
Numéro de dossier : GP-21-1207

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelante, L. P., a droit à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). Les paiements commencent en décembre 2019. Cette décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] L’appelante a 49 ans. Elle a travaillé pendant de nombreuses années dans le secteur des assurances à titre de représentante du service à la clientèle, puis de gestionnaire de cas. Elle a cessé de travailler en février 2014 en raison d’un trouble de stress post-traumatique (TSPT), d’une dépression et de l’anxiété. En 2015, elle a commencé à ressentir de graves douleurs à la main et au bras gauche. En 2018, elle a commencé à avoir régulièrement des étourdissements et des pertes de conscience. Elle a tenté un retour progressif au travail en septembre 2018, mais n’a pu le faire que jusqu’en avril 2019, lorsque ses problèmes de santé sont devenus trop difficiles à gérer. Elle n’a pas travaillé depuis.

[4] L’appelante a demandé une pension d’invalidité du RPC le 26 novembre 2020. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelante a porté en appel la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’appelante dit avoir une invalidité grave et prolongée. Elle ressent constamment de la douleur, est fatiguée, est incapable de se concentrer, est sujette à des étourdissements ou à des pertes de conscience, est anxieuse et déprimée. Elle a fait de son mieux pour retourner au travail en 2018, mais sa tentative a échoué. Elle ne voit pas comment elle pourrait gérer un emploi tout en faisant face à ses symptômes quotidiens imprévisibles.

[6] Le ministre affirme que la preuve ne corrobore pas une invalidité grave et prolongée. La preuve n’indique aucune pathologie ou déficience grave qui aurait empêché l’appelante d’exécuter un travail adapté à ses limites. L’appelante pourrait ne pas être en mesure de reprendre son emploi habituel. Cependant, cela ne signifie pas qu’elle ne peut pas accomplir d’autres tâches mieux adaptées à ses affections.

Ce que l’appelante doit prouver

[7] Pour obtenir gain de cause, l’appelante doit prouver qu’elle avait une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2020. Cette date est fondée sur ses cotisations au RPCNote de bas de page 1.

[8] Le Régime de pensions du Canada définit « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité n’est grave que si elle rend un appelant régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 2.

[10] Cela signifie que je dois examiner l’ensemble des problèmes de santé de l’appelante pour voir quel effet ils ont sur sa capacité de travailler. Je dois également tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau de scolarité et son expérience professionnelle et personnelle antérieure. Et ce pour que je puisse obtenir une image réaliste de la gravité de son invalidité. Si l’appelante est en mesure d’effectuer régulièrement un travail lui permettant de gagner sa vie, elle n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 3.

[12] Cela signifie que l’invalidité de l’appelante ne peut comporter une date prévue de rétablissement. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité empêche l’appelante de travailler longtemps.

[13] L’appelante doit prouver qu’elle a une invalidité grave et prolongée. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est invalide.

Motifs de ma décision

[14] Je conclus que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2020. J’ai pris cette décision en tenant compte des questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelante était-elle grave?
  • L’invalidité de l’appelante était-elle prolongée?

L’invalidité de l’appelante était-elle grave?

[15] L’invalidité de l’appelante était grave. J’en suis arrivé à cette conclusion en tenant compte de plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci-après.

Les limitations fonctionnelles de l’appelante affectent effectivement sa capacité de travailler

[16] L’appelante est atteinte de TSPT, de dépression, d’anxiété, de douleurs chroniques à la main ou au bras gauche et d’hypotension orthostatique (étourdissements ou pertes de conscience causés par une faible pression artérielle). Toutefois, je ne peux me concentrer sur les diagnostics de l’appelanteNote de bas de page 4. Je dois plutôt me demander si elle a des limitations fonctionnelles qui l’empêchent de gagner sa vieNote de bas de page 5. Dans le cadre de cette démarche, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelante (pas seulement le problème principal) et réfléchir à leur incidence sur sa capacité de travaillerNote de bas de page 6.

[17] Je juge que l’appelante a des limitations fonctionnelles.

Ce que l’appelante dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[18] L’appelante affirme que ses troubles de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui affectent sa capacité de travailler. Elle dit que la combinaison de ses nombreux symptômes crée des défis physiques et psychologiques qui ont un impact sur tous les aspects de sa vie, y compris le travail.

[19] Elle est atteinte de TSPT, de dépression et d’anxiété depuis de nombreuses années en raison d’une relation de 18 ans empreinte de violence physique et émotionnelle. Elle a eu plusieurs longues absences du travail entre 2011 et 2013 en raison du stress et de l’anxiété liés à la relationNote de bas de page 7. Une fois la relation terminée, en 2014, elle a connu une augmentation importante de son anxiété. Elle a cessé de travailler en février 2014 à cause de ces symptômes.

[20] Son ex-conjoint était – et demeure – une source importante de stress et d’anxiété. Outre l’impact durable des mauvais traitements passés, son comportement est demeuré menaçant et violent après la fin de la relation. L’appelante a dû obtenir une ordonnance restrictive à un moment donné. La Société de l’aide à l’enfance s’est impliquée. L’appelante s’est adressée aux tribunaux à intervalle régulier et continue de demander une pension alimentaire adéquate pour ses enfants. Elle craint toujours pour sa sécurité. Elle craint qu’un jour il aille la « renverser » et la tuer.

[21] Elle estime que son TSPT, sa dépression et son anxiété ne se sont pas vraiment améliorés depuis qu’elle a cessé de travailler en février 2014. Elle a connu nombre de hauts et de bas au fil des ans. Elle continue d’avoir de bons jours et de mauvais jours. Ne pas travailler a enlevé un stress de sa vie qui avait augmenté ses symptômes, mais pour l’essentiel, son état demeure le même.

[22] À un moment donné en 2014 ou 2015, elle a ressenti beaucoup de douleurs dans sa main ou son bras gauche. Elle éprouvait constamment de la douleur et ne pouvait pas utiliser du tout son bras gauche. Si sa main entrait en contact avec quelque chose, elle ressentait l’effet de coups douloureux dans son bras. Il a fallu plus d’un an avant qu’elle puisse consulter un spécialiste. Ils ont trouvé un kyste synovial dans son poignet gauche. Elle a subi une intervention chirurgicale en février 2016 pour faire retirer le kyste. Malheureusement, l’intervention n’a pas réglé ses douleurs.

[23] Elle ressent constamment une douleur au bras gauche. Sur une échelle de 1 à 10, elle note ses douleurs habituelles entre 5 à 7. Les mauvais jours, la douleur peut atteindre 9 ou 10 sur 10. La douleur qu’elle ressent au poignet ou à la main gauche irradie au niveau de son bras et de son aisselle. Ses doigts se contractent en forme arrondie parce qu’ils ont été trop utilisés. Le fait de toucher ou de frotter son bras provoque une sensation de picotements et de brûlure.

[24] À un moment donné en 2018, l’appelante a commencé à avoir régulièrement des étourdissements ou des pertes de conscience. Elle avait vécu ce genre de situation de façon périodique tout au long de sa vie. Elle a constaté que ces situations se sont multipliées au fil du temps en raison du stress de la violence conjugale et de la douleur chronique à son bras gauche.

[25] Les problèmes se produisent de deux façons différentes :

  • Perte de conscience – parfois, en position debout, tout devient noir. Elle laisse tomber ce qu’elle a entre les mains et son corps tremble. Elle ne sait pas combien de temps cela dure. Quand c’est terminé, elle transpire et se sent secouée et épuisée.
  • Étourdissements – parfois, lorsqu’elle passe de la position assise à la position debout ou à la marche, elle devient très étourdie et sent la pièce tourner autour d’elle. Elle doit s’asseoir au sol pour ne pas perdre conscience. Cela peut se produire n’importe où. Par la suite, elle se sent très faible et fatiguée.

[26] L’appelante dit avoir les limitations suivantes en raison de ses problèmes de santé :

  • Limitations physiques en raison d’une douleur à la main gauche – Elle ne peut pas utiliser sa main gauche sans ressentir une douleur importante. Lorsqu’elle tape, sa main gauche se contracte et subit des spasmes, et tout son bras lui fait mal. La marche peut être douloureuse à cause de l’oscillation de son bras.
  • Sommeil – La douleur dans son bras affecte son sommeil. Parfois, l’anxiété peut l’affecter aussi. Elle dort habituellement entre deux et trois heures par nuit. Quand la douleur est vraiment intense, elle ne dort pas du tout.
  • Énergie et motivation – Elle a très peu d’énergie. Elle se sent toujours fatiguée. Trois à quatre jours par semaine, elle retourne au lit une fois que ses enfants sont partis à l’école. Elle y retourne parfois pour toute la matinée. Les pertes de conscience et les étourdissements la fatiguent encore plus.
  • Concentration et mémoire – Elle a de la difficulté à se concentrer et à retenir l’information. Elle oublie les rendez-vous. Elle doit relire la même page de cinq à dix fois. Elle ne peut pas se concentrer quand la douleur est intense.
  • Interaction sociale/être en public – Elle a de la difficulté à être en public et à traiter avec des personnes qu’elle ne connaît pas. Parler au téléphone à un étranger lui cause beaucoup d’anxiété. Elle demeure craintive envers son ex-conjoint et craint de quitter la maison. Si elle sort, ses enfants ou ses amis l’accompagnent.
  • Stress/anxiété – Elle a du mal à faire face au stress, surtout en situation de nouveauté. Elle a souvent tendance à être anxieuse et à pleurer. Elle fait des crises de panique environ une fois par semaine.

Ce que la preuve médicale indique au sujet des limitations fonctionnelles de l’appelante

[27] L’appelante doit fournir une preuve médicale démontrant que ses limitations fonctionnelles ont nui à sa capacité de travailler au 31 décembre 2020Note de bas de page 8.

[28] La preuve médicale étaye ce que dit l’appelante.

[29] Le Dr Lefcoe, psychiatre, a diagnostiqué à l’appelante un trouble dépressif majeur et un trouble anxieux non précisé en mars 2013Note de bas de page 9. Ce diagnostic ainsi que le TSPT ont depuis été confirmés par d’autres médecinsNote de bas de page 10.

[30] Le TSPT, la dépression et l’anxiété de l’appelante présentent les symptômes suivants et les limitations qui y sont associéesNote de bas de page 11 :

  • Problèmes de sommeil, y compris des cauchemars liés à des traumatismes passés.
  • Crises de panique (respiration difficile et douleur thoracique).
  • Mauvaise humeur, peu d’énergie et de motivation.
  • Problèmes de mémoire, de concentration et de prise de décisions.
  • Bouleversement et larmes faciles.
  • Sensibilité au stress qui rend difficile de tolérer des facteurs de stress, même mineurs.

[31] L’appelante a été évaluée par la Dre Lanius, psychiatre, en juin 2020. La Dre Lanius a déclaré que les symptômes de longue date du TSPT et de la dépression de l’appelante font qu’il lui est très difficile de fonctionner sur le plan social et professionnelNote de bas de page 12. La Dre Lanius a conclu que [traduction] « compte tenu de la chronicité de [son] TSPT et des symptômes dépressifs, son pronostic de retour au travail demeure sombre et il est peu probable qu’elle puisse un jour reprendre le travail »Note de bas de page 13.

[32] L’appelante a demandé des soins médicaux pour une douleur invalidante à la main gauche en juillet 2015Note de bas de page 14. On lui a diagnostiqué un kyste synovial au poignet gauche en décembre 2015Note de bas de page 15. Le kyste a été enlevé par intervention chirurgicale en février 2016Note de bas de page 16. Elle a continué de ressentir de la douleur au poignet gauche après cette interventionNote de bas de page 17. En janvier 2020, elle a reçu un diagnostic de syndrome douloureux régional complexe chroniqueNote de bas de page 18.

[33] L’appelante a connu de plus en plus d’étourdissements à partir de décembre 2017Note de bas de page 19. Elle a consulté son médecin de famille, la Dre Homji, en mars 2018Note de bas de page 20. En juillet 2018, le Dr Mendonca, neurologue, a diagnostiqué ces étourdissements comme une présyncope (vertiges; sentiment de faiblesse) liée à une faible tension artérielle. En mars 2019, elle a commencé à avoir des pertes de conscience en plus des étourdissementsNote de bas de page 21. L’hypotension orthostatique, une forme de basse pression artérielle, a été confirmée comme diagnostic en mai 2019Note de bas de page 22.

[34] La preuve médicale confirme que les problèmes de santé de l’appelante l’empêchaient de travailler au 31 décembre 2020.

[35] J’examinerai ensuite si l’appelante a suivi les conseils médicaux.

L’appelante a suivi les conseils médicaux

[36] Pour recevoir une pension d’invalidité, l’appelante doit suivre les conseils médicauxNote de bas de page 23. Si l’appelante ne suit pas ces conseils, elle doit avoir une explication raisonnable pour ne pas le faire. Je dois également examiner l’effet, le cas échéant, que les conseils médicaux auraient pu avoir sur son invaliditéNote de bas de page 24.

[37] L’appelante a suivi les conseils médicauxNote de bas de page 25. Elle a cessé de prendre certains de ses médicaments, mais son explication est raisonnable.

[38] L’appelante consulte régulièrement une psychiatre depuis au moins 2014Note de bas de page 26. Sa psychiatre de longue date, la Dre Upfold, a dit qu’elle [traduction] « travaille fort dans le cadre du traitement »Note de bas de page 27. Elle a participé à des programmes de conditionnement au travail avec des ergothérapeutes en 2014 et 2016Note de bas de page 28. En 2018 et 2019, elle a participé à un programme de thérapie intensive qui a fourni du soutien avant et pendant une tentative de retour progressif au travailNote de bas de page 29.

[39] Elle a consulté de nombreux spécialistes au fil des ans pour s’attaquer à ses douleurs chroniques à la main, à ses étourdissements et à ses pertes de conscience. Elle a essayé de se faire injecter de la cortisone pour soulager la douleur. Ces injections n’ont eu qu’un impact mineurNote de bas de page 30.

[40] On lui a prescrit de nombreux types de médicaments pour traiter sa dépression, son anxiété et ses douleurs chroniques aux mains et aux brasNote de bas de page 31. Elle a dû cesser d’en prendre certains à cause d’effets secondairesNote de bas de page 32. Elle a pris du Cymbalta pendant cinq ans, mais a constaté que ce médicament ne soulageait pas la douleur et qu’elle se sentait comme un « zombie »Note de bas de page 33. On lui a prescrit de l’amitriptyline, aussi pour la dépression et la douleur. Ce médicament apaisait un peu sa douleur à la main et au bras, mais la rendait nauséeuse et encore plus étourdie que d’habitude. Elle continue de prendre du lorazépam pour l’anxiété au besoin, ce qui représente habituellement un demi-comprimé à un comprimé complet par jour.

[41] Je conclus que les choix de l’appelante au sujet de la médication sont raisonnables. Elle ne prend pas de médicaments en raison des effets secondaires importants. Elle prend néanmoins du lorazépam au besoin. Elle a déclaré à l’audience que son médecin de famille, la Dre Homji, ne recommande actuellement aucun médicament qu’elle ne prend pas.

[42] Je dois maintenant décider si l’appelante peut effectuer sur une base régulière d’autres types de tâches. Pour pouvoir être qualifiées de sévères, les limitations fonctionnelles de l’appelante doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, pas seulement dans son emploi habituelNote de bas de page 34.

L’appelante ne peut pas travailler dans le monde réel

[43] Lorsque je décide si l’appelante peut travailler, je ne peux pas simplement examiner ses problèmes de santé et leur incidence sur ce qu’elle peut faire. Je dois également tenir compte de facteurs comme :

  • son âge
  • son niveau de scolarité
  • ses compétences linguistiques
  • son expérience de travail et de vie antérieure.

[44] Ces facteurs m’aident à décider si l’appelante peut travailler dans le monde réel, c’est-à-dire s’il est réaliste de dire qu’elle peut travaillerNote de bas de page 35.

[45] Je conclus que l’appelante ne peut pas travailler dans le monde réel. Ses graves limitations fonctionnelles ne lui donnent aucune capacité de travailler. Elle n’a que 49 ans, a fait des études postsecondaires et possède une solide expérience de travail. Ce sont des facteurs qui pourraient l’aider à trouver du travail. Toutefois, ces facteurs ne compensent pas ses limitations qui l’empêchent d’accomplir les exigences de base d’un emploi.

[46] Les problèmes de santé de l’appelante limitent grandement sa capacité de faire ce qui suit :

  • Accomplir des tâches de base – ses symptômes nuisent aux activités quotidiennes. Elle ressent constamment de la douleur. Elle n’a pas d’énergie. Elle a de la difficulté à se concentrer. Elle se sent souvent anxieuse. Elle est très sensible au stress.
  • Respecter un horaire – La douleur, les étourdissements/pertes de conscience, l’anxiété et la dépression sont tous imprévisibles. Ses divers symptômes peuvent se répercuter les uns sur les autres – par exemple, le stress augmente ses douleurs à la main et au bras.
  • Fonctionner en public – Elle craint de sortir en public seule. Elle a de la difficulté à interagir avec des inconnus. 

[47] Je ne suis pas d’accord avec le ministre pour dire que l’appelante a la capacité d’effectuer un autre travail. Son retour progressif au travail de septembre 2018 à avril 2019 est une preuve solide qu’elle ne peut effectuer aucun travail. Il s’agissait de sa meilleure chance de conserver un emploi véritablement rémunérateur. En effet, elle retournait à un emploi qu’elle connaissait avec un soutien thérapeutique important et des mesures d’adaptation en milieu de travail. Malheureusement, la combinaison de ses problèmes de santé a fini par excéder sa capacité de continuer à travailler.

[48] Avant et pendant son retour progressif au travail, l’appelante bénéficiait de l’aide d’un service de santé privé en plus de sa psychothérapeute attitrée, la Dre Upfold. Le service de santé a offert une thérapie comportementale individuelle ainsi que des exercices de conditionnement au travail et du soutien à la main et au bras gaucheNote de bas de page 36. Elle a suivi un traitement actif pendant 37 semaines (126 heures de contact thérapeutique) avant son retour progressif au travail en septembre 2018Note de bas de page 37. Elle a continué de recevoir ce soutien supplémentaire jusqu’en mars 2019Note de bas de page 38.

[49] L’appelante était enthousiaste de reprendre le travail. À partir de cette époque, les notes de sa psychiatre, la Dre Upfold, et de son médecin de famille, la Dre Homji, semblaient positivesNote de bas de page 39. Elle a commencé à travailler à temps partiel avec de la formation et du jumelage pendant les quatre ou cinq premiers mois et elle a fini par travailler à temps plein en janvier 2019Note de bas de page 40.

[50] Malgré toute la préparation et le soutien, l’appelante a continué de ressentir des symptômes actifs de ses troubles de santé après son retour au travail. Elle a manqué environ 24 jours de travail en 7 mois en raison de ses troublesNote de bas de page 41. Elle dit qu’elle voulait travailler et se forçait à le faire. Cependant, en avril 2019, elle a dû cesser de travailler parce qu’elle ne pouvait plus exercer son emploi tout en composant avec ses douleurs à la main et au bras, les étourdissements, le stress et l’anxiété. Elle ne croit pas qu’un statut à temps partiel aurait fait une différence en raison de la gravité de ses symptômes quotidiens.  

[51] Je conclus que l’appelante n’a aucune capacité de travailler. La preuve démontre que tout emploi causerait beaucoup de douleur et de détresse. À mon avis, il est irréaliste de s’attendre à ce qu’elle puisse gérer ses diverses conditions médicales tout en répondant aux exigences d’un emploi. Elle dit qu’elle n’en peut plus après avoir fait son possible pour retourner au travail en 2018, et je la crois.

[52] Je conclus que l’invalidité de l’appelante était grave au 31 décembre 2020.

L’invalidité de l’appelante était-elle prolongée?

[53] L’invalidité de l’appelante était prolongée

[54] Les problèmes de l’appelante sont devenus invalidants en avril 2019, lorsqu’elle a cessé de travailler pour la dernière fois. Il se peut qu’elle n’ait jamais retrouvé la capacité d’occuper un emploi véritablement rémunérateur après avoir cessé de travailler la première fois en février 2014. Cependant, en avril 2019, elle avait perdu toute capacité de travail qu’il lui restait. Ces affections se sont poursuivies depuis et elles se poursuivront probablement indéfinimentNote de bas de page 42.

[55] Les facteurs qui suivent m’amènent à juger que l’invalidité de l’appelante est susceptible d’être de longue durée, continue et indéfinie :

  • Elle a commencé à s’absenter du travail en raison de ses problèmes de santé en 2011 et n’est parvenue à travailler que pendant environ sept mois depuis février 2014, malgré des années de psychothérapie et d’autres efforts de traitement réguliers.
  • Sa tentative infructueuse de reprendre graduellement le travail en septembre 2018 a été faite à la suite de longues séances d’ergothérapie et de thérapie comportementale.
  • Elle a consulté de nombreux spécialistes pour ses douleurs à la main et au bras et ses étourdissements/pertes de conscience. Cependant, aucune recommandation n’a permis d’apporter une amélioration durable.
  • La Dre Lanius, psychiatre, a déclaré en juin 2020 que [traduction] « compte tenu de la chronicité de ses symptômes et de son manque de réponse significative au traitement, son état l’empêchera probablement d’obtenir et de conserver un autre emploi convenable maintenant et à l’avenir »Note de bas de page 43.

[56] Je conclus que l’invalidité de l’appelante était prolongée au 31 décembre 2020.

Début des paiements

[57] L’appelante avait une invalidité grave et prolongée en avril 2019, lorsqu’elle a cessé de travailler en raison de ses problèmes médicaux.

[58] Toutefois, en vertu du Régime de pensions du Canada, une appelante ou un appelant ne peut être considéré comme invalide plus de 15 mois avant que le ministre reçoive sa demande de pension d’invalidité. Par la suite, il y a une période d’attente de quatre mois avant le début des paiementsNote de bas de page 44.

[59] Le ministre a reçu la demande de l’appelante en novembre 2020Note de bas de page 45. Cela signifie qu’elle est considérée comme devenue invalide en août 2019.

[60] Le paiement de sa pension débute en décembre 2019.

Conclusion

[61] Je conclus que l’appelante a droit à une pension d’invalidité du RPC parce que son invalidité est grave et prolongée.

[62] Cela signifie que l’appel est accueilli.

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