Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : LM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 636

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : L. M.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante ou représentant : Tiffany Glover

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision rendue le 12 juillet 2019 par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : George Tsakalis
Date de la décision : Le 15 juin 2022
Numéro de dossier : GP-20-975

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Décision

[1] L’appelante, L. M., n’a pas dûment signifié son avis de question constitutionnelle et déposé au Tribunal la preuve de signification, comme l’exige le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. L’audience de l’appel fondé sur la Charte canadienne des droits et libertés prévue les 16 et 17 juin 2022 ne peut pas avoir lieu et est ajournée. Elle aura lieu les 26 et 27 septembre 2022. Je donne à l’appelante jusqu’au 26 août 2022 pour signifier son avis de question constitutionnelle et déposer une preuve de signification au Tribunal, comme l’exige le Règlement sur le Tribunal de la séurité sociale. Les motifs qui suivent expliquent pourquoi j’ai pris cette décision.

Aperçu

[2] Le présent appel porte sur une contestation constitutionnelle de l’article 44(1)(d) et de l’article 58(1) du Régime de pensions du Canada (RPC). L’appelante affirme que ses droits à l’égalité conférés à l’article 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés ont été violésNote de bas de page 1.

[3] L’appelante est née le X. Elle avait 34 ans lorsque son époux est décédé le 9 juillet 1998.

[4] L’appelante a présenté une demande de pension de survivant en 1998. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande puisqu’elle ne répondait pas aux critères d’admissibilité à la pension de survivant lorsque son conjoint est décédé en 1998. Elle n’avait pas 35 ans, elle n’avait pas d’enfants à sa charge et elle n’était pas handicapéeNote de bas de page 2.

[5] Le RPC a été modifié le 1er janvier 2019. À partir de cette date, les conditions d’admissibilité à la pension de survivant lorsqu’un survivant est âgé de moins de 35 ans ont été éliminées. Le ministre a écrit à l’appelante en janvier 2019. Le ministre l’a invitée à présenter de nouveau une demande de pension de survivantNote de bas de page 3. Le ministre a approuvé sa demande. L’appelante a commencé à recevoir une pension de survivant en janvier 2019.

[6] L’appelante a demandé au ministre de réviser sa décision. Elle a demandé le paiement rétroactif de la pension de survivant depuis août 1998Note de bas de page 4. La ministre a rejeté sa demande parce que selon le RPC, aucun paiement ne pouvait être fait avant le 1er janvier 2019Note de bas de page 5. L’appelante a interjeté appel de la décision de révision du ministre auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada.

[7] L’appelante a participé à une audience devant la division générale le 8 novembre 2019. Le membre de la division générale a rejeté son appel le 14 novembre 2019. Ce dernier a conclu que l’appelante ne pouvait pas recevoir de pension de survivant pour les périodes précédant janvier 2019.

[8] L’appelante a fait appel de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. La division d’appel a accueilli l’appel le 22 juin 2020 parce que la division générale n’avait pas offert à l’appelante un processus équitable. La division d’appel a conclu que la division générale n’avait pas tenu compte des arguments selon lesquels les articles du RPC cités violaient les droits protégés de l’appelante selon la Charte.

[9] La division d’appel a renvoyé l’affaire à la division générale pour réexamen, avec la directive que je devrais examiner si l’avis de question constitutionnelle déposé par l’appelante (voir le dossier à AD9) était suffisant pour que la demande fondée sur la Charte doive être tranchée.

[10] J’ai finalement décidé que l’avis de question constitutionnelle déposée par l’appelante satisfaisait aux exigences du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Il spécifie la disposition en cause et présente des observations à l’appui de la question soulevée. J’ai décidé que l’avis de question constitutionnelle de l’appelante contenait un exposé de l’argument fondé sur la Charte. L’appelante a soutenu qu’elle était victime de discrimination en vertu de la Charte en raison de son âge. Elle ne lui manquait que deux mois pour atteindre l’âge de 35 ans lorsque son conjoint est décédé. L’âge est un motif de discrimination énuméré au paragraphe 15(1) de la CharteNote de bas de page 6.

[11] J’ai tenu plusieurs conférences préparatoires pour discuter de questions de procédure, y compris la remise de dossiers pour le présent appel fondé sur la Charte. J’ai conclu que le dossier de l’appelante soulevait suffisamment de questions pour exiger au ministre de remettre un dossierNote de bas de page 7. Le ministre a répondu et a présenté son dossierNote de bas de page 8. L’appelante a déposé un dossier de répliqueNote de bas de page 9.

[12] Lors de notre dernière conférence préparatoire, le 12 avril 2022, j’ai informé l’appelante que le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale l’obligeait à signifier son avis de question constitutionnelle au procureur général du Canada et au procureur général de chaque province et à fournir une preuve de signification de son avis au Tribunal au moins 10 jours avant l’audienceNote de bas de page 10.

[13] J’ai demandé à l’appelante de signifier son avis de question constitutionnelle et de fournir une preuve de signification au Tribunal au plus tard le 27 mai 2022, afin que l’audience puisse se dérouler les 16 et 17 juin 2022Note de bas de page 11.

[14] Le Tribunal a reçu un courriel de l’appelante le 25 mai 2022. Elle a dit qu’elle avait envoyé son avis de question constitutionnelle par courriel aux provinces et qu’elle prévoyait envoyer une télécopie aux procureurs généraux du Nunavut et des Territoires du Nord-OuestNote de bas de page 12.

[15] Le représentant juridique du ministre a écrit au Tribunal le 31 mai 2022. Le ministre a fait valoir que l’appelante n’avait pas adéquatement signifié son avis de question constitutionnelle comme le prévoit le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Le ministre a fait valoir les arguments suivants :

  • L’appelante a soulevé de nouveaux arguments non pertinents et a inadéquatement inclus des pages des observations de l’intimé dans son avis de question constitutionnelle.
  • L’appelante n’a pas respecté la date limite pour signifier l’avis de question constitutionnelle aux procureurs généraux provinciaux et au procureur général du Canada, et elle n’a pas fourni de preuve de signification de son avis de question constitutionnelle à ceux à qui elle prétendait avoir signifié son avisNote de bas de page 13.

[16] Le ministre m’a demandé d’instruire l’appelante de remplir de nouveau un avis de question constitutionnelle adéquat et de fournir une preuve de signification comme l’exige le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale et dans le délai prévu par la loi.

Question en litige

[17] L’appelante a-t-elle correctement signifié son avis de question constitutionnelle conformément au Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale?

Analyse

[18] Je suis d’accord avec le ministre pour dire que l’appelante n’a pas bien signifié son avis de question constitutionnelle comme le prévoit le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[19] Un avis de question constitutionnelle est un document important. Ce dernier joue un rôle essentiel et fait en sorte que les cours de justice et les tribunaux disposent d’un dossier de preuve complet lorsqu’ils examinent des violations présumées à la Charte. Un avis de question constitutionnelle fait en sorte qu’une loi ne puisse pas être déclarée inconstitutionnelle avant que le gouvernement n’ait eu la possibilité de la défendre pleinementNote de bas de page 14. Un avis de question constitutionnelle est obligatoire et je ne peux pas envisager une contestation constitutionnelle en l’absence d’un avis signifié au procureur général du Canada et à chaque procureur général provincial. Il ne s’agit pas d’une simple formalité ou d’un détail technique. Je ne peux pas libérer l’appelante de son obligation de signifier et de déposer une preuve de signification d’un avis de question constitutionnelleNote de bas de page 15.

[20] L’appelante n’a pas bien signifié son avis de question constitutionnelle comme le prévoit le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Elle n’a pas signifié l’avis que j’ai jugé conforme aux exigences du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Elle n’a pas non plus servi l’avis qui figurait dans ses observations à la page IS15-4Note de bas de page 16 du dossier d’appel. L’appelante a plutôt signifié un tout nouveau document. Ce document contenait de nouveaux arguments qui n’indiquaient pas précisément quel article du RPC l’appelante contestait.

[21] Je suis d’accord avec l’argument du ministre selon lequel, étant au courant de l’affaire, il aurait été en mesure de déduire de façon informée quelles dispositions l’appelante contestait. Mais on ne peut pas en dire autant des procureurs généraux des provinces, pour qui les seuls détails au sujet du présent appel se trouvent dans l’avis de question constitutionnelle que l’appelante leur a servi. Sans connaître adéquatement le contexte, les procureurs généraux des provinces sont incapables d’examiner l’avis ou la nature de la contestation constitutionnelle et de prendre une décision éclairée quant à sa participation ou non à une audience.

[22] L’avis de question constitutionnelle que l’appelante a tenté de servir à tous les procureurs généraux provinciaux contient également des pages d’un rapport d’expert du ministre, ce qui ne convient pas à un avis de question constitutionnelle.

[23] L’appelante a également déclaré qu’elle n’avait pas encore servi les procureurs généraux du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest. Elle a dit avoir envoyé un courriel aux procureurs généraux des provinces. Mais elle n’a fourni aucune preuve de signification de l’un ou l’autre des destinataires requis. On ne sait pas non plus si l’appelante a bien signifié son avis au procureur général du CanadaNote de bas de page 17.

[24] Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale indique que si la preuve de signification de l’avis de question constitutionnelle n’a pas été déposé au moins 10 jours avant une audience, le Tribunal peut ajourner ou reporter l’audience.

[25] L’audience devait avoir lieu le 16 juin 2022. Cela signifie que l’appelante devait signifier son avis de question constitutionnelle au procureur général du Canada et à tous les procureurs généraux provinciaux, et déposer une preuve de signification au Tribunal avant le 6 juin 2022. L’appelante n’a pas respecté ce délai.

[26] L’audience prévue les 16 et 17 juin 2022 ne peut pas avoir lieu et est donc ajournée. Je donne à l’appelante jusqu’au 26 août 2022 pour signifier son avis de question constitutionnelle et fournir une preuve de signification au Tribunal, comme l’exige le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. L’appelante devrait signifier son avis de question constitutionnelle (celui qui figure aux pages AD9 et IS15-4 du dossier d’appel) au procureur général du Canada et à tous les procureurs généraux des provinces. Elle ne peut pas signifier un nouvel avis de question constitutionnelle qui contient des arguments qui ne figurent pas au dossier d’appel.

[27] Si l’appelante signifie avec succès son avis au procureur général du général [sic] et à tous les procureurs généraux des provinces et fournit une preuve de signification au Tribunal, comme l’exige le Règlement du Tribunal de la sécurité sociale, au plus tard le 26 août 2022, l’audience portant sur la Charte sera reportée aux 26 et 27 septembre 2022.

[28] Si l’appelante ne signifie pas son avis de question constitutionnelle au procureur général du général [sic] et à tous les procureurs généraux des provinces et ne fournit pas une preuve de signification au Tribunal, comme l’exige le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, au plus tard le 26 août 2022, le membre du Tribunal tiendra une conférence préparatoire pour décider si son appel fondé sur la Charte doit être rejeté.

Conclusion

[29] L’audience portant sur la Charte prévue les 16 et 17 juin 2022 ne peut avoir lieu et est ajournée. Elle aura lieu les 26 et 27 septembre 2022. Je donne à l’appelante jusqu’au 26 août 2022 pour signifier son avis de question constitutionnelle et fournir une preuve de signification au Tribunal, comme l’exige le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

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