Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : WA c Ministre de l’Emploi et du Développement social et SA, 2023 TSS 1847

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : W. A.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Partie mise en cause : S. A.

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 6 décembre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Pierre Vanderhout
Mode d’audience : Par écrit
Date de la décision : Le 11 septembre 2023
Numéro de dossier : GP-23-433

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, W. A., n’a pas établi que le ministre de l’Emploi et du Développement social a effectué à tort le partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension (PGNAP ou partage des crédits) au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). J’explique dans la présente décision pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant a 60 ans. Il s’est marié avec S. J. (S. J.) le 31 décembre 2012Note de bas page 1. Ils se sont séparés le 2 novembre 2020Note de bas page 2. Leur divorce est entré en vigueur le 13 mai 2022Note de bas page 3. Tous ces événements ont eu lieu au Manitoba, où S. J. et l’appelant vivent encore.

[4] S. J. a demandé le partage des crédits du RPC le 25 mai 2022. Elle a demandé le partage égal des cotisations au RPC qu’elle et l’appelant ont versées pendant leur mariage et jusqu’à leur séparation. Le ministre a accueilli la demande de S. J. et a maintenu sa décision après révision. L’appelant a ensuite fait appel devant le Tribunal.

[5] L’appelant s’oppose au partage des crédits du RPC. Il affirme qu’il verse des paiements suffisants à S. J. au titre de la pension alimentaire. Il ajoute que, malgré le déclin de son état de santé physique, il doit continuer à travailler en raison de ses obligations financières. Il dit que S. J. peut subvenir à ses besoins. Il affirme qu’elle a déclaré un faible revenu à l’Agence du revenu du Canada. Il se demande également si elle a droit à un partage des crédits du RPC de ses autres ex‑conjoints. 

[6] Le ministre affirme que les dates de mariage et de cohabitation ne sont pas contestées. Il soutient que le partage des crédits du RPC a été effectué conformément à la loi. Aucune des exceptions possibles ne s’applique. Le ministre affirme qu’il n’a pas le pouvoir discrétionnaire d’empêcher le partage des crédits du RPC pour la période au cours de laquelle l’appelant et S. J. ont cohabité.

[7] L’appelant a demandé la tenue d’une audience écriteNote de bas page 4. L’audience s’est déroulée par écrit, car le Tribunal doit tenir ses audiences selon le mode demandé par l’appelantNote de bas page 5.

Ce que l’appelant doit prouver

Pour obtenir gain de cause, l’appelant doit prouver que le ministre a mal appliqué les dispositions sur le partage des crédits du RPC à l’égard de sa relation avec S. J.

Motifs de ma décision

[8] Je conclus que l’appelant et S. J. ont cohabité dans le cadre d’une relation conjugale du 31 décembre 2012 au 2 novembre 2020. Cette période commence à la date de leur mariage et se termine à la date de leur séparation. Cela signifie qu’un partage des crédits du RPC doit être effectué pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2019.

[9] Je vais maintenant expliquer les raisons de cette décision.

Le mariage de l’appelant avec S. J. crée un droit à un partage des crédits du RPC

[10] La loi prescrit qu’un partage des crédits du RPC doit être effectué pour un ancien conjoint qui en fait la demande. Le ministre doit le faire dès qu’il est informé du jugement de divorce. Il n’a aucun pouvoir discrétionnaire. La loi prescrit qu’il doit y avoir partageNote de bas page 6. Celui‑ci doit être effectué une fois que le ministre reçoit les renseignements exigés par le Règlement sur le Régime de pensions du Canada (Règlement sur le RPC)Note de bas page 7.

[11] La preuve montre que S. J. a demandé le partage des crédits du RPCNote de bas page 8. Elle établit également que le ministre a reçu les renseignements requis pour effectuer ce partageNote de bas page 9. Le ministre doit donc effectuer le partage pour la période applicable.

Dates à l’égard desquelles le partage des crédits du RPC s’applique

[12] Je ne vois aucune raison de remettre en question les dates de cohabitation. Les parties s’entendent sur ces dates. Ni l’appelant ni S. J. n’ont dit qu’ils avaient cohabité avant le mariage.

[13] Le Règlement sur le RPC prévoit que la période de partage des crédits du RPC commence le premier mois de l’année où les parties se sont mariées ou ont commencé à vivre ensemble dans une relation conjugaleNote de bas page 10. Comme l’appelant et S. J. se sont mariés en décembre 2012, la période du partage des crédits du RPC doit commencer en janvier 2012.

[14] Le Règlement sur le RPC prévoit également que les parties sont réputées ne pas avoir cohabité pendant l’année où elles ont commencé à vivre séparémentNote de bas page 11. Comme l’appelant et S. J. se sont séparés en novembre 2020, la période du partage des crédits du RPC ne peut se prolonger au‑delà du mois de décembre 2019.

[15] Je conclus que le partage des crédits du RPC s’applique pour la période de janvier 2012 à décembre 2019. Il s’agit de la même période pour laquelle le ministre a effectué le partage, selon leurs observationsNote de bas page 12. Toutefois, le ministre a désigné incorrectement cette période à un moment donné dans la décision de révisionNote de bas page 13. Il devrait s’assurer que le partage a été effectué pour la bonne période.

Le partage des crédits peut-il être évité pour d’autres motifs?

[16] Comme il est mentionné dans les observations du ministre, il existe deux exceptions très limitées à l’obligation de faire le partage des crédits du RPC.

[17] Premièrement, le ministre ne peut pas effectuer un partage des crédits du RPC si cela aurait pour effet de diminuer le droit à des prestations du RPC des deux ex‑conjointsNote de bas page 14. Bien que l’appelant affirme que le partage a eu pour effet de diminuer son droit au RPC, je ne vois aucune preuve qu’il a diminué le droit de S. J. Pour ainsi dire tous les partages entraînent une hausse de ce droit pour un conjoint et une diminution pour l’autre.

[18] Deuxièmement, dans certaines conditions, les dispositions d’un contrat écrit ou d’une ordonnance d’un tribunal peuvent empêcher le ministre d’effectuer le partage des crédits du RPCNote de bas page 15.

[19] Toutefois, il faut notamment que les dispositions en question qui empêchent le partage des crédits du RPC soient expressément autorisées selon le droit provincial applicable à de tels contratsNote de bas page 16. Dans la présente affaire, le droit du Manitoba s’appliquerait. Toutefois, je ne vois aucune indication que le droit du Manitoba autorise de tels contrats pour empêcher un partage. Le Québec, la Saskatchewan, l’Alberta et la Colombie‑Britannique semblent être les seules provinces à le permettre.

[20] Quoi qu’il en soit, je ne vois aucune preuve d’un contrat écrit ou d’une ordonnance du tribunal qui traite expressément du partage des crédits du RPC pour S. J. et l’appelant. Le RPC prescrit qu’un tel contrat ou ordonnance doit faire expressément mention du RPC et exprimer l’intention des parties de ne pas faire le partage des crédits du RPCNote de bas page 17.

[21] Dans ses observations, l’appelant soutient que je ne devrais pas appliquer la loi telle qu’elle est rédigée parce qu’il en subirait une injustice. Il affirme également que S. J. peut subvenir à ses besoins par d’autres moyens. Toutefois, je signale que le Tribunal est une création de la loi. Il ne peut appliquer la loi que tel qu’elle est rédigée. Il ne peut accorder que des mesures de réparation que la loi lui permet d’accorderNote de bas page 18. Je ne peux pas passer outre à la loi simplement parce que cela peut avoir des répercussions différentes sur les parties.

[22] Je ne peux pas non plus tenir compte des ententes financières que S. J. pourrait avoir conclues dans le cadre de ses autres mariages. Le présent appel ne concerne que le partage des crédits du RPC pour S. J. et l’appelant. Je ne peux pas non plus tirer de conclusions sur le revenu véritable de S. J. ou ses cotisations au RPC pendant la période visée aux fins du partage des crédits du RPC. Les questions sur le revenu sont normalement réglées auprès de l’Agence du revenu du Canada ou de la Cour canadienne de l’impôt.

Conclusion

[23] J’en arrive à la conclusion que le ministre a conclu à juste titre qu’il devait effectuer le partage des crédits du RPC pour la période de janvier 2012 à décembre 2019. Toutefois, en raison d’une déclaration qu’il a faite dans la décision de révision et qui pourrait semer la confusion, le ministre doit s’assurer qu’il a effectué correctement le partage des crédits du RPC pour ces dates.

[24] L’appel est donc rejeté.

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