Régime de pensions du Canada (RPC) – autre

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[TRADUCTION]

Citation : AY c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 231

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : A. Y.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision datée du 31 juillet 2023 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Antoinette Cardillo
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 17 janvier 2024
Numéro de dossier : GP-23-1566

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, A. Y., ne peut pas obtenir un délai supplémentaire pour demander au ministre de l’Emploi et du Développement social de réviser sa décision et de lui verser des paiements rétroactifs de sa pension de retraite du Régime de pensions du Canada (RPC).

[3] Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[4] L’appelant a demandé une pension de retraite du RPC en ligne le 20 décembre 2021Note de bas page 1.

[5] Le 8 janvier 2022, le ministre a envoyé une lettre à l’appelant pour approuver sa demande. La pension était payable à compter de janvier 2022 (un mois après la réception de la demande).

[6] L’appelant a demandé une révision le 23 mai 2023, soit 545 jours après la date de la décision initiale. Il a demandé que sa pension commence en juin 2019, lorsqu’il a eu 60 ans. Il a dit qu’il n’a pas été informé qu’il pouvait demander des prestations de retraite anticipée.

[7] Le 31 juillet 2023, le ministre a refusé d’accorder à l’appelant une prolongation du délai de 90 jours pour présenter une demande de révision.

[8] Selon le ministre, l’appelant n’a pas présenté de demande de révision dans les 90 jours suivant la réception de la décision initiale. La demande de révision a été reçue plus d’un an après le délai de 90 jours accordé. Le ministre devait tenir compte de quatre critères pour décider si la demande de révision était accordée ou refusée.

[9] L’appelant a fait appel de la décision du ministre de refuser sa demande de révision à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

Ce que je dois décider

[10] Je dois décider si la demande de révision de l’appelant est en retard.

[11] Si oui, je dois aussi décider si le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire (c’est-à-dire rendu sa décision correctement) en refusant de donner à l’appelant plus de temps pour lui demander de réviser sa décisionNote de bas page 2.

[12] Si le ministre n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, je rendrai la décision qu’il aurait dû rendre. Ma décision portera sur la question de savoir si l’appelant a une explication raisonnable pour justifier son retard et s’il a démontré une intention persistante de demander au ministre de réviser sa décision. J’examinerai aussi si sa demande de révision a une chance raisonnable de succès et si un délai supplémentaire est injuste pour l’autre partie.

Motifs de ma décision

La demande de révision de l’appelant était en retard

[13] La demande de révision de l’appelant était en retard. Il a demandé au ministre de réviser sa décision du 8 janvier 2022 plus d’un an après le jour où elle lui a été communiquée. Sa demande de révision a été reçue le 23 mai 2023.

[14] Une partie appelante a 90 jours pour demander au ministre de réviser une décisionNote de bas page 3. Si elle attend plus de 90 jours, sa demande de révision est considérée comme étant en retard.

[15] L’appelant affirme ne pas avoir reçu la décision du ministre datée du 8 janvier 2022. Toutefois, le ministre a déclaré qu’il n’y avait pas d’avis de courrier retourné ou non livré inscrit au dossier et que toutes les lettres adressées à l’appelant sont envoyées à la même adresse.

[16] J’estime que l’appelant a demandé au ministre de réviser sa décision du 8 janvier 2022 plus d’un an après le jour où elle lui a été communiquée.

Ce qu’il faut considérer lorsqu’une demande de révision est en retard

[17] Le ministre peut réviser une décision même si la demande de révision est en retard. Pour que cela se produise, la loi prévoit qu’une partie appelante doit convaincre le ministre de deux choses.

[18] La partie appelante doit démontrer ce qui suitNote de bas page 4 :

  • Elle a une explication raisonnable pour justifier son retard.
  • Elle a toujours voulu demander au ministre de réviser sa décision, c’est ce qu’on appelle son « intention constante ».

[19] Si une partie appelante a demandé au ministre de réviser sa décision plus de 365 jours après qu’elle lui a été communiquée par écrit, la loi prévoit que la partie appelante doit aussi convaincre le ministre de deux autres choses.

[20] La partie appelante doit démontrer ce qui suitNote de bas page 5 :

  • Sa demande de révision a une chance raisonnable de succès.
  • Le fait d’accorder plus de temps ne serait pas injuste envers une autre partie.

[21] L’appelant doit répondre à ces quatre critères. S’il ne remplit pas l’un de ces critères, il n’aura pas droit à une révision de la décision rendue par le ministre le 8 janvier 2022.

Le ministre doit exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire

[22] La décision du ministre d’examiner ou non une demande tardive de révision est discrétionnaire. Le pouvoir discrétionnaire est le pouvoir de décider de faire ou non quelque chose. Le ministre doit exercer son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaireNote de bas page 6.

[23] Si le ministre a fait l’une des choses suivantes, il n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaireNote de bas page 7 :

  • agir de mauvaise foi;
  • agir dans un but ou pour un motif irrégulier;
  • considérer un facteur non pertinent;
  • ignorer un facteur pertinent;
  • agir de façon discriminatoire (injuste).

[24] Mon rôle n’est pas de déterminer l’issue de la révision ni de décider si le ministre a rendu la bonne décision, mais plutôt de décider si le pouvoir discrétionnaire a été exercé de façon judiciaire. Il incombe à l’appelant de prouver que le ministre n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire comme il se doit.

Le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire

[25] Le ministre devait tenir compte des quatre critères suivants :

i. Explication raisonnable pour le retard

[26] Le ministre a tenu compte de l’explication fournie par l’appelant pour ce critère.

[27] Une lettre automatisée (lettre d’avis d’admissibilité) a été envoyée le 8 janvier 2022 pour informer l’appelant du montant de sa pension de retraite, de la date d’entrée en vigueur et de ses droits de demander une révision. L’appelant a déclaré qu’il n’avait pas reçu cette lettre. Cependant, le ministre n’a pas de courrier non livrable ni de courrier retourné inscrit au dossier. Il a aussi ajouté que toutes les lettres adressées à l’appelant ont été envoyées à la même adresse.

[28] Le ministre a décidé que l’appelant n’avait fourni aucune explication indiquant des circonstances exceptionnelles ou atténuantes.

ii. Intention constante de demander une révision

[29] Le ministre a examiné le deuxième critère, soit l’intention constante de l’appelant de demander une révision.

[30] Le ministre a déclaré que la date de la première demande de renseignements faite par l’appelant concernant son admissibilité rétroactive était le 5 décembre 2022, soit 11 mois après le début du versement de sa pension de retraite du RPC.

iii. Chance raisonnable de succès

[32] Le ministre devait décider si la demande avait une chance raisonnable de succès, puisque l’appelant a présenté sa demande plus d’un an après que la décision initiale a été rendue.

[33] Le ministre a décidé que la révision n’avait aucune chance raisonnable de succès parce que le RPC prévoit qu’aucun paiement rétroactif ne peut être versé aux personnes âgées de 60 à 65 ans. L’appelant avait 62 ans lorsqu’il a demandé une pension de retraite du RPCNote de bas page 8.

iv. Préjudice causé au ministre

[34] Le ministre a examiné le quatrième critère et a décidé qu’une prolongation ne lui serait pas injuste, car tous les renseignements pertinents étaient disponibles.

Conclusion

[35] Le ministre a tenu compte de l’explication de l’appelant justifiant le retard, si celle-ci était raisonnable et si l’appelant avait montré une intention constante de demander une révision. De plus, comme la demande de révision a été reçue plus d’un an après que la décision initiale a été rendue, le ministre a également examiné si elle avait une chance raisonnable de succès et si l’accueillir causerait un préjudice au ministre ou à une autre partie.

[36] En examinant le dossier, je n’ai trouvé aucune preuve montrant que le ministre a agi de mauvaise foi, a agi dans un but ou pour un motif irrégulier, a agi de façon discriminatoire lorsqu’il a rendu sa décision, a tenu compte d’un facteur non pertinent ou a ignoré un facteur pertinent. Le ministre a informé l’appelant de son droit de demander une révision dans les 90 jours suivant le refus de sa demande initiale. La preuve a confirmé que l’appelant a présenté sa demande de révision en dehors du délai de 90 jours accordé et plus d’un an après que la décision initiale a été rendue.

[37] Le ministre a examiné les quatre critères pour décider s’il accordait ou non un délai plus long à l’appelant pour présenter une demande de révision, comme il est prévu par la loi.

[38] Je conclus que le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire en rejetant la demande de révision de l’appelant.

[39] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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