[TRADUCTION]
Citation : JC c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 1535
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu
Décision
Partie appelante : | J. C. |
Représentante ou représentant : | M. C. |
Partie intimée : | Ministre de l’Emploi et du Développement social |
Représentante ou représentant : | Janice Wong |
Décision portée en appel : | Décision de révision rendue le 14 mai, 2024 par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | James Beaton |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 27 novembre, 2024 |
Personnes présentes à l’audience : | Appelante Représentant de l’appelante Représentante de l’intimé |
Date de la décision : | Le 28 novembre, 2024 |
Numéro de dossier : | GP-24-1354 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté.
[2] L’appelante, J. C., n’a pas droit au rétablissement de sa pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, ni à une augmentation de sa pension de retraite du Régime. La présente décision explique pourquoi je rejette l’appel.
Aperçu
[3] En octobre 1991, l’appelante a commencé à recevoir une pension d’invalidité à raison de 458,56 $ par mois. Le montant de la pension d’invalidité augmente avec l’inflation. Elle a eu 65 ans en février 2024. Ce mois-là, elle a touché 922,43 $. En mars 2024, le ministre de l’Emploi et du Développement social a cessé de lui verser la pension d’invalidité. Il a plutôt commencé à lui verser une pension de retraite. Celle‑ci s’élevait seulement à 452,22 $ par moisNote de bas page 1.
[4] L’appelante a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Elle explique qu’elle est toujours invalide et que le coût de la vie et les dépenses liées à son invalidité ont augmenté. La seule chose qui a changé est son âge. Elle veut que sa pension d’invalidité soit rétablie ou que le montant de sa pension de retraite soit équivalent à celui de sa pension d’invalidité. Elle s’interroge sur les [traduction] « orientations stratégiques » derrière la décision du ministre et me demande de rendre ma décision dans une [traduction] « perspective d’équité et de justice socialeNote de bas page 2 ».
Ce que je dois décider
[5] Je dois décider si l’appelante a droit au rétablissement de sa pension d’invalidité ou à l’augmentation de sa pension de retraite.
Motifs de ma décision
[6] L’appelante n’a pas droit au rétablissement de sa pension d’invalidité ni à l’augmentation de sa pension de retraite.
L’appelante n’a pas droit au rétablissement de sa pension d’invalidité
[7] Dès que les personnes qui reçoivent une pension d’invalidité ont 65 ans, le ministre cesse automatiquement de leur verser la pension d’invalidité et commence plutôt à leur verser une pension de retraite. Personne ne peut recevoir une pension d’invalidité après son 65e anniversaireNote de bas page 3. Ce n’est pas une simple politique du ministre, c’est la loi.
[8] L’appelante remet en question la politique à l’origine de la loi. Mais je ne suis pas en mesure de défendre ou de modifier les choix stratégiques du gouvernement qui transparaissent dans la loi. Je peux seulement appliquer la loi telle qu’elle est écrite. Je ne peux faire aucune exception fondée sur l’« équité » ou la « justice socialeNote de bas page 4 ».
L’appelante n’a pas droit à l’augmentation de sa pension de retraite
[9] Les règles qui permettent de calculer la pension d’invalidité et la pension de retraite sont différentesNote de bas page 5.
[10] Une pension d’invalidité comprend un montant uniforme et un montant fondé sur les gains. En octobre 1991, le montant uniforme était de 289,99 $. Le montant fondé sur les gains de l’appelante a été établi à 168,57 $. Ce chiffre tenait compte des cotisations qu’elle avait versé au Régime de pensions du Canada. Les sommes étaient versées ensemble et augmentaient chaque année en fonction de l’inflation.
[11] La pension de retraite est entièrement fondée sur les gains. Il n’y a aucune portion à taux uniforme. Pour calculer la pension de retraite de l’appelante, le ministre a pris le montant fondé sur ses gains pour octobre 1991 (168,57 $). Il a divisé ce montant par 0,75, ce qui a donné 224,76 $. Il a ensuite multiplié ce chiffre par l’indice 2,012, ce qui a donné 452,22 $. L’indice permet au ministre de tenir compte de l’inflation.
[12] Pour la pension de retraite, les calculs du ministre étaient conformes aux règles prévues par le Régime de pensions du Canada. L’appelante ne conteste pas les calculs du ministre.
Pourquoi a-t-on dit à l’appelante qu’elle pouvait faire appel?
[13] À l’audience, le représentant de l’appelante s’est demandé pourquoi le ministre avait dit à l’appelante qu’elle pouvait faire appel alors que son appel n’avait aucune chance de succès. Il pense que le ministre aurait dû leur dire que le Tribunal avait déjà tranché la même question (en faveur du ministre) dans des affaires antérieures au lieu de donner à l’appelante de [traduction] « faux espoirs » et de lui faire croire qu’elle pourrait changer sa situation si elle s’adressait au TribunalNote de bas page 6.
[14] Quand une personne n’est pas d’accord avec la décision du ministre, elle peut lui demander de réviser sa décision. Si elle n’est toujours pas d’accord avec sa décision révisée, elle peut faire appel au Tribunal. C’est l’article 82 du Régime de pensions du Canada qui donne aux gens le droit de faire appel.
[15] Le ministre n’a pas dit à l’appelante de faire appel. Il lui a dit qu’elle pouvait faire appel. Il lui a aussi expliqué le fondement de sa décisionNote de bas page 7. Le ministre n’était toutefois pas obligé de lui parler des décisions antérieures du Tribunal ni de lui dire son avis sur ses chances de succès. L’appelante a eu assez de renseignements pour pouvoir décider par elle-même si faire appel en valait la peine. Si elle le souhaitait, elle aurait pu essayer de trouver d’autres décisions du Tribunal, car bon nombre sont disponibles gratuitement sur le site Web du Tribunal, y compris les décisions que la représentante du ministre a mentionnées à l’audience. Elle aurait aussi pu consulter une avocate ou un avocat pour obtenir des conseils.
[16] Au fond, l’appelante soutient que le ministre devrait regarder quelles causes ont une chance de succès devant le Tribunal, puis seulement informer ces personnes de leur droit d’appel. Un des problèmes de cette approche est que le ministre pourrait se tromper, ce qui ferait que certaines personnes ne sauraient pas qu’elles ont le droit de faire appel et que leur appel pourrait mener à un résultat différent. De plus, le ministre rend ce qu’il croit être la bonne décision. Ainsi, il considèrerait sûrement tous les appels visant ses décisions comme ayant (du moins dans une certaine mesure) peu de chances de succès. Si le ministre pense qu’un appel risque d’être accueilli, il va rendre une décision différente.
[17] Au bout du compte, l’appelante a fait appel et le Tribunal l’a entendue. Avant le 5 décembre 2022, le Tribunal devait rejeter de façon sommaire (c’est-à-dire sans tenir d’audience) les appels qui n’avaient aucune chance raisonnable de succèsNote de bas page 8. À cette date, la loi a été modifiée de sorte que le Tribunal n’a plus ce pouvoir. Maintenant, le Tribunal doit entendre les parties appelantes durant une audience, même si leur appel est voué à l’échec.
Conclusion
[18] Je conclus que l’appelante n’a pas droit au rétablissement de sa pension d’invalidité ni à l’augmentation de sa pension de retraite.
[19] Par conséquent, l’appel est rejeté.