[TRADUCTION]
Citation : RS c Ministre de l’Emploi et du Développement social et CH, 2024 TSS 1554
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu
Décision
Partie appelante : | R. S. |
Partie intimée : | Ministre de l’Emploi et du Développement social |
Partie mise en cause : | C. H. |
Décision portée en appel : | Décision découlant de la révision datée du 18 juillet 2024 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Dawn Kershaw |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 21 novembre 2024 |
Personne présente à l’audience : | Appelante |
Date de la décision : | Le 17 décembre 2024 |
Numéro de dossier : | GP-24-1397 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est accueilli.
[2] L’appelant, R. S., est admissible à la prestation de décès du Régime de pensions du Canada (RPC). La présente décision explique pourquoi j’accueille l’appel.
Aperçu
[3] La présente affaire porte sur des demandes concurrentes de prestations de décès du RPC.
[4] La prestation de décès est un paiement unique qui est payable lorsqu’une personne décède.
[5] R.M.S. (le cotisant décédé) est décédé le 8 janvier 2024.
[6] Le 18 janvier 2024, la mise en cause, qui est la fille de la conjointe de R.M.S.Note de bas de page 1, a demandé la prestation de décès à titre de personne responsable des frais funérairesNote de bas de page 2.
[7] Elle a écrit qu’elle était la belle-fille du cotisant décédéNote de bas de page 3. Elle a dit qu’il n’y avait pas de testament. Elle a joint un contrat avec le salon funéraire qui la présentait comme celle qui payait pour leurs servicesNote de bas de page 4.
[8] Le 1er février 2024, le ministre a décidé de verser la prestation de décès à la mise en causeNote de bas de page 5.
[9] Le 15 avril 2024, l’appelant, qui est le fils du cotisant décédé, a demandé la prestation de décèsNote de bas de page 6.
[10] Dans une lettre datée du 8 mai 2024, le ministre a rejeté la demande de l’appelantNote de bas de page 7. Le ministre a dit qu’on avait déjà versé la prestation de décès à la mise en causeNote de bas de page 8 et que l’appelant n’était pas admissible à la prestation.
[11] L’appelant a demandé au ministre de réviser sa décisionNote de bas de page 9.
[12] Le ministre a refusé de modifier sa décisionNote de bas de page 10. L’appelant a porté la décision du ministre en appel au TribunalNote de bas de page 11.
Ce que je dois décider
[13] Je dois décider si l’appelant est admissible à la prestation de décès.
Ce que dit la loi
[14] Le Régime de pensions du Canada établit qui a droit à une prestation de décès lorsqu’une personne décède. Par défaut, la prestation de décès est payable à la succession de la personne cotisante décédéeNote de bas de page 12. Cependant, il y a trois exceptions à cette règle générale. Dans les trois situations suivantes, la règle ne s’applique pasNote de bas de page 13 :
- a) Après s’être raisonnablement renseigné, le ministre a conclu qu’il n’y a pas de succession.
- b) La succession n’a pas présenté de demande dans les 60 jours suivant le décès de la personne cotisante.
- c) Le montant de la prestation de décès est inférieur au « montant prescrit » (si le décès est survenu avant l’année 2019).
[15] Si l’une de ces exceptions s’applique, le ministre peut verser la prestation de décès à la personne ou à l’organisme qui a payé les frais funéraires ou qui est responsable de les payer, mais seulement jusqu’à concurrence du montant des frais funérairesNote de bas de page 14. Ensuite, si la prestation de décès est supérieure aux frais funéraires, le reste de la prestation peut être versé au survivant ou au plus proche parent de la personne cotisante décédéeNote de bas de page 15.
[16] Le pouvoir du ministre de verser la prestation de décès à une personne autre que la succession de la personne cotisante est discrétionnaire, non pas obligatoire. Le ministre peut donc exercer ce pouvoir, mais il n’est pas obligé de le faire. S’il le fait, il doit agir de façon judiciaire. Autrement dit, le ministre ne doit pas :
- agir de mauvaise foi;
- agir dans un but ou pour un motif irrégulier (pour une mauvaise raison);
- tenir compte d’un facteur non pertinent;
- ignorer un facteur pertinent;
- discriminerNote de bas de page 16.
Motifs de ma décision
[17] Le ministre doit verser la prestation de décès à la succession à moins qu’une des exceptions s’applique.
[18] Le ministre affirme que la succession n’a pas demandé la prestation de décès dans les 60 jours suivant le décès du cotisant décédéNote de bas de page 17, donc cette exception s’applique. Cependant, l’obligation du ministre de verser la prestation de décès à la succession se poursuit même si la succession ne présente pas de demande dans les 60 joursNote de bas de page 18. Le ministre ne peut donc pas se prévaloir de cette exception puisqu’il y a une succession. Même si le ministre ne le savait pas à ce moment-là, il n’a pas attendu 60 jours avant de verser la prestation à la mise en cause.
[19] Le ministre ne peut pas non plus invoquer la troisième exception parce que le décès est survenu après l’année 2019Note de bas de page 19.
[20] Cela signifie qu’il n’y a qu’une autre exception sur laquelle le ministre aurait pu s’appuyer pour envisager de verser la prestation de décès à une autre partie plutôt que de la verser à la succession. Le ministre peut verser la prestation de décès à une autre partie s’il fait d’abord des recherches raisonnables et est en mesure de conclure qu’il n’y a pas de successionNote de bas de page 20.
[21] Le ministre ne s’est pas renseigné de façon raisonnable. Il a versé la prestation de décès à la mise en cause après seulement 14 jours. Il l’a versée à la belle-fille du cotisant décédé sans même effectuer de recherche pour savoir s’il y avait une succession.
[22] Par conséquent, aucune des exceptions ne s’appliquait dans la présente affaire, et le ministre aurait dû verser la prestation de décès à la succession.
[23] Puisqu’il a versé la prestation de décès à la mise en cause en dépit du fait qu’aucune des exceptions ne s’appliquait, je conclus que le ministre n’a pas agi de façon judiciaire. En effet, il a ignoré un facteur pertinent en décidant à qui la prestation de décès devait être versée.
[24] Comme le ministre n’a pas agi de façon judiciaire, je peux rendre la décision qu’il aurait dû rendre.
[25] Je conclus que l’appelant a droit au versement de la prestation de décès à titre de représentant de la succession.
[26] De plus, même si la succession n’a pas présenté de demande dans les 60 jours, la priorité de paiement est accordée à la personne responsable de payer les frais funérairesNote de bas de page 21. Dans la présente affaire, selon la facture présentée par l’appelant, la mise en cause n’a pas payé les frais funéraires (en date de juin 2024Note de bas de page 22). Il reviendrait à la succession de régler les dépenses impayées.
Conclusion
[27] Je conclus que l’appelant est admissible à la prestation de décès.
[28] Par conséquent, l’appel est accueilli.