Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le Tribunal conclut qu'aucune pension d'invalidité n'est payable à l'appelante au titre du Régime de pensions du Canada.

Introduction

[2] L'intimé a estampillé la demande de pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) de l'appelante le 8 avril 2011. L'intimé a rejeté la demande après l'examen initial et l'a rejetée également à l'étape du réexamen. L'appelante a ensuite interjeté appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR).

[3] Il s'agit de la deuxième demande présentée par l'appelante afin de toucher une pension d'invalidité du RPC. Sa première demande avait été estampillée par l'intimé le 14 novembre 2008. L'intimé avait rejeté cette demande après l'examen initial et à l'étape du réexamen. L'appelante avait alors interjeté appel devant le BCTR. L'appel a été instruit par un tribunal de révision du BCTR le 2 septembre 2010 et les motifs de décision ont été communiqués le 29 octobre 2010. L'appel a été rejeté. L'appelante n'a pas demandé l'autorisation d'interjeter appel à la Commission d'appel des pensions.

[4] La décision rendue en appel relativement à la deuxième demande est fondée sur les documents et les observations figurant dans le dossier d'audience, puisque le Tribunal n'a besoin d'aucun autre renseignement pour trancher et qu'il n'y a pas d'éléments de preuve pertinents qui soient contradictoires.

Droit applicable

[5] Aux termes de l'article 257 de la Loi sur l'emploi, la croissance et la prospérité durable, un appel qui a été présenté devant le BCTR avant le 1er avril 2013 et qui n'a pas été instruit par le BCTR est réputé avoir été interjeté à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[6] L'alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada énonce les critères d'admissibilité à une pension d'invalidité du RPC. Pour être admissible à une pension d'invalidité, un demandeur :

  1. a) doit avoir moins de 65 ans;
  2. b) ne doit pas toucher de pension de retraite du RPC;
  3. c) doit être invalide;
  4. d) doit avoir versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité.

[7] Le calcul de la période minimale d'admissibilité est important parce qu'une personne doit établir qu'elle était atteinte d'une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa période minimale d'invalidité ou avant cette date.

[8] Aux termes de l'alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada, pour être considérée comme invalide, une personne doit être atteinte d'une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée comme étant atteinte d'une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[9] Le Tribunal a examiné le registre des gains (RDG) et a constaté que la période minimale d'admissibilité se termine le 31 décembre 2011.

[10] En l'espèce, le Tribunal doit déterminer s'il est plus probable qu'improbable que l'appelante était atteinte d'une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa période minimale d'admissibilité ou avant cette date.

[11] Aux fins de l'instruction de la présente affaire, étant donné que l'appel interjeté par l'appelante devant le BCTR à la suite de sa première demande a été rejeté sur le fond, il faut considérer que l'appelante n'a pas été jugée invalide le 2 septembre 2010 (date de l'instruction de cet appel) selon la définition du Régime de pensions du Canada. Par conséquent, il incombe à l'appelante d'établir que, pendant la période du 2 septembre 2010 au 31 décembre 2011 (la période visée), son état s'est considérablement modifié ou détérioré, au point où l'on peut conclure que, même si elle n'était pas invalide le 2 septembre 2010, elle l'était le 31 décembre 2011.

Preuve

[12] Dans le questionnaire sur l'invalidité rempli à l'appui de la demande, où l'intimé a estampillé la date du 8 avril 2011, l'appelante a écrit que son dernier emploi avait été celui de manœuvre pour Sklar-Peppler Furniture, du 5 novembre 1975 au 22 février 2008, et qu'elle avait cessé de travailler en raison d'une mise à pied. L'appelante a déclaré être invalide depuis le 11 septembre 2008. Les affections incapacitantes qu'elle a notées sont une discopathie dégénérative de la colonne lombaire, une détérioration d'un bombement discal au dos et une douleur aux épaules. Elle a nommé trois médecins traitants : le Dr Barrettara, son médecin de famille, qu'elle a consulté pour la dernière fois en mars 2011; le Dr John, physiatre, qu'elle a consulté le plus récemment en mai 2010, et le Dr Sharda, chiropraticien, dont la dernière consultation remonte à mai 2010. Elle a indiqué qu'elle prenait des médicaments, soit Tramacet et Flexeril. Elle ne recevait pas de traitement. Aucun traitement ni investigation médicale n'étaient prévus.

[13] Un rapport médical daté du 21 mars 2011, du Dr Barrettara, le médecin de famille de l'appelante, accompagnait la demande de pension du RPC. Voici le diagnostic figurant dans ce rapport : discopathie dégénérative de la colonne lombaire, avec hernie discale et déchirure annulaire au niveau L4-5, capsulite rétractile bilatérale aux épaules droite et gauche, et discopathie dégénérative de la colonne cervicale. Le rapport indique qu'aucune autre consultation ou investigation n'est prévue. Le pronostic est sombre.

[14] Le dossier d'audience ne contient aucun autre rapport médical datant de la période visée, soit du 2 septembre 2010 au 31 décembre 2011. Les seuls résultats d'investigation sont des rapports de radiographie datés du 14 mars 2011. Les rapports de radiographie des épaules ne révèlent aucune anomalie aux os ou aux articulations, et aucune calcification. Les radiographies de la colonne vertébrale montrent une discopathie dégénérative en C5-6; des changements minimes au niveau de C6-7; une scoliose et une discopathie dégénérative au niveau de L4-5; et une scoliose lombaire avec rotation.

[15] Dans le dossier d'audience, le seul autre rapport médical portant une date ultérieure à l'audience du 2 septembre 2010 est un rapport produit par le Dr Barrettara le 25 septembre 2013, qui fait le point sur les troubles médicaux de l'appelante. D'après ce rapport, l'appelante s'est plainte de façon répétée de douleurs constantes au cou, aux épaules et au dos, et de maux de tête. Le rapport mentionne les limites de l'appelante et se termine ainsi : [traduction] « Le diagnostic demeure (italiques ajoutés) une discopathie dégénérative de la colonne cervicale, aggravée. Discopathie dégénérative de la colonne lombaire avec hernie discale et déchirure annulaire en L4-5, aggravée. Capsulite rétractile bilatérale, pas de changement. Céphalées de tension et troubles du sommeil, aggravés. »

[16] Il est clair, d'après une lecture attentive de la décision du 2 septembre 2010, que le tribunal de révision a instruit l'appel sur le fond après avoir entendu la preuve verbale présentée par l'appelante et avoir examiné une vaste documentation médicale comprenant trois rapports du Dr Barrettara, datés du 16 novembre 2008 au 2 août 2010; deux rapports du Dr Sharada, chiropraticien, datés d'octobre 2008 à juin 2009; quatre rapports du Dr John, physiatre, datés du 10 septembre 2009 au 18 mars 2010; et de nombreux rapports d'imagerie, dont des rapports de radiographie, un rapport d'IRM et un rapport d'échographie.

[17] Les troubles médicaux déclarés dans la demande en cours de l'appelante, ainsi que dans le rapport médical du Dr Barrettara présenté à l'appui de la demande, sont détaillés dans ces rapports. Le rapport du 2 août 2010 du Dr Barrettara indique que l'appelante continue à souffrir de lombalgie et d'une douleur à l'épaule gauche, et a maintenant des douleurs au cou. Le rapport du 18 mai 2010 du Dr John indique que l'appelante souffre de lombalgie depuis plus de 25 ans, qu'il s'agit d'une douleur constante qui a progressivement empiré et qui irradie jusqu'au haut du dos et aux épaules, qu'elle a parfois mal au cou et qu'elle souffre aussi de céphalées occipitales.

[18] Le tribunal de révision a reconnu que l'appelante éprouvait plusieurs problèmes médicaux et s'est concentré sur leur degré de gravité. Il a exprimé des préoccupations concernant des incohérences et un manque de précision dans le témoignage de l'appelante; il a souligné qu'elle avait arrêté de travailler pour des raisons non médicales, à savoir la fermeture de l'usine, qu'elle avait touché des prestations régulières d'assurance-emploi jusqu'en novembre 2008, ce qui indiquait qu'elle était prête et disposée à travailler, et qu'elle avait déclaré n'avoir jamais cherché d'emploi. Le tribunal de révision a conclu que [traduction] « même si l'appelante avait probablement des limites attribuables à des problèmes médicaux, elle n'était pas nécessairement incapable d'occuper quelque emploi que ce soit à la date de son audience et par la suite ». Le tribunal de révision a conclu qu'à la date de l'audience, les problèmes médicaux de l'appelante n'étaient pas graves selon la définition de ce terme dans le Régime de pensions du Canada.

Observations

[19] L'appelante soutient ce qui suit :

  1. Elle est atteinte d'une grave déficience de la colonne vertébrale qui se répercute considérablement sur ses activités de la vie courante, et l'empêche d'occuper un emploi durable adapté.

[20] L'intimé a présenté les observations suivantes :

  1. La preuve médicale additionnelle soumise par l'appelante pour sa deuxième demande ne témoigne pas d'une incapacité à occuper quelque emploi que ce soit;
  2. Aucun résultat d'investigation ou d'examen objectif ne démontre que l'appelante était atteinte d'une invalidité grave pendant la période du 3 septembre 2010 au 31 décembre 2011.

Analyse

[21] L'appelante doit prouver selon la prépondérance des probabilités qu'elle était atteinte d'une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2011 ou avant cette date.

Invalidité grave

[22] Une décision rendue par le tribunal de révision est définitive et exécutoire. La doctrine de res judicata s'applique à la décision rendue le 2 septembre 2010 par le tribunal de révision. L'examen de cette décision montre qu'il s'agit d'une décision sur le fond et que le tribunal a conclu que l'appelante n'avait pas établi que son invalidité était grave à cette date. Par conséquent, aux fins de l'instruction de l'affaire, le présent tribunal doit considérer que l'invalidité de l'appelante n'était pas grave à la date en question, et doit essentiellement déterminer si l'état de l'appelante a évolué pendant la période visée, soit du 2 septembre 2010 au 31 décembre 2011, en ce sens que son état aurait connu une détérioration notable ou qu'un nouveau problème médical important se serait déclaré, ce qui permettrait de conclure que son invalidité était grave et prolongée en date du 31 décembre 2011 (MDRH c. Boudreau, [28 février 2003], CP14752 [CAP] et Leblanc c. MEI, [2 août 1996], CP3694 [CAP]).

[23] Le fardeau de la preuve incombe à l'appelante et le Tribunal a pour devoir et responsabilité de s'appuyer sur des éléments de preuve crédibles et probants et non sur des spéculations (MRHD c. S.S. [3 décembre 2007] CP25013 [CAP]).

[24] Un seul rapport médical (rapport du 21 mars 2011 du Dr Barrettara) date de la période visée, et ce rapport n'indique pas de détérioration marquée ou de nouveaux problèmes médicaux. Les troubles médicaux diagnostiqués dans ce rapport ont été examinés exhaustivement par le tribunal de révision, et ce rapport n'est pas sensiblement différent des rapports précédents du Dr Barrettara. Les radiographies prises le 14 mars 2011 ne révèlent pas de pathologie grave; il n'y a aucun rapport d'un spécialiste qui aurait interprété ces radiographies; il n'y a pas de différences marquées entre ces rapports de radiographie et les rapports de radiographie et d'autres rapports d'imagerie qui ont été soumis au tribunal de révision. Le rapport du 25 septembre 2013 du Dr Barrettara date de presque deux ans après la période minimale d'admissibilité; il ne fournit pas de renseignements sur son état à la date de la fin de la période minimale d'admissibilité; il ne mentionne pas de nouveaux problèmes de santé; il ne montre pas une détérioration marquée des problèmes de santé de l'appelante pendant la période visée, soit du 2 septembre 2010 au 31 décembre 2011. Il contient tout au plus de vagues déclarations sur la détérioration de certains problèmes de santé de l'appelante, mais ne précise pas le degré de détérioration ni le moment où elle s'est produite.

[25] Le Tribunal a aussi noté qu'aucune consultation ni investigation de spécialiste n'a été effectuée par un spécialiste pendant la période visée ou à un autre moment par la suite. Il n'y a pas eu de changement notable dans la médication de l'appelante, et celle-ci n'a pas reçu de traitements. En outre, aucun traitement ni consultation de spécialiste n'était prévu. Le Tribunal a aussi constaté que, dans le questionnaire que l'appelante a rempli pour demander une pension du RPC, elle a déclaré qu'elle était invalide depuis le 11 septembre 2008. Cette date remonte à deux ans avant que le tribunal de révision conclue qu'elle n'était pas atteinte d'une invalidité grave. Cette conclusion a une valeur contraignante pour le Tribunal. Il n'y a dans les documents aucune indication de l'appelante selon laquelle son invalidité aurait débuté pendant la période visée.

[26] Le Tribunal conclut que, selon l'ensemble de la preuve, et à la lumière de la doctrine de res judicata, l'appelante n'a pas fourni de preuve crédible et probante établissant selon la prépondérance des probabilités qu'elle était atteinte d'une invalidité grave à la date de la fin de sa période minimale d'admissibilité, soit le 31 décembre 2011.

Invalidité grave

[27] Étant donné la conclusion que l'appelante n'était pas atteinte d'une invalidité grave à la date de la fin de sa période minimale d'admissibilité, soit le 31 décembre 2011, il n'est pas nécessaire que le Tribunal se prononce sur le critère de l'invalidité prolongée.

Conclusion

[13] L'appel est rejeté.

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