Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le Tribunal de la sécurité sociale (ci-après « le Tribunal ») refuse d’accorder la permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal.

Introduction

[2] Le 4 juin 2013, un tribunal de révision a déterminé qu’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada n’était pas payable à la demanderesse. Le 29 août 2013 ou vers cette date, la demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler (ci-après « la demande ») à la division d’appel du tribunal, dans le délai prescrit par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

Question en litige

[3] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[4] Selon les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[5] Aux termes du paragraphe 58(2) de cette même loi, la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Observations de la demanderesse

[6] La demanderesse a préparé une lettre dans laquelle elle explique les raisons pour lesquelles elle souhaite interjeter appel de la décision du tribunal de révision. En voici un aperçu :

  1. i) Le représentant de la demanderesse souhaitait présenter des « observations officielles »; le tribunal de révision lui a expliqué qu’il pouvait s’exprimer au nom de sa cliente, mais que de telles observations n’étaient pas nécessaires. La demanderesse indique que sa lettre renferme les principaux points des observations.
  2. ii) La demanderesse n’adhère pas aux conclusions du tribunal de révision selon lesquelles son invalidité n’est pas grave et prolongée. Elle croit avoir présenté suffisamment d’information au tribunal de révision pour lui permettre de conclure qu’elle souffre d’une invalidité grave et prolongée. Lors de l’audience, le 20 mars 2013, elle venait de subir une réintervention au genou en novembre 2012. Il ne s’était alors pas écoulé suffisamment de temps pour conclure que la réintervention serait une réussite, mais les renseignements reçus depuis confirment la nature prolongée de son invalidité.
  3. iii) La demanderesse a plusieurs problèmes qui limitent son employabilité. Elle se demande comment elle peut approcher des membres de la communauté portugaise pour leur offrir son aide alors qu’elle est incapable de subvenir à ses propres besoins.
  4. iv) Le Dr Burnell a préparé une lettre datée du 29 juillet 2013 dans laquelle il confirme que l’état de sa patiente s’est peu amélioré par rapport à avant l’opération, et qu’elle ne serait pas en mesure de retourner au travail. La demanderesse souligne que le Dr Burnell ne croit pas être en position de la déclarer inapte à occuper quelque emploi que ce soit tant qu’un physiothérapeute qualifié n’aura pas procédé à une évaluation de sa capacité fonctionnelle.
  5. v) La demanderesse renvoie à une lettre datée du 25 juin 2013 de son médecin traitant, le Dr G.L. Fuzeta, dans laquelle celui-ci confirme l’avoir traitée pour dépression à la suite de sa chirurgie d’octobre 2008.
  6. vi) La demanderesse avait espéré que le tribunal de révision prendrait en considération le fait qu’elle maîtrise la langue anglaise de façon limitée, qu’elle n’a aucune scolarité officielle et que tout ce qu’elle est en mesure d’offrir à un employeur est sa capacité d’accomplir du travail de nature physique.

La lettre contient une chronologie de ses antécédents médicaux et professionnels.

Observations de l'intimé

[7] L’intimé n’a présenté aucune observation écrite.

Analyse

[8] La demande de permission d’en appeler est un premier obstacle que la demanderesse doit franchir – inférieur à celui auquel elle devra faire face à l’audition de l’appel sur le fond. Toutefois, pour que la demande soit recevable, elle doit présenter un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel (Kerth c. Canada [Ministre du Développement des ressources humaines], [1999] A.C.F. no 1252 [CF]).

[9] Selon le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] Dans la présente affaire, la décision du tribunal de révision est considérée comme une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[11] La demande de permission d’en appeler n’est pas une occasion de réévaluer la preuve médicale ni d’instruire à nouveau une affaire pour déterminer si le demandeur est invalide au sens du Régime de pensions du Canada.

[12] En l’espèce, la demanderesse me demande essentiellement de réévaluer la preuve médicale et de trancher en sa faveur. Je n’ai pas le pouvoir d’agir ainsi : mon devoir est de déterminer si l’une ou l’autre des raisons invoquées se rapporte à un moyen d’appel admissible et si l’une de ces raisons fait en sorte que l’appel a une chance raisonnable de succès. La plupart des raisons fournies par la demanderesse ne soulèvent aucun moyen d’appel que je puisse prendre en considération.

[13] Les seules raisons invoquées par la demanderesse qui sont susceptibles de soulever un moyen d’appel sont les raisons i) et vi).

[14] Si le tribunal de révision a refusé les observations du représentant de la demanderesse, le premier moyen d’appel – le tribunal de révision n’a pas observé un principe de justice naturelle – pourrait être envisagé.

[15] Si le tribunal de révision n’a pas pris en considération sa scolarité et ses capacités linguistiques limitées, le deuxième moyen d’appel – le tribunal de révision a rendu une décision entachée d’une erreur de droit – pourrait être invoqué.

(i) Manquement à un principe de justice naturelle

[16] La demanderesse n’énonce pas directement que le tribunal de révision a manqué à un principe de justice naturelle ou qu’elle n’a pas bénéficié d’une audience équitable, mais elle indique que le tribunal de révision a refusé les observations écrites officielles de son représentant. La demanderesse fournit dans sa lettre les principaux éléments contenus dans ces observations, lesquelles résument ses antécédents professionnels et médicaux ainsi que la façon dont son état de santé affecte ses capacités et son employabilité.

[17] Le représentant de la demanderesse a fourni une lettre datée du 28 septembre 2012 au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, mais il n’est pas clair si les observations écrites qu’il avait l’intention de soumettre au tribunal de révision sont un double de cette lettre. Si c’est le cas, la question de savoir si la demanderesse a bénéficié d’une audience équitable ne se pose clairement pas. Il aurait été tout à fait inutile, pour le tribunal de révision, de recevoir une copie de cette lettre, qui figure déjà au dossier. Toutefois, je ne peux pas vraiment en arriver à cette conclusion. Il aurait peut-être été utile que la demanderesse fournisse une copie des observations écrites préparées par son représentant ou, à tout le moins, qu’elle les reproduise en entier dans sa propre lettre.

[18] Bien que le tribunal de révision ait refusé de recevoir les observations écrites du représentant, la demanderesse ne laisse pas entendre qu’elle et son représentant se sont vu refuser la possibilité de présenter l’entièreté de ces observations de vive voix. Au contraire, elle déclare que le tribunal de révision a indiqué que son représentant pouvait parler en son nom. Son représentant aurait donc pu se prévaloir de la possibilité de lire de vive voix toutes les observations écrites qu’il avait préparées.

[19] Quoi qu’il en soit, si les points principaux des observations écrites sont reproduits dans la lettre d’appel de la demanderesse, ils ont tous été, d’une certaine façon, portés à la connaissance du tribunal de révision (sauf, bien sûr, les renseignements à jour sur son état de santé). Le tribunal de révision avait à sa disposition tous les éléments de la preuve médicale ainsi que le témoignage de la demanderesse, et il s’est penché sur l’incidence des problèmes de santé de celle-ci.

[20] Compte tenu de ces considérations, je ne peux pas en venir à la conclusion que, dans cette demande de permission d’en appeler, la position de la demanderesse est qu’elle n’a pas bénéficié d’une audience équitable devant le tribunal de révision. Ainsi, je refuse de déterminer si le refus du tribunal de révision d’accepter les observations écrites qui lui étaient présentées soulève un moyen d’appel présentant une chance raisonnable de succès.

(ii) Erreur de droit

[21] La demanderesse a écrit espérer que le tribunal de révision prenne en compte sa maîtrise limitée de l’anglais et son peu de scolarité officielle lors de l’évaluation de son invalidité. Elle s’est exprimée en ces termes :

[Traduction] J’espérais que le tribunal de révision tienne compte du fait que les gens qui, comme moi, ont une maîtrise limitée de l’anglais et n’ont aucune scolarité officielle, ne peuvent offrir à un employeur que leur capacité à accomplir du travail de nature physique. Lorsque, en raison d’une maladie ou d’une blessure, nous perdons la capacité d’accomplir des tâches manuelles, nous n’avons plus rien à offrir et devenons inaptes au travail. C’est ce qui m’est arrivé.

[22] Le tribunal de révision a clairement tenu compte de la maîtrise de l’anglais limitée de la demanderesse au moment d’évaluer son invalidité, mais il ne semble pas s’être attardé longuement sur son manque de scolarité officielle.

[23] Toutefois, même si la scolarité revêt une certaine pertinence, il n’en reste pas moins que les demandeurs doivent démontrer qu’ils souffrent d’une invalidité grave et prolongée qui les rend régulièrement incapables de détenir une occupation véritablement rémunératrice. La preuve médicale ainsi que la preuve des efforts déployés pour trouver un emploi et de l’existence de possibilités d’emploi demeurent essentiels (Villani c. Canada [Procureur général du Canada], 2001 CAF 248. Il ne suffit pas d’affirmer que la scolarité et la langue constituent des obstacles à l’emploi : des éléments de preuve suffisants doivent appuyer l’invalidité. Comme la Cour d’appel fédérale l’a souligné dans la décision Villani, toutes les personnes souffrant d’un problème de santé qui ont de la difficulté à trouver et à conserver un emploi ne sont pas admissibles à une pension d’invalidité.

[24] En l’espèce, le tribunal de révision a évalué la preuve médicale et a estimé qu’elle ne permettait pas d’établir que la demanderesse souffrait d’une invalidité grave. D’ailleurs, elle a conclu que rien ne laissait entendre que la demanderesse était incapable de continuer à travailler en tant qu’aide-soignante (pendant une période indéterminée) après septembre 2009. Le tribunal de révision a également conclu que la demanderesse n’était pas invalide de façon continue après 2008 jusqu’à l’expiration de sa période minimale d’admissibilité, soit le 31 décembre 2012.

[25] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[26] La permission d’en appeler est refusée.

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