Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La demande de permission est rejetée.

Contexte et historique des procédures

[2] Le 10 avril 2013, un tribunal de révision a déterminé qu’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada n’était pas payable au demandeur, au motif qu’il était capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice après le 31 décembre 1995, date de la fin de sa période minimale d’admissibilité.

[3] Le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler de cette décision (« la demande ») à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (« le Tribunal ») le 18 avril 2013, soit dans le délai prévu par la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (« la Loi »).

[4] Le 6 mars 2014, j’ai posé deux questions à l’intimé : y a-t-il un relevé des gains mis à jour ou un nouveau relevé des gains pour le demandeur; le cas échéant, le nouveau relevé des gains modifie-t-il sa période minimale d’admissibilité? Dans sa réponse écrite du 12 mars 2014, l’intimé a indiqué qu’il n’y a pas de nouveau relevé des gains ni de modification à la période minimale d’admissibilité du demandeur.

Question en litige

[5] L’appel présente-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[6] Selon les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (« la Loi »), « [il] ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « [la division d’appel] accorde ou refuse cette permission ».

[7] Le paragraphe 58(2) de la Loi énonce ce qui suit : « La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

Observations du demandeur

[8] Dans la demande de permission d’en appeler de la décision du tribunal de révision, le demandeur n’a indiqué aucun moyen d’appel. Le demandeur a plutôt, tant dans la lettre datée du 18 avril 2013 qu’il a adressée au Tribunal de la sécurité sociale et dans un document intitulé « Lance CPP-D Appeal », énuméré ses diverses affections médicales, décrit leur caractère progressif et expliqué leur incidence sur sa capacité fonctionnelle.

[9] Le demandeur a également déposé un avis médical daté du 22 novembre 2012 préparé par son médecin de famille, en appui à son appel. Le Dr Armstrong indique dans son rapport que le demandeur est incapable de travailler depuis 2007. Il confirme le diagnostic et le pronostic des affections du demandeur. Dans son avis médical, le Dr Armstrong ne soulève aucun moyen d’appel.

Observations de l'intimé

[10] L’intimé n’a déposé aucune observation autre que la réponse qu’il a préparée aux deux questions concernant le relevé des gains et la période minimale d’admissibilité du demandeur.

Analyse

Critères d’admissibilité à une pension d’invalidité

[11] Le demandeur se concentre sur son état de santé actuel, sans égard à l’état de santé qu’il avait à la date de la fin de sa période minimale d’admissibilité. Il serait donc utile de fournir un peu de contexte pour comprendre comment le tribunal de révision a conclu comme il l’a fait en rendant sa décision. L’alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada porte sur les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité. Pour qu’une pension d’invalidité soit payable à un demandeur, celui ci doit satisfaire aux conditions suivantes :

  1. a) avoir moins de 65 ans;
  2. b) ne pas toucher une pension de retraite du Régime de pension du Canada;
  3. c) être invalide;
  4. d) avoir versé des cotisations valides au Régime de pensions du Canada pendant au moins la période minimale d’admissibilité.

[12] Si le demandeur ne satisfait pas à l’une ou l’autre des quatre conditions susmentionnées, il n’est pas admissible à une pension d’invalidité.

[13] La période minimale d’admissibilité correspond à la date la plus tardive à laquelle un demandeur doit être réputé être invalide. L’alinéa 44(2)b) du Régime de pensions du Canada porte sur le calcul de la période minimale d’admissibilité. Le calcul se fonde en partie sur les années au cours desquelles le demandeur a versé des cotisations valides au Régime de pensions du Canada.

[14] Le relevé des gains du demandeur montre que celui ci a eu des gains jusqu’en 2006. Des gains supplémentaires figurent également sur ses déclarations de revenu pour les années 2003 à 2010. La question qui se pose alors est de savoir si le demandeur pourrait avoir versé des cotisations valides au Régime de pensions du Canada pendant les années subséquentes, puisque cela pourrait reporter à une date ultérieure la fin de sa période minimale d’admissibilité. L’intimé a préparé un sommaire de l’historique des gains du demandeur pour les années 1986 à 2006. Si nous y rajoutons les années 2007 à 2010, nous obtenons le relevé des gains suivant :

Année Gains / revenu imposable Exemption de base pour invalidité Cotisation valide
1986 10 610 $ 2 500 $ Oui
1987 5 100 $ 2 500 $ Oui
1988 8 403 $ 2 600 $ Oui
1989 4 990 $ 2 700 $ Oui
1990 3 282 $ 2 800 $ Oui
1991 1 066 $ 3 000 $ Non
1992 3 200 $
1993 3 300 $
1994 3 400 $
1995 3 400 $
1996 3 500 $
1997 3 500 $
1998 3 600 $
1999 3 700 $
2000 3 700 $
2001 3 800 $
2002 104 $ 3 900 $ Non
2003 0 3 900 $
2004 3 744 $ 4 000 $ Non
2005 6 491 $ 4 100 $ Oui
2006 334 $ 4 200 $ Non
2007 0 4 300 $ Non
2008 0 4 400 $
2009 0 4 600 $
2010 171 $ 4 700 $ Non

[15] Le tableau ci-dessus montre également les années au cours desquelles le demandeur a versé des cotisations valides. Il a versé des cotisations valides au cours des années 1986, 1987, 1988, 1989, 1990 et 2005.

[16] Pour répondre aux critères de cotisation du Régime de pensions du Canada, le demandeur doit avoir versé des cotisations valides au régime pendant au moins quatre des six dernières années ou avoir cumulé un minimum de 25 ans de cotisations valides et avoir cotisé pendant trois des six dernières années. Le demandeur ne répond à ni l’un ni l’autre de ces critères et doit donc satisfaire aux dispositions du Régime de pensions du Canada qui s’appliquent aux demandes de pension d’invalidité tardives.

[17] Dans l’affaire qui nous occupe, le demandeur doit avoir versé des cotisations valides au Régime de pensions du Canada pendant au moins cinq années d’une période de dix ans allant de 1986 à 1995. Le demandeur a versé des cotisations valides pour les années 1986, 1987, 1988, 1989 et 1990; ainsi, la date la plus tardive à laquelle il a satisfait au critère de cotisation du Régime de pensions du Canada est le 31 décembre 1995. Autrement dit, la date de fin de sa période minimale d’admissibilité est le 31 décembre 1995. Le demandeur devait donc démontrer qu’il était invalide à cette date. Le tribunal de révision devait être convaincu que le demandeur était invalide en date du 31 décembre 1995, à défaut de quoi le demandeur ne serait pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada.

[18] En l’espèce, le tribunal de révision a simplement conclu que, non seulement il y n’avait aucune preuve médicale documentaire datant de la fin de la période minimale d’admissibilité du demandeur, mais ce dernier avait eu des gains par la suite. Autrement dit, le tribunal de révision était d’avis que le revenu gagné par le demandeur après le 31 décembre 1995 démontrait que celui ci était capable de détenir une occupation véritablement rémunératrice et que, par conséquent, il n’était pas invalide à la date de la fin de sa période minimale d’admissibilité et de façon continue depuis ce temps.

[19] Bien que la demande d’autorisation d’interjeter appel soit un premier obstacle que le demandeur doit franchir – et un obstacle inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audition de l’appel sur le fond – il reste que la demande doit soulever un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] ACF no 1252 (CF) (1re instance).

[20] Selon le paragraphe 58(1) de la Loi, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[21] Aux fins de la présente instance, la décision du tribunal de révision est considérée comme étant une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[22] Il faudrait qu’au moins un moyen d’appel soit soulevé par le demandeur pour que je puisse envisager d’accorder la permission d’en appeler. Le demandeur n’a pas laissé entendre que le tribunal de révision n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence. De même, il n’a pas mentionné d’erreur de droit que le tribunal de révision aurait commise ni n’allègue que le tribunal de révision a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée. Le demandeur est simplement en désaccord avec la décision du tribunal de révision. Le demandeur semble n’avoir nullement considéré le fait que le tribunal de révision avait conclu qu’il devait démontrer qu’il était invalide, tant à la date de la fin de sa période minimale d’admissibilité que de façon continue par la suite. Le demandeur n’a pas laissé entendre que le tribunal de révision ne lui a pas accordé une audience équitable; il n’a pas abordé les critères juridiques que le tribunal de révision pourrait avoir appliqués pour dire s’ils étaient corrects ni n’a laissé entendre que le tribunal de révision aurait tiré des conclusions de fait erronées.

[23] Le tribunal de révision était habilité à examiner les éléments de preuve dont il était saisi et à leur accorder le poids qu’il jugeait approprié. Il pouvait aussi évaluer la qualité de la preuve présentée et déterminer quels faits accepter ou rejeter, selon le cas. Si le demandeur demande que je réévalue la preuve médicale et rende une décision qui lui est favorable, je ne suis pas en mesure de le faire, puisque je dois être convaincue que les raisons pour lesquelles il veut en appeler cadrent avec l’un des moyens d’appel et je dois déterminer si l’un des moyens d’appel présente une chance raisonnable de succès. La demande de permission d’en appeler ne présente aucun moyen d’appel dont je puisse tenir compte.

Rapport du Dr Armstrong

[24] Le demandeur n’a pas indiqué pourquoi il a déposé le nouvel avis médical du Dr Armstrong, sinon pour renforcer le poids des avis médicaux dont le tribunal de révision était saisi. De même, le demandeur n’a pas précisé en quoi la présentation du nouvel avis médical pourrait se rattacher à l’un des moyens d’appel.

[25] Même si le demandeur a déposé un autre document médical à l’appui de sa demande de permission d’en appeler et de son appel, je ne suis pas en mesure d’examiner de nouveaux documents étant donné la portée étroite des dispositions du paragraphe 58(1) de la Loi. Je ne peux pas examiner de nouveaux documents, même des documents qui pourraient faire la lumière sur l’état de santé du demandeur à la fin de sa période minimale d’admissibilité.

[26] Si le demandeur a déposé le rapport médical dans le but de faire annuler ou modifier la décision du tribunal de révision, il doit se conformer aux exigences établies aux articles 45 et 46 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, et doit aussi déposer une demande d’annulation ou de modification auprès de la division qui a rendu la décision visée (en l’espèce, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale). Un demandeur doit également satisfaire à d’autres exigences pour que la demande d’annulation ou de modification d’une décision soit accueillie. Ainsi, selon l’article 66 de la Loi, le demandeur doit démontrer que les faits nouveaux qu’il a présentés sont essentiels et ne pouvaient être connus au moment de l’audience malgré l’exercice d’une diligence raisonnable. En l’espèce, la division d’appel n’a pas compétence pour annuler ou modifier une décision d’après des faits nouveaux, puisque seule la division qui a rendu la décision est habilitée à le faire. Il ne s’agit pas d’une nouvelle audition de la demande sur le fond. En résumé, je ne peux m’appuyer sur aucun moyen d’appel pour examiner le rapport médical du Dr Armstrong, peu importe à quel point ils appuient la demande selon le demandeur.

Conclusion

[27] Le demandeur n’ayant précisé aucun moyen d’appel, il m’est impossible de conclure que l’appel présente une chance raisonnable de succès.

[28] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

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