Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le Tribunal refuse la permission d'en appeler devant la division d'appel du Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal »).

Contexte et historique des procédures

[2] La demanderesse présente une demande de permission d'interjeter appel de la décision du tribunal de révision rendue le 14 mars 2013. Le tribunal de révision avait déterminé que la demanderesse n'avait pas droit à une pension d'invalidité du Régime de pensions du Canada, car il a estimé que son invalidité n'était pas « grave » à la fin de sa période minimale d'admissibilité, à savoir le 31 décembre 2011. La demanderesse a présenté une demande de permission d'en appeler (la « demande ») à la division d'appel du Tribunal de la sécurité sociale le 12 juin 2013, en respectant le délai prévu dans la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social.

Question en litige

[3] L'appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[4] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi, « il ne peut être interjeté d'appel à la division d'appel sans permission » et « [la division d'appel] accorde ou refuse cette permission. »

[5] Selon le paragraphe 58(2) de la Loi, la « division d'appel rejette la demande de permission d'en appeler si elle est convaincue que l'appel n'a aucune chance raisonnable de succès. »

Observations de la demanderesse

[6] En appui à sa demande, la demanderesse indique ce qui suit :

Mes douleurs croissantes à la jambe, au genou et au pied gauche continuent de m'empêcher d'avoir une vie normale. Je suis incapable de subvenir financièrement aux besoins de notre famille et nous avons éprouvé des difficultés financières. Jusqu'à ce que je sois mise à pied, je consentais à travailler et j'étais en mesure de le faire, car je n'avais aucun autre choix. Toutefois, à la fin de ma période de prestations d'assurance-emploi, j'ai discuté avec mon médecin et les membres de ma famille, et j'ai décidé de ne plus rien faire qui me donnerait mal aux pieds. Mes antécédents médicaux montrent que j'ai des douleurs aux pieds depuis longtemps.

J'ai remarqué que la lettre de décision n'indiquait pas que je m'étais rendue dans une clinique de podologie à l'hôpital St. Paul de Vancouver. Pourtant, j'en avais informé le tribunal de révision pendant notre rencontre. J'ai fréquenté cette clinique dans le passé et récemment aussi, et j'ai passé un examen par IRM. Mon médecin m'a remis un document écrit dans lequel il confirme que je ne suis pas capable de travailler dans un endroit où je dois me tenir debout et/ou marcher pendant une durée quelconque en raison de mes problèmes chroniques aux pieds.

Si je trouvais un emploi où je devais rester en position assise, j'accepterais de travailler volontiers. Cependant, compte tenu de ma piètre connaissance de l'anglais, j'aurais beaucoup de difficulté à trouver un tel emploi. J'ai terminé ma 12e année de scolarité en Inde. Je n'ai pas appris l'anglais à l'école. Je comprends un tout petit peu l'anglais, car je suis au Canada depuis plus de trois décennies.

Je ne sais pas comment je pourrais expliquer autrement le fait que je ne suis pas capable d'occuper un emploi qui exige que je me tienne debout ou que je marche. À la maison, mon fils m'aide à faire la plupart des tâches ménagères. Je suis encore capable de préparer les repas et de faire la vaisselle pourvu que je sois assise sur un tabouret (chaise haute). J'espère que les documents médicaux du Dr Henderson et du médecin de la clinique de podologie que j'ai fournis avec (sic) ouvrir la voie en ce qui concerne la preuve dont vous avez besoin. Je vais vous envoyer cette information au cours de la semaine, car le podiatre n'a pas encore retourné mon appel. Toutefois, j'ai joint le document du Dr Henderson. Je vais également inclure une copie des notes de la clinique de podologie relatives à l'examen par IRM.

[7] Essentiellement, la demanderesse soutient que le tribunal de révision a commis une erreur de droit lorsqu'il a fondé sa décision sur des faits erronés, et plus particulièrement, lorsqu'il a omis de mentionner dans la décision qu'elle avait eu recours aux services d'une clinique de podologie à l'hôpital St. Paul de Vancouver, en Colombie-Britannique. La demanderesse ne déclare pas que le tribunal de révision a omis de tenir compte de ce fait pour déterminer si son invalidité peut être considérée comme grave au sens du Régime de pensions du Canada, et elle ne déclare pas non plus que s'il avait fait cette omission, le Tribunal aurait considéré que son invalidité était grave. Toutefois, je crois que cette déclaration est implicite dans ses observations.

[8] La demanderesse a joint un document rédigé par son médecin de famille dans lequel il a confirmé que la demanderesse a des problèmes chroniques aux pieds ainsi que diverses limitations et restrictions.

Observations de l'intimé

[9] L'intimé n'a pas présenté d'observations écrites.

Analyse

[10] Bien qu'une demande de permission d'en appeler constitue un premier obstacle à franchir, celui-ci est inférieur à celui auquel la demanderesse devra faire face à l'audition de l'appel sur le fond. Pour que cette demande soit recevable, il existe des arguments défendables qui pourraient faire en sorte que l'appel soit accueilli : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] ACF no 1252 (CF).

[11] Le paragraphe 58(1) de la Loi indique que les seuls moyens d'appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n'a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d'exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d'une erreur de droit, que l'erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] En ce qui nous concerne, la décision du tribunal de révision est considérée comme une décision rendue par la division générale.

[13] Je suis tenue de m'assurer que les moyens d'appel invoqués par la demanderesse correspondent à un des moyens d'appel établis et qu'un de ces moyens a une chance raisonnable de succès avant d'accorder la permission d'en appeler.

Conclusion de fait erronée

[14] Aux fins de la présente demande de permission, je n'exige pas qu'il y ait une véritable erreur démontrée de la part du tribunal de révision, mais pour évaluer le moyen d'appel soulevé par la demanderesse, je dois vérifier si le tribunal de révision en est arrivé ou non à la conclusion à laquelle la demanderesse affirme que le Tribunal est arrivé ou a omis d'arriver.

[15] La demanderesse allègue que le tribunal de révision a omis de mentionner qu'elle s'était rendue à une clinique de podologie. La seule mention concernant une clinique de podologie se trouve au paragraphe 28 de la décision, où le tribunal de révision a noté qu'un podiatre avait reporté un pronostic jusqu'à ce qu'elle ait eu une consultation à la clinique spécialisée en soins des pieds et des chevilles.

[16] Bien que la demanderesse souligne avec raison que le tribunal de révision n'a pas mentionné le fait qu'elle avait déjà eu une consultation à la clinique de podologie de l'hôpital St. Paul de Vancouver, en Colombie-Britannique, je suis d'avis qu'un tribunal de révision n'est pas tenu de faire référence à chacun des éléments de preuve qui lui est présenté, et qu'on peut présumer que le tribunal de révision a tenu compte de l'ensemble de la preuve.

[17] Les cours fédérales ont déjà abordé cette observation, dans d'autres causes, selon laquelle des Tribunaux de révision ou des commissions d'appel des pensions ont omis de tenir compte de l'ensemble de la preuve. Dans la décision Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82, l'avocate de la requérante a fait valoir que, selon elle, la commission d'appel des pensions avait ignoré, mal compris ou mal interprété un certain nombre de rapports, ou qu'elle y a accordé trop d'importance. Lorsqu'elle a rejeté la demande de révision judiciaire de la requérante, la Cour d'appel a indiqué ce qui suit :

« Premièrement, un tribunal n'est pas tenu de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve qui lui ont été présentés, mais il est présumé avoir examiné l'ensemble de la preuve. Deuxièmement, le poids accordé à la preuve, qu'elle soit orale ou écrite, relève du juge des faits. Ainsi, une cour qui entend un appel ou une demande de contrôle judiciaire ne peut pas en règle générale substituer son appréciation de la valeur probante de la preuve à celle du tribunal qui a tiré la conclusion de fait contestée. […] »

[18] Conformément à la décision Simpson, il est loisible à un tribunal de révision de faire une lecture sélective des faits pertinents, d'évaluer la qualité de la preuve, de déterminer quels éléments de preuve, s'il y a lieu, il juge appropriés, et de prendre une décision en fonction de la valeur des éléments de preuve retenus. Un tribunal de révision peut examiner la preuve qui lui est présentée et attribuer la valeur, s'il y a lieu, qu'il considère appropriée, puis rendre une décision fondée sur son interprétation et son analyse de la preuve qui lui est présentée. Le tribunal de révision n'était pas tenu de tenir compte de tous les éléments de preuve qui lui ont été présentés, même si la demanderesse est d'avis que la preuve aurait pu mener à une décision différente.

[19] Si le fait que la demanderesse se soit rendue à une clinique de podologie avait été si essentiel à l'appel qu'elle avait interjeté devant le tribunal de révision, la demanderesse aurait pu obtenir un rapport ou les dossiers de la clinique de podologie, même si ce fait avait nécessité un ajournement des procédures.

[20] En outre, le tribunal de révision était au courant des problèmes aux pieds que vivait la demanderesse, des douleurs qui l'affligeaient ainsi que des limitations et restrictions qui lui étaient imposées. Bien que le pronostic demeurait indéterminé, la demanderesse avait déjà reçu un diagnostic de douleurs chronique aux pieds. Cette information a été présentée au tribunal de révision; néanmoins, la demanderesse affirme que cette information reste à venir.

[21] Si la demanderesse demande que nous réévaluions la preuve et que nous prenions une décision en sa faveur, sachez que je ne peux pas le faire, car je suis tenue de déterminer si un des moyens qu'elle a invoqués fait partie des moyens d'appel établis et si un de ces moyens a une chance raisonnable de succès. La demande de permission ne constitue pas une occasion de réévaluer la preuve ou de réentendre la demande pour déterminer si la demanderesse est invalide au sens du Régime de pensions du Canada.

[22] Je ne suis pas convaincue que la demanderesse a soulevé un moyen valable ou qu'il existe une chance raisonnable de succès. Pour ce motif, je rejette la demande de permission.

Faits nouveaux

[23] La demanderesse a fourni un document de son médecin de famille dans lequel il a confirmé que la demanderesse avait des problèmes chroniques aux pieds ainsi que diverses limitations et restrictions. Elle a également indiqué qu'elle attendait des renseignements médicaux complémentaires et qu'elle ferait bientôt suivre des copies de ces renseignements au Tribunal.

[24] Pour le moment, je suis incapable d'examiner tout nouveau dossier ou avis médical, compte tenu des dispositions très strictes du paragraphe 58(1) de la Loi. Si la demanderesse entend présenter ces dossiers ou avis médicaux dans le but d'annuler ou de modifier la décision du tribunal de révision, elle doit se conformer aux exigences énoncées dans les articles 45 et 46 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, et elle doit aussi présenter une demande d'annulation ou de modification à la division qui a rendu la décision en question (ou, en l'espèce, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale). Un demandeur doit répondre à d'autres exigences pour réussir à faire accepter une demande d'annulation ou de modification d'une décision. L'article 66 de la Loi exige aussi qu'un demandeur démontre que le fait nouveau est substantiel et qu'il ne pouvait être connu au moment de l'audience malgré l'exercice d'une diligence raisonnable. En l'espèce, la division d'appel n'a pas compétence pour annuler ou modifier une décision en se fondant sur des faits nouveaux. En effet, seule la division qui a rendu la décision a le pouvoir de le faire. En résumé, rien ne me permet d'examiner d'autres dossiers ou avis que la demanderesse pourrait avoir l'intention de présenter.

Conclusion

[25] Pour les motifs susmentionnés, la demande est rejetée.

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