Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] Le 15 décembre 2010, un tribunal de révision a déterminé qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (la « Loi ») n’était pas payable à l’appelante.

[3] L’appelante avait originalement présenté à la Commission d’appel des pensions (« CAP ») une demande de permission d’interjeter appel de la décision du tribunal de révision (« Demande de permission d’en appeler ») le 12 mars 2011.

[3] Le 11 mai 2011, la CAP a accordé la permission d’interjeter appel. En application de l’article 259 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durablede 2012, la division d’appel du Tribunal est réputée avoir accordé la permission d’en appeler le 1er avril 2013.

[5] Cet appel a été instruit sur la foi du dossier écrit pour les raisons énoncées dans l’avis d’audience daté du 17 juillet 3013 [traduction fidèle]. L’avis demandait aux deux parties de présenter par écrit tout autre renseignement qu’elles souhaitaient voir prendre en considération dans le processus de décision au plus tard 30 jours suivant la date de l’avis. L’intimé a présenté des observations écrites. L’appelante ne l’a pas fait.

Droit Applicable

[6] Afin de garantir l’équité, le présent appel sera examiné en fonction des attentes légitimes de l’appelant au moment du dépôt de sa demande de permission d’en appeler devant la CAP. Pour cette raison, la décision relative à l’appel sera rendue sur la base d’un appel de novo en application du paragraphe 84(1) du Régime de pensions du Canada (la Loi) dans sa version antérieure au 1er avril 2013.

[7] L’alinéa 44(1)b) de la Loi énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans ;
  2. b) ne touche pas de pension de retraite du Régime de pensions du Canada ;
  3. c) est invalide ;
  4. d) a versé des cotisations valides au Régime de pensions du Canada pendant au moins la période minimale d’admissibilité.

[8] Le calcul de la période minimale d’admissibilité est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la fin de sa période minimale d’invalidité ou avant cette date.

[9] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) de la Loi, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée comme étant atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[10] La date de la période minimale d’invalidité n’est pas contestée, puisque les parties conviennent et que le Tribunal conclut que la période minimale d’invalidité de l’appelante a pris fin le 31 décembre 2010.

[11] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer si l’appelante était vraisemblablement atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de la période minimale d’admissibilité ou avant cette date.

Preuve

[12] L’appelante avait 55 ans à la date à laquelle sa période minimale d’admissibilité a pris fin. Elle est née en Finlande, où elle avait atteint un certain niveau d’études secondaires lorsqu’elle a immigré au Canada. Même si elle n’a pas terminé ses études secondaires, l’appelante a obtenu deux certificats d’études collégiales, un certificat d’aide-soignante et un autre en soins aux personnes atteintes de démence. L’appelante a acquis une expérience de travail en services de garde d’enfants et de service à la clientèle. Elle a travaillé au Hawthorne Care Centre comme aide-soignante pendant plus de 21 ans. En octobre 2007, l’appelante est tombée dans un escalier et s’est blessée au dos. Elle n’est pas retournée sur le marché du travail depuis avril 2008.

[13] Les rapports médicaux versés au dossier d’audience (pièce 1) indiquent que l’appelante s’était aussi blessée au dos en 1994 et que cette blessure a été traitée par des moyens conservateurs. L’appelante s’est rétablie complètement de cette blessure et a pu continuer de travailler comme aide-soignante.

[14] Depuis nombre d’années, l’appelante souffre d’insomnie. Elle prend des médicaments pour aider à dormir. L’appelante a fait savoir qu’en 2013, elle a été adressée à une clinique du sommeil pour un examen plus poussé de cette affection ; toutefois, aucun rapport provenant de cette clinique ne figure au dossier.

[15] L’appelante soutient être invalide en raison de douleur chronique au dos découlant de sa chute et d’insomnie. Dans sa demande de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, l’appelante a écrit qu’elle ressent un inconfort lorsqu’elle demeure en position assise ou debout pendant plus de 30 minutes. Elle a des limitations pour ce qui est d’atteindre un objet ou de se pencher, et il lui est difficile d’exécuter de gros travaux ménagers, comme passer l’aspirateur. Elle peut s’acquitter de tâches plus légères.

[16] L’appelante a consulté différents spécialistes de la santé ainsi que son médecin de famille au sujet de son état de santé. Le 16 octobre 2008, le Dr Feldman, un spécialiste en médecine physique et en réadaptation, a rédigé un rapport après avoir fait une évaluation approfondie de l’appelante. Il a confirmé que celle-ci souffre de douleurs chroniques au dos découlant d’une chute qu’elle a faite au travail en octobre 2007. L’appelante a tenté, à deux reprises, de retourner travailler comme aide-soignante, mais sans succès. De plus, l’employeur n’était pas en mesure de lui offrir un travail ne comportant que des travaux légers pouvant correspondre à ses limitations. L’appelante a suivi des séances de physiothérapie et de thérapie par la technique de relâchement actif, mais elle y a mis fin car elle ne les trouvait pas bénéfiques. Le Dr Feldman a conclu que l’appelante devrait trouver un emploi moins exigeant physiquement.

[17] Ce médecin a recommandé que l’appelante aille à un centre de conditionnement physique en vue d’un renforcement du tronc et qu’elle prenne part à un programme de conditionnement physique général.

[18] Le médecin de famille de l’appelante, la Dre Prem-Smith, a rédigé plusieurs rapports qui figurent dans le dossier d’audience. En octobre 2008, elle a posé un diagnostic de douleur neuropathique chronique. Elle a déclaré que l’appelante ne peut pas travailler comme soignante, et qu’elle a des limitations en ce qui a trait aux activités de la vie quotidienne et à certains travaux ménagers. L’appelante ne peut, non plus, exécuter des tâches exigeantes et répétitives. Elle risque facilement de se blesser à nouveau.

[19] Le 4 août 2009, la Dre Prem-Smith a écrit qu’il serait possible pour l’appelante de faire un travail moins exigeant au plan physique. Le 1er février 2010, la Dre Prem-Smith a rempli un formulaire de la Great West Life Insurance, dans lequel elle a indiqué que l’appelante avait entrepris un programme de formation en informatique et qu’elle aurait besoin d’un recyclage professionnel en vue d’emplois ne nécessitant pas d’efforts physiques.

[20] La Dre Prem-Smith a aussi indiqué que l’appelante obtenait un certain soulagement de sa douleur lorsqu’elle utilisait un appareil de neurostimulation transcutanée (NSTC).

[21] L’appelante a subi une évaluation de ses capacités fonctionnelles réalisée par M. R. Gander, ergothérapeute. L’évaluation est consignée dans un rapport daté du 29 mars 2010. L’appelante a participé à une entrevue et à divers tests aux fins de cette évaluation. Dans ce rapport, M. Gander indique que l’appelante ressent des symptômes à l’épaule droite depuis des années (aucun autre élément de preuve n’en fait mention). Ce problème a été aggravé par une chute qu’elle a faite en 2007 et qui a entraîné des limitations fonctionnelles en ce qui a trait aux mouvements au-dessus des épaules. L’appelante rapporte aussi un certain engourdissement dans le pied droit (aucun autre élément de preuve n’en fait mention). M. Gander a indiqué que l’appelante ménage ses forces et modère son activité, qu’elle évite de soulever des objets et s’accroupit plutôt que de se pencher. Elle prend, tels que prescrits, des analgésiques et des médicaments pour dormir (Advil et Tramacet). L’appelante fait de la marche quotidiennement et de la bicyclette stationnaire, à l’occasion. Son état était stabilisé à ce moment-là. Il conclut que l’appelante a des limitations physiques mais qu’elle peut néanmoins accomplir une pleine charge de travail sédentaire, à raison de huit heures de travail un jour et de quatre heures de travail le jour suivant. L’appelante pourrait faire un travail de bureau si elle recevait une formation à cette fin. Il recommande que l’appelante suive un programme de retour graduel au travail pour les tâches exigeant une certaine force.

[22] L’appelante a été adressée à un service d’évaluation professionnelle, et un rapport a été rédigé le 26 avril 2011. Le rapport porte sur les résultats de l’évaluation des capacités fonctionnelles ainsi que sur les intérêts et aptitudes de l’appelante. Dans ce rapport, on indique que l’appelante peut utiliser le courrier électronique et l’Internet et qu’elle utilise deux doigts pour taper. Le rapport dresse une liste des emplois sédentaires que l’appelante pourrait faire sans recyclage scolaire. On y mentionne aussi que ces emplois pourraient ne pas être aussi rémunérateurs pour l’appelante que ne l’était son emploi d’aide-soignante.

Observations

[23] L’appelante soutient qu’elle est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) Elle est physiquement incapable de continuer à travailler comme aide-soignante;
  2. b) Elle souffre de douleurs chroniques au dos et d’insomnie qui la rendent invalide;
  3. c) Elle n’a pas la formation requise pour effectuer tout autre emploi qui pourrait être aussi rémunérateur que l’emploi d’aide-soignante qu’elle occupait.

[24] L’intimé soutient que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) L’appelante n’est pas atteinte d’une invalidité grave et prolongée au sens où le définit la Loi;
  2. b) Les rapports médicaux indiquent que l’appelante peut occuper un emploi sédentaire;
  3. c) L’appelante n’a pas tenté de se recycler ni de trouver un autre type d’emploi.

Analyse

[25] L’appelante doit prouver selon la prépondérance des probabilités qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2010 ou avant cette date.

Caractère grave

[26] La gravité de l’invalidité doit être évaluée dans un contexte « réaliste » (Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248 (CanLII)). Cela signifie que pour évaluer la capacité de travailler d’une personne, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie. Bien que l’appelante n’ait pas terminé ses études secondaires, elle a décroché deux certificats dans le domaine dans lequel elle avait choisi de travailler. Elle a réussi à travailler dans ce domaine pendant plus de 20 ans. L’anglais n’est pas sa langue première ; néanmoins, rien n’indique qu’elle ne peut communiquer efficacement dans cette langue au travail ou avec les personnes qui lui fournissent des soins de santé.

[27] Bien que l’appelante souffre d’insomnie depuis des années, elle a pu continuer à travailler malgré cela. Ce n’est qu’en 2013 qu’elle a été adressée à une clinique du sommeil pour un examen plus approfondi. Aucun élément de preuve d’ordre médical n’indique qu’il s’agit là d’une affection grave ou qui nuisait à sa réussite au travail.

[28] L’appelante a subi une blessure au dos lorsqu’elle a fait une chute au travail en 2007. Cette chute lui a, malheureusement, entraîné des douleurs chroniques au dos. La dorsalgie est traitée par des moyens conservateurs, à l’aide de médicaments en vente libre. L’appelante a reçu des traitements de physiothérapie et de techniques de relâchement actif, mais ceux-ci ne lui ont pas été bénéfiques. Elle a utilisé un appareil de neurostimulation transcutanée (NSTC). Les rapports médicaux indiquent que cela lui a procuré un certain soulagement. L’appelante n’a toutefois pas subi de traitement intensif ni n’a été adressée à un spécialiste de la douleur, à un spécialiste de la chirurgie rachidienne ou à un programme de gestion de la douleur chronique, ce qui est habituellement le cas d’un patient aux prises avec des douleurs chroniques de forte intensité.

[29] L’appelante peut aussi effectuer des tâches domestiques légères, et parfois des tâches plus exigeantes, comme passer l’aspirateur. Aucun élément de preuve n’indique que le domicile de l’appelante a fait l’objet de mesures d’adaptation pour tenir compte de ses limitations physiques.

[30] L’appelante a tenté un retour au travail comme aide-soignante, une démarche fort louable, mais qui a échoué en raison de son incapacité à tolérer les tâches physiquement ardues que comportait ce poste. L’appelante n’a toutefois pas tenté de faire tout autre travail non exigeant sur le plan physique. Les rapports médicaux du Dr Feldman et de la Dre Prem-Smith font tous deux état de la capacité de l’appelante à tolérer ce genre de travail.

[31] Dans des cas d’invalidité du Régime de pensions du Canada, la Cour d’appel fédérale a clairement affirmé que lorsqu’il y a des preuves de capacité de travail, la personne doit démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c. Canada (Procureur général) 2003 CAF 117 (CanLII)). L’appelante n’a fourni aucun élément de preuve à ce sujet. La Dre Prem-Smith a écrit que l’appelante avait entrepris un programme de formation en informatique. Cependant, rien n’indique que l’appelante a terminé le programme. De même, aucun élément de preuve ne démontre que l’appelante s’est servie des compétences acquises dans ce programme pour chercher du travail ou qu’elle n’a pas terminé le programme en raison de ses limitations physiques.

[32] Enfin, l’appelante fait valoir qu’elle n’a pas la formation requise pour effectuer tout autre emploi qui pourrait être aussi rémunérateur que l’emploi d’aide-soignante qu’elle occupait. Dans l’affaire Canada (MDRH) c. Rice, 2002 CAF 47 (CanLII), la Cour d’appel fédérale a conclu que des facteurs socio-économiques, comme les conditions du marché du travail, ne sont pas pertinents dans une décision visant à déterminer si une personne est invalide aux termes du Régime de pensions du Canada. Je suis liée par cette décision. J’ai à déterminer si un appelant peut détenir une occupation véritablement rémunératrice et non pas s’il peut détenir une occupation qui lui procure un revenu semblable à celui qu’il touchait avant d’être blessé. L’évaluation professionnelle d’avril 2011 renfermait une liste d’emplois que l’appelante pourrait occuper. L’évaluation fournissait aussi la liste des salaires rattachés à ces emplois et précisait qu’il s’agissait d’emplois moins rémunérateurs que le travail d’aide-soignante qu’elle effectuait. La rémunération que l’appelante pourrait tirer de ces emplois n’est d’aucune pertinence dans ma décision concernant l’invalidité aux termes du Régime de pensions du Canada. Il n’y a cependant aucun élément de preuve qui indique que l’appelante a tenté d’occuper un de ces emplois ou même tout autre emploi.

[33] Pour ces motifs, je conclus que la preuve ne démontre pas que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave au sens de la Loi.

Caractère prolongé

[34] Ayant conclu que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave, je n’ai pas à tirer de conclusion relativement au caractère prolongé de l’invalidité.

Conclusion

[35] L’appel est rejeté.

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