Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le membre de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal ») refuse au demandeur la permission d’en appeler.

Contexte

[2] Le demandeur souhaite obtenir la permission d’appeler de la décision rendue par un tribunal de révision le 6 février 2013. Il a présenté sa demande en retard. Le tribunal de révision avait déterminé qu’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada n’était pas payable au demandeur parce que lorsque sa période minimale d’admissibilité (PMA) avait pris fin, le 31 décembre 2003, son invalidité n’était pas « grave ». Le ou vers le 9 avril 2013, le demandeur a rempli une demande de permission d’en appeler (la « demande ») à la Commission d’appel des pensions (CAP). Le Tribunal a reçu la demande initiale le 9 avril 2013. Le 8 octobre 2013, le Tribunal a écrit au demandeur pour l’aviser que sa demande était incomplète et qu’elle ne pourrait être traitée que lorsque le Tribunal aurait reçu certains documents. La lettre précisait que le Tribunal considérerait que le demandeur avait présenté sa demande à temps s’il faisait parvenir les documents manquants au plus tard le 18 novembre 2013. Or, le Tribunal a reçu les documents le 12 décembre 2013.

[3] Le paragraphe 57(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi » permet à la division d’appel du Tribunal de proroger d’au plus un an le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler. La décision a été communiquée le 6 février 2013 : la demande respecte donc la limite d’un an précisée dans le critère lié à la prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler. Dans l’arrêt Gattellaro,Note de bas de page 1la juge Snider a appliqué certains critères pour évaluer la décision de proroger le délai accordé pour présenter la demande de permission d’en appeler. Elle s’est exprimée comme suit :

« Selon la jurisprudence invoquée par le ministre (Grewal c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] 2 C.F. 263 (C.A.F.); Baksa c. Neis (c.o.b. Brookside Transport), [2002] A.C.F. no 832), il faut prendre en considération et évaluer les critères suivants :

  1. a. il y a intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel;
  2. b. la cause est défendable;
  3. c. le retard a été raisonnablement expliqué;
  4. d. la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie ».

[4] Le ou vers le 18 décembre 2013, le Tribunal a indiqué à l’intimé qu’il avait reçu les documents relatifs à la demande. Tout comme dans l’arrêt Gattellaro, l’intimé n’a pas présenté d’observations. Dans ces circonstances, le Tribunal estime donc qu’il peut appliquer les principes établis dans Gattellaro : on peut considérer que le premier critère est rempli, puisque le demandeur a présenté les documents manquants; et l’intimé n’a pas indiqué que la prorogation par le Tribunal du délai pour présenter la demande lui causerait un préjudice.

Question en litige

[5] Cet appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[6] Les dispositions législatives pertinentes qui s’appliquent à la demande de permission sont les paragraphes 56(1), 58(1), 58(2) et 58(3) de la Loi. Le paragraphe 56(1) prévoit qu’« [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » tandis que le paragraphe 58(3) indique que la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ». Il est donc clair qu’il n’existe aucun droit d’appel automatique. Un demandeur doit d’abord demander et obtenir la permission de présenter son appel devant la division d’appel, et c’est cette dernière qui doit lui accorder ou lui refuser cette permission.

[7] Le paragraphe 58(2) de la Loi prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

Observations du demandeur

[8] Les observations du demandeur figurent dans sa courte lettre datée du 9 avril 2013 et dans la lettre de présentation datée du 12 décembre 2013. Dans la lettre du 9 avril 2013, il dit avoir présenté la demande parce que [traduction] « les deux médecins ont dit que j’étais inemployable » : il s’appuyait sur les déclarations figurant dans les rapports de Ross Rehabilitation et du Dr Wallenburg. Dans sa lettre datée du 12 décembre 2013, il affirme qu’il fondait sa demande sur [traduction] « l’état de dépression physique et mentale dans lequel il se trouvait ».

Observations de l’intimé

[9] Comme nous l’avons déjà indiqué, l’intimé n’a pas présenté d’observations écrites.

Analyse

[10] La demande de permission d’en appeler représente un premier obstacle que le demandeur doit franchir, mais celui-ci est inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audition de l’appel sur le fond. Toutefois, pour que cette permission lui soit accordée, le demandeur doit montrer que sa cause est défendableNote de bas de page 2 ou soulever un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel. Dans l’arrêt St-LouisNote de bas de page 3, le juge Mosley a affirmé que le critère à appliquer pour accorder une autorisation d’appel est maintenant bien établi. En s’appuyant sur l’arrêt CalihooNote de bas de page 4 , il a répété que le critère consiste à « établir s’il existe un motif défendable permettant de croire que l’appel sera accueilli ». Il a également insisté sur l’importance de ne pas décider, dans une demande de permission, si l’appel sera accueilli ou non.

[11] Au paragraphe 58(1) de la Loi, il est indiqué que les seuls motifs d’appels sont les suivants :

  1. a. la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b. elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c. elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] Aux fins de la présente demande, la décision du tribunal de révision est considérée comme une décision de la division générale.

[13] Avant d’accorder la permission, je suis tenue de déterminer si les motifs d’appel du demandeur s’inscrivent dans les moyens d’appel prévus et si un appel en vertu de l’un ou l’autre de ces motifs a une chance raisonnable de succès.

[14] Le demandeur n’a fait aucune mention selon laquelle le tribunal de révision n’a pas observé un principe de justice naturelle, ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence. Il n’a relevé aucune erreur de droit qui aurait été commise par le tribunal de révision dans sa décision. Le requérant n’a relevé aucune conclusion de fait erronée qui aurait été tirée par le tribunal de révision de façon abusive ou arbitraire, sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, dans sa décision. Le requérant n’a fait mention d’aucun des moyens d’appel énumérés.

[15] Bien qu’un demandeur ne soit pas tenu de prouver les moyens d’appels aux fins de la demande de permission, il doit tout au moins décrire certains fondements de ses observations cadrant avec les moyens d’appels énumérés, afin que la division d’appel n’ait pas à spéculer sur ce qu’ils pourraient bien être. Il ne suffit pas pour un demandeur de manifester son désaccord avec la décision du tribunal de révision et d’exprimer sa ferme conviction que ses problèmes de santé le rendent invalide au sens du Régime de pensions du Canada. Il ne suffit pas non plus pour un demandeur de s’appuyer sur des rapports produits plusieurs années après sa PMA pour justifier la présentation d’une demande de permission.

[16] La demande est déficiente à cet égard et je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Pour en arriver à cette conclusion, je m’attarde sur le fait qu’il a été convenu que la date de fin de la période minimale d’admissibilité du demandeur était le 31 décembre 2003. Cette date a été choisie parce que le demandeur n’a pas cotisé au RPC pendant les quatre années précédant la fin de sa période cotisable, qui a pris fin en novembre 2009, soit 15 mois avant qu’il ne présente sa demande de pension d’invalidité du RPC. Le tribunal de révision a appliqué le sous-alinéa 44 (1)b)(ii) pour fixer la date de fin de la PMA du demandeur, qui avait cessé de travailler le 25 octobre 2001, au 31 décembre 2003. Cependant, le demandeur devait non seulement établir qu’il était invalide avant le 31 décembre 2003, mais aussi que son invalidité se poursuivait depuis cette date. C’est là le critère juridique que le tribunal de révision devait appliquer, et c’est ce qu’il a fait.

[17] Après examen, la prépondérance de la preuve médicale antérieure à la PMA ne permet pas de conclure à l’existence d’une invalidité. Ce n’est qu’en 2009 que Ross Rehabilitation and Vocational Services a établi, à l’issue d’une évaluation médico-légale de la situation du demandeur, qu’il ne démontrait pas les capacités nécessaires pour travailler. Toutefois, même cette conclusion était mitigée par l’ajout de la mention [traduction] « à l’heure actuelle ». Par ailleurs, ce n’est que le 15 février 2011 que le Dr Yellin a diagnostiqué chez le demandeur [traduction] « de multiples troubles physiques dégénératifs qui continueront d’évoluer même si la chirurgie pourrait permettre des améliorations temporaires ». Le Dr Yellin a également constaté que les troubles chroniques du demandeur étaient bien ancrés. Il a conclu en affirmant que le demandeur n’était pas apte à l’emploi.

[18] Il est de jurisprudence constante que si les rapports médicaux ne se prononcent pas sur l’état d’un demandeur ou sur son aptitude au travail au moment de sa PMA, on ne peut s’appuyer sur ces rapports pour renverser la décision originale de refuser une demande. Dans l’affaire du demandeur, les rapports antérieurs à la PMA qui se prononcent sur l’aptitude au travail de ce dernier indiquent de manière indiscutable qu’il pourrait effectuer un travail léger ou sédentaire ou qu’il pourrait suivre une formation en ce sens. Il se peut que l’état de santé du demandeur se soit dégradé après la PMA, mais ce n’est pas là le critère juridique à appliquer et rien ne permet d’accéder à la demande puisque le Tribunal estime que le tribunal de révision n’a commis aucune erreur.

Conclusion

[19] La demande est rejetée.

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