Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Comparutions

Les personnes suivantes ont pris part à l’audience :

  • M. Bibhas Vaze : avocat supervisant le représentant de l’appelant
  • Peter Beaudin : représentant de l’appelant
  • A. K. : appelant

Décision

[1] Le Tribunal conclut qu’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) est payable à l’appelant.

Introduction

[2] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité du RPC de l’appelant le 4 juin 2010. L’intimé a rejeté la demande de l’appelant initialement et après une révision, et l’appelant a interjeté appel auprès du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR).

[3] Le présent appel a été instruit par comparution en personne des parties le 12 novembre 2014, pour les raisons données dans l’avis d’audience daté du 24 juillet 2014. Le Tribunal a jugé nécessaire de reprendre l’instruction de l’appel afin de clarifier des éléments de preuve. Une deuxième audience a été tenue par vidéoconférence le 11 décembre 2014.

[4] Selon l’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012, les appels déposés auprès du BCTR avant le 1er avril 2013 mais non instruits par le BCTR sont réputés avoir été interjetés à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada précise les exigences auxquelles doit satisfaire un requérant pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, soit :

  1. a) ne pas avoir atteint l’âge de soixante‑cinq ans;
  2. b) ne pas toucher une pension de retraite du RPC;
  3. c) être invalide;
  4. d) avoir versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[6] Le calcul de la PMA est important, car une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au moment où sa PMA a pris fin ou avant cette date.

[7] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[8] Le litige ne concerne pas la PMA, car les parties conviennent que cette période a pris fin le 31 décembre 2012, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[9] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelant ait été atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date à laquelle sa PMA a pris fin ou avant cette date.

Preuve

[10] La section ci‑dessous n’a pas pour but de décrire exhaustivement les éléments de preuve, mais d’en présenter une vue d’ensemble.

[11] Voici ce que l’appelant a déclaré dans son témoignage à l’audience :

[12] Il a fait des études collégiales et a obtenu un diplôme de mécanicien. Il a travaillé à temps plein pendant quatre ans, puis a obtenu son certificat de compagnon. En 1997, il a commencé à travailler comme préposé dans un programme d’assistance automobile. En 2008, il a eu un premier accident de voiture, et ses tâches ont été modifiées selon ses limitations.

[13] Il a commencé à travailler à l’entrepôt de fournitures d’un hôpital en avril 2010. Son travail consistait à trier des fournitures et à remplir des bacs. Il a dû réduire son nombre d’heures de travail à cause de la douleur. Il n’a pas travaillé beaucoup en 2011. Ses tâches ont été modifiées vers la fin de 2011, mais il n’était pas capable de les exécuter.

[14] Son épouse et lui ont lancé une entreprise d’investissement sur Internet. En 2012, il a travaillé peut‑être deux ou trois heures dans cette entreprise. Il n’a pas été capable de continuer à s’en occuper. Au début, son épouse éprouvait de l’intérêt pour ce projet, mais lorsque leur mariage a pris fin en juillet 2012, il ne s’intéressait plus à l’entreprise. L’entreprise existe encore, mais il n’y a pas travaillé depuis 2012 et elle ne génère pas de revenus. Il n’y avait que son épouse et lui qui y travaillaient.

[15] En 2012, il ne pouvait plus assumer ses tâches à l’entrepôt. En 2013, il a travaillé une journée, soit le 27 décembre. Il était propriétaire d’un immeuble jusqu’au 29 septembre 2014. Son père faisait les réparations nécessaires dans l’immeuble. Il s’occupait des finances, mais c’est maintenant son épouse qui le fait. Il possède toujours une propriété, mais son épouse touche les revenus qui en proviennent. Il habite dans une maison qui appartient à ses parents.

[16] Lorsqu’il s’est fait poser une question à propos de sa déclaration de revenus de 2012, où il a déclaré des revenus d’entreprise ou de profession de 19 103,00 $, il a répondu que son comptable avait déclaré à tort ce montant comme revenu, et qu’en fait le montant de 19 103,00 $ correspondait à des dépenses à l’égard d’intérêts sur son bien locatif. Il a confirmé que le courriel daté du 10 septembre 2014, qui expliquait cette divergence, provenait de son comptableNote de bas de page 1.

[17] L’appelant a demandé des prestations d’invalidité pendant qu’il travaillait parce que sa santé se détériorait. Lorsqu’il a été invité à coter sa douleur sur une échelle où 0 correspondait à « OK » et où 10 correspondait à une douleur telle qu’il voulait aller à l’urgence, il a indiqué que, sans médicaments, la douleur à ses épaules se situait à 10. Avec des médicaments, la douleur était de 7. La douleur au bas de son dos et à ses hanches est pire que la douleur à ses épaules.

[18] L’appelant a demandé de l’aide au printemps 2012 parce qu’il se questionnait sur ce qui n’allait pas chez lui. Il ne se souvenait pas avec précision de son comportement, mais il savait qu’il était fâché contre les gens. Il a consulté un psychiatre au centre communautaire. Le centre communautaire a confirmé qu’il serait approprié de l’admettre dans un établissement, mais l’appelant ne voulait pas être hospitalisé. En mai 2012, il a commencé à consulter le Dr Thinda, un psychologue. En juillet 2012, il a été vu par le Dr Solomon, un psychiatre, qui a produit un certificat en vertu de la Mental Health Act, de sorte que l’appelant a été hospitalisé pendant un mois.

[19] L’appelant a des rendez‑vous d’environ une demi‑heure avec le Dr Leech-Porter, psychiatre, une ou deux fois par mois. Au cours de l’été 2012, il le voyait une demi‑heure environ une fois par mois. Toutefois, lorsque l’appelant a été invité à commenter la déclaration du Dr Leech-Porter selon laquelle il ne l’avait pas vu depuis janvier 2013, sa réponse est restée vague. Il a des rendez‑vous d’une heure avec le Dr Thinda aux trois mois environ. Il ne fait pas partie d’un groupe de soutien, mais fait de la méditation et du yoga tous les jours. Au cours des dernières années, la douleur et la dépression se sont accrues.

[20] Les spécialistes qu’il a consultés sont les Drs Yu, Hershler et Yorke. Il a vu des spécialistes deux ou trois fois dans les deux dernières annéesNote de bas de page 2.

[21] Il a vu son médecin de famille, le Dr Ngui, tous les mois depuis huit mois. Il voyait le Dr Sakian environ une fois par mois à une clinique sans rendez‑vous. Il a aussi vu le Dr Haq, qui travaillait au même endroit que le Dr Ngui, mais cela fait un certain temps.

[22] Il prenait du Topamax jusqu’à un mois avant l’audience. Pendant un certain temps, il prenait du Topamax et de l’Oxycontin. Il prend actuellement de l’Oxycontin et de l’Ativan prescrits par le Dr Leech-Porter, psychiatre. Il a commencé à prendre de l’Ativan quelques jours avant l’audience.

[23] Il a eu des séances de massothérapie d’une heure d’août 2012 à décembre 2013 environ, à peu près une fois par semaine. Il utilise des remèdes maison comme des sacs de fèves chauds et des bouillottes environ une fois par jour.

[24] L’appelant a habité avec son épouse jusqu’en 2012, année où ils se sont séparés. De 2012 à 2014, il a habité dans une partie d’une maison, et des locataires habitaient dans l’autre partie. Un paysagiste l’aidait à entretenir le terrain et il ne pelletait pas d’entrée. Sa mère l’aidait pour les travaux ménagers environ une fois par semaine. Ses parents l’aidaient aussi pour l’épicerie et la cuisine. Il faisait la lessive [traduction] « quand la douleur lui permettait de le faire ».

[25] Il a décrit une journée typique : il se réveille en éprouvant de la douleur et il prend une douche. Il prie. Il navigue sur Internet pendant environ une heure. Il voit ses enfants, qui ont trois et cinq ans, environ une fois par semaine.

[26] Il est capable de s’occuper de son apparence, mais cela lui prend du temps. Il ne se rase pas tous les jours. Il trouve difficile de préparer des repas, alors sa famille lui donne de la nourriture préemballée. Il a de la difficulté à dormir à cause de la douleur à son épaule et au dos. Il fait des siestes pour compenser.

[27] Il a lancé une entreprise d’investissement sur Internet avec son épouse. Il avait certaines compétences en investissement, mais il n’en a plus maintenant. Il avait une propriété et un locataire, qui l’aidait à payer les factures, mais la maison a été vendue et il n’a aucune source de revenus. Sa vie sociale consiste à rendre visite à sa mère et à son père. Il a confirmé qu’il avait dû renoncer au golf, mais il fait du bénévolat au terrain de golf.

[28] Bien qu’il ait écrit dans son questionnaire qu’il comptait reprendre son travail comme préposé aux automobiles en 2004, il était alors optimiste. Il a dit qu’il travaillait à ce moment et que son épouse avait fourni l’information.

[29] La preuve documentaire contient les éléments présentés ci‑dessous :

[30] Une arthrographie a été effectuée pour l’épaule droite de l’appelant le 4 février 2009. L’arthrogramme a montré un amincissement modéré du cartilage de l’interligne gléno-huméral antéro-inférieur. Les résultats dans cette région suggéraient une chondromalacie légère. Il y avait une rupture partielle de la face superficielle du tendon supra‑épineux (partie antérieure) et une tendinopathie de l’infra‑épineux.

[31] Le Dr Haq, un médecin traitant, a rédigé un rapport daté du 19 janvier 2010, où il a noté que l’appelant avait eu deux accidents de voiture. Le premier a eu lieu le 5 septembre 2008. Le deuxième accident, où l’appelant s’était blessé au cou et à la partie supérieure du dos, s’était produit le 17 août 2009. Le médecin a écrit que l’appelant avait déclaré une douleur progressive et n’était pas capable de continuer à exercer un emploi occasionnel comprenant des tâches légères. Il demeurait incapable d’occuper tout emploi pour une période de temps incertaine en raison de sa douleur chronique post‑traumatique.

[32] Le Dr Yu, chirurgien orthopédiste, a examiné l’appelant le 8 avril 2010. Il a noté avoir vu l’appelant le 9 janvier 2009. L’appelant avait trouvé un nouveau travail qu’il croyait convenable pour ses capacités puisqu’il s’agissait de tâches légères. Le Dr Yu pensait que l’appelant était probablement atteint de chondromalacie touchant l’articulation de l’épaule, et qu’une chirurgie n’était pas nécessaire. Le Dr Yu a encouragé l’appelant à continuer à faire de l’exercice et jugeait que le travail serait tolérable.

[33] Le Dr Haq a préparé un rapport médical daté du 25 mai 2010 à l’appui de la demande de l’appelant. Dans ce rapport, il a noté que l’appelant avait eu des blessures post-traumatiques et des microtraumatismes répétés, et que la douleur chronique à l’épaule droite y était liée. Le médecin a émis un pronostic réservé quant à la possibilité d’une guérison complète de l’épaule droite dans l’immédiat. Il s’attendait toutefois à ce que l’appelant se rétablisse à long terme.

[34] En juin 2010, l’appelant a demandé une pension du RPC.

[35] Une arthrographie de l’épaule droite de l’appelant effectuée le 31 mars 2011 a montré qu’il était gravement atteint d’arthrite acromio‑claviculaire et qu’il avait une tendinose du supra-épineux. L’intensité du signal était élevée dans la partie centrale du petit rond, mais il n’y avait pas de déchirure grave du muscle. Il y avait une fissure horizontale rehaussée par le gadolinium jusque dans le tendon du biceps à l’insertion bicipitale, pouvant correspondre à un clivage avec délamination. Aucune lésion du bourrelet n’était visible.

[36] Le Dr Yu a fourni un rapport daté du 4 mai 2011. Il y déclarait avoir vu l’appelant pour la dernière fois le 9 janvier 2009. L’appelant avait arrêté de travailler en décembre 2010 à cause de la douleur. Le Dr Yu croyait que ses symptômes étaient attribuables à des changements dégénératifs dans ses épaules. Une image par résonance magnétique montrait un amincissement modéré de l’interligne gléno‑huméral antérieur et des changements dégénératifs aux articulations acromio‑claviculaires. Il y avait une rupture partielle de la face superficielle du supra-épineux.

[37] Depuis la dernière visite, le Dr Yu croyait que l’appelant était incapable de retourner travailler comme préposé au service pour la BCAA. À son avis, il est probable que l’appelant sera incapable d’exécuter tout travail exigeant physiquement. Il a essayé d’effectuer des tâches plus légères, mais a été incapable de continuer en raison de la douleur à son cou et à ses épaules, surtout à son épaule droite, probablement à cause d’arthrose dans cette région.

[38] L’appelant a rempli un questionnaire à l’appui de sa demande de pension du RPC. Il a suivi une formation pour devenir mécanicien d’automobiles et a obtenu son diplôme en 1997. Il touchait des prestations d’assurance‑emploi lorsqu’il a présenté sa demande. Il a indiqué qu’il avait arrêté de travailler en novembre 2010 mais n’a pas fourni de raison.

[39] Le conseiller médical de l’intimé a téléphoné à l’appelant le 4 mai 2011 et lui a demandé de l’information sur le fait que, d’après ce qu’il avait écrit dans le questionnaire, il travaillait encore. L’appelant a dit qu’il avait mal indiqué la date de sa dernière journée de travail à la BCAA. La date qui aurait dû être indiquée était le 22 septembre 2009. Il avait obtenu un emploi occasionnel en avril 2010 et l’avait conservé jusqu’au 30 octobre 2010, date où il avait cessé de travailler à cause de la douleur. L’appelant a précisé que son état avait beaucoup changé depuis qu’il avait rempli sa demande et a demandé que le conseiller médical écrive à son médecin pour avoir des renseignements à jour. Le conseiller médical a accepté de le faire.

[40] En mars 2012, l’appelant a été vu en psychiatrie pour d’importants symptômes dépressifs. Le Dr Waraich a rédigé un rapport le 8 mars 2012. L’appelant avait perdu son emploi à cause de symptômes relatifs à la santé mentale. L’appelant avait dit qu’il espérait parfois être frappé par un camion, même s’il ne faisait rien pour que cela se produise, afin que sa famille soit indemnisée par la compagnie d’assurances. Il n’avait pas eu de counseling et n’avait pas été hospitalisé pour des raisons psychiatriques. Le Dr Waraich a écrit que l’appelant avait des idées suicidaires. Il lui a suggéré d’essayer des médicaments régulateurs de l’humeur tels qu’Effexor et a dirigé l’appelant vers un spécialiste de la douleur chronique. Il a conçu un plan avec l’appelant pour les périodes où les idées suicidaires étaient plus intenses. Il a aussi recommandé que l’appelant soit hospitalisé pendant l’essai d’Effexor.

[41] L’appelant ne voulait pas être hospitalisé et est retourné chez lui.

[42] Le Dr Solomon, psychiatre, a vu l’appelant le 3 juillet 2012. L’appelant avait été dirigé vers le Dr Solomon par son médecin de famille, le Dr Haq. Son épouse avait fait savoir que l’appelant menaçait de se suicider et que son état avait empiré. Elle s’inquiétait pour sa sécurité. Le Dr Solomon a conclu que l’appelant était dans un état maniaque aigu. Il ne voulait pas se faire hospitaliser, alors le Dr Solomon a rempli un certificat concernant la santé mentale (Formule 4) et a demandé à la police de l’emmener à l’hôpital. L’appelant avait besoin de soins qui allaient au‑delà de ce qui était offert dans un cabinet privé, et répondait aux critères qui s’appliquaient pour qu’une équipe de santé mentale fasse un suivi.

[43] Le 3 juillet 2012, l’appelant a été admis à l’hôpital sans son consentement. Le Dr Madhani, un médecin de l’hôpital, a produit ce jour‑là un rapport où il a écrit qu’il était fort probable que l’appelant était dans un état maniaque et en psychose, et a noté que l’appelant avait pris de la marijuana.

[44] Le Dr Ronsley, aussi médecin à l’hôpital, a écrit le 14 juillet 2014 que l’appelant avait un comportement délirant et disait qu’il était Dieu. Il [traduction] « manifestait » des choses sur Internet. Il prenait de la marijuana et du Topamax. Ce médecin a dit que l’appelant traversait un épisode maniaque aigu ayant des caractéristiques psychotiques. Il a accepté l’hospitalisation de l’appelant.

[45] Pendant qu’il était à l’hôpital, l’appelant a été examiné par une équipe de traitement. Le Dr Morton a produit un rapport le 19 juillet 2012. Il a noté que l’appelant souffrait de douleur chronique et que le topiramate l’aidait. Toutefois, le Dr Morton a indiqué que ce médicament avait des effets secondaires – agressivité, dépression, problèmes relatifs au comportement et à l’humeur, labilité émotionnelle, psychose, névrose et hallucinations – et a écrit qu’il voulait réduire lentement son utilisation.

[46] Pendant son séjour à l’hôpital, l’appelant a aussi été examiné par le Dr Yorke, rhumatologue, le 17 juillet 2012. Ce médecin a diagnostiqué un syndrome algique myofascial chronique aux épaules et au dos, avec de la fibromyalgie. Le personnel de l’hôpital ne voulait pas confier l’appelant aux soins de sa famille avec une ordonnance de Topamix. L’appelant a quitté l’hôpital ultérieurement pour se rendre à une autre adresse.

[47] Le 31 juillet 2012, le Dr Popovic a examiné l’appelant relativement à sa douleur aux épaules, la douleur à droite étant considérablement pire qu’à gauche. Il a diagnostiqué une tendinite du biceps et une tolérance réduite à la douleur en raison de la fibromyalgie. L’appelant devait commencer un programme de traitement de la douleur chronique. Le médecin a suggéré une anesthésie et une injection de stéroïdes dans la gaine tendineuse du biceps à des fins diagnostiques et thérapeutiques. L’appelant a refusé le plan de gestion proposé par le médecin.

[48] Le Dr Ronsley a préparé un résumé de sortie pour l’unité de psychiatrie de l’hôpital le 31 juillet 2012, mais ce document est incomplet.

[49] Le Dr Thinda, psychologue, a rédigé un rapport daté du 28 novembre 2013. Dans ce rapport, il a indiqué que l’appelant était affaibli sur le plan fonctionnel par la douleur chronique et des problèmes émotionnels à un point tel que ce psychologue avait de la difficulté à concevoir que l’appelant pourrait occuper tout emploi à ce moment ou dans un avenir proche.

[50] Le Dr Leech-Porter, psychiatre, a rédigé un rapport le 25 mars 2014. Dans ce rapport, il a parlé de la douleur, de la fibromyalgie et du stress mental de l’appelant. Il appuyait la demande de pension d’invalidité de l’appelant. Le [traduction] « niveau fonctionnel » de l’appelant se situait alors à 20-30Note de bas de page 3. L’appelant ne pourrait pas travailler pendant quelques années. Si l’appelant avait encore eu son épouse et ses enfants, il ne serait peut‑être pas invalide de façon permanente. Toutefois, cela n’empêchait pas qu’il était complètement invalide au moment où le rapport a été rédigé.

[51] Le Dr Ngui, un autre médecin traitant, a produit un rapport daté du 27 mars 2014. L’appelant était un patient depuis 1977. Il avait eu deux accidents de voiture. Selon ce médecin, l’appelant avait dit qu’il avait encore de graves douleurs musculosquelettiques au cou, aux épaules et au bas du dos. Il était aussi gravement déprimé et avait besoin d’aide pour de nombreuses activités de la vie courante. Il était handicapé par son trouble bipolaire et par la fibromyalgie, et était inapte à occuper un emploi rémunérateur. Il sera difficile pour l’appelant de se recycler dans un autre domaine à cause de son trouble de la pensée et de son état dépressif. Il est incapable de rester debout ou de marcher longtemps en raison de la fibromyalgie et du fait qu’il se fatigue facilement. Le médecin appuyait l’appelant dans sa démarche d’appel.

[52] Le Dr Yorke a produit un rapport daté du 21 avril 2014. Il n’avait pas vu l’appelant depuis juillet 2012. L’appelant avait une douleur persistante aux épaules, en plus d’avoir la nuit des contractions et des spasmes allant de son dos à sa jambe. Le médecin a posé un diagnostic de fibromyalgie. Toutefois, il ne savait pas exactement pourquoi l’appelant avait des crampes musculaires épisodiques.

[53] Le Dr Ng, spécialiste en médecine et pathologie buccales, a rédigé un rapport le 9 juin 2014. Il a dit que le Dr Chung avait recommandé à l’appelant de le consulter à cause de la douleur que ce dernier éprouvait à la mâchoire depuis l’accident. Ce problème était probablement un aspect de la douleur chronique et de la fibromyalgie de l’appelant. Le Dr Ng a diagnostiqué une douleur orofaciale caractérisée par une dysfonction de l’articulation temporomandibulaire (ATM), et principalement une douleur myofasciale liée au muscle masticateur et une arthralgie de l’ATM. Il a suggéré que l’appelant aille à la clinique antidouleur et consulte le Dr Sakian.

[54] Le Dr Leech-Porter a fourni un autre rapport, daté du 23 juillet 2014, où il a déclaré qu’il avait vu l’appelant le 27 mai, le 24 juin et le 18 juillet 2014. L’évaluation globale du fonctionnement de l’appelant n’avait pas changé de manière significative. L’appelant était incapable de travailler.

[55] Le Dr Leech-Porter a écrit plus tard, soit le 11 août 2014, que l’appelant avait des périodes d’instabilité en raison de la douleur. Il ne pensait pas que l’appelant pourrait recommencer à travailler. Ce dernier continuait à avoir mal.

[56] Le Dr Hershler, spécialiste en médecine physique et réadaptation, a fourni un rapport daté du 28 août 2014. L’appelant était un mécanicien d’automobiles. L’historique et les résultats sur le plan physique cadrent avec une vaste douleur myofasciale. La douleur est générée par des points douloureux au niveau musculaire. Il n’y a aucune preuve de radiculopathie ni de neuropathie. Il a écrit que l’appelant était complètement incapable d’accomplir un travail physique impliquant de soulever des objets, de faire des torsions ou de se pencher de façon répétée. Il a recommandé que l’appelant suive un programme de réadaptation axé sur l’activité et que la douleur soit contrôlée.

[57] Le Dr Thinda, psychologue, a produit un rapport le 22 septembre 2014. Il a diagnostiqué un trouble de symptômes somatiques, avec une douleur grave prédominante et persistante, et un trouble dépressif majeur. Il a noté que l’appelant présentait des symptômes d’anxiété.

[58] L’appelant a aussi soumis une déclaration des activités d’entreprise ou professionnelles préparée pour l’Agence du revenu du Canada (ARC). Ce document montre qu’il a déclaré un profit brut de 19 103,00 $ et un revenu de 10 611,19 $ en 2012. Il a aussi fourni le formulaire subséquent de redressement d’une T1 de mai 2013. Dans ce document, son revenu a été changé pour « 0 ». Enfin, il a fourni un courriel provenant de son comptable et adressé à son représentant. Le comptable y explique que des renseignements incorrects lui ont été transmis de façon involontaire pour la déclaration de revenus. Ces renseignements incluaient le revenu d’entreprise. Le montant a été réattribué plus tard en tant qu’intérêt sur les loyers de biens immeubles dans une déclaration ultérieure soumise à l’ARC.

Observations

[59] L’appelant soutient qu’il est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) L’appelant a établi selon la prépondérance des probabilités qu’il est atteint d’une invalidité au sens du Régime de pensions du Canada, puisqu’il est incapable d’occuper tout type d’emploi rémunérateur de façon constante.
  2. b) L’appelant a tenté de recommencer à travailler en 2011, mais il ne pouvait pas maintenir un horaire régulier parce qu’il était vidé sur les plans physique et émotionnel.
  3. c) Les éléments de preuve médicale permettent de conclure que l’appelant était atteint d’une invalidité grave avant la fin de sa PMA. De plus, le représentant a souligné que, bien que le Dr Hershler ait déclaré dans son rapport du 28 août 2014 que l’appelant ne prenait pas d’antidépresseur, l’appelant prenait du Topamax, qui est un antidépresseur, et le Dr Leech-Porter a indiqué dans son rapport du 26 novembre 2013 que l’appelant prenait du Tegeretol, un médicament du même type.

[60] L’intimé soutient que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) Bien que le Dr Leech-Porter, le psychiatre de l’appelant, ait coté à 20-30 le niveau fonctionnel de l’appelant lorsqu’il a fait l’évaluation globale de son fonctionnement, c’était en mars 2014 et cela ne s’applique pas à la PMA, qui a pris fin en décembre 2012.
  2. b) L’appelant est jeune et possède des compétences transférables.
  3. c) L’appelant n’a pas établi qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée avant la fin de sa PMA, en décembre 2012.

Analyse

Question préliminaire concernant la représentation

[61] Le représentant de l’appelant n’était ni conseiller juridique ni parajuriste délégué, ce qui soulève la question de savoir s’il était habilité à comparaître devant le Tribunal, puisque le barreau de la province où a eu lieu l’audience a établi des dispositions particulières à ce sujet. Le Tribunal a informé le représentant de cette question dans une lettre datée du 30 octobre 2014. Il a aussi avisé le représentant que, s’il n’était pas autorisé à comparaître devant le Tribunal, le membre du Tribunal pouvait refuser d’aller de l’avant avec l’audience en apprenant cette information. Cela pourrait entraîner un ajournement et un retard important. Cela soulève plusieurs considérations.

[62] Au début de l’audience, M. Vaze, un avocat qui supervise le représentant, a présenté des observations écrites selon lesquelles le représentant, qui n’est ni un conseiller juridique ni un parajuriste désigné, avait le droit de comparaître devant le Tribunal. Il a soumis une lettre, datée du 12 novembre 2014, indiquant qu’il agissait à titre d’avocat superviseur pour l’organisation sans but lucratif où travaille le représentant. Il a précisé que le représentant ne reçoit pas d’honoraires des clients qu’il représente. Il a aussi souligné que, selon la loi sur la profession d’avocat en vigueur dans la province où réside l’appelant et où s’est tenue l’audience, la définition de la pratique du droit énoncée à l’alinéa 1(h) précise que cette pratique n’inclut aucun des actes mentionnés s’ils sont accomplis par une personne qui n’est pas un avocat, et non en échange ou dans l’espoir d’un bénéfice direct ou indirect obtenu de la personne pour qui ils sont accomplis, notamment sous forme d’honoraires ou de récompense.

[63] De plus, M. Vaze a confirmé que l’organisation recevait du financement de la Law Foundation. Le statut des organismes sans but lucratif et leur lien avec la pratique du droit sont aussi traités dans le code de déontologie des avocats de la C.‑B. (Law Society of British Columbia Code of Conduct). La règle 6 de ce code commence par des définitions, et prévoit notamment ce qui suit :

[Traduction]

6.1-2 Dans la présente section,

« non‑avocat » désigne une personne qui n’est ni un avocat, ni un stagiaire en droit;

« parajuriste » désigne un non-avocat qui est un professionnel formé travaillant sous la supervision d’un avocat.

« parajuriste désigné » désigne une personne autorisée selon l’article 6.1-3.3 à fournir des avis juridiques et à représenter des clients devant une cour ou un tribunal.

[64] Selon la règle 6, un parajuriste désigné peut comparaître devant un tribunal. Il est aussi indiqué qu’un avocat ne peut pas permettre à un non‑avocat de faire ce qui suit :

[Traduction]

(f) comparaître devant une cour ou participer activement à une procédure juridique officielle au nom d’un client, sauf dans les cas énoncés plus haut ou dans un rôle d’appui auprès de l’avocat qui comparaît dans le cadre de telles procédures.

[65] Il est cependant indiqué à l’article 6.1-3.1 que :

[Traduction]

Les limites imposées par l’article 6.1-3 ne s’appliquent pas lorsque le non‑avocat est :

  1. (a) un porte-parole communautaire financé et désigné par la Law Foundation.

[66] L’article 6.1-3.1 du code de conduite exempte certains groupes sans but lucratif des restrictions en matière de délégation, y compris ceux qui ont des liens de financement avec la Law Foundation.

[67] Le Tribunal a examiné ces dispositions dans le contexte de l’appel dont il est saisi. L’avocat superviseur a précisé que le représentant travaille pour un organisme sans but lucratif qui plaide des causes depuis des années devant des tribunaux. Aucun des représentants n’est autorisé à accepter quelque forme d’honoraires que ce soit des appelants. L’avocat a fait valoir que, puisque le représentant n’est rémunéré d’aucune façon par l’appelant, cette représentation est une exception à l’interdiction générale, pour les représentants non autorisés, de comparaître devant les tribunaux. Pour cette affaire, dans ces circonstances particulières, le Tribunal en convient. Il est clair que le représentant n’accepte pas d’honoraires de l’appelant pour son travail. Par ailleurs, le représentant peut toucher un salaire pour son travail; toutefois, ce salaire n’est pas une récompense ni un bénéfice indirect obtenu de la part de l’appelant. Le salaire provient de l’organisme sans but lucratif.

[68] En outre, étant donné que l’organisme sans but lucratif est financé par la Law Foundation, le Tribunal est d’avis que les limites concernant la représentation devant les tribunaux ne s’y appliquent pas. Pour cette raison, dans ces circonstances, le représentant a été autorisé à représenter l’appelant à l’audience.

Question préliminaire concernant un élément de preuve médicale soumis en retard

[69] Une deuxième question préliminaire s’est posée lorsque le représentant a tenté de soumettre à l’audience un rapport médical daté du 7 novembre 2014, produit par le Dr Leech-Porter. Lorsque le représentant a été invité à expliquer pourquoi ce document n’avait pas été soumis plus tôt, il a répondu qu’il l’avait reçu le jour même. Le Tribunal a informé le représentant qu’il ne se prononçait pas immédiatement sur l’admissibilité de cet élément de preuve et traiterait de la question dans la décision.

[70] Le Tribunal note que les parties ont été informées des périodes de dépôt dans un avis d’audience daté du 24 juillet 2014. Les parties avaient jusqu’au 15 septembre 2014 pour déposer des documents supplémentaires; la période de réponse prenait fin le 13 octobre 2014. Le Tribunal a aussi noté que le rapport du Dr Leech-Porter ne contenait pas d’éléments de preuve autres que ce qui figurait déjà au dossier. Pour ces raisons, le rapport médical du Dr Leech-Porter daté du 7 novembre 2014 n’a pas été admis en preuve pour le présent appel.

L’appelant était‑il atteint d’une invalidité grave à la date marquant la fin de sa PMA ou avant cette date?

[71] L’appelant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en décembre 2012 ou avant cette date.

[72] Même s’il existe des renseignements médicaux plus récents, le Tribunal doit considérer l’état de l’appelant en décembre 2012 ou plus tôt. Après s’être penché sur la question, le Tribunal conclut qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée à cette date.

[73] L’effet cumulatif des maux psychologiques et physiques de l’appelant était tel qu’il ne pouvait pas occuper régulièrement un emploi véritablement rémunérateur. En 2012, l’appelant avait des douleurs chroniques aux épaules et un trouble dépressif majeur. Il a eu des problèmes médicaux en 2010 et par la suite, mais il n’y pas suffisamment d’éléments de preuve montrant qu’il s’agissait d’une invalidité grave avant juillet 2012 pour les raisons exposées ci‑dessous.

[74] L’appelant a été capable de travailler régulièrement jusqu’en 2011 environ. Alors que l’état de compte du cotisant confirme qu’il a travaillé minimalement en 2011, l’appelant a confirmé qu’à cette période, il a lancé une entreprise d’investissement sur Internet, en novembre 2011. L’appelant a essentiellement travaillé jusqu’en janvier 2012; il semble que ses blessures physiques constituaient sa principale limite, et que cela n’était pas suffisant pour l’empêcher d’avoir un travail rémunérateur. En fait, en janvier 2012, le Dr Yu a écrit que l’appelant était capable d’accomplir des tâches légères. Le Dr Haq a écrit le 25 mai 2010, pour la demande de pension du RPC, que l’appelant devrait se remettre de sa blessure aux épaules à long terme. Il est certain que, jusqu’en janvier 2012, il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour conclure que l’appelant était atteint d’une invalidité grave le rendant incapable d’avoir une occupation véritablement rémunératrice de façon régulière. De plus, de janvier à juillet 2012, les éléments de preuve concernant l’état de l’appelant sont vagues. Il ne semblait pas travailler, mais la preuve médicale ne décrit pas ses capacités pendant cette période de sept mois. En outre, le témoignage de l’appelant concernant ses activités jusqu’en juillet 2012 n’était pas clair. Il n’y a pas d’éléments de preuve suffisants pour établir qu’il était atteint d’une invalidité grave le rendant incapable d’avoir une occupation véritablement rémunératrice de façon régulière.

[75] En mars 2012, l’appelant avait eu une consultation psychiatrique avec le Dr Waraich, qui a diagnostiqué d’importants symptômes de dépression. À cette époque, il avait des pensées suicidaires passives, mais son anxiété et ses symptômes de dépression empiraient. Selon le Dr Waraich, l’appelant voulait le consulter entre autres pour avoir son appui par rapport à l’appel concernant le RPC. Le Dr Waraich avait alors conseillé à l’appelant de se faire hospitaliser pour qu’il puisse essayer des médicaments. Toutefois, l’appelant ne voulait pas être hospitalisé.

[76] Il ne fait aucun doute qu’en juillet 2012, l’appelant traversait un épisode aigu et qu’il ne s’en est pas complètement remis. Lorsque le Dr Solomon a vu l’appelant pour la première fois en juillet 2012, il a immédiatement produit un certificat en vertu de la Mental Health Act pour que l’appelant soit admis à l’hôpital sans son consentement. Le Dr Ronsley, médecin à l’hôpital, a produit un rapport de consultation le 14 juillet 2012, et a diagnostiqué un épisode maniaque aigu présentant des caractéristiques psychotiques. Après son congé de l’hôpital, l’appelant n’est pas retourné travailler et a continué à recevoir un traitement régulier.

[77] Le poids de la preuve médicale montre que l’appelant était atteint d’une invalidité grave en juillet 2012. Il semble que différents diagnostics aient été posés relativement à l’état psychologique de l’appelant. Le Dr Madhani a diagnostiqué un état maniaque. Le Dr Waraich a diagnostiqué un trouble de la personnalité. Selon le Dr Ronsley, l’appelant avait eu un épisode maniaque présentant des caractéristiques psychotiques. Il est clair que l’appelant était incapable de travailler pendant qu’il était hospitalisé. De plus, la preuve amène à conclure qu’il était incapable d’occuper régulièrement un emploi véritablement rémunérateur après son congé de l’hôpital. Au cours de l’été 2012, l’appelant était suicidaire et traversait un épisode maniaque aigu. Il a commencé à avoir des séances de consultation en psychiatrie avec le Dr Leech-Porter. En outre, alors que l’appelant était traité à l’hôpital pour un épisode de problèmes psychologiques aigus, il a été nécessaire d’avoir l’avis de spécialistes pour ses limitations physiques. Il a été examiné par un rhumatologue, le Dr Yorke, qui a conclu que l’appelant était atteint du syndrome algique myofascial aux épaules et au dos, et de fibromyalgie. Un autre médecin qui l’a examiné pendant son hospitalisation, le Dr Popovic, a déclaré qu’il avait une douleur importante. Les symptômes physiques de l’appelant étaient suffisamment graves pour justifier un examen par deux spécialistes pendant son séjour à l’unité de psychiatrie. Il est à noter que son état physique était tel que le Dr Popovic a recommandé d’autres traitements comme des injections, que l’appelant ait décidé ou non de les accepter.

[78] Le Tribunal précise qu’un refus de traitement peut constituer une raison de conclure que l’appelant n’était pas atteint d’une invalidité grave. Toutefois, dans ce cas, l’appelant se faisait traiter pour un épisode maniaque aigu et n’était pas en mesure de prendre les meilleures décisions possible pour sa santé. Dans ces circonstances, l’appelant ne devrait pas être pénalisé pour son refus.

[79] Le poids de la preuve amène à conclure que l’effet cumulatif des maux physiques et émotionnels de l’appelant l’empêchait d’occuper un emploi de façon régulière au cours de l’été 2012. Même si l’appelant peut avoir pris du mieux et avoir eu moins d’idées suicidaires et maniaques, il est resté affaibli par ses limites psychologiques et physiques par après.

[80] L’intimé a fait valoir que le Dr Leech-Porter avait coté à 20-30 le fonctionnement de l’appelant selon une évaluation globale du fonctionnement, comme il était indiqué dans son rapport de mars 2014, mais que cela était applicable seulement au moment où le rapport avait été produit. Toutefois, le Dr Leech-Porter a déclaré dans son rapport du 23 juillet 2014 que la cote de l’évaluation globale du fonctionnement n’avait pas changé de manière significative et que l’appelant demeurait incapable de travailler. La preuve ne démontre pas que la capacité de fonctionner de l’appelant se situait à un niveau supérieur après juillet 2012. De plus, bien que le Dr Leech-Porter ait déclaré dans son rapport du 6 mai 2013 qu’il n’avait pas vu l’appelant depuis janvier 2013, il a dit par la suite dans son rapport du 24 mars 2014 que l’effet cumulatif des problèmes physiques et psychologiques de l’appelant indique une invalidité grave. Il est clair d’après le témoignage de l’appelant et la preuve médicale que l’appelant était incapable d’occuper un emploi rémunérateur de façon régulière depuis juillet 2012 en raison de l’effet cumulatif de ses problèmes physiques et psychologiques.

[81] Même s’il y avait des éléments de preuve montrant une capacité de travail après l’été 2012, ce ne serait pas suffisant pour conclure que l’appelant n’était pas alors atteint d’une invalidité grave. S’il y a des preuves de capacité de travail, la personne doit démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c. Canada (P.G.), 2003 CAF 117). L’appelant a tenté de travailler. Le Tribunal accepte le témoignage de l’appelant selon lequel il n’a pas travaillé à l’entrepôt depuis la fin de 2011 puisque cela cadre avec son relevé des gains. De plus, bien qu’il ait créé une entreprise d’investissement sur Internet, il a déclaré qu’il n’avait pas pu en faire une occupation régulière et rémunératrice. Il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour contredire ce témoignage et le Tribunal l’accepte.

[82] En outre, bien que l’appelant ait écrit dans le questionnaire daté de mai 2010 qu’il prévoyait retourner au travail en avril 2010, il a aussi indiqué que sa dernière journée de travail remontait à septembre 2010. Il y a un manque de cohérence dans les dates. Toutefois, étant donné qu’il est clair que l’appelant a tenté de travailler en 2011, les incohérences dans le formulaire ne sont pas suffisantes pour justifier le rejet de l’appel.

[83] L’intimé a fait valoir que, puisque l’appelant est jeune et qu’il possède des compétences transférables, on ne peut appliquer le principe établi dans l’arrêt Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248, selon lequel le Tribunal doit prendre en compte des facteurs tels que l’âge du requérant, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie, pour déterminer s’il est atteint d’une invalidité grave. Il est vrai que l’appelant est jeune et qu’il possède des compétences. Toutefois, il a aussi une affection psychiatrique débilitante exigeant un traitement régulier ainsi que des blessures physiques qui empêchent tout travail physique. Un recyclage ne semble pas envisageable vu son état psychologique. L’échec de l’entreprise d’investissement sur Internet amène à conclure que même un travail sédentaire régulier est au‑delà de la capacité de l’appelant. Dans ce cas, la jeunesse, l’instruction et les antécédents de travail de l’appelant ne sont pas suffisants pour conclure que son invalidité n’est pas grave.

[84] Comme il a déjà été mentionné, il y a eu une certaine amélioration dans l’état de santé de l’appelant après sa sortie de l’hôpital en juillet 2012. Toutefois, le Tribunal est d’avis que l’état physique et psychologique de l’appelant l’empêchait encore d’occuper un emploi véritablement rémunérateur de façon régulière. Il souffrait encore d’une douleur chronique débilitante. Il est traité régulièrement pour ses problèmes psychologiques. Il n’a pas été capable d’occuper régulièrement un emploi véritablement rémunérateur.

L’appelant est-il atteint d’une invalidité prolongée?

[85] Des éléments de preuve convaincants permettent d’établir que l’invalidité débilitante de l’appelant sur les plans psychologique et physique couvre une période longue, continue et indéfinie. Il a continué à être traité régulièrement pour ses problèmes psychologiques. Des rapports récents de son psychiatre confirment qu’il est encore invalide à cause de ces maux. Bien que le Dr Leech-Porter, dans son rapport de mars 2014, semble indiquer que l’état de l’appelant s’améliorerait si sa situation familiale s’améliorait d’abord, apparemment cette amélioration est hypothétique; lorsque les audiences ont eu lieu, l’appelant et son épouse étaient encore séparés. Cette spéculation ne suffit pas pour conclure que l’appelant n’est pas atteint d’une invalidité prolongée. De plus, dans son rapport du 11 août 2014, le Dr Leech-Porter a déclaré qu’il ne pouvait pas envisager que l’appelant puisse un jour recommencer à travailler.

[86] L’appelant a aussi obtenu d’autres traitements de spécialistes pour sa douleur chronique, diagnostiquée comme de la fibromyalgie et une douleur myofasciale. Le Dr Hershler a noté en août 2014 l’effet cumulatif des maux physiques et psychologiques. De plus, le témoignage de l’appelant et la documentation médicale fournie par le Dr Ngui, en date de mars 2014, appuient la conclusion que son invalidité était prolongée. Le poids de la preuve amène à la conclusion que, à la date marquant la fin de sa PMA, l’appelant avait une invalidité grave combinant des affections sur les plans psychologique et physique et couvrant une période longue, continue et indéfinie.

Conclusion

[87] Le Tribunal conclut que l’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée en juillet 2012 lorsqu’il a été hospitalisé en raison de son état psychologique. L’effet cumulatif de ses maux physiques et psychologiques l’empêchait alors d’occuper un emploi véritablement rémunérateur de façon régulière. Bien que la preuve démontre que l’état psychologique de l’appelant se soit amélioré dans une certaine mesure après cette date, l’amélioration n’était pas suffisante pour qu’il puisse participer au marché du travail autrement qu’en travaillant de manière sporadique, en ayant des gains minimes. Selon l’article 69 du Régime de pensions du Canada, les paiements débutent quatre mois après la date établie pour l’invalidité. Les paiements commencent donc en novembre 2012.

[88] L’appel est accueilli.

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