Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Une prorogation du délai prévu pour déposer la demande de permission d’en appeler est accordée.

[2] La permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale est accordée.

Introduction

[3] La demanderesse a présenté une demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, et a soutenu qu’elle était invalide en raison de sa douleur chronique qui a été décrite comme de la fibromyalgie, de la douleur chronique et d’autres problèmes. L’intimé a rejeté sa demande au moment de sa présentation initiale et à la suite d’un réexamen. Elle a porté ces décisions en appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. Cet appel a été transféré à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale conformément à la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable.

[4] La division générale a tenu une audience par téléconférence. Le 30 septembre 2014, elle a rejeté la demande de la demanderesse. Cette décision a été postée à la demanderesse le 3 octobre 2014. L’appelante a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal le 12 janvier 2015. Cette demande semblait être en retard.

[5] La demanderesse a fait valoir que puisqu’elle n’a reçu la décision de la division générale que le 23 octobre 2014, sa demande n’est pas en retard. Subsidiairement, elle a soutenu qu’elle répondait à toutes les exigences juridiques pour obtenir une prorogation du délai prévu pour présenter la présente demande.

[6] En ce qui a trait à sa demande de permission d’en appeler, la demanderesse a présenté un certain nombre d’arguments à titre de moyens d’appel. Elle a fait valoir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, que la preuve médicale présentée par les médecins et autres praticiens de la santé a établi qu’elle était invalide, que les documents transmis par son ancien employeur appuyaient sa demande, et qu’elle attendait encore d’autres rendez-vous au Women’s College Hospital. En outre, la demanderesse a corrigé les erreurs factuelles commises par la division générale dans sa décision et a cité des décisions en matière d’invalidité pour appuyer sa cause. Enfin, la demanderesse a fait valoir que la division générale n’a pas pris en compte les opinions des autres fournisseurs de soins de santé.

[7] L’intimé n’a présenté aucune observation.

Analyse

[8] Pour accorder la permission d’en appeler à la demanderesse, je dois être convaincue qu’il faut accorder une prorogation du délai prévu pour présenter la demande au Tribunal si la demande est en retard, et que la demanderesse a soulevé un moyen d’appel qui présente une chance de succès en appel.

Dépôt de la demande

[9] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la Loi) régit le fonctionnement du Tribunal. L’article 57 de la Loi prévoit que la demande de permission d’interjeter appel d’une décision de la division générale doit être présentée à la division d’appel dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date où la demanderesse a reçu communication de la décision de la division générale. L’article 19 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit qu’une telle décision est présumée avoir été communiquée à la partie, si elle a été transmise par la poste ordinaire, le dixième jour suivant celui de sa mise à la poste.

[10] En l’espèce, la décision de la division générale a été postée à la demanderesse le 3 octobre 2014. Par conséquent, elle est présumée lui avoir été communiquée le 13 octobre 2014. La date correspondant à quatre-vingt-dix jours après le 13 octobre 2014 est le 11 janvier 2015, qui était un dimanche. Puisque la demande a été déposée au Tribunal le jour ouvrable suivant, soit le 12 janvier 2015, la demande n’était donc pas en retard.

[11] En outre, la demanderesse a fait valoir qu’elle avait reçu la décision le 23 octobre 2014. Si le délai pour déposer la demande est calculé à partir de cette date, elle n’a pas été présentée au Tribunal en retard.

[12] Par conséquent, je suis convaincue que la demande a été présentée dans le délai permis pour le faire.

Permission d’en appeler

[13] Pour que la permission d’en appeler lui soit accordée, la demanderesse doit présenter un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] FCJ No 1252 (CF). Par ailleurs, la Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le demandeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41; Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[14] L’article 58 de la Loi énonce les seuls moyens d’appel pouvant être pris en compte pour accorder la permission d’interjeter appel d’une décision de la division générale (voir l’Annexe de cette décision).

[15] La demanderesse a invoqué un certain nombre d’arguments à titre de moyens d’appel. Pour commencer, elle a corrigé des erreurs factuelles commises dans la décision. Elle a fait valoir qu’elle n’a jamais dit qu’elle ne croyait pas aux médecins traditionnels, mais qu’elle s’est tournée vers les thérapies alternatives parce que son état ne s’améliorait guère et qu’elle était « désespérée ». Elle a aussi écrit dans sa demande qu’elle n’a pas changé son horaire de 7 heures pour un horaire de 3,5 heures, mais qu’elle avait été affectée à ces quarts en guise de mesure d’adaptation pour tenir compte de son invalidité. Elle a aussi nié qu’elle était vague dans ses réponses aux questions concernant l’exercice, et a fait référence à son témoignage et à celui de sa sœur pour clarifier ce qui a été dit à l’audience concernant sa condition physique, et les efforts déployés par son employeur pour l’accommoder.

[16] Pour que ces arguments soient considérés comme des moyens d’appel en vertu de la Loi, ils doivent mener à la conclusion que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Dans sa décision, la division générale a résumé la preuve présentée à l’audience et a tiré des conclusions de fait. Il n’appartient pas au tribunal qui doit décider s’il accorde ou non la permission d’en appeler de réévaluer la preuve et de tirer une conclusion différente (voir Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82). Les erreurs de fait mentionnées ci-dessus n’ont pas été commises de façon abusive ou arbitraire. La décision de la division générale n’a pas été rendue sans tenir compte de la preuve. Par conséquent, ces arguments n’établissent pas des moyens d’appel présentant une chance raisonnable de succès en appel.

[17] La demanderesse a aussi souligné que le Dr Pop et le Dr Harth ont rédigé des rapports qui confirmaient le fait que la demanderesse était invalide au sens du Régime de pensions du Canada. Ces rapports ont été examinés par la division générale, mais la division générale n’a pas accordé beaucoup de valeur probante à ces rapports médicaux et a expliqué pourquoi elle était arrivée à cette conclusion. Pour la même raison, je ne suis pas convaincue que cet argument présente une chance raisonnable de succès en appel.

[18] L’appelante a aussi affirmé que la division générale avait reconnu que le Dr Harth avait conclu qu’elle était invalide, et a insisté sur le fait que des dossiers médicaux avaient démontré qu’elle avait cherché des traitements médicaux traditionnels entre 1993 et 2009. Dans sa décision, la division générale a fait référence aux rapports rédigés par le Dr Harth et le Dr Pop ainsi qu’à un rapport obtenu du Dr Boyd. La division générale, au moment de rendre sa décision, a examiné cette information. Le fait de répéter ces éléments de preuve ne constitue pas un moyen d’appel qui présente une chance raisonnable de succès en appel.

[19] La demanderesse a aussi fait valoir qu’elle attendait encore d’autres examens médicaux au Women’s College Hospital. Cet argument ne révèle aucune erreur commise par la division générale ni aucun manquement à un principe de justice naturelle. Il ne s’agit pas d’un moyen d’appel qui présente une chance raisonnable de succès en appel.

[20] Dans sa demande, la demanderesse a aussi cité deux décisions de la Commission d’appel des pensions à l’appui de sa demande. La décision Moore c. Ministre du Développement des ressources humaines (Septembre 2001, CP15717) est à l’effet qu’une demanderesse doit seulement établir, selon la prépondérance des probabilités et non hors de tout doute raisonnable, qu’elle souffre d’invalidité grave et prolongée. Cet énoncé est correct en droit. Il n’y a aucune indication que la division générale n’a pas appliqué le bon fardeau de la preuve en l’espèce. Par conséquent, la mention de cette décision ne constitue pas un moyen d’appel qui présente une chance raisonnable de succès en appel.

[21] La demanderesse a aussi fait référence à la décision Curnew c. Ministre du Développement des ressources humaines (Avril 2001, CP12886). Cette affaire impliquait aussi un demandeur de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada qui souffrait de douleur chronique. La Commission d’appel des pensions a conclu que la douleur constitue une invalidité progressive, et qu’on ne peut pas dire qu’elle est apparue seulement lorsqu’un praticien médical lui a donné un nom. Par ailleurs, dans Klabouche c. Canada (MDS) 2008 CAF 33, la Cour d’appel fédérale a clairement déclaré que ce n’est pas le diagnostic d’un état, mais ses effets sur la capacité d’un demandeur à travailler qui détermine la gravité de l’invalidité. En l’espèce, la division générale a accordé de l’importance au fait qu’aucun praticien de médecine traditionnelle n’a établi de diagnostic définitif concernant l’état de la demanderesse. Sa décision a été influencée par ce fait. Par conséquent, cette observation suggère que la division générale aurait pu commettre des erreurs de fait et des erreurs mixtes de fait et de droit. Il s’agit d’un moyen d’appel qui présente une chance raisonnable de succès en appel.

[22] La demanderesse a aussi fait valoir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle. Elle a affirmé que la division générale n’a pas pris en compte les opinions des autres fournisseurs de soins de santé. Le principe de justice naturelle vise à s’assurer que les demandeurs aient la possibilité de défendre pleinement leur cause et de répondre aux arguments de l’autre partie, et que la décision soit rendue par un décideur indépendant et impartial. Certaines déclarations contenues dans la décision de la division générale peuvent laisser croire que le décideur avait un parti pris. Par exemple, dans sa décision, la division générale a déclaré que les rapports des autres fournisseurs de soins de santé ne constituaient pas une preuve médicale objective de son invalidité. Elle a écarté tous ces rapports sous prétexte que les praticiens n’étaient pas qualifiés pour fournir une opinion médicale sans toutefois indiquer qu’elle avait examiné les qualifications des praticiens. Elle a aussi déclaré qu’elle n’avait accordé aucune valeur aux rapports du Dr Pop et du Dr Harth, du moins en partie, parce que la demanderesse avait consulté ces médecins pour tenter de se constituer un dossier. Ces déclarations contenues dans la décision de la division générale, lorsqu’elles sont lues dans le contexte de la décision complète, portent à croire que la division générale a peut-être fait preuve de partialité. Si tel était le cas, il s’agirait d’un manquement aux principes de justice naturelle. Cet argument constitue un moyen d’appel qui présente une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[23] La demande est accueillie pour les motifs exposés ci-dessus.

[24] La présente décision accordant la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

Annexe

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

(2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

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