Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Comparutions

  1. L’appelant
  2. Mme Huma Hashmi : interprète (panjabi vers l’anglais et vice versa)

Décision

[1] Le Tribunal conclut qu’une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) n’est pas payable à l’appelant.

Introduction

[2] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité du RPC de l’appelant le 14 mars 2011. L’intimé a rejeté la demande initiale et la demande de réexamen, et l’appelant a interjeté appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR).

[3] Le présent appel devait être instruit par téléconférence le 24 novembre 2014 pour les raisons indiquées dans l’avis d’audience modifié et daté du 24 octobre 2014 (GT0A).

[4] L’audience du 24 novembre 2014 a été ajournée de la propre initiative du Tribunal en raison de la nécessité d’avoir recours à un interprète. L’audience a été reportée au 25 février 2015, et devait avoir lieu par téléconférence, selon l’avis d’audience daté du 6 novembre 2014 (GT0B). Cet avis d’audience a été signifié à l’appelant le 13 novembre 2014. Conformément au processus interne du Tribunal, le personnel du Tribunal a téléphoné à l’appelant le 11 février 2015 et a laissé un message sur sa boîte vocale pour lui rappeler la date et l’heure de l’audience.

[5] Avant la présentation du témoignage à l’audience, l’appelant a indiqué qu’il avait eu de la difficulté à lire l’information figurant dans le dossier d’audience. Il a cependant dit qu’il souhaitait que l’audience ait lieu.

Droit applicable

[6] L’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012 prévoit que tout appel interjeté au BCTR avant le 1er avril 2013, qui n’a pas été instruit par ce dernier, est réputé avoir été interjeté à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[7] L’alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne touche pas de pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[8] Le calcul de la PMA est important parce qu’une personne doit avoir établi qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de la PMA ou avant cette date.

[9] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) de la Loi, pour être considérée comme invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité n’est prolongée que si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[10] Le litige ne concerne pas la PMA, car les parties conviennent que la date de fin de la PMA est le 31 décembre 1997, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[11] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer si, selon toute vraisemblance, l’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de la PMA ou avant cette date.

Preuve

[12] Le Tribunal a examiné toute la preuve orale et documentaire présentée après que l’audience a pris fin. Voici un résumé de cette preuve.

[13] L’appelant avait 44 ans à la date de fin de la PMA. Il a fait des études primaires (GT1‑35). Il est droitier (GT1-37). Dans un questionnaire du RPC rempli le 10 mars 2011 (GT1‑35 à 41), l’appelant a indiqué qu’il avait cessé de travailler en 1991 en raison de son état de santé. Le dernier emploi qu’il avait occupé avant cela était celui d’emballeur de meubles pour Edgewood Furniture, et ce, depuis 1986. Il s’est blessé à l’épaule gauche au travail. D’après le questionnaire, il s’agissait du premier des trois problèmes de santé l’empêchant de travailler. Les deux autres étaient l’hypertension et le diabète. Ces problèmes font qu’il a peu d’énergie. Il a aussi indiqué qu’il souffre d’anxiété.

[14] Selon la feuille de cotisations de Service Canada (GT1‑31), l’appelant avait des gains non ajustés ouvrant droit à pension de 3 542 $ en 1995. L’appelant a dit à l’audience qu’il n’avait pas travaillé une seule journée en 1995. Ses médecins ne l’avaient pas autorisé à retourner au travail, et il n’avait pas tenté un tel retour depuis 1995. Il a ajouté que les employeurs dans des usines ne lui avaient pas offert de travail compte tenu de l’utilisation limitée de ses membres supérieurs, en particulier de son bras gauche. Lorsqu’il a été prié avec insistance de fournir des détails, l’appelant ne pouvait se rappeler des noms des usines où il avait postulé, mais se rappelait d’avoir essuyé un refus à la réception avant qu’il puisse soumettre une demande. L’appelant a réitéré qu’il était chez lui sans emploi depuis 1995. Plus tard, pendant l’audience, il a été appelé à confirmer à quel moment il avait arrêté de chercher du travail, et il a répondu qu’il ne s’en souvenait pas.

[15] Un rapport du 23 août 1991 du Dr J. Singh (physiatre) indiquait que la radiographie de l’épaule gauche de l’appelant ne révélait aucune anomalie notable. L’appelant a reçu une injection à l’épaule. De l’exercice et l’application de glace ont été recommandés (GT1‑54 à 55).

[16] Dans un rapport du 12 mai 1992, le Dr I. Katz (chirurgien orthopédiste) indiquait que l’appelant signalait une amélioration graduelle du contrôle de la douleur et de l’amplitude de mouvement. Une manipulation sous anesthésie générale était prévue en juillet 1992 (GT1‑48).

[17] Un rapport du 24 juin 1992 du Dr L. Hilbert (physiatre) mentionnait que la douleur constante de l’appelant à l’épaule gauche persistait malgré [traduction] « une physiothérapie quotidienne rigoureuse », de l’acupuncture et des médicaments anti‑inflammatoires, qui avaient débuté le 4 décembre 1991. L’appelant a admis que la douleur était d’une [traduction] « intensité moindre ». Le traitement ne fournissait qu’un soulagement à court terme. Il n’y avait aucun déficit neurologique dans ses bras. Aucun autre traitement n’était prévu, bien qu’une mobilisation sous anesthésie générale avait été demandée (GT1‑47).

[18] Un rapport de physiothérapie du 23 décembre 1992 mentionnait que l’appelant avait une bonne amplitude de mouvement à l’épaule et que sa force s’était améliorée à un niveau satisfaisant. Sa douleur avait également été évaluée comme étant [traduction] « légère », « persistante », mais en voie « d’amélioration ». On lui a conseillé de continuer à faire des exercices chez lui en raison d’un plateau à la physiothérapie (GT1‑46). À l’audience, l’appelant a contesté cette évaluation, déclarant que la connaissance du physiothérapeute se limite à ce qu’il constate en six semaines. Son médecin de famille a confirmé que son état empirait et que sa douleur persistait. Questionné par le Tribunal sur ses tentatives pour soigner son épaule depuis qu’il avait arrêté de travailler en 1991, l’appelant a dit qu’il utilisait des crèmes de massage. Ces massages devaient être effectués quotidiennement pour contrôler un peu la douleur. Il a ajouté n’avoir rien fait d’autre pour ce qui est des soins indépendants pour son épaule.

[19] Un rapport médical du 14 février 2011 indiquait qu’une échographie des deux épaules était sans particularité. Il n’y avait aucune indication de tendinopathie, de déchirure du tendon ou de bursite ni de coincement. Bref, l’échographie des deux épaules était normale. Une radiographie de l’épaule gauche ne révélait aucun signe de fracture, de dislocation ou d’arthropathie notable (GT1‑60).

[20] En mars 2011 (d’après le questionnaire du RPC), l’appelant prenait des médicaments pour le diabète, le cholestérol, le cœur et le sommeil (GT1‑40). Il notait également qu’il faisait de la physiothérapie.

[21] Un rapport médical à l’intention du RPC produit par le Dr A. Hussain, en date du 27 février 2012, mentionnait que l’appelant avait arrêté de travailler en raison d’une dislocation de l’épaule gauche. Le traitement a commencé en juillet 1991. Une faible énergie et de l’anxiété en lien avec sa douleur ainsi qu’une difficulté à bouger son épaule gauche ont été notées. Le Dr Hussain a indiqué que l’épaule gauche de l’appelant était maintenant stable. L’anxiété s’est développée après l’incident ayant causé une blessure à l’épaule gauche; l’appelant a commencé à avoir peur de travailler dans une usine ou d’occuper d’autres emplois [traduction] « touchant sa capacité ». L’hypertension, l’infarctus du myocarde, l’anxiété et le diabète de l’appelant ont été notés comme étant postérieurs à la PMA (GT1‑42 à 45).

Observations

[22] L’appelant soutient qu’il est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) Il est en désaccord avec la décision de l’intimé de refuser sa demande de prestations d’invalidité du RPC. En juin et en septembre 2011, il a écrit que ses problèmes de santé le faisaient beaucoup souffrir (GT1‑22 et 83, respectivement).

[23] L’intimé soutient que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) Les éléments de preuve n’établissent pas qu’il avait un problème de santé qui l’aurait empêché d’exercer toute activité professionnelle à la fin de la PMA et depuis ce temps;
  2. b) En ce qui a trait aux symptômes d’anxiété, rien ne prouve qu’il a été suivi par un spécialiste des soins en santé mentale;
  3. c) Rien n’indique qu’il a tenté de retourner au travail depuis 1991, y compris d’effectuer un travail moins exigeant ou modifié.

(GT1‑18 à 19; GT1‑85 à 89)

Analyse

[24] L’appelant doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 1997 ou avant cette date.

Caractère grave

[25] La gravité de l’invalidité doit être évaluée dans un contexte « réaliste » (Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248). Cela signifie que pour évaluer la gravité de l’invalidité d’une personne, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[26] Dans les cas où il y a des preuves de capacité de travail, la personne doit démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé (Inclima c. Canada (P.G.), 2003 CAF 117).

[27] Dans le présent appel, l’appelant était un jeune homme peu scolarisé lorsqu’il s’est blessé au travail en 1991. D’après son médecin, il s’est blessé à l’épaule gauche non dominante (dislocation) (GT1‑42). L’incident l’a fait devenir anxieux à l’idée de travailler dans des usines et d’occuper d’autres emplois semblables, selon son médecin de famille (GT1‑45). Cela dit, la majorité des éléments de preuve médicale datant de cette période a convaincu le Tribunal que la blessure à l’épaule de l’appelant n’était pas grave au sens du Régime de pensions du Canada. Dans l’ensemble, les éléments de preuve indiquaient une blessure à l’épaule sans particularité de son bras non dominant qui répondait à un traitement conservateur. Une radiographie d’août 1991 ne montrait aucune anomalie notable. Une injection a été administrée, et il a été conseillé à l’appelant de faire des exercices et d’appliquer de la glace sur son épaule (GT1‑54 à 55). En mai 1992, l’appelant a signalé une amélioration graduelle du contrôle de la douleur et de l’amplitude de mouvement (GT1‑48). Le rapport de physiothérapie de décembre 1992 mentionnait que l’appelant avait une bonne amplitude de mouvement à l’épaule et que sa force s’était améliorée à un niveau satisfaisant, malgré une douleur persistante, mais « légère » et en voie d’amélioration (GT1‑46). Le Tribunal note que l’appelant a contesté ce rapport à l’audience, mais il n’a pas accordé beaucoup de poids à son témoignage qui, il faut le dire, accusait des lacunes en raison du passage du temps.

[28] Pour ce qui est des autres problèmes de santé qui, selon l’appelant, l’empêchaient de travailler (hypertension, diabète et anxiété), il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour convaincre le Tribunal qu’ils équivalaient à une invalidité grave au sens du Régime de pensions du Canada à la date de fin de la PMA ou avant cette date. Le Dr Hussain a signalé que l’anxiété et le diabète étaient postérieurs à la PMA (GT1‑42).

[29] Il a été conseillé à l’appelant de faire des exercices et d’appliquer de la glace (GT1‑46, 54, 55). L’appelant a cependant dit qu’il avait uniquement appliqué des crèmes de massage pour soulager sa douleur à l’épaule. Il a dit qu’il était essentiellement confiné chez lui et sans emploi depuis au moins 1995. Son témoignage sur la recherche d’un emploi après 1991 accusait des lacunes attribuables à une mémoire défaillante. Au mieux, il a fait une déclaration vague selon laquelle il cherchait un travail semblable à celui qu’il exerçait lorsqu’il s’était blessé à l’épaule. Rien ne prouve qu’il cherchait un travail moins exigeant ailleurs que dans des usines ni qu’il souhaitait même se recycler en vue d’un tel travail. Un effort aussi limité pour atténuer sa condition et chercher un emploi convenable ou se recycler, notamment à compter de décembre 1992, minait la demande de prestations d’invalidité du RPC de l’appelant selon le Tribunal, car cela laissait croire qu’il avait choisi d’adopter le style de vie d’une personne invalide.

[30] Pour les motifs ci‑dessus, le Tribunal estime que l’appelant ne s’est pas acquitté du fardeau de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était atteint d’une invalidité grave à la date de fin de la PMA ou avant cette date.

Caractère prolongé

[31] Comme l’appelant n’a pas satisfait au critère d’invalidité « grave », il n’est pas nécessaire de se prononcer sur le caractère « prolongé » de l’invalidité. Cependant, s’il est déterminé ultérieurement que le Tribunal a tort quant à son évaluation du critère d’invalidité « grave », les commentaires ci‑après sont présentés au sujet du critère d’invalidité « prolongée ».

[32] Il ressortait clairement des éléments de preuve au dossier que la blessure à l’épaule gauche de l’appelant ne revêtait pas un caractère prolongé. Selon le rapport de février 2012 du Dr Hussain (GT1‑45), l’épaule de l’appelant était stable. Ce fait est étayé par des images de son épaule prises en février 2011, qui étaient sans particularité (GT1‑60). Il n’existe pas d’autres éléments de preuve fiables selon lesquels les autres problèmes de santé de l’appelant antérieurs à la PMA revêtaient un caractère prolongé.

Conclusion

[33] L’appel est rejeté.

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