Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Comparutions

  1. S. F. : Appelante
  2. Brian Julien : Représentant de l’appelante

Décision

[1] Le Tribunal conclut qu’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) n’est pas payable à l’appelante.

Introduction

[2] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité du RPC de l’appelante le 14 octobre 2011. L’intimé a rejeté la demande initiale et la demande de réexamen, et l’appelante a interjeté appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR).

[3] Cet appel a été instruit par vidéoconférence pour les raisons énoncées dans l’avis d’audience daté du 13 novembre 2014.

Droit applicable

[4] L’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012 prévoit que tout appel interjeté au BCTR avant le 1er avril 2013, qui n’a pas été instruit par ce dernier, est réputé avoir été interjeté à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne touche pas de pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[6] Le calcul de la PMA est important parce qu’une personne doit avoir établi qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de sa PMA ou avant cette date.

[7] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada, pour être considérée comme invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée être atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[8] Le Tribunal établit que la PMA a pris fin le 31 décembre 2007.

[9] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable que le contraire que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de sa PMA ou avant cette date.

Contexte

[10] L’appelante avait 36 ans à la date marquant la fin de sa PMA, soit le 31 décembre 2007; elle a maintenant 43 ans. Elle a trois enfants : D, né en juillet 1990, C, née en février 1993, et L, né en mai 2010. Elle a quitté l’école après avoir terminé sa 10e année et ses antécédents professionnels indiquent qu’elle a notamment travaillé comme serveuse, femme de chambre et ouvrière dans des serres. En 2003, elle a fréquenté le centre de formation pour adultes à X pour se mettre à niveau, puis a suivi un cours de coiffure de dix mois au Collège Boréal, qui lui a permis d’obtenir les préalables en coiffure. Elle a ensuite travaillé au studio de coiffure chez Sears, à X, où elle a effectué les 1 500 heures nécessaires à son apprentissage.

[11] Le 30 janvier 2007, l’appelante traversait une intersection lorsque sa voiture a été frappée de côté, à l’arrière, et sous l’effet de l’impact, sa voiture a été projetée dans un banc de neige. Elle a subi des blessures au cou, à l’épaule droite, au bas du dos et à la tête. Elle a été conduite à l’hôpital, où son cou et son dos ont été examinés. Elle a obtenu son congé le même jour, et on lui a prescrit des analgésiques. L’appelante devait effectuer son dernier examen écrit en coiffure deux semaines après l’accident de la route. Elle n’a pas pu faire l’examen et n’a pas repris le travail depuis l’accident.

Documents relatifs à la demande

[12] Dans son questionnaire sur les prestations d’invalidité du RPC, que l’intimé a estampillé le 19 octobre 2011, l’appelante a indiqué que le dernier emploi qu’elle avait occupé était celui de coiffeuse/styliste de juin 2005 au 29 janvier 2007; elle a noté qu’elle avait cessé de travailler en raison de blessures subies lors d’un accident de voiture. Elle a allégué être invalide depuis le 30 janvier 2007 et a énuméré les maladies et déficiences qui l’empêchaient de travailler, notamment un syndrome de douleur chronique, un coup de fouet cervical, une blessure au bas du dos, des symptômes dépressifs, une diminution de l’acuité auditive et visuelle du côté droit, des douleurs et un engourdissement dans le bras droit, des maux de tête, ainsi que des problèmes de concentration et de mémoire.

[13] Lorsqu’elle a expliqué ses difficultés/limitations fonctionnelles, elle a noté ce qui suit : je ne peux pas m’asseoir ou me tenir debout plus de 30 minutes; je ne peux pas marcher plus de 15 minutes; je ne peux pas soulever ni transporter des objets pesant plus de cinq à dix livres; je ne peux pas tendre le bras droit plus haut que les épaules; me plier au niveau des hanches me cause des douleurs lombaires du côté droit; je ne peux me laver les cheveux qu’avec la main gauche; je suis limitée dans ma capacité de faire l’entretien ménager; mon acuité auditive et visuelle est réduite du côté droit; j’ai développé un bégaiement à la suite de l’accident; j’ai des problèmes de mémoire à court terme et de la difficulté à me concentrer; j’ai aussi de la difficulté à dormir et je ne peux pas conduire plus de 20 minutes. Elle n’a énuméré aucun médicament et, en ce qui a trait aux modalités de traitement, elle a indiqué qu’elle avait suivi des séances de physiothérapie et de massothérapie, un traitement psychologique et subi une évaluation de la douleur chronique. Elle a noté qu’elle suivait actuellement des traitements de chiropractie et de massothérapie.

[14] Un rapport daté du 13 octobre 2011 du Dr Chisholm, le médecin de famille de l’appelante, et de Marnie Chisholm, infirmière praticienne, accompagnait la demande de prestations du RPC. Il y est diagnostiqué des douleurs au dos, au cou et à l’épaule ainsi qu’un coup de fouet cervical de niveau II. Il y est aussi noté que l’appelante est incapable de faire de l’activité physique pendant de longues périodes et qu’elle ne peut pas reprendre son ancien emploi en raison de douleurs chroniques au dos, à l’épaule et au bas du dos. Parmi les médicaments énumérés figurent du naproxène, du Tylenol extra fort et du Baclofène. Les traitements de physiothérapie et de massothérapie faisaient partie des modalités de traitement énumérées. Le pronostic indique que la douleur s’est transformée en affection chronique, et qu’il est recommandé que l’appelante continue de suivre des traitements de physiothérapie et de massothérapie et de prendre des analgésiques, au besoin. Il est noté dans le rapport que les soins primaires ont été fournis à l’appelante uniquement par l’infirmière praticienne, que le médecin n’a pas évalué l’appelante et que celle‑ci a été évaluée à une clinique de traitement de la douleur à Hamilton, où des recommandations ont été formulées.

Témoignage oral

[15] L’appelante a expliqué en détail ses antécédents en matière d’études et de travail. Elle a déclaré qu’elle avait tenté de poursuivre des études en 2008 en terminant sa douzième année, mais qu’elle avait été incapable de réussir sa onzième année en raison de ses problèmes de mémoire et de concentration. Elle a suivi des cours pendant six mois, à raison d’une à deux heures par jour. Elle a des compétences très limitées en informatique et n’utilise un ordinateur que pour les courriels et Facebook – elle ne sait même pas comment faire des recherches sur Internet. Elle n’a jamais travaillé dans un bureau ni à l’ordinateur.

[16] Elle a déclaré qu’elle n’avait aucun problème médical important avant l’accident de la route et décrit les blessures et les affections causées par cet accident en ces termes :

  • - Elle a une douleur pulsatile constante dans le cou, l’épaule et le dos; il lui est difficile de faire quoi que ce soit en raison de la douleur et elle doit continuellement se coucher et se détendre en mettant des coussins chauffants; elle ne peut rien soulever de plus de huit livres et a du mal à tenir quoi que ce soit dans sa main droite dominante (elle échappe facilement les choses) à cause de la perte de sensation. Elle ne peut pas lire plus de 30 minutes, marcher plus de 10 minutes et se tenir debout plus de 30 minutes compte tenu de la douleur; elle a aussi de la difficulté à se pencher.
  • - Elle souffre de migraines quotidiennes; elles vont et viennent presque tous les jours et lorsqu’elle a une migraine, elle doit prendre une Tylenol et se coucher. Elle pense que les migraines surviennent quand elle est fatiguée ou qu’elle essaie d’en faire trop. Elle estime que le simple fait d’effectuer des activités comme couper ou peler des aliments les fera se déclencher.
  • - Elle a de la difficulté à dormir et se réveille de trois à quatre fois par nuit à cause de la douleur; elle a du mal à se rendormir et ne peut pas prendre de somnifères parce que son estomac « rejette » les médicaments. Elle se sent lasse et fatiguée en raison du manque de sommeil.
  • - Elle a des problèmes de mémoire et de concentration; elle doit écrire les choses pour ne pas les oublier et a indiqué qu’elle ne se rappelait pas comment effectuer des calculs mathématiques lorsqu’elle essayait de terminer ses études secondaires.
  • - Elle perd l’équilibre et doit se déplacer lentement; elle n’a pas fait de chutes, mais perd l’équilibre si elle se déplace trop rapidement ou quand elle descend les marches.
  • - Elle a des nausées associées aux migraines et se sent nauséeuse presque tous les matins – certains jours, elle vomit le matin.

[17] L’appelante a déclaré qu’elle avait tous ces symptômes depuis l’accident de la route. Elle voit Marnie Chisholm, son infirmière praticienne, tous les deux mois; Mme Chisholm lui a prescrit des médicaments, mais son estomac y a mal réagi; son estomac ne les supportait pas et elle vomissait. Elle prend maintenant huit Tylenol extra fort par jour, ainsi que du Robaxacet comme relaxant musculaire. Elle suit des traitements de chiropractie et de massothérapie, ainsi qu’un programme d’exercices à domicile de dix à quinze minutes par jour. Elle se souvient d’avoir fait une évaluation à la clinique de traitement de la douleur chronique, mais n’a pas suivi le programme; elle soutient qu’un de ses médecins lui a dit que cela ne serait pas utile, et sa grossesse était avancée à ce moment‑là. Elle a vu le Dr Blain pendant 20 séances de consultation psychologique, mais a cessé d’y aller parce que la compagnie d’assurance a refusé de continuer à les payer.

[18] Au cours d’une journée normale, elle se lève et prépare son fils (il a maintenant quatre ans et demi), qui se rend à l’école en autobus scolaire. Elle se couche ensuite pendant environ une heure parce qu’elle est fatiguée, puis elle se lève, fait la vaisselle du déjeuner et pense à ce qu’elle va préparer pour le souper – elle trouve cela difficile. Après, elle fait une sieste et regarde la télévision. Son fils revient à la maison à 15 h 45. Elle essaie de faire un peu de lessive et de tâches ménagères légères comme le balayage – elle ne peut en faire qu’un peu à la fois et doit ménager ses forces. Elle ne passe pas l’aspirateur et ne fait pas de travaux extérieurs non plus parce qu’il lui est difficile de se tenir debout, de se pencher ou de ramasser des choses par terre. Elle peut lire et faire des casse‑têtes avec son fils, mais ne peut effectuer aucune activité physique, comme l’amener au parc. Elle va faire l’épicerie avec son époux et sa fille – elle doit soulever les sacs avec sa main gauche parce qu’elle ne peut rien soulever avec sa main droite. Elle ne peut conduire que sur de courtes distances et, lorsqu’elle conduit, ses jambes et son dos lui font mal. Sa seule activité sociale est d’aller rendre visite à ses parents à X X tous les trois mois; elle reste souvent deux ou trois jours sans sortir de la maison et lorsqu’elle sort, ce n’est pas pour plus de 30 minutes en raison de la douleur et de la fatigue.

[19] Elle a tenté de retourner au travail l’an passé, en travaillant pour son époux lorsqu’il a lancé une nouvelle entreprise de construction; il avait besoin de quelqu’un pour recueillir les billets des camionneurs. Elle n’a pu le faire que pendant environ 20 jours et a ensuite dit à son époux qu’elle ne pouvait pas continuer en raison de la douleur et de la fatigue. Elle n’a fait aucune autre tentative pour retourner au travail. Tenue de dire pourquoi, elle a déclaré ce qui suit [traduction] : « Je n’ai aucune compétence… aucun diplôme… Je ne peux faire aucun type de travail à cause de ma douleur… Je sais que je ne le peux pas. »

Preuve médicale

[20] Le Tribunal a examiné attentivement l’ensemble de la preuve médicale contenue dans le dossier d’audience. Les extraits que le Tribunal juge les plus pertinents sont présentés ci‑dessous.

[21] Le 30 avril 2007, le Dr Coutts, de la clinique médicale de soirée de Timmins, a noté que l’appelante souffrait d’un syndrome des facettes articulaires cervicales associé à un spasme du muscle scalène causant de la douleur au bras.

[22] Dans un rapport d’évolution daté du 25 juin 2007, Candice Laxdal, physiothérapeute, a mentionné que l’appelante ressent toujours de la douleur au cou, à l’épaule et au bras droits et qu’elle a de la difficulté à effectuer des activités de la vie quotidienne, comme cuisiner et nettoyer, compte tenu de la douleur et de la faiblesse dans son bras droit. Selon le rapport, l’appelante est toujours incapable de reprendre son travail de coiffeuse en raison de la douleur et d’une parathésie du côté droit du cou et du bras droit. Le rapport mentionne aussi qu’elle peut effectuer des tâches légères chez elle comme cuisiner et faire la vaisselle, mais qu’elle ne peut pas balayer ni passer l’aspirateur à cause de la fatigue dans le bras droit. Dans le rapport, il est recommandé des traitements de physiothérapie continus axés davantage sur le renforcement fonctionnel afin de préparer l’appelante à un retour au travail.

[23] Le 25 août 2007, Carol Orok, kinésiologue agréée, a effectué une évaluation des capacités fonctionnelles (ECF) de l’appelante à la demande de la compagnie d’assurances ING. Les résultats de l’ECF indiquaient que l’appelante démontrait les capacités suivantes : peut demeurer assise ou se tenir debout pendant une période continue; aucune limitation pour marcher et monter un escalier; extension vers l’avant : fréquent; extension au niveau supérieur et position penchée et voutée: occasionnel; position accroupie : rare; position à genoux : occasionnel; torsion/rotation axiale : rare; levée maximale de 20 livres de la taille aux épaules (4 fois, fréquent); levée maximale de 30 livres du sol à la taille (2 fois) et de 20 livres (4 fois, fréquent); transport d’une charge de 30 livres (30 pieds en un déplacement); capacité de pousser et de tirer modérée (50 livres ou moins); force de préhension : 71 livres de la main gauche et 44 livres de la main droite; force de pincement inférieure à la normale dans la main droite et de faible à normale dans la main gauche.

[24] Le rapport indique également que l’appelante pourrait actuellement effectuer un travail dont le niveau d’exigence physique est léger et qu’elle est incapable d’effectuer les tâches essentielles du poste qu’elle occupait avant l’accident. Mme Orok était d’avis que, puisque l’appelante peut faire la majorité des tâches de l’emploi qu’elle occupait avant l’accident, elle pourrait retourner au travail à temps partiel en faisant modifier ses tâches. Mme Orok a recommandé un retour au travail progressif, à raison de quatre heures par quart de travail pour commencer.

[25] Le 13 septembre 2007, le Dr Cisa, chirurgien orthopédiste, a effectué une évaluation de l’appelante à la demande de la compagnie d’assurances ING. D’après son examen (deux heures et demie), les antécédents fournis oralement et ses constatations cliniques, le Dr Cisa a conclu qu’à l’heure actuelle, l’appelante souffre toujours d’une incapacité importante à effectuer les tâches essentielles de son travail de coiffeuse. Il a estimé que, dans l’immédiat, il n’est pas sécuritaire pour l’appelante de reprendre à temps plein son ancien emploi et de faire toutes les tâches qui s’y rattachent mais qu’elle pourrait faire un travail modifié à temps partiel. Le Dr Cisa a recommandé des traitements continus de physiothérapie assortis de modalités actives et passives, notamment d’électrothérapie et d’exercices dans un centre de physiothérapie et chez elle. Il a aussi recommandé la massothérapie.

[26] Le 2 janvier 2008, Candice Laxdal a signalé à la compagnie d’assurances ING que l’appelante suivait des séances de physiothérapie environ trois fois par semaine depuis le 7 février 2007 et qu’elle avait démontré des progrès minimes par rapport au traitement. On a mis fin au programme de physiothérapie de l’appelante, compte tenu de l’amélioration minimale obtenue, et on lui a recommandé de poursuivre son programme d’exercices chez elle.

[27] Le 5 février 2008, Marnie Chisholm a dirigé l’appelante vers le Dr Ethier en vue d’une évaluation audiologique, compte tenu d’une diminution de l’acuité auditive dans l’oreille droite après l’accident de la route. L’évaluation avait pour but d’exclure les dommages structurels.

[28] Le 14 mars 2008, le Dr Kos et Marnie Chisholm ont écrit à l’avocat de l’appelante pour confirmer qu’ils avaient demandé une image par résonance magnétique (IRM) et un électromyogramme (EMG).

[29] Une IRM de la colonne cervicale de l’appelante effectuée le 21 avril 2008 ne révélait aucune discopathie dégénérative importante, aucune hernie discale et aucune sténose du canal rachidien.

[30] Une IRM de la tête de l’appelante effectuée le 21 avril 2008 était normale.

[31] Des radiographies thoraciques de l’appelante effectuées le 23 avril 2008 étaient normales.

[32] Le 18 juin 2008, le Dr Cisa a fait rapport à la compagnie d’assurances ING de son évaluation plus approfondie de l’appelante, effectuée le 4 juin 2008. Ses conclusions reposaient sur son examen (approximativement deux heures), les antécédents fournis par l’appelante, un examen des documents médicaux et ses constatations cliniques. Il a noté que son examen démontrait que l’appelante avait une meilleure amplitude de mouvement, que ses douleurs avaient diminué et que moins d’anormalités avaient été observées au cou et à l’épaule droite que le 23 août 2007. Il estimait que les déficiences de l’appelante étaient temporaires, compte tenu surtout des écarts entre l’amplitude de mouvement lorsque les limitations avaient été mesurées et non mesurées et le manque de force allégué dans le haut du bras droit même s’il n’y avait aucune atrophie. Il a indiqué que l’état de l’appelante s’était amélioré considérablement depuis qu’il l’avait évaluée en août 2007.

[33] Le Dr Cisa estimait également que, bien que les limitations de l’appelante concordent avec les blessures subies, elle se plaint en fait davantage que ce à quoi il s’attendrait après ce type de blessure à ce stade‑ci de la période de rétablissement et que l’écart des limitations indique qu’elle se limite par peur de la douleur plutôt que par une incapacité réelle de bouger le cou et l’épaule. Il a ajouté que l’appelante ne souffre d’aucune incapacité grave l’empêchant d’effectuer les tâches essentielles de son emploi; qu’elle a une légère limitation de mouvement dans le cou et l’épaule droite; que le principal obstacle au retour au travail repose sur ses plaintes de douleur subjectives plutôt que sur ses déficiences; que l’examen neurologique était normal et qu’il n’a fait aucune constatation objective qui constitueraient un empêchement pour l’appelante de retourner au travail.

[34] Le Dr Cisa a conclu que l’appelante devrait pouvoir retourner au travail à temps partiel, une heure par jour pour les deux premières semaines, puis qu’il faudrait augmenter progressivement à deux heures par semaine pour les deux semaines suivantes et continuer à augmenter progressivement selon le degré de tolérance. Si un retour progressif n’est pas possible, il a recommandé un programme de conditionnement au travail de trois à quatre semaines. Il a indiqué que l’appelante avait été traitée en temps opportun et que le programme de retour progressif au travail devrait être mis en œuvre immédiatement.

[35] Le 9 juillet 2008, Deborah Armstrong, physiothérapeute, a signalé à l’avocat de l’appelante que celle‑ci avait été évaluée initialement à sa clinique le 16 janvier 2008 et qu’elle avait commencé le traitement le 5 février 2008. Son plan de traitement a pris fin le 5 mai 2008 et, en raison d’un retard dans l’approbation du deuxième plan de traitement, elle n’est retournée à sa clinique que le 25 juin 2008. Divers traitements et modalités ont été utilisés, et l’appelante allait à la salle de physiothérapie régulièrement, sous la supervision directe d’un physiothérapeute. Mme Armstrong a mentionné que les symptômes persistants de l’appelante affectaient principalement le côté droit du cou et de l’épaule, le milieu du dos et son bras droit. Ses principaux problèmes étaient des maux de tête, une douleur constante, une faiblesse dans le bras droit, une diminution de l’amplitude des mouvements, un manque de mobilité durale complète, une constriction myofasciale et une perte fonctionnelle. Mme Armstrong a noté que l’appelante a très bien suivi son programme de physiothérapie; que rien n’indiquait la présence de symptômes non organiques et qu’elle est toujours prête à faire les exercices qu’on lui demande. En ce qui concerne le rapport récent du Dr Cisa, Mme Armstrong a dit qu’il n’était vraisemblablement pas possible pour l’appelante de retourner au travail compte tenu des attentes de son employeur et qu’un programme de conditionnement au travail pourrait être indiqué.

[36] Le 15 juillet 2008, Marnie Chisholm et le Dr Kos ont signalé que l’appelante était une patiente du Centre de mieux-être VON depuis le 22 janvier 2008 et qu’elle se plaignait de douleurs chroniques au cou et à l’épaule, accompagnées d’un engourdissement et de picotements dans les quatrième et cinquième doigts de la main gauche. Le rapport note que l’appelante continue de suivre des séances de physiothérapie et de massothérapie et qu’elle estime que cela l’aide à soulager sa douleur et que son amplitude de mouvement s’est légèrement améliorée. Le rapport note également que l’appelante a essayé divers types d’anti‑inflammatoire non stéroïdiens (AINS), comme Advil et Toradol, contre la douleur, mais qu’elle admet ne pas aimer prendre de médicaments. L’état de l’appelante continuait à être traité comme une lésion des tissus mous et un coup de fouet cervical jusqu’à ce que des tests de conduction nerveuse soient effectués par le Dr Mitchell. Le plan de traitement devait se poursuivre par des traitements de physiothérapie et de massothérapie et un soulagement de la douleur.

[37] Le 8 août 2008, Louis Favretto, physiothérapeute, a fait part à l’avocat de l’appelante de son évaluation de la capacité fonctionnelle de l’appelante. Celle‑ci se plaignait de maux de tête. Elle ressentait également de la douleur dans l’articulation temporomandibulaire droite, le côté droit du cou et de l’épaule, le haut du bras droit et du coude, la fesse droite et l’arrière de la jambe droite. Elle a dit qu’elle ressentait une constriction au poignet gauche, un engourdissement dans les quatrième et cinquième doigts de la main droite et des picotements dans les orteils du pied droit. Ses symptômes au cou et dans le haut du bras droit étaient constants; tous les autres symptômes étaient intermittents. En général, son état empire lorsqu’elle reste assise pendant plus de 30 minutes, qu’elle garde le cou penché de façon prolongée, qu’elle tourne le cou vers la gauche, tôt le matin, à la fin de la journée et lorsqu’elle reste immobile. Elle se sent un peu mieux lorsqu’elle se couche durant la journée et de façon générale lorsqu’elle est en mouvement. La douleur perturbe ses nuits de sommeil, et elle dit qu’elle se réveille environ toutes les heures. La toux et les éternuements augmentent la douleur. Elle a eu des épisodes d’étourdissement, d’acouphène et de nausées. Le seul médicament qu’elle prenait était de l’Advil. Le diagnostic était une lésion des tissus mous à la colonne cervicale et à l’épaule droite et un syndrome de douleur chronique.

[38] En fonction des résultats des tests, M. Favretto a conclu qu’en ce qui concerne son travail, l’appelante ne répond pas aux exigences professionnelles de tendre le bras verticalement pour couper des cheveux longs ou encore placer des fournitures sur des tablettes élevées ou les enlever; elle ne répond pas aux exigences professionnelles de tendre le bras à hauteur de poitrine pour couper des cheveux ni à celles de se pencher en position debout pour shampouiner les clients. Le rapport conclut qu’en raison de l’accident de la route, l’appelante souffre d’une déficience physique au cou et à l’épaule droite; que ces déficiences physiques entraînent des limitations fonctionnelles qui nuisent grandement à sa capacité d’effectuer des tâches ménagères et de se livrer à des activités de loisir, et qu’elle ne répond pas aux exigences essentielles du travail de coiffeuse.

[39] Le 19 août 2008, le Dr Mitchell, physiatre, a signalé qu’il n’avait trouvé aucun déficit neurologique et que la seule constatation est une légère diminution de l’amplitude de mouvement dans le cou avec une sensibilité localisée principalement dans le muscle sterno‑cléido‑mastoïdien droit qui pourrait être la source de sa douleur. L’appelante a déclaré que la compagnie pour laquelle elle travaille ne lui permettra pas de tenter de retourner travailler à temps partiel, que son avocat a pu obtenir un remplacement du revenu et qu’elle n’a pas travaillé depuis l’accident.

[40] Le 4 septembre 2008, le Dr Mitchell a signalé que la palpation du cou de l’appelante n’avait révélé aucun spasme paracervical, mais qu’il avait constaté une sensibilité dans la région occipitale droite, où le grand nerf occipital passe par le muscle semi‑épineux de la tête, indiquant que ses maux de tête pourraient être attribuables à un déclencheur dans le muscle ou à une compression du nerf occipital Le Dr Mitchell allait tenter une anesthésie tronculaire du nerf occipital.

[41] Le 1er octobre 2008, Marnie Chisholm a transmis des copies des rapports ayant trait à la consultation de l’appelante avec le Dr Mitchell. Mme Chisholm a noté qu’un EMG n’avait pas été effectué parce que le Dr Mitchell estimait que la douleur de l’appelante était liée à un spasme musculaire paracervical qui causait une plus grande irritation du nerf occipital.

[42] Le 24 octobre 2008, Allison Gould, conseillère en gestion des capacités, a fait part à la compagnie d’assurances ING de son évaluation des capacités de travail de l’appelante. Le rapport indique des emplois qui pourraient lui convenir, comme commis à la saisie de données, commis de bureau général, commis à l’information, réceptionniste, commis à la gestion des documents et commis à la réception (sauf dans un hôtel). Selon le rapport, à la suite de l’accident, l’appelante ne souffre pas d’une incapacité totale à occuper quelque emploi que ce soit qui correspondrait dans une mesure raisonnable à son niveau d’instruction, de formation ou d’expérience.

[43] Le 27 octobre 2008, Deborah Soligo, conseillère en réadaptation professionnelle, a fait part à l’avocat de l’appelante de son évaluation de la réadaptation professionnelle. Le rapport note que l’appelante a plusieurs limitations professionnelles en raison de ses douleurs exacerbées, de ses limitations physiques et de ses maux de tête. Le rapport note également que l’appelante décrit qu’elle a des problèmes de mémoire et de concentration depuis l’accident et que ses antécédents scolaires et professionnels constituent aussi des limitations professionnelles importantes. Le rapport conclut que l’appelante ne sera vraisemblablement pas capable de retourner travailler comme coiffeuse, qui suppose de rester longtemps debout, de travailler à hauteur d’épaule ou plus haut avec les deux bras ainsi qu’avec des instruments pour coiffer les cheveux. En outre, le rapport indique qu’elle ne pourrait pas reprendre un travail physiquement exigeant comme ouvrière de serre, serveuse, plongeuse ou femme de chambre. Le rapport conclut que l’appelante ne peut reprendre aucun des emplois qu’elle occupait avant l’accident, qu’elle n’est pas une bonne candidate pour le recyclage scolaire et que, compte tenu de son niveau d’invalidité, elle inapte au travail.

[44] Le 18 novembre 2008, le Dr Ogilvie‑Harris, chirurgien orthopédiste, a fait part à l’avocat de l’appelante de sa consultation en orthopédie. Les symptômes actuels de l’appelante consistaient en des maux de tête, de la douleur dans les régions paracervicales et paralombaires ainsi que dans les articulations sacro‑iliaques; de la douleur dans la cuisse et le mollet droits et des problèmes de sommeil. L’appelante a essayé divers médicaments, mais éprouve de la difficulté à les prendre parce qu’ils lui causent des maux d’estomac. L’examen neurologique de l’appelante était normal, et l’appelante avait un résultat positif aux cinq signes de Waddell, ce qui, selon le Dr Ogilvie‑Harris, indiquait une réaction psychologique négative à une blessure et un pronostic sombre sur le plan du rétablissement. Le Dr Ogilivie‑Harris estimait qu’il y avait des caractéristiques d’un syndrome de douleur chronique avec une sensibilisation centrale. Il a conclu que, compte tenu de ses limitations fonctionnelles permanentes, l’appelante n’a pas la capacité physique de reprendre son ancien emploi de coiffeuse, car elle aurait de la difficulté à effectuer des mouvements de la colonne cervicale et du membre supérieur droit. Le Dr Ogilvie‑Harris était d’avis que l’appelante devait suivre un programme de traitement de la douleur chronique, après quoi elle devait subir une évaluation professionnelle et une analyse des compétences transférables. Il estimait aussi qu’elle pourrait devoir se recycler pour exercer un emploi qui correspond à sa capacité physique.

[45] Le 24 décembre 2008, le Dr Cisa a fait rapport à la compagnie d’assurance ING de son évaluation en orthopédie de l’appelante effectuée le 10 décembre 2008. Il s’agissait de sa troisième évaluation de l’appelante (les évaluations précédentes avaient été effectuées le 29 août 2007 et le 4 juin 2008); il a passé une heure et quarante-cinq minutes avec l’appelante. Il a noté qu’elle suit toujours des traitements de physiothérapie une fois par semaine, qu’elle se rend à un centre de conditionnement physique deux fois par semaine et qu’elle a des traitements de massothérapie une fois par semaine. Il a également noté que le Dr Mitchell lui a fait deux injections de cortisone (une au cou et une à l’épaule). Elle prend de l’Advil pour soulager sa douleur. En fonction des antécédents de l’appelante, de ses constatations cliniques et de son examen des documents médicaux, le Dr Cisa a conclu que l’appelante s’était remise de ses blessures; que l’amplitude de mouvement de sa colonne cervicale et de son épaule était normale et complète; que le manque de force démontré était variable et n’était pas étayé par l’absence d’atrophie du membre supérieur droit; que ses plaintes et sa perception durables des limitations ne correspondent pas à l’examen physique, qui démontrait une amplitude de mouvement complète du cou et des épaules.

[46] Selon le Dr Cisa, l’appelante n’est pas tout à fait incapable d’occuper quelque emploi que ce soit qui correspondrait dans une mesure raisonnable à son niveau d’instruction, de formation ou d’expérience et il a noté que l’évaluation professionnelle a recensé plusieurs emplois qu’elle pourrait exercer. Il a discuté d’un retour au travail avec l’appelante, et celle‑ci a dit qu’elle croit qu’elle pourrait reprendre son emploi précédent s’il était disponible, même si au début, elle ne pourrait travailler qu’à temps partiel pendant les deux ou trois premières semaines.

[47] Le 23 janvier 2009, le Dr Miller, psychologue, a fait rapport à l’avocat de l’appelante de son évaluation psychoprofessionnelle de l’appelante effectuée le 6 novembre 2008. Le rapport note qu’elle entretient une relation avec quelqu’un depuis un an et demi; qu’ils vont au restaurant et au cinéma et qu’ils rendent visite à des membres de leurs familles; qu’à part cela, sa vie sociale est beaucoup plus calme; qu’elle n’a pas d’énergie pour faire grand‑chose et qu’elle a tendance à rester davantage chez elle; qu’elle passe la majeure partie de son temps dans l’appartement à faire des tâches ménagères, à naviguer occasionnellement sur Internet et à regarder la télévision; qu’elle ne lit pas beaucoup, car la flexion aggrave sa douleur dans le cou.

[48] Le Dr Miller a indiqué ce qui suit :

[Traduction]
Compte tenu de la façon dont elle se sent et fonctionne actuellement, Mme S. F. croit qu’elle aurait de la difficulté à reprendre l’emploi qu’elle occupait comme coiffeuse avant l’accident en raison de sa capacité limitée de se pencher, de rester debout et de lever les bras. Elle ne pourrait pas travailler comme serveuse à cause des efforts pour soulever des objets. Son travail comme ouvrière dans les pépinières était très exigeant, notamment pour ce qui est de transporter des objets, ce qu’elle est incapable de faire compte tenu de sa douleur au cou et au dos. Le travail de femme de chambre nécessite de se pencher, de déplacer un lourd aspirateur et de travailler rapidement. Mme S. F. estime ne pouvoir reprendre aucun des emplois qu’elle occupait avant l’accident. Elle a songé à retourner à l’école pour étudier la comptabilité, mais s’inquiétait de la nécessité de rester en position assise pendant de longues périodes. Son massothérapeute lui a suggéré de devenir enseignante suppléante. Il a été jugé qu’elle pourrait mieux gérer physiquement ce type de travail parce qu’elle pourrait se déplacer. Mme S. F. n’a pu penser à aucun autre besoin de réadaptation, à l’exception du besoin continu de traitements de physiothérapie et de massothérapie.

[49] Le Dr Miller a noté qu’il n’y avait aucune déficience cognitive durant l’entrevue; que son récit était précis; qu’elle n’était pas inattentive; qu’elle s’exprimait bien et comprenait facilement les questions et que ses compétences verbales rudimentaires indiquaient une intelligence limitée, du moins sur le plan verbal. Les tests psychométriques révélaient un niveau de formulation et lecture de 6,9, de compréhension des phrases de 7,9, d’orthographe de 12,7 et de calcul mathématique de 6,3. Le Dr Miller estimait que l’appelante présentait un trouble de la douleur associé à des facteurs psychologiques, sur une base chronique, et un trouble d’adaptation avec humeur anxieuse. Le Dr Miller jugeait que sa douleur était essentiellement d’origine psychogène et soulignait que son trouble n’est aucunement synonyme d’une amplification des symptômes et qu’il s’agit d’un trouble très réel lié à une souffrance authentique et à une incapacité importante. Il a décrit l’appelante comme étant une personne stoïque qui répugnait à reconnaître ses troubles émotionnels lors des mesures officielles de fonctionnement psychologique.

[50] Le pronostic du Dr Miller était mauvais du fait que deux années s’étaient écoulées depuis l’accident. Il a recommandé un traitement de la douleur multidisciplinaire, y compris du counseling psychologique, mais a tenu à souligner qu’étant donné [traduction] « sa nature très concrète et très simple et son manque de perspicacité psychologique, elle pourrait ne pas bénéficier grandement des approches de traitement de la douleur qui vont bien au‑delà des interventions pharmacologiques, médicales ou physiques ». Le rapport conclut que l’appelante doit se limiter au travail léger ou sédentaire en raison de ses blessures; qu’elle devra certainement se recycler afin d’atténuer ses pertes, car elle n’a aucune expérience antérieure dans ce type de travail et que le counselling professionnel est recommandé avant qu’elle n’envisage un autre emploi ou programme d’études.

[51] La note clinique de Marnie Chisholm datée du 1er avril 2009 indique une prise en charge future de la douleur. La douleur persiste, et la patiente a un rendez‑vous à la clinique de traitement de la douleur à Hamilton. Elle ne prend aucun médicament à l’heure actuelle. On a discuté afin de déterminer si la douleur doit être traitée – elle devra prendre des médicaments afin de mieux la gérer. On lui a suggéré de prendre du Tylenol no 2 et on a demandé un EMG – aiguillage vers le Dr Chang à Sudbury.

[52] Le 21 mai 2009, le Dr Reznek, psychiatre, a signalé aux avocats de la partie défenderesse dans le cadre de la réclamation en responsabilité civile délictuelle de l’appelante que, lors de l’examen, l’appelante ne semblait pas objectivement déprimée; qu’elle était orientée quant au temps, au lieu et à la personne; qu’elle n’avait commis aucune erreur en ce qui concerne les tâches de mémoire à court terme et qu’elle avait obtenu 30 sur 30 au mini‑examen de Folstein sur l’état mental. En fonction de ses tests et examens, le Dr Reznek a conclu que l’appelante ne souffre pas d’un trouble dépressif majeur ni d’un trouble d’adaptation avec humeur dépressive ou anxieuse; qu’elle ne souffre pas d’un état de stress post‑traumatique; qu’elle n’a pas subi un traumatisme cérébral lors de l’accident et qu’elle ne souffre pas d’un trouble de la douleur. Selon le Dr Reznek, rien n’empêche l’appelante d’effectuer les activités de la vie quotidienne qu’elle faisait avant l’accident ou de reprendre quelque emploi que ce soit qui correspondrait dans une mesure raisonnable à son niveau d’instruction, de formation et d’expérience et à ses capacités physiques.

[53] Le 21 mai 2009, le Dr Cameron, chirurgien orthopédiste, a signalé aux avocats de la partie défenderesse dans le cadre de la réclamation en responsabilité civile délictuelle de l’appelante que, lors de l’examen, l’appelante démontrait une amplitude de mouvement complète dans le cou et le dos et une amplification des symptômes avec une sensibilité étendue au niveau de la peau et qu’elle avait subi des foulures simples et non compliquées dont elle aurait dû se remettre depuis longtemps. Il ne croyait pas que l’appelante avait des restrictions médicales. Il a noté que des callosités sur sa main indiquaient qu’il est [traduction] « évident qu’elle travaille » et qu’il estimait qu’elle n’a besoin d’aucun traitement à la suite des blessures orthopédiques subies dans l’accident. Il a conclu que l’appelante n’a subi aucune blessure permanente et grave de nature physique lors de l’accident de la route.

[54] Le 18 juin 2009, John Haratsis, physiothérapeute agréé, a signalé à la compagnie d’assurance ING que l’examen physique n’avait pas réussi à démontrer l’existence d’une pathologie sous‑jacente expliquant les symptômes présentés par l’appelante. M. Haratsis s’est dit d’avis que les symptômes présentés par l’appelante [traduction] « semblent être autogènes et ne sont pas considérés comme une déficience ».

[55] Le 2 février 2010, Laura Demaiter, ergothérapeute, et le Dr Kirsh, directeur médical, ont signalé que l’appelante avait été adressée par son avocat pour une évaluation à l’unité de traitement de la douleur chronique de l’hôpital Chedoke. Elle était enceinte de six mois au moment de l’évaluation. Le rapport recommande l’essai de divers analgésiques et antidépresseurs après la grossesse et indique que le traitement le plus important est un programme de traitement interdisciplinaire de la douleur comme le leur. Le rapport note que l’appelante présente une combinaison complexe de problèmes psychologiques et physiques, dont le meilleur traitement se fait dans un environnement multimodal intensif.

[56] Dans un rapport soumis à Intact Insurance, le Dr Kirsh, directeur médical de l’unité de traitement de la douleur chronique de l’hôpital Chedoke, a indiqué que l’appelante avait été évaluée le 2 février 2010 et qu’elle était une bonne candidate pour leur programme de traitement de la douleur chronique. Son admission au programme de traitement en résidence a été recommandée.

[57] Le 5 mars 2010, Deborah Soligo a signalé à l’avocat de l’appelante que celle‑ci tente de se perfectionner; qu’elle a commencé à suivre le Programme d’affectations visant l’enrichissement de carrière dans un centre d’apprentissage pour adultes en septembre ou en octobre 2009; qu’elle a terminé deux cours le 24 février 2010; qu’elle a réussi le cours de mathématiques et le cours d’anglais de 11e année; qu’elle a obtenu 87 % en mathématiques et 72 % en anglais et qu’elle a travaillé à son propre rythme et a effectué les travaux chez elle. Elle a aussi indiqué que l’appelante suit maintenant deux cours de français, que son objectif à long terme est d’obtenir son diplôme de 12e année et qu’elle a un intérêt pour la comptabilité et la suppléance. Le rapport note, qu’outre ses problèmes physiques et ses difficultés à dormir, l’appelante continue d’avoir des problèmes de mémoire et de concentration; qu’elle prend constamment des notes; qu’elle a mentionné que ses travaux scolaires lui prennent du temps et que lorsqu’elle se sent plus fatiguée, elle arrête d’étudier pendant environ deux jours. Mme Soligo fait remarquer que l’appelante demeure motivée malgré son invalidité, qu’elle fréquente un centre d’apprentissage pour les adultes, qu’elle va à son rythme et éprouve toujours de la difficulté.

[58] Mme Soligo a indiqué ce qui suit [traduction] « Au mieux, en réduisant sa douleur, elle pourrait travailler à temps partiel comme réceptionniste. Le travail à temps partiel lui conviendrait mieux. Elle devrait suivre une formation en cours d’emploi. Toutefois, cela ne serait possible qu’en réduisant sa douleur. Malheureusement, ce n’est pas le cas à l’heure actuelle. » Elle a recommandé que l’appelante poursuive le programme de traitement de la douleur chronique. Elle n’était toutefois pas convaincue que cela ferait une différence d’un point de vue professionnel, mais espérait que cela améliorerait sa qualité de vie. Mme Soligo a conclu qu’elle [traduction] « croyait fermement que l’appelante est inapte au travail actuellement ».

[59] Le 10 août 2010, Louis Favretto a signalé à l’avocat de l’appelante que le fait de rester assis bien droit et de s’asseoir en position penchée constitue un facteur aggravant qui augmente la douleur au cou et à l’épaule droite de l’appelante. M. Favretto a conclu que tout emploi dans lequel l’appelante doit absolument demeurer en position assise dépasse ses limites fonctionnelles.

[60] Le 24 août 2010, Robin Richards, professeur de chirurgie, a signalé à l’avocat de l’appelante que malgré les traitements, l’appelante a des symptômes importants, graves et persistants, notamment une douleur au cou, à l’épaule droite, dans le bas du dos, dans le coude droit, un engourdissement qui touche la face ulnaire de sa main droite, ainsi que des maux de tête et une incapacité de reprendre le niveau d’activité qu’elle avait avant l’accident. Il estimait que l’appelante a des limitations permanentes en ce qui concerne les activités à fort impact, la capacité de soulever des objets lourds, les activités où il faut lever les bras au-dessus de la tête, ainsi que l’utilisation répétitive ou en force du membre supérieur droit contre une résistance. Il était d’avis que l’invalidité de l’appelante l’empêche d’exercer son ancien emploi de coiffeuse et qu’elle a des limitations permanentes pour ce qui est des activités professionnelles, récréatives et ménagères découlant de son accident.

[61] Le 25 août 2010, le Dr Ogilvie‑Harris a signalé à l’avocat de l’appelante que celle‑ci devrait suivre un programme de traitement interdisciplinaire de la douleur. Il estimait qu’en raison de sa douleur persistante et de ses limitations physiques, l’appelante n’a pas la capacité physique de reprendre l’emploi qu’elle exerçait avant l’accident; qu’il s’agit du seul emploi qui lui convienne raisonnablement à l’heure actuelle et qu’après le programme de traitement de la douleur chronique, elle aura encore besoin de réadaptation et de formation professionnelles.

[62] Le 6 septembre 2010, le Dr Miller a fait part à l’avocat de l’appelante de son réexamen effectué le 25 août 2010. L’appelante a indiqué qu’elle avait réussi le cours de mathématiques de 12e année et qu’elle avait tenté d’améliorer ses compétences en français, mais avait trouvé le cours trop difficile et avait abandonné. Le Dr Miller a noté ce qui suit [traduction] « Compte tenu de la façon dont elle se sent et fonctionne actuellement, Mme S. F. ne croit pas qu’elle peut retourner sur le marché du travail en raison de ses limitations physiques et de son manque de qualifications. Elle m’a dit, la dernière fois, qu’elle ne pouvait pas retourner travailler comme coiffeuse, car elle ne pourrait pas gérer les exigences physiques. Sa situation n’a pas changé. Lorsqu’elle suivait des cours, elle avait pour objectif d’obtenir son diplôme d’études secondaires afin de devenir secrétaire ou enseignante suppléante. Pour l’heure, elle n’est pas certaine que cet objectif soit réaliste ni atteignable à cause de ses difficultés liées aux cours de français. Pour ce qu’elle en sait, elle estime qu’elle doit obtenir une 11e ou une 12e année de français pour avoir son diplôme. »

[63] Le Dr Miller était d’avis que l’appelante présente toujours un trouble de la douleur associé à des facteurs psychologiques, sur une base chronique, et un trouble d’adaptation avec humeur anxieuse, sur une base chronique, ainsi qu’un rétablissement léger à modéré. Il convenait avec Deborah Soligo que l’appelante est actuellement inapte au travail et, qu’à moins qu’elle n’apprenne à mieux composer avec sa douleur (un scénario improbable puisque presque quatre ans se sont écoulés depuis son accident), elle restera ainsi de façon permanente.

[64] Le 14 octobre 2010, le Dr Blain, psychologue, a indiqué dans un rapport à l’avocat de l’appelante que celle‑ci est sa patiente depuis avril 2009; qu’elle a assisté à 20 séances, la plus récente ayant eu lieu le 13 octobre 2010 et que lors du traitement, ils ont abordé les questions des symptômes dépressifs et de la douleur chronique. Le Dr Blain a noté que l’appelante s’est conformée au traitement et a fait preuve d’assiduité. Le Dr Blain a indiqué qu’une approche multimodèle est la plus efficace pour traiter la douleur chronique et les troubles douloureux et que le plus avantageux serait qu’elle poursuive une psychothérapie et une combinaison de massothérapie, de physiothérapie, d’exercices et d’acuponcture afin de mieux composer avec sa douleur chronique.

[65] Les notes cliniques du Dr Blain indiquent que l’appelante a assisté à 13 séances de consultation psychologique entre le 20 avril 2009 et le 13 septembre 2010. L’appelante était vue pour une dépression, une régulation de l’humeur et le traitement de la douleur. La note datée du 4 février 2010 indique que l’appelante revenait tout juste de son évaluation à la clinique de traitement de la douleur Chedoke-McMaster, que le moment semble poser des problèmes en raison de sa grossesse, qu’elle ne savait rien sur les dates de début et que cela l’inquiétait beaucoup. La note datée du 26 février 2010 indique que l’appelante n’a reçu aucune nouvelle de McMaster au sujet du programme de traitement de la douleur et que, à mesure que sa date d’échéance [mai] approche, elle devient de plus en plus stressée à propos du programme. Il y a eu deux séances après la naissance de L en mai 2010. La dernière séance, le 13 septembre 2010, indique que l’appelante ressent de plus en plus de douleur, probablement attribuable au fait qu’elle soulève davantage le bébé, que cela la dérange au point qu’elle est parfois incapable de le soulever et qu’elle doit compter sur sa fille pour le faire. Ils ont examiné à nouveau sur le cycle de la douleur par rapport à l’humeur, à l’activité physique, à l’accroissement de la douleur et à la tolérance.

Observations

[66] M. Julien soutient que l’appelante est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) elle est incapable d’être une employée fiable et prévisible en raison de ses multiples limitations et problèmes médicaux – elle est nettement limitée dans ses activités quotidiennes et sa capacité d’effectuer les tâches ménagères, et elle passe souvent plus de deux à trois jours par semaine sans même quitter la maison;
  2. b) elle s’est conformée aux modalités de traitements recommandés, notamment la physiothérapie, la massothérapie, la chiropractie et les séances de consultation psychologique;
  3. c) les éléments de preuve médicale, y compris ceux fournis pas son médecin de famille, le psychologue, deux physiothérapeutes traitants, les évaluations professionnelles et les consultants en orthopédie confirment qu’elle est incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice;
  4. d) elle a tenté d’atténuer ses pertes en poursuivant des études secondaires et de travailler pour son époux en exerçant un emploi très peu exigeant dans lequel elle devait uniquement recueillir des billets, mais n’a pas réussi compte tenu de sa douleur, de sa fatigue ainsi que de ses problèmes de mémoire et de concentration;
  5. e) l’appelante a présenté un témoignage crédible et sincère, et il était clair qu’elle avait beaucoup de difficulté à répondre aux questions, à se souvenir des choses et à s’exprimer;
  6. f) le tribunal devrait tenir compte des caractéristiques personnelles de l’appelante, notamment de son instruction limitée, de son peu de compétences transférables et de ses antécédents professionnels restreints, et considérer la capacité d’emploi de l’appelante dans un contexte « réaliste ».

[67] L’intimé soutient que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) l’appelante est peut‑être incapable de reprendre son ancien travail de coiffeuse, mais les éléments de preuve ne révèlent aucune pathologie ou déficience grave qui l’empêcherait d’exercer une activité professionnelle qui tiendrait compte de ses limitations;
  2. b) les tests diagnostiques ne révèlent rien de grave dans la tête ou la colonne de l’appelante, et elle suit un traitement foncièrement conservateur, sous forme de séances de massothérapie et de physiothérapie et d’un seul anti‑inflammatoire offert en vente libre;
  3. c) l’appelante a eu un accident de la route apparemment mineur en janvier 2007, au cours duquel les coussins gonflables ne se sont pas déployés; il n’y a pas eu de perte de conscience; elle n’a pas eu besoin de soins d’urgence; elle est sortie elle‑même du véhicule et a quitté les lieux en voiture;
  4. d) de nombreux rapports d’évaluation d’experts pour le compte de l’assureur soutiennent que l’appelante est capable d’occuper un autre emploi moins exigeant et bon nombre des rapports sur lesquels s’appuyait l’appelante sont postérieurs à la date de la PMA;
  5. e) l’appelante n’a pas établi une invalidité grave et prolongée selon les critères du RPC en date de sa PMA du 31 décembre 2007 ou continuellement par la suite.

Analyse

[68] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2007 ou avant cette date.

Caractère grave

[69] Les exigences législatives appuyant une demande de prestations d’invalidité sont décrites au paragraphe 42(2) Régime de pensions du Canada. Ce paragraphe explique essentiellement que, pour être déclarée invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité qui est « grave » et « prolongée ». Une invalidité n’est « grave » que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Non seulement une personne doit être incapable d’occuper son emploi habituel, mais elle doit aussi être incapable de détenir tout emploi qu’il est raisonnable de croire qu’une personne peut détenir. Une invalidité n’est « prolongée » que si elle est déclarée devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès.

Principes directeurs

[70] Les causes suivantes ont fourni des lignes directrices et de l’aide au Tribunal afin de déterminer les questions à trancher à l’égard du présent appel.

[71] Le fardeau de la preuve incombe à l’appelante, qui doit établir, selon la prépondérance des probabilités, que le 31 décembre 2007 ou avant cette date, elle était invalide conformément à la définition établie. L’exigence concernant la gravité doit être évaluée dans un « contexte réaliste » : Villani c. Canada (Procureur général) 2001 CAF 248. Le Tribunal doit prendre en compte des facteurs comme l’âge d’une personne, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie au moment de déterminer « l’employabilité » de cette personne compte tenu de son invalidité.

[72] Cependant, cela ne signifie pas que quiconque éprouve des problèmes de santé et des difficultés à trouver et à conserver un emploi a droit à une pension d’invalidité. Un requérant est toujours tenu de démontrer qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée qui le rend régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu’une preuve des efforts déployés pour se trouver un emploi et de l’existence des possibilités d’emploi.

[73] L’appelante doit non seulement démontrer qu’elle a un grave problème de santé, mais lorsqu’il y a des preuves de capacité de travail, elle doit également démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santé : Inclima c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 117. Toutefois, s’il n’y a aucune capacité de travail, il y a une obligation de démontrer des efforts pour trouver un emploi. La question visant à savoir si l’appelante a tenté de trouver un travail de remplacement ou si elle a manqué de motivation pour le faire constitue clairement une considération pertinente à prendre en compte pour déterminer si l’invalidité est « grave » : Klabouch c. Ministre du Développement social, 2008 CAF 33.

[74] La détermination de la gravité de l’invalidité de l’appelante ne dépend pas de son incapacité d’occuper son emploi régulier, mais plutôt de son incapacité d’exécuter quelque travail que ce soit, c.‑à‑d. « une occupation véritablement rémunératrice » : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Scott, 2003 CAF 34. L’évaluation imposée par la loi découlant du paragraphe 42(2) porte principalement sur la capacité fonctionnelle d’une personne et non sur le marché du travail particulier. Il incombe à la personne qui demande une pension d’invalidité du RPC de démontrer qu’elle est atteinte d’une déficience fonctionnelle qui, en réalité, l’empêche d’occuper un emploi rémunéré et, en plus, que la déficience en question, à un niveau plus objectif, fera en sorte que le Tribunal conclura que les capacités fonctionnelles de l’appelante l’empêchent de détenir une occupation véritablement rémunératrice : Buckley c. Ministre du Développement des ressources humaines (29 novembre 2001), CP 15265 (CAP).

[75] La résolution de la question visant à savoir si une appelante peut invoquer avec succès la définition d’une invalidité grave selon les critères du RPC en fonction du syndrome de douleur chronique est difficile parce que la résolution d’une telle question dépend de la façon dont le Tribunal considère au final l’authenticité de ce qui constitue souvent des symptômes strictement subjectifs. Toutefois, il ne suffit pas de constater qu’il existe un syndrome de douleur chronique; la douleur doit être telle qu’elle empêche la personne qui en souffre de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Il incombe aussi à la personne qui a demandé des prestations de prouver qu’elle a cherché à obtenir un traitement et qu’elle a fait des efforts pour gérer sa douleur : MSNBE c. Densmore (2 juin 1993), CP 2389 (CAP).

Application des principes directeurs

[76] Bien qu’il y ait une certaine contradiction entre les rapports d’évaluation, le Tribunal est convaincu que l’appelante n’a pas la capacité de reprendre son emploi précédent comme coiffeuse ni aucun des anciens emplois physiquement exigeants comme femme de chambre, serveuse ou ouvrière dans une serre. Le Tribunal doit cependant déterminer si l’appelante conservait, à la fin de sa PMA, la capacité résiduelle d’exercer un autre travail plus léger et, le cas échéant, si elle n’a pas déployé des efforts raisonnables pour trouver d’autre travail.

[77] Pour trancher cette question, le Tribunal garde à l’esprit qu’il doit se concentrer sur la date de la PMA, le 31 décembre 2007 (soit plus de sept années avant l’audience), et que l’appelante n’avait que 36 ans à ce moment‑là. Il est bien sûr très difficile pour l’appelante de se souvenir de ses conditions et limitations à cette date et, par conséquent, le Tribunal s’est fondé plus particulièrement sur les éléments de preuve médicale objectifs et les rapports qui traitaient de l’état de l’appelante à cette date.

[78] En se fondant sur son examen de l’ensemble de la preuve, le Tribunal a déterminé que, bien que l’appelante souffre de douleurs chroniques, elle a cependant conservé la capacité d’effectuer des tâches légères à modérées et déployé des efforts négligeables pour trouver un autre emploi qui convient à son état. L’appelante n’a donc pas satisfait au critère établi dans Inclima (précité).

[79] En rendant cette décision, le tribunal a accordé une attention particulière à ce qui suit :

  • - L’âge de l’appelante, sa capacité de parfaire ses compétences professionnelles et scolaires et ses antécédents de travail diversifiés, bien qu’ils soient physiquement exigeants, indiquent une capacité d’adaptation importante sur le plan du travail. L’appelante ne pouvait pas reprendre son emploi de coiffeuse, mais a reconnu qu’elle n’avait déployé aucun effort pour un trouver un autre emploi convenable avant de tenter de retourner travailler pour son époux en 2014, soit près de sept ans après la fin de la PMA.
  • - Bien que l’appelante ait quitté l’école après la 10e année, elle a pu parfaire ses compétences et terminer avec succès un cours de coiffure. Le rapport du 5 mars 2010 de Deborah Soligo indique que l’appelante avait terminé deux cours en février 2010, qu’elle avait réussi le cours de mathématiques et le cours d’anglais de 11e année et qu’elle avait obtenu 87 % en mathématiques et 72 % en anglais. Le rapport du 6 septembre 2010 du Dr Miller indique que l’appelante avait réussi le cours de mathématiques de 12e année et qu’elle avait tenté d’améliorer ses compétences en français, mais avait trouvé le cours trop difficile et avait abandonné. Bien qu’elle n’ait pas obtenu son diplôme compte tenu de ses difficultés liées aux cours de français, ses résultats démontrent une capacité de concentration importante sur des cours de perfectionnement, qu’elle a suivis pendant plus deux ans après la fin de la PMA.
  • - Le rapport du 23 janvier 2009 du Dr Miller (soit un an après la fin de la PMA, préparé pour l’avocat de l’appelante) dépeint un mode de vie qui, bien que limité, est raisonnablement actif et note que l’appelante entretient une relation avec quelqu’un depuis un an et demi; qu’ils vont au restaurant et au cinéma et qu’ils rendent visite à des membres de leurs familles. Le rapport notait qu’il n’y avait aucune déficience cognitive durant l’entrevue; que le récit de l’appelante était précis; qu’elle n’était pas inattentive; qu’elle s’exprimait bien et comprenait facilement les questions et que ses compétences verbales rudimentaires indiquaient une intelligence limitée, du moins sur le plan verbal.
  • - Le rapport du 21 mai 2009 du Dr Reznek (soit 17 mois après la fin de la PMA, préparé pour les avocats représentant la partie défenderesse dans le cadre de la réclamation en responsabilité civile délictuelle) indique qu’elle était orientée quant au temps, au lieu et à la personne; qu’elle n’avait commis aucune erreur en ce qui concerne les tâches de mémoire à court terme et qu’elle avait obtenu 30 sur 30 au mini‑examen de Folstein sur l’état mental.
  • - Bien que les rapports des médecins traitants soutiennent que l’appelante ne pourrait reprendre aucun de ses emplois précédents, la prépondérance des rapports (plus particulièrement ceux qui datent de la période de 2007 à 2008, soit aux alentours de la PMA) laissent supposer qu’elle a la capacité de détenir un autre emploi.
  • - S’il est vrai que les rapports confirment que l’appelante est motivée à suivre les modalités de traitement et à s’y conformer, il reste qu’elle n’a pas suivi la recommandation concernant le programme de traitement interdisciplinaire de la douleur chronique en résidence à l’hôpital Chedokee, où elle pourrait être traitée dans un environnement multimodal. Il est compréhensible que l’appelante ait eu une réticence à suivre ce programme à un stade avancé de sa grossesse, mais son fils a presque cinq ans et elle a eu amplement le temps de suivre ce programme, qui a été recommandé par bon nombre des médecins.
  • - Rien ne démontre que l’appelante a suivi une psychothérapie après 2010 et, bien que son témoignage oral confirme qu’elle suit des traitements continus de chiropractie et de massothérapie, rien n’indique qu’elle a été traitée dans un [traduction] « environnement multimodal intensif », que le programme de traitement de la douleur de l’hôpital Chedokee peut fournir.
  • - Le Tribunal a également noté que le dossier d’audience ne contient aucun rapport décrivant en détail les traitements, consultations ou examens effectués après le rapport du 13 octobre 2011 du Dr Chisholm et de Marnie Chisholm, infirmière praticienne, qui accompagnait la demande de prestations du RPC. Ce rapport laisse entendre que l’appelante est incapable de reprendre son ancien emploi en raison d’une douleur chronique au cou, à l’épaule et au bas du dos, mais il ne mentionne pas qu’elle est incapable de détenir toute forme d’emploi rémunérateur.

[80] Bien que le Tribunal reconnaisse que l’appelante éprouve des difficultés attribuables à son état, elle ne s’est pas acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait et n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était atteinte d’une invalidité grave selon les critères du RPC à la date marquant la fin de sa PMA.

Caractère prolongé

[81] Puisqu’il a été déterminé que l’invalidité de l’appelante n’est pas grave, il n’est pas nécessaire que le Tribunal se prononce sur le caractère prolongé de l’invalidité.

Conclusion

[82] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.