Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le Tribunal n’est pas convaincu que l’appelant a établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) avant la date à laquelle il a présenté une demande de prestations pour la première fois.

Introduction

[2] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations d’invalidité du RPC le 14 juillet 2011. Sa période minimale d’admissibilité (PMA) a pris fin le 31 décembre 2009. L’intimé a accueilli la demande de l’appelant et lui a versé le montant maximal de prestations rétroactives auxquelles il avait droit, c’est-à-dire à compter d’août 2010, soit quatre mois après la date de début réputée de son invalidité, qui était avril 2010.

[3] L’appelant conteste la date de début du versement et soutient qu’il était invalide avant la date de présentation de sa demande. Il affirme que le versement aurait dû commencer à partir du 23 octobre 2007 parce qu’il n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC entre cette date et juillet 2011.

[4] L’intimé a rejeté la demande de l’appelant initialement et après réexamen. Il est d’avis que la preuve ne permet pas d’établir que l’appelant remplissait les conditions énoncées aux paragraphes 60(8), (9) et (10) du Régime de pensions du Canada. Par conséquent, la date la plus antérieure permise pour établir le début de la période de rétroactivité devrait demeurer inchangée. L’appelant a porté en appel la décision de rejeter sa demande devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR).

[5] L’audience du présent appel devait d’abord avoir lieu par comparution en personne pour les motifs suivants indiqués dans l’avis d’audience (l’« avis ») daté du 27 octobre 2014 : i) les audiences peuvent avoir lieu par vidéoconférence dans la région où habite l’appelant; ii) certains renseignements contenus dans le dossier présentent des disparités ou devraient être précisés; et iii) le mode d’audience tient compte de l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (le « Règlement ») selon laquelle l’audience doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question préliminaire

[6] Selon les documents fournis par Postes Canada et versés au dossier du Tribunal, le représentant de l’appelant a signé l’avis le 28 octobre 2014. De plus, l’agent de gestion des cas du Tribunal chargé du dossier a tenté de communiquer avec le représentant de l’appelant et lui a laissé un message dans sa boîte vocale le 4 février 2015 pour confirmer la date, l’heure et le lieu de l’audience, et lui donner un numéro de rappel. Malgré l’avis reçu et le message laissé dans la boîte vocale, ni l’appelant ni son représentant ne se sont présentés devant le Tribunal à l’heure et à la date prévues. Le membre du Tribunal a attendu pendant une demi‑heure après l’heure fixée pour l’audience, mais personne ne s’est présenté.

[7] Le paragraphe 12(1) du Règlement prévoit que si une partie omet de se présenter à l’audience le Tribunal peut procéder en son absence, s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience. En l’espèce, le Tribunal est convaincu que l’appelant a été avisé de la tenue de l’audience par l’entremise de son représentant. Ni l’appelant ni son représentant n’ont informé le Tribunal que la date fixée ne leur convenait pas ou qu’ils n’étaient pas en mesure d’assister à l’audience ce jour‑là. Par conséquent, le Tribunal a décidé de procéder en l’absence de l’appelant et de rendre sa décision en se fondant sur les observations et les documents versés au dossier d’audience.

Droit applicable

[8] L’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012 prévoit que tout appel déposé auprès du BCTR avant le 1er avril 2013 qui n’a pas été instruit par ce dernier est réputé avoir été interjeté à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[9] Les paragraphes 60(8), (9) et (10) du Régime de pensions du Canada énoncent ainsi les conditions à remplir concernant l’incapacité :

  1. (8) Dans le cas où il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur ou en son nom, que celui‑ci n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande le jour où celle‑ci a été faite, le ministre peut réputer cette demande de prestation avoir été faite le mois qui précède celui au cours duquel la prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé.
  2. (9) Le ministre peut réputer une demande de prestation avoir été faite le mois qui précède le premier mois au cours duquel une prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon lui, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé, s’il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur :
    1. a) que le demandeur n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle celle-ci a réellement été faite;
    2. b) que la période d’incapacité du demandeur a cessé avant cette date;
    3. c) que la demande a été faite, selon le cas :
    4. (i) au cours de la période – égale au nombre de jours de la période d’incapacité mais ne pouvant dépasser douze mois – débutant à la date où la période d’incapacité du demandeur a cessé,
    5. (ii) si la période décrite au sous‑alinéa (i) est inférieure à trente jours, au cours du mois qui suit celui au cours duquel la période d’incapacité du demandeur a cessé.
  3. (10) Pour l’application des paragraphes (8) et (9), une période d’incapacité doit être continue à moins qu’il n’en soit prescrit autrement.

[10] Le paragraphe 20(1) du Règlement est ainsi libellé :

20. (1) Lorsque la validité, l’applicabilité ou l’effet, sur le plan constitutionnel, d’une disposition du Régime de pensions du Canada, de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, de la Loi sur l’assurance‑emploi, de la partie 5 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social ou de leurs règlements est mis en cause devant le Tribunal, la partie qui soulève la question :

  1. a) dépose auprès du Tribunal un avis qui contient :
    1. (i) la disposition visée,
    2. (ii) toutes observations à l’appui de la question soulevée;
  2. b) au moins dix jours avant la date fixée pour l’audition de l’appel ou de la demande, signifie aux personnes mentionnées au paragraphe 57(1) de la Loi sur les Cours fédérales un avis énonçant la question et dépose auprès du Tribunal une copie de l’avis et la preuve de sa signification.

Question en litige

[11] En l’espèce, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelant n’ait pas eu la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC avant juillet 2011 et, le cas échéant, il doit établir la période d’incapacité.

Preuve

Preuve documentaire

[12] L’intimé a estampillé la demande de prestations d’invalidité du RPC de l’appelant le 14 juillet 2011. L’appelant a signé la demande le 12 juillet 2011, et son représentant, H. K., l’a également signée en précisant qu’il était l’ami de l’appelant.

[13] Dans le questionnaire daté du 12 juillet 2011 et signé par l’appelant, ce dernier a déclaré qu’il avait cessé de travailler le 23 octobre 2007, à la suite d’un accident au cours duquel il avait été blessé grièvement. En raison des graves blessures qu’il a subies, l’appelant a subi onze inteventions chirurgicales à la tête et il est devenu incapable, sur le plan psychologique, d’occuper tout emploi. Il a déclaré qu’il souffrait d’une dépression majeure et qu’il était atteint d’un trouble de stress post‑traumatique (PTSD). Sa femme l’aide dans presque toutes ses activités quotidiennes. Il ne peut se souvenir d’aucune conversation et n’a aucune concentration. Il est incapable de conduire pendant plus de sept ou huit minutes.

[14] Dans le rapport médical du RPC daté du 20 juin 2011, le Dr Panjwani, psychiatre, a déclaré qu’il a commencé à traiter l’appelant en juillet 2008. Il a diagnostiqué chez l’appelant un trouble dépressif majeur résistant à tout traitement et accompagné d’une anxiété généralisée grave, et qui s’est manifesté en un seul épisode continu, ainsi qu’un TSPT et un syndrome post‑commotion cérébrale chronique. Sur l’échelle d’évaluation globale de fonctionnement (EGF), il lui a accordé une cote de 40 (état actuel) et une de 35 (état antérieur). Il a ajouté que le pronostic à long terme était sombre, compte tenu du caractère prolongé et grave des troubles mentaux de l’appelant. Selon le Dr Panjwani, l’appelant était incapable de détenir toute occupation rémunératrice.

[15] Selon un rapport médical daté du 23 octobre 2007 et rédigé par le Dr Chellis, l’appelant a été victime d’un accident de la route, il a été intubé et il ne pouvait pas fournir d’antécédents. Dans le rapport, il est également indiqué que l’appelant était le conducteur d’un camion qui avait fait une sortie de route, qu’il avait été éjecté de son véhicule et qu’il avait subi une blessure importante à la tête. Il semblait être dans un état critique.

[16] Selon le résumé du congé d’hôpital daté du 23 octobre 2007, à son arrivée, l’appelant était plongé dans un coma de niveau 8, selon l’échelle de Glasgow. Il souffrait aussi d’hypotension artérielle et était victime d’une crise de tachycardie. Il a été intubé, et on a diagnostiqué une fracture facettaire à C6 et une fracture du plateau supérieur à T12.

[17] Dans un rapport de consultation du 11 juillet 2008, le Dr Panjwani a indiqué que l’appelant avait été victime d’un accident de la route le 23 octobre 2007. L’appelant est resté inconscient pendant trois à quatre jours et ne se souvenait pas de l’accident. Il aurait subi un traumatisme crânien et des fractures. Depuis l’accident, il se plaignait de souffrir d’insomnie, de maux de tête persistants, d’étourdissements, d’acouphènes dans l’oreille gauche et de douleurs constantes au dos et aux membres inférieurs. Il a ensuite développé des symptômes de dépression et d’anxiété. Un examen de son état mental a révélé un repli sur soi et une dépression majeure, bien que l’appelant ait nié avoir des idées suicidaires ou des projets de suicide. L’appelant avait des problèmes de concentration et de compréhension, et sa mémoire à court terme ainsi que sa mémoire des événements passés lui faisaient défaut. Le Dr Panjwani a diagnostiqué chez l’appelant un trouble dépressif majeur qui s’est manifesté en un seul épisode continu accompagné d’anxiété, ainsi qu’un syndrome post‑commotion cérébrale et un TSPT dont la cote sur l’échelle d’EGF était de 35. Il lui a prescrit de la sertraline, du Seroquel, du méloxicam, du Tylenol et du Cymbalta. Il a déclaré que l’appelant était totalement invalide et que le pronostic à long terme était sombre.

[18] Dans un rapport daté du 7 juillet 2011, le Dr Panjwani a indiqué qu’il administrait des soins psychiatriques à l’appelant depuis le 11 juillet 2008. Il a fait état de l’accident de la route du 23 octobre 2007 au cours duquel l’appelant a subi un traumatisme crânien, une fracture laminaire bilatérale à C6, une fracture par tassement à T12 et une fracture des os nasaux. À partir de ce moment‑là, l’appelant a commencé à se plaindre de douleurs au dos, au côté gauche du corps et au membre inférieur gauche, ainsi que de douleurs persistantes au niveau du pariétal droit, d’étourdissements, d’acouphènes à l’oreille gauche, d’insomnie et de difficulté à rester en position debout ou assise et à marcher pendant une période prolongée. Selon le Dr Panjwani, l’appelant a développé des symptômes de dépression et d’anxiété peu de temps après son accident, il se sentait déprimé, seul, isolé, nerveux et irritable, il pleurait facilement et il ressentait une fatigue constante. Il souffrait d’anhédonie et d’insomnie, et n’avait aucune motivation pour accomplir quoi que ce soit. Il avait peu d’énergie, souffrait de pertes de mémoire et éprouvait de la difficulté à se concentrer ou à prendre des décisions. Il fuyait toute activité sociale, passait la majeure partie de son temps confiné chez lui et composait mal avec le stress. L’examen de son état mental a révélé que l’appelant présentait un affect agité et gravement dépressif. Aucun aspect psychotique n’a été observé. Il n’y avait aussi aucun signe officiel de trouble de la pensée ou d’idées délirantes ni aucun ressenti d’expériences perceptuelles anormales. Par contre, les fonctions cognitives et exécutives de l’appelant étaient atteintes. Malgré la prise de médicaments, les symptômes de l’appelant ont persisté et ce dernier a continué à être anxieux et déprimé. Le Dr Panjwani a déclaré que l’appelant était totalement incapable d’occuper un emploi rémunérateur et qu’il ne lui serait nullement bénéfique de participer à un programme de réadaptation professionnelle, compte tenu de ses symptômes psychiatriques sous‑jacents. Le pronostic à long terme est sombre en raison du caractère prolongé et grave de son trouble.

[19] Dans la déclaration d’incapacité du 22 mai 2012, le Dr Panjwani a indiqué qu’à cause de son état, l’appelant était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande. Selon le Dr Panjwani, l’incapacité de l’appelant aurait commencé le 11 juillet 2008, soit la date à laquelle il a commencé à le traiter. Le Dr Panjwani a déclaré que la date à laquelle l’appelant s’était blessé était le 23 octobre 2007 et qu’il fallait communiquer avec le médecin de famille de l’appelant pour obtenir un rapport faisant état de la période précédant la date à laquelle il a commencé à le traiter.

Observations

[20] Le représentant de l’appelant soutient que ce dernier n’a pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC avant la date à laquelle il a présenté sa demande, et ce, pour les raisons suivantes :

  1. a) Le 23 octobre 2007, l’appelant a subi de graves blessures à la tête, qui l’ont rendu totalement invalide physiquement et incapable mentalement de gérer ses propres affaires;
  2. b) Il a été transporté dans un hôpital où il a subi une opération au centre de traumatologie. Il a reçu son congé onze jours plus tard. Depuis, il est suivi par le Dr Panjwani qui est d’avis qu’il souffre d’un trouble dépressif majeur et qu’il a une déficience cognitive, et que celle-ci sera permanente;
  3. c) Depuis son accident de la route, l’appelant a été incapable de gérer ses propres affaires parce qu’il ne jouissait pas de toutes ses facultés mentales;
  4. d) En 2011, la femme de l’appelant a communiqué avec le ministère des Services sociaux et communautaires et un ami de la famille, H. K., pour se renseigner sur la façon de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC;
  5. e) Monsieur H. K., qui parle la langue maternelle de l’appelant, a fourni l’information nécessaire pour que l’appelant puisse présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC. Il a communiqué avec la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT), et rempli les formulaires du RPC, dont le Questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, la Clause pour élever des enfants et le Formulaire de consentement autorisant Service Canada à obtenir des renseignements personnels;
  6. f) L’appelant ne conduit presque pas et conduit toujours en présence de sa femme;
  7. g) L’appelant est invalide depuis son accident de la route. La présentation d’une demande a été reportée jusqu’à ce que quelqu’un puisse le faire à sa place;
  8. h) Les exigences énoncées à l’alinéa 43(2)b) et aux paragraphes 44(1) et 44(2) du Régime de pensions du Canada font une distinction illicite à l’égard de l’appelant en lui refusant l’égalité d’accès à une pension uniquement en raison de son invalidité. Elles ont pour effet de créer une période de prescription alors qu’il n’en existe aucune relativement aux pensions de retraite;
  9. i) Subsidiairement, d’octobre 2007, date à laquelle il a cessé de travailler, à juillet 2011, date à laquelle il a présenté sa demande de prestations d’invalidité, l’appelant n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande. Par conséquent, des prestations devraient lui être versées rétroactivement à partir d’octobre 2007;
  10. j) À l’appui de sa demande, l’appelant a déposé les rapports médicaux rédigés par son médecin de famille, le Dr Sunerh, et par le psychiatre qui le traite depuis juillet 2008, le Dr Panjwani. Ce dernier a rempli la déclaration d’incapacité (rapport du médecin), laquelle est datée du 22 mai 2012;
  11. k) L’incapacité de l’appelant a été continue d’octobre 2007 à juillet 2011. Au cours de cette période, l’appelant n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande à cause de ses troubles médicaux graves et des effets secondaires des médicaments;
  12. l) Dans son rapport du 7 juin 2011, le Dr Panjwani a déclaré qu’il estimait que l’appelant était atteint d’une déficience mentale de manière permanente et indéfinie, et ce, depuis octobre 2007;
  13. m) La dépression majeure dont souffre l’appelant ainsi que ses problèmes de santé associés à sa peur de mourir l’ont tellement atteint sur le plan psychologique qu’en octobre 2007, il était incapable de déterminer s’il avait l’intention de présenter une demande d’invalidité du RPC, d’exprimer cette intention ou d’y donner suite.

[21] L’intimé soutient que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. a) À la suite de son accident de la route, l’appelant a bénéficié des services d’un traducteur pendant son séjour à l’hôpital, ce qui permet de penser qu’il était capable de communiquer à ce moment‑là. Au moment où il a reçu son congé, son état était considéré comme [traduction] « bon »;
  2. b) Les rapports sur le profil du patient montrent que, après l’accident de la route, l’appelant s’est fait prescrire plusieurs médicaments par le médecin de famille, ce qui donne à penser qu’il était capable de décrire ses symptômes et de demander un traitement curatif;
  3. c) Selon les notes de consultation du Dr Panjwani, l’appelant était capable de fournir des détails sur son accident et son séjour à l’hôpital. Le fait qu’il se soit plaint de divers symptômes permet de penser qu’il participait activement aux consultations et qu’il se rendait à ses rendez‑vous de suivi;
  4. d) Tous les traitements de l’appelant (consultation en psychoéducation, gestion de la douleur et du stress, psychothérapie de soutien et exercices de relaxation) supposent une capacité d’entretenir des interactions cognitives ou physiques;
  5. e) Bien que le Dr Panjwani ait rempli une déclaration d’incapacité indiquant que l’appelant était invalide depuis qu’il avait commencé à le traiter le 11 juillet 2008, la preuve n’étaye pas cette affirmation. L’appelant participait activement aux consultations et aux traitements, lesquels impliquaient des interactions cognitives ou physiques;
  6. f) L’appelant a signé la demande de prestations d’invalidité, ainsi que le Questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, la Clause pour élever des enfants et le Formulaire de consentement autorisant Service Canada à obtenir des renseignements personnels (12 juillet 2011). Il a également signé le formulaire intitulé Autorisation de communiquer des renseignements dans lequel il a déclaré qu’il comprenait la nature et les conséquences de l’autorisation de communiquer en son nom qu’il accordait à Monsieur H. K. (8 septembre 2011), et il a signé sa lettre de demande de réexamen le 21 décembre 2011;
  7. g) Le Questionnaire relatif aux prestations d’invalidité (14 juillet 2011) montre que l’appelant touchait des prestations de la CSPAAT depuis son accident de la route. Pour recevoir ces prestations, il faut généralement remplir des demandes et divers formulaires, et voir à la gestion financière de ces montants;
  8. h) Rien n’indique que l’appelant aurait eu besoin, à un moment donné, qu’un mandataire ou un curateur public prenne des décisions en son nom. Il n’a pas eu besoin de soins en établissement;
  9. i) L’appelant est capable de conduire et d’utiliser le transport en commun, ce qui démontre qu’il possède une certaine capacité mentale et physique et réfute la conclusion selon laquelle il n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande à une date antérieure.

Analyse

[22] L’appelant doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC avant juillet 2011.

[23] Le Tribunal est d’avis que l’appelant ne satisfait pas aux exigences énoncées à l’article 20 du Règlement. Par conséquent, il ne tiendra pas compte de l’argument de l’appelant selon lequel certains articles du Régime de pensions du Canada font une distinction illicite à son égard en lui refusant l’égalité d’accès à une pension uniquement en raison de son invalidité.

[24] Le Tribunal établit que le dossier médical ne permet pas de trancher l’affaire dont il est saisi.

[25] Le Tribunal prend bonne note des commentaires du Dr Panjwani qui portent sur sa première consultation avec l’appelant, le 11 juillet 2008. Au cours de cette consultation, le Dr Panjwani a constaté que l’appelant souffrait d’une dépression grave, qu’il avait des problèmes de concentration et de compréhension, et que sa mémoire à court et à long terme était défaillante. Le Dr Panjwani a également établi que l’état de l’appelant correspondait à une cote de 35 sur l’échelle d’EGF. Dans son rapport du 7 juin 2011, il a inscrit que les symptômes de l’appelant perduraient malgré la prise de médicaments. Il a également indiqué que l’appelant avait de la difficulté à se concentrer et à prendre des décisions, qu’il avait des pertes de mémoire, qu’il fuyait toute activité sociale, qu’il passait la majeure partie de son temps confiné chez lui et qu’il composait mal avec le stress. Il lui a attribué une cote de 40 sur l’échelle d’EGF.

[26] Bien que les renseignements contenus dans les rapports du Dr Panjwani n’excluent pas la possibilité d’en arriver à la conclusion que l’appelant n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC avant la date de présentation de la demande, le Tribunal n’est pas convaincu que ces rapports à eux seuls permettent de trancher la question. Le Dr Panjwani ait indiqué que l’appelant éprouvait de la difficulté à se concentrer ou à prendre des décisions, mais il n’a pas déclaré, dans ses rapports très exhaustifs, que l’appelant n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[27] Le Tribunal fait observer qu’une personne qui éprouve de la difficulté à se concentrer ou à prendre des décisions peut quand même être capable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[28] Dans la déclaration d’incapacité signée par le Dr Panjwani, ce dernier a déclaré qu’en date du 11 juillet 2008, l’appelant était devenu incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande à cause de son état. Le Dr Panjwani a notamment écrit ce qui suit : [traduction] « Voir le rapport ci‑joint pour de plus amples détails ». Le rapport en pièce jointe semble être son rapport du 7 juin 2011, décrit précédemment. Comme je l’ai déjà mentionné, le Tribunal n’est pas convaincu que la difficulté à se concentrer ou à prendre des décisions se traduit nécessairement et inévitablement par une incapacité à former ou à exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[29] Afin de trancher correctement la question de l’incapacité de l’appelant, le Tribunal s’est fondé sur la Cour d’appel fédérale, qui a déclaré que les documents médicaux ainsi que les activités menées par une personne peuvent aider le Tribunal à déterminer si celle‑ci a la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations : Slater c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 375 (CanLII).

[30] En raison du dossier actuel faisant état des activités de l’appelant, le Tribunal n’est pas convaincu que ce dernier s’est acquitté du fardeau d’établir qu’il était plus probable qu’improbable qu’il n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC avant juillet 2011.

[31] Le Tribunal constate que l’appelant a signé les documents suivants :

  1. a) une lettre datée du 21 décembre 2011 dans laquelle il demande un réexamen de la décision de lui refuser les prestations rétroactives (GT1‑08);
  2. b) une demande de prestations d’invalidité du RPC datée du 12 juillet 2011 (GT1‑15);
  3. c) un formulaire intitulé Clause pour élever des enfants daté du 12 juillet 2011 (GT1‑17);
  4. d) une lettre datée du 25 janvier 2012 et dans laquelle il expose son argument concernant la rétroactivité des prestations (GT1‑32);
  5. e) un formulaire intitulé Questionnaire relatif aux prestations d’invalidité daté du 12 juillet 2011 (GT1‑51).

[32] Le Tribunal constate également que, dans son questionnaire, l’appelant a indiqué qu’il touchait des prestations de la CSPAAT depuis 2007 en raison de ses multiples blessures à la tête.

[33] Dans l’observation de l’appelant à la pièce GT5‑4, le représentant de ce dernier a indiqué qu’il parlait la langue maternelle de l’appelant, qu’il avait communiqué avec la CSPAAT en son nom et qu’il avait rempli les formulaires du RPC, c’est-à‑dire le Questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, la Clause pour élever des enfants et le Formulaire de consentement autorisant Service Canada à obtenir des renseignements personnels.

[34] Le problème de l’appelant est que ses observations ne sont pas étayées par la preuve présentée au Tribunal. Ni l’appelant ni son représentant n’ont fourni un témoignage sous serment pour appuyer le contenu des observations.

[35] Compte tenu de la conclusion du Tribunal à cet égard, il ne peut que se fonder sur les éléments de preuve qui montrent que l’appelant a présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC et une demande de prestations de la CSPAAT, et qu’il a signé plusieurs formulaires. Ces éléments de preuve contredisent l’affirmation selon laquelle il était incapable de façon continue de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC avant juillet 2011.

[36] Le Tribunal estime également que d’autres éléments de preuve viennent remettre en question l’affirmation de l’appelant selon laquelle il était incapable de façon continue de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC pendant la période en cause. Par exemple, le dossier médical montre que le Dr Panjwani avait obtenu de l’information pertinente de la part de l’appelant, qui était venu le consulter, et que ce dernier lui avait expliqué les symptômes qu’il ressentait à ce moment‑là. Dans aucun de ses rapports, le Dr Panjwani n’a indiqué que l’appelant était incapable de communiquer directement avec lui. Le Tribunal fait également observer que l’appelant a participé à des séances de consultation en psychoéducation, ainsi qu’à des séances de gestion de la douleur et du stress, et de psychothérapie de soutien, et qu’il a pratiqué des exercices de relaxation, comme l’indique le Dr Panjwani dans son rapport médical du RPC daté de juin 2011. Ces éléments de preuve permettent au Tribunal de penser que l’appelant était capable de se rendre par lui‑même chez le médecin, de s’exprimer et de suivre des traitements. Ces éléments soulèvent à tout le moins un doute que l’appelant n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[37] D’après l’observation écrite de l’appelant, celui-ci devait obtenir de l’aide chaque fois qu’il communiquait ou interagissait avec d’autres personnes et qu’il prenait part à des consultations. Il ne pouvait jamais se rendre à ses rendez‑vous par lui‑même et devait toujours être accompagné de sa femme ou d’un membre de sa famille élargie. Le représentant de l’appelant affirme que ce dernier était alité, qu’il était incapable de communiquer avec son psychiatre ou d’autres personnes, et que, sans aide, il ne pouvait ni comprendre les autres ni se faire comprendre.

[38] En raison de l’absence d’éléments de preuve concernant ce point, le Tribunal ne peut conclure que l’appelant était incapable de communiquer avec son psychiatre ou d’autres personnes sans aide, de se rendre par lui‑même chez le médecin, de décrire ses symptômes ou de suivre ses traitements.

[39] Le Tribunal doit également examiner la déclaration que l’appelant a faite dans son questionnaire et selon laquelle il conduisait rarement ou jamais plus de sept ou huit minutes à la fois. Comme l’a mentionné le tribunal dans la décision rendue par la Commission d’appel des pensions, L.K. and Minister of Human Resources and Skills Development (24 février 2009), CP 25910 (CAP), conduire un véhicule est une activité qui exige une attention constante et une capacité de prendre des décisions. Bien que le représentant de l’appelant ait déclaré dans son observation écrite que l’appelant ne conduisait pas sans sa femme, ni cette dernière ni l’appelant n’ont assisté à l’audience pour fournir un témoignage à cet égard. Quoi qu’il en soit, une capacité résiduelle de conduire constitue un élément de preuve convaincant qui, lorsqu’il est combiné à tous les autres éléments de preuve, soulève des doutes dans l’esprit du Tribunal en ce qui a trait à la question de savoir si l’appelant était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations du RPC pendant une période antérieure. Comme l’a fait observer l’intimé, l’appelant doit être titulaire d’un permis valide pour conduire, et cette activité exige une bonne capacité cognitive.

[40] En conclusion, le Tribunal n’est pas convaincu, compte tenu des éléments de preuve portés à sa connaissance, que l’appelant a satisfait au critère relatif à l’invalidité énoncé dans le Régime de pensions du Canada avant la date à laquelle il a présenté sa demande de prestations d’invalidité du RPC.

Conclusion

[41] L’appel est rejeté.

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