Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] La demanderesse souhaite obtenir la permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 13 mai 2014. La division générale a statué que la demanderesse n’était pas admissible à des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada, après avoir conclu que celle-ci ne souffrait pas d’une invalidité grave à la date de sa période minimale d’admissibilité, soit le 31 décembre 2014.

[2] La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler auprès de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale le 4 mars 2015 (la demande de permission), mais ne l’a apparemment pas fait dans les délais prescrits à cet égard. Elle demande cette permission en faisant valoir que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. La demanderesse s’appuie sur une note du 24 février 2015 de son médecin de famille, qui décrit l’état de santé de la demanderesse. La demanderesse offre d’obtenir un « document médical détaillé » en réponse à la décision de la division générale.

[3] Pour obtenir gain de cause dans la présente demande, la demanderesse doit démontrer ce qui suit :

  1. (a) la demande de permission a été déposée dans les délais prescrits, ou je devrais exercer mon pouvoir discrétionnaire et proroger le délai prescrit pour interjeter appel;
  2. (b) l’appel a une chance raisonnable de succès.

Contexte

[4] La demanderesse a présenté une demande de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada en janvier 2012. Le questionnaire pour les prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada indique que le dernier emploi de la demanderesse était celui de couturière, lequel a pris fin en mai 2011, lorsqu’elle a arrêté de travailler à cause de problèmes au genou et dans le dos. Elle a expliqué que ces problèmes l’empêchaient de s’asseoir ou de se tenir debout pendant une période prolongée. Elle souffrait également de douleurs intenses au genou et dans le dos lorsqu’elle appuyait sur la pédale de la machine à coudre au travail. Cette action est semblable à la conduite d’un véhicule, une activité qu’elle exerce rarement maintenant. La demanderesse a décrit d’autres limitations et restrictions fonctionnelles.

[5] Selon le diagnostic qu’elle a reçu, la demanderesse souffre de chondromalacie patellaire de haut degré du genou droit et de symptômes d’arthrose, de douleurs chroniques au bas du dos et de bursite trochantérienne, ainsi que d’inflammation de la bandelette de Maissiat du côté droit. Elle a également été diagnostiquée comme souffrant du syndrome de la douleur chronique, puisqu’elle souffre de douleurs depuis plus de six mois, accompagnées de troubles de l’humeur et du sommeil.

[6] Le tribunal de révision a examiné les diverses opinions médicales des docteurs Riyat, médecin de famille; K. Hughes, chirurgien orthopédique et H. Underwood, physiatre. Il y avait également des résultats des examens par IRM de la région lombaire et des deux genoux de la demanderesse, qui avaient eu lieu, respectivement, en juin et en novembre 2011. L’examen par IRM de la région lombaire a révélé une discopathie dégénérative et des lésions arthritiques au niveau des L5-6 et L6-S1, tandis que les examens par IRM des deux genoux ont révélé une chondromalacie de haut degré.

Observations

[7] Dans la demande de permission, le représentant de la demanderesse (le « représentant ») affirme que la demanderesse a reçu la décision de la division générale le 10 décembre 2014. Il allègue donc que la demande de permission, déposée le 4 mars 2015, a été déposée dans les délais prescrits, dans les 90 jours de la date à laquelle la décision lui a été transmise. Le représentant allègue que son épouse et lui se sont adressés plusieurs fois au Tribunal de la sécurité sociale pour connaître l’issue de l’appel, mais qu’on lui avait répondu qu’il devait attendre la lettre qui serait envoyée par courrier. Lorsqu’ils ont joint le Tribunal de la sécurité sociale autour du mois d’octobre 2014, on les a finalement informés que la décision avait été mise à la poste le 13 mai 2014. Ils ont demandé que la lettre leur soit renvoyée. Dès qu’ils ont reçu la lettre le 10 décembre 2014, ils ont à nouveau joint le Tribunal de la sécurité sociale et ont demandé quelle était la date d’échéance pour déposer un appel. Ils ont alors appris que cette date d’échéance était le 10 mars 2015.

[8] Le représentant allègue, en outre, que :

la demanderesse aimerait en profiter pour clarifier et corriger les renseignements existants sur ses antécédents médicaux et pour soumettre des documents médicaux supplémentaires qui n’étaient pas disponibles au moment de son procès. Les éclaircissements apportés ainsi que les documents supplémentaires fourniront des preuves d’une invalidité grave et prolongée.

[9] La note du Dr Underwood indique que la demanderesse souffre de douleurs chroniques constantes à l’épaule droite, au bas du dos ainsi qu’aux deux genoux. Le Dr Underwood indique également que la demanderesse attend une évaluation orthopédique concernant ses genoux et qu’elle a été incapable de travailler de façon assidue depuis 2011. Le Dr Underwood ne s’attend pas à des changements importants dans l’état de santé de la demanderesse.

[10] Le représentant offre de présenter d’autres avis d’experts pour démontrer que la demanderesse souffre d’une invalidité grave et prolongée. Le représentant souligne qu’au moment de l’audience devant la division générale, on avait mis l’emphase sur les soins médicaux et la gestion par la demanderesse de sa symptomatologie, plutôt que sur la présentation de preuves à l’appui de sa demande de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Le représentant explique que, comme la demanderesse comprend maintenant le processus et le type de preuve exigés, ils voudraient en profiter pour défendre la cause de celle-ci de façon plus exhaustive et précise.

[11] L’intimé n’a pas déposé d’observations.

Analyse

a) Présentation tardive de la demande

[12] L’alinéa 19(1)a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (le « Règlement ») prévoit qu’une décision qui a été transmise par la poste ordinaire est présumée avoir été communiquée à une partie le dixième jour suivant celui de sa mise à la poste.

[13] Les alinéas 57(1)b) et (2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social régissent les présentations tardives de demandes. Dans le cas d’une décision rendue par la section de la sécurité du revenu, une demande de permission d’en appeler doit être déposée auprès de la division d’appel dans les 90 jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision. Aux termes du paragraphe 57(2), la division d’appel peut accorder un délai supplémentaire pour présenter la demande, mais une demande ne peut en aucun cas être déposée plus d’un an après la date à laquelle la décision a été transmise à l’appelant.

[14] Dans l’affaire Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Gattellaro, 2005 CF 833, la Cour a énoncé quatre critères que doit prendre en considération et évaluer la division d’appel en déterminant si elle doit proroger le délai de 90 jours imposé au demandeur pour le dépôt d’une demande de permission d’en appeler :

  1. Il y a intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel
  2. La cause est défendable
  3. Le retard a été raisonnablement expliqué
  4. La prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

[15] Il aurait été prudent de la part du représentant ou de la demanderesse de confirmer, par écrit, qu’ils avaient demandé au Tribunal de la sécurité sociale s’ils pouvaient s’attendre à recevoir bientôt une copie de la décision de la division générale, à défaut de quoi la demanderesse risquait d’être assujettie aux présomptions de l’alinéa 19(1)a) du Règlement.

[16] Je suis cependant convaincue que la demanderesse a déposé la demande de permission dans le délai prescrit à cet égard. En plus de la déclaration du représentant et de la demanderesse dans la demande de permission, je constate que le Tribunal de la sécurité sociale a reçu approximativement en juin 2014 la décision de la division générale qui lui a été retournée, que cette dernière a documenté le fait que la demanderesse l’avait informée à la fin de novembre 2014 qu’elle n’avait pas encore reçu la décision et que la décision avait été finalement renvoyée à la demanderesse le 10 décembre 2014.

[17] Je veux maintenant aborder la question de la chance raisonnable de succès qu’à la demande de permission d’en appeler.

b) Demande de permission d’en appeler

[18] Bien que la demande de permission d’en appeler soit un premier obstacle que le demandeur doit franchir, et un obstacle inférieur à celui auquel il devra faire face à l’audience de l’appel sur le fond, il reste que la demande doit soulever un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth v. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (CF). Dans l’affaire Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 A.C.F. 4, la Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si la demande a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique.

[19] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit que les moyens d’appel sont limités à ce qui suit :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[20] La demanderesse doit me convaincre que les motifs de l’appel ne relèvent pas de l’un des moyens d’appel et qu’au moins un des motifs a une chance raisonnable de succès avant que la permission ne puisse être accordée.

Analyse

(a) Allégation de conclusions de fait erronées

[21] Le représentant allègue que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, mais il n’a pas énoncé quelles étaient les conclusions de fait alléguées.

[22] À mon avis, la demanderesse doit énoncer les détails de l’erreur ou de la faute commise par la division générale. Il ne suffit pas de faire une déclaration générale que la division générale a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, sans indiquer quelles sont ces conclusions de fait erronées et comment elles auraient eu des répercussions sur l’issue de la présente affaire. Sinon, je n’ai aucun fondement sur lequel m’appuyer pour évaluer la demande de permission.

[23] Bien que la demanderesse ne soit pas tenue de démontrer les moyens de l’appel aux fins d’une demande de permission, elle devrait, à tout le moins, énoncer les fondements sur lesquels s’appuie sa demande de permission, et non se contenter de faire une déclaration générale qu’une erreur a été commise et laisser la division d’appel s’interroger sur ce que cette erreur ou cette faute pourrait être. La demande est déficiente à cet égard et le demandeur ne m’a pas convaincue que l’appel avait une chance raisonnable de succès.

(b) Note médicale récemment émise

[24] Si le représentant demande que je prenne en considération la note récemment émise par le Dr Underwood, soupèse de nouveau la preuve et réévalue la demande en faveur de la demanderesse, il m’est impossible de le faire dans le cas présent à cause des contraintes imposées par le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social. Ni la demande de permission ni l’appel ne permettent de réexaminer le fond de la présente affaire. Bien que ni le représentant ni la demanderesse ne puissent être accusés de se concentrer sur les soins médicaux et la gestion par la demanderesse de sa symptomatologie plutôt que de renforcer la preuve de la demanderesse, c’est devant la division générale qu’il faut défendre sa cause, puisqu’il n’existe pas une seconde chance de le faire devant la division d’appel.

[25] Tout « nouveau » fait ou dossier, comme la note médicale du Dr Underwood, doit se rapporter aux moyens d’appel énoncés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social. En d’autres termes, le représentant aurait dû établir ou au moins alléguer que la note médicale du Dr Underwood se rapporte à ou soutient toute allégation que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, a rendu une décision entachée d’une erreur de droit ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[26] Si le représentant a l’intention de déposer des dossiers médicaux supplémentaires, tel un rapport plus détaillé du Dr Underwood, dans le but de faire annuler ou modifier la décision de la division générale, il doit se conformer aux exigences énoncées aux articles 45 et 46 du Règlement et doit déposer une demande d’annulation ou de modification auprès de la même division qui a rendu la décision. Il y a des échéanciers et des exigences strictes que doit respecter la demanderesse pour obtenir gain de cause lorsqu’il soumet une demande d’annulation ou de modification d’une décision. Le paragraphe 66(2) de la Loi sur le ministère de l’emploi et du développement social exige que le demandeur qui veut annuler ou modifier présente sa demande à cet effet au plus tard un an après la date où l’appelant reçoit communication de la décision, alors que l’alinéa 66(1)b) de la Loi sur le ministère de l’emploi et du développement social exige que le demandeur prouve que le fait nouveau est un fait essentiel qui, au moment de l’audience, ne pouvait être connu malgré l’exercice d’une diligence raisonnable. Aux termes du paragraphe 66(4) de la Loi sur le ministère de l’emploi et du développement social, la division d’appel dans la présente affaire n’a pas le pouvoir d’annuler ou de modifier une décision en s’appuyant sur des faits nouveaux, puisque seule la division qui a rendu la décision, en l’occurrence, la division générale,
a le pouvoir de le faire.

Conclusion

[27] La demanderesse n’a relevé aucune conclusion de fait erronée précise à laquelle serait parvenue la division générale en rendant sa décision.  Comme les motifs d’appel invoqués par la demanderesse ne constituent pas des moyens d’appel valables que je puisse prendre en considération, je ne peux conclure que l’appel a une chance raisonnable de succès, et c’est pourquoi je rejette la demande de permission d’en appeler.

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