Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] La demanderesse a allégué dans sa demande de pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada qu’elle était invalide parce qu’elle est atteinte de fibromyalgie, de douleurs chroniques, d’urgences urinaires et de maladie mentale. L’intimé a rejeté sa demande à l’examen initial puis après réexamen. La demanderesse a interjeté appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. Le 1er avril 2013, l’affaire a été déférée à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale en vertu de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable. La division générale a tenu une audience en personne et, le 27 octobre 2014, a rejeté l’appel de la demanderesse.

[2] La demanderesse a d’abord présenté à la division générale une demande d’annulation ou de modification de sa décision. Par la suite, elle a déposé une demande de permission d’en appeler à la division d’appel. Elle a informé le Tribunal de la sécurité sociale par écrit qu’elle ne souhaitait pas faire annuler ou modifier la décision, mais qu’elle voulait plutôt obtenir la permission d’en appeler. Pour rendre ma décision, j’ai pris en considération les documents ayant trait à la demande d’annulation ou de modification de la décision de la division générale et la demande de permission d’en appeler à la division d’appel.

[3] À l’appui de sa demande de permission d’en appeler, la demanderesse a soutenu qu’elle était atteinte d’une incapacité grave et prolongée, qu’elle demeurait à l’emploi du conseil scolaire où elle avait travaillé en dernier, mais était en congé de maladie non payé, que la décision de la division générale renfermait des erreurs de fait qui avaient été commises de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, que la division générale n’avait pas pris en compte l’effet cumulatif de toutes ses incapacités, que la décision était fondée sur des commentaires de son médecin traitant pris hors contexte en leur donnant un sens qui n’était pas voulu, et que la division générale n’avait pas considéré le fait qu’elle s’était conformée aux recommandations relatives à son traitement. La demanderesse a aussi souligné ses limitations physiques et a exprimé le désir de présenter de nouveaux éléments de preuve à l’appui de sa thèse.

[4] L’intimé n’a présenté aucune observation.

Analyse

[5] Pour obtenir la permission d’interjeter appel, la demanderesse doit présenter un motif valable pouvant donner gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (CF). La Cour d’appel fédérale a aussi conclu que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le demandeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41; Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[6] La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS ») régit le fonctionnement du Tribunal. L’article 58 de la Loi énonce les seuls moyens d’appels pouvant être pris en compte pour accorder la permission d’interjeter appel (voir l’annexe de la présente décision). Par conséquent, je dois déterminer si la demanderesse a présenté un moyen d’appel qui a une chance raisonnable de succès en vertu de l’article 58 de la Loi.

[7] La demanderesse a soulevé plusieurs arguments à l’appui de sa demande. D’abord, elle a fait valoir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée et avait des limitations physiques, cognitives et mentales. La division générale a été saisie de cet élément de preuve lors de l’audience qu’elle a tenue. Sa réitération ne constitue pas un moyen d’appel étant donné qu’il ne soulève pas une erreur de fait, une erreur de droit ou un manquement à la justice naturelle.

[8] La demanderesse désirait également présenter de nouveaux éléments de preuve pour appuyer sa demande, notamment un rapport d’IRM, des travaux d’auteurs, sa lettre de congédiement du conseil scolaire qu’elle a reçue après l’audience de la division générale et une lettre récente de son médecin de famille. La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social ne prévoit pas la présentation de nouveaux éléments de preuve comme moyen d’appel pouvant être pris en compte.

[9] En outre, la demanderesse a affirmé que la division générale avait erré en concluant qu’elle n’avait pas collaboré à son traitement. Elle a admis qu’elle n’avait pas poursuivi le programme d’aquaforme qui est mentionné dans la décision de la division générale. L’appelante a toutefois fait valoir qu’elle avait cessé d’aller à la piscine municipale parce qu’elle ne pouvait plus s’y rendre étant donné qu’elle ne conduit pas et qu’elle ne peut emprunter les transports en commun. Elle a continué de faire des exercices dans sa propre cuve thermale. Même si la division générale a souligné dans sa décision que l’appelante ne conduit pas, elle n’a pas expliqué pourquoi elle n’avait pas continué à pratiquer les exercices en piscine qui lui ont été recommandés. Il peut s’agir d’une erreur de fait commise par la division générale en ne tenant pas compte des éléments portés à sa connaissance. Ce moyen d’appel peut avoir une chance raisonnable de succès.

[10] De plus, la demanderesse a soutenu que la division générale avait commis une erreur en ne tenant pas compte de l’effet cumulatif de toutes ses invalidités. Dans sa décision, la division générale énumère les nombreux problèmes médicaux de la demanderesse. Cependant, elle n’a pas tenu compte de l’effet cumulatif de tous ces problèmes sur sa capacité de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Le droit est clair sur ce point : le décideur doit tenir compte de l’ensemble des affections entraînant une incapacité, et non seulement de l’invalidité principale, pour déterminer si la demanderesse est invalide aux termes du RPC (Bungay c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 47). Par conséquent, ce moyen d’appel pourrait avoir une chance raisonnable de succès.

[11] La demanderesse a aussi fait valoir que la division générale avait erré en concluant qu’elle n’avait pas dûment tenté d’obtenir un autre emploi qui répondait à ses limitations même si elle a continué d’être employée par le conseil scolaire. Dans la décision Boyle c. Ministre du Développement des ressources humaines (29 avril 2003, CP 18508), la Commission d’appel des pensions a accepté le fait qu’un demandeur n’a pas eu à chercher un autre emploi parce qu’il pouvait occuper un emploi chez son ancien employeur dès qu’il sentirait prêt à retourner au travail. Ce principe juridique peut être pertinent en l’espèce. La division générale n’en a pas tenu compte. Il peut s’agir d’une erreur qui constitue un moyen d’appel ayant une chance raisonnable de succès.

[12] De plus, la demanderesse a affirmé que, dans sa décision, la division générale a mal cité un rapport de son médecin selon qui elle ne pouvait pas reprendre son ancien emploi; le rapport indiquait qu’elle ne pouvait ni retourner à son ancien emploi, ni effectuer aucun autre travail. La division générale peut avoir tiré une conclusion de fait erronée en ne tenant pas compte des éléments portés à sa connaissance étant donné qu’elle n’a peut-être pas pris en compte de l’avis du médecin dans son ensemble. Ce moyen d’appel peut aussi avoir une chance raisonnable de succès.

[13]  La demanderesse a souligné d’autres erreurs de fait dans la décision de la division générale, notamment une référence au nom du mauvais médecin comme étant l’auteur d’un certain rapport et des références à des médecins en utilisant le mauvais genre. Ces erreurs n’auraient aucun effet sur l’issue de la présente affaire. Elles n’ont pas été commises d’une manière abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à la connaissance de la division générale. Par conséquent, ces arguments n’ont pas de chance raisonnable de succès en appel.

[14] Toutefois, la décision de la division générale peut renfermer des erreurs de fait qui ont été commises de manière abusive. Elle conclut que la demanderesse s’est estimée capable de travailler parce qu’elle avait demandé une évaluation de la capacité fonctionnelle du conseil scolaire afin de déterminer le genre de travail qu’elle pouvait faire. Par conséquent, elle a conclu que la demanderesse pouvait reprendre un travail sédentaire. La décision précisait également que le témoignage de la demanderesse selon lequel elle aurait seulement pu continuer à occuper son dernier poste pendant deux ou trois mois n’était qu’une hypothèse étant donné qu’elle était prête à continuer à travailler avec certaines adaptations. La décision n’expliquait pas pourquoi son témoignage a mené à ces conclusions contradictoires ou le poids qui avait été accordé à cet élément de preuve. Il s’agit donc d’une erreur qui constitue un moyen d’appel ayant une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[15] La demande est accueillie parce que la demanderesse a présenté des moyens d’appel pouvant avoir une chance raisonnable de succès.

[16] La présente décision d’accorder la permission d’interjeter appel ne présume aucunement de l’issue de l’appel sur le bien-fondé de l’affaire.

Annexe

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

58. (2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

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