Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Décision

[1]  La permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est accordée.

Introduction

[2]  Le 7 février 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (le Tribunal) a rendu une décision dans laquelle elle rejetait la demande de prestations d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC) présentée par la demanderesse. La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler (la demande) de la décision de la division générale.

Question en litige

[3]  Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[4]  Les appels interjetés à l’encontre de décisions de la division générale sont régis par les articles 56 à 59 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la Loi sur le MEDS). Les paragraphes 56(1) et 58(3), qui régissent la permission d’en appeler, prévoient qu’« [i]l ne peut être interjeté appel à la division d’appel sans permission » et que la division d’appel « […] accorde ou refuse cette permission ».

[5]  Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prescrit que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ». Les seuls moyens d’appel sont énoncés au paragraphe 58(1). Ils sont notamment le manquement à la justice naturelle, ainsi que les erreurs de droit, les erreurs de fait et les erreurs mixtes de fait et de droitNote de bas de page 1.

Observations

[6] L’avocat du demandeur a soutenu que la division générale avait commis de nombreuses erreurs mixtes de droit et de fait lorsqu’elle a conclu que la demanderesse n’avait pas satisfait au critère du RPC de l’invalidité « grave ». L’avocat a allégué que la division générale n’avait pas pris en compte la preuve pertinente, qu’elle avait plutôt tenu compte d’éléments de preuve non pertinents, avait mal interprété la preuve, qu’elle avait négligé d’analyser la preuve pertinente et avait substitué ses propres opinions à celles des médecins.

Analyse

[7] Les demandes de permission d’en appeler constituent la première étape du processus d’appel. Le critère est moins rigoureux que celui qui doit être appliqué à l’audition de l’appel sur le fond. Toutefois, pour obtenir la permission d’en appeler, la demanderesse doit présenter un motif valable pour lequel l’appel pourrait être accueilli : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) [1999] ACF no 1252 (CF).

[8] La Cour d’appel fédérale a conclu que la question de savoir si un demandeur a une cause défendable en droit revient à se demander s’il a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63. Par conséquent, le Tribunal doit déterminer en premier lieu si les motifs de la demande constituent un moyen d’appel qui aurait une chance raisonnable de succès.

[9] Si la permission est accordée, la demanderesse a l’intention d’invoquer ce qu’elle prétend être des erreurs de fait dans l’analyse de la division générale. L’avocat de la demanderesse fait valoir en son nom que la division générale avait mal interprété et mal qualifié la scolarité de la demanderesse, sa capacité d’effectuer un travail sédentaire, les cours d’anglais langue seconde qu’elle suivait et son tabagisme. L’avocat affirme qu’au lieu de trois années d’études collégiales auxquelles la division générale a fait référence, la demanderesse ne possède en réalité que l’équivalent d’une onzième année, et ce, d’une école de métiers. L’avocat de la demanderesse fait aussi valoir que le niveau de scolarité de la demanderesse l’empêche d’obtenir un travail sédentaire, qu’elle a suivi des cours d’anglais langue seconde pendant deux mois seulement et qu’elle a essayé de cesser de fumer. L’avocat soutient que le Tribunal aurait dû accorder plus de poids à ces facteurs.

[10] Le Tribunal n’est pas convaincu que les arguments de l’avocat auraient une chance raisonnable de succès en appel. La décision de la division générale était en grande partie fondée sur la conclusion selon laquelle la demanderesse n’avait fait aucune tentative de trouver un autre emploi et qu’elle n’avait fourni aucune raison satisfaisante pour ne pas avoir cherché de travail. Dans le contexte de la décision, l’examen par la division générale du niveau de scolarité de la demanderesse et de ses antécédents professionnels ne révèle aucune erreur pouvant avoir joué un rôle crucial dans la décision.

[11] Le membre de la division générale n’a commis aucune erreur à l’égard du niveau de scolarité de la demanderesse parce que l’information quant à ses trois années d’études postsecondaires provenait de la demanderesse elle-mêmeNote de bas de page 2. Le Tribunal n’est pas non plus convaincu que la division générale a tiré des conclusions erronées ou des conclusions défavorables à l’égard des autres questions soulevées. Le Tribunal n’est pas convaincu par le sens que l’avocat a donné aux commentaires de la division générale concernant les habiletés linguistiques de la demanderesse. Le Tribunal conclut que les commentaires ont été formulés dans le contexte où le membre n’avait aucune difficulté à comprendre la demanderesse. Le Tribunal n’est pas non plus d’avis que la division générale s’est fondée sur le tabagisme de la demanderesse. Par conséquent, ces observations ne constituent pas un motif permettant d’accorder la permission.

[12] L’avocat de la demanderesse a fait valoir que la division générale avait commis une autre erreur de fait en concluant que le médecin de famille de la demanderesse était le seul médecin qui avait affirmé qu’elle était atteinte d’une invalidité grave. L’argument de l’avocat de la demanderesse selon lequel on doit préférer l’opinion du médecin de famille de la demanderesse à ceux d’autres médecins vise la façon dont la division générale a apprécié la preuve portée à sa connaissance. En l’absence d’une erreur manifeste de la part de la division générale, le Tribunal n’est pas convaincu par l’argument avancé par l’avocat.

[13] Dans le cas de la demanderesse, la division générale a conclu qu’il existait des preuves médicales contradictoires. L’appréciation de la preuve relève de la division générale. Le membre de la division générale a décrit en détail la preuve médicale sur laquelle il s’est fondé ainsi que les raisons pour lesquelles il a agi ainsi. Ce faisant, le membre a satisfait au critère de la preuve privilégiée. Par conséquent, le Tribunal conclut qu’aucune erreur n’a été commise par la division générale. La permission ne sera pas accordée sur ce fondement.

[14] Les autres erreurs de fait alléguées sont que la division générale aurait mal décrit les médicaments pris par la demanderesse. L’avocat de la demanderesse fait valoir que, contrairement à l’avis de la division générale, la demanderesse prenait de puissants analgésiques. À cet égard, le Tribunal conclut que la demanderesse a soulevé un motif valable. Le Tribunal conclut également que la demanderesse a soulevé un motif valable en ce qui concerne sa non-participation à des séances de counseling, car il n’est pas clair si le membre de la division générale a pris en compte la barrière linguistique de la demanderesse comme étant un facteur qui l’empêchait de participer à des séances de counseling. La permission d’en appeler est accordée sur le fondement de ces observations.

[15] Même si le Tribunal a accordé la permission, il estime souhaitable d’examiner certaines autres observations de la demanderesse, plus précisément, l’observation de l’avocat de la demanderesse selon laquelle la division générale n’a pas bien appliqué l’arrêt VillaniNote de bas de page 3. Le Tribunal se fonde sur l’arrêt GiannarosNote de bas de page 4 de la Cour d’appel fédérale qui énonce le principe selon lequel un tel manquement ne porte pas nécessairement un coup fatal à la décision.

[16] Selon la Cour d’appel fédérale, l’analyse « réaliste » n’est pas nécessaire si le décideur n’est pas convaincu qu’il existe un problème médical grave. Ainsi, de l’avis du Tribunal, l’arrêt Giannaros s’appliquerait en l’espèce parce que la division générale a déjà conclu que la demanderesse ne souffrait pas d’un problème médical grave. Par conséquent, aucune erreur de droit n’a été commise en raison du défaut de procéder à un examen plus détaillé des facteurs énoncés dans l’arrêt Villani à l’égard de la demanderesse ou de procéder à une analyse « réaliste ».

[17] L’avocat de la demanderesse a aussi soutenu que la division générale n’a pas pris en compte tous les problèmes médicaux de la demanderesse. Le Tribunal n’est pas convaincu par cet argument. La division générale a expressément examiné les nombreux problèmes médicaux de la demanderesse aux paragraphes 35 à 41 de sa décision, en les énumérant et en commentant les traitements médicaux prescrits. Cette observation ne constitue donc pas un moyen d’appel.

[18] En ce qui concerne l’observation selon laquelle la division générale n’a pas pris en considération la décision Taylor c. MDRH de la Commission d’appel des pensions(4 juillet 1975), CP 4436 (CAP), cette décision et les autres décisions citées par la demanderesse étayent la thèse selon laquelle une fausse déclaration faite par un prestataire de l’assurance-emploi indiquant qu’il est prêt à travailler n’entraîne pas nécessairement le rejet d’une demande de prestations d’invalidité du RPC. Toutefois, d’autres décisions de la Commission d’appel de pensions ont indiqué le contraire. Ainsi donc, le Tribunal est d’avis qu’il revenait également à la division générale de tirer des conclusions quant à la crédibilité à l’égard des déclarations faites par la demanderesse à la Commission de l’assurance-emploi. La permission d’en appeler n’est pas accordée sur ce fondement.

[19] Les autres observations de l’avocat de la demanderesse concernant la preuve de la capacité de travailler pendant la PMA et un employeur philanthropique ne sont pas pertinentes à la présente demande. En ce qui concerne les premières, les observations sont constituées en grande partie des arguments de l’avocat; quant aux dernières, aucune question n’a été soulevée au sujet d’un employeur philanthropique. Par conséquent, ces observations ne constituent pas des moyens d’appel.

Conclusion

[20] L’avocat de la demanderesse a présenté de nombreux arguments visant à appuyer la demande. Parmi ces arguments, le Tribunal a conclu que la demanderesse a soulevé un motif défendable concernant la déclaration de la division générale selon laquelle on ne lui avait pas prescrit de puissants analgésiques. La permission est aussi accordée relativement à la rare participation de la demanderesse à des séances de counseling.

[21] À l’étape de la demande, la demanderesse ne devait réussir à soulever qu’un moyen d’appel. Le Tribunal conclut qu’elle l’a fait. La demande de permission d’en appeler est accueillie.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.