Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est refusée.

Introduction

[2] Le 26 janvier 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (le Tribunal) a rendu une décision aux termes de laquelle elle a refusé à la demanderesse des prestations d’invalidité du Régime des pensions du Canada (RPC). La demanderesse a présenté une demande de permission (la « demande ») d’interjeter appel à l’encontre de la décision de la division générale.

Question en litige

[3] La question que le Tribunal doit trancher est la suivante : « l’appel a-t-il une chance raisonnable de succès? ».

Droit applicable

[4] Les appels interjetés à l’encontre d’une décision de la division générale sont régis par les articles 56 à 59 de laLoi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi »). Les paragraphes 56(1) et 58(3) régissent l’autorisation d’interjeter appel et prévoient qu’« [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et que la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[5] Le paragraphe 58(2) de la Loi prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ». Le paragraphe 58(1) énonce les seuls moyens d’appel : les manquements à la justice naturelle, les erreurs de droit et les erreurs de fait, et les erreurs sur une question mixte de fait et de droitFootnote 1.

Observations

[6] Par l’entremise de son avocat, la demanderesse a fait valoir que la division générale avait commis de nombreuses erreurs de droit, des erreurs de fait et des erreurs sur une question mixte de fait et de droit.

Analyse

[7] La demande de permission d’en appeler représente la première étape du processus d’appel. Le seuil à atteindre est cependant inférieur à celui qui doit être atteint à l’audition de l’appel sur le fond. Toutefois, pour que la permission lui soit accordée, le demandeur doit soulever un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (CF).

[8] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le demandeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, Fancy c. Canada (Procureur général) 2010 CAF 63. Par conséquent, le Tribunal doit d’abord déterminer si les motifs de la demande correspondent  à un moyen d’appel qui aurait une chance raisonnable de succès.

La division générale a-t-elle commis des erreurs de fait?

[9] La demanderesse soutient que le membre de la division générale a commis plusieurs erreurs de droit :

  1. Il aurait mal appliqué la jurisprudence;
  2. Il n’aurait pas tenu compte de tous les problèmes de santé de la demanderesse;
  3. Il n’aurait pas évalué le degré de douleur subjective ressentie par la demanderesse, alors que plusieurs rapports médicaux faisaient état d’un diagnostic de syndrome de douleur chronique;
  4. Il se serait fié aux « attentes » du médecin de famille plutôt qu’aux rapports médicaux pour évaluer l’employabilité de la demanderesse;
  5. Il aurait assimilé le fait d’assister à des cours au fait d’occuper un emploi;
  6. Il aurait fait erreur en énonçant le critère à appliquer pour l’atténuation, puisqu’il a indiqué que le seuil à franchir consistait à chercher « très activement » à se faire soigner, et a rejeté la preuve subjective présentée par la demanderesse au sujet d’une blessure au genou, preuve qu’il a jugée insuffisante parce qu’aucun rapport médical n’avait été présenté pour l’étayer;
  7. Il aurait mal interprété les tentatives faites par la demanderesse pour retourner sur le marché du travail.

[10] Il va sans dire que la demanderesse conteste la décision de la division générale. Toutefois, le Tribunal constate que beaucoup des erreurs de droit invoquées par la demanderesse n’ont pas été commises.

[11] Tout d’abord, la demanderesse accuse la division générale d’avoir mal appliqué la jurisprudence, mais elle ne précise pas ce que la division générale aurait fait incorrectement. Le Tribunal est en réduit à deviner. Dans les circonstances, le Tribunal estime que la demanderesse n’a pas présenté de cause défendable quant à cet aspect.

[12] La demanderesse a ensuite fait valoir que la division générale n’avait pas tenu compte de tous ses problèmes de santé. Le défaut de tenir compte de tous les problèmes de santé de la demanderesse constituerait une erreur de droit. Toutefois, contrairement à ce qu’affirme la demanderesse, la division générale a abordé à la fois ses problèmes de santé « organiques «  (genou) et inorganiques (syndrome de douleur chronique). La demanderesse conteste les conclusions du membre, mais cela ne signifie pas que celui-ci n’a pas tenu compte de tous les problèmes de santé dont elle souffrait. Le Tribunal n’est pas convaincu qu’un appel fondé sur ce moyen serait couronné de succès.

[13] De la même façon, le Tribunal estime que la division générale s’est bel et bien penchée sur le degré subjectif de douleur ressentie par la demanderesse et en a tenu compte. En effet, au paragraphe 58, dans lequel il était question du fait que la demanderesse n’était pas allée à une clinique de gestion de la douleur, la division générale a mentionné que la demanderesse avait indiqué que le degré de douleur qu’elle éprouvait nuisait à toutes ses activités. Il ne s’agit absolument pas d’un rejet du témoignage subjectif de la demanderesse : ce passage montre plutôt que le membre de la division générale a bel et bien pris en compte le témoignage de la demanderesse dans son analyse. Par conséquent, le Tribunal juge que cette allégation n’est pas étayée et qu’il est peu probable qu’un appel fondé sur ce moyen soit couronné de succès.

[14] La demanderesse s’est offusquée du fait que la division générale s’appuie sur le pronostic de son médecin de famille. En toute déférence, le Tribunal estime qu’il n’existe à cet égard aucune cause défendable. Non seulement le médecin de famille de la demanderesse traite cette dernière depuis plusieurs années, c’est aussi lui qui a vu à ses chirurgies au genou. Le Tribunal est donc d’avis qu’il était bien placé pour poser le pronostic qu’il a posé et que la division générale n’a pas eu tort de s’y fier.

[15] En ce qui concerne l’argument selon lequel le fait d’assister à des cours ne peut être assimilé à la capacité réelle de travailler, le Tribunal reconnaît que la jurisprudence sur cette question est contradictoire. Toutefois, la détermination doit se fonder sur des faits (Fraser c. MDRH), 20 septembre 2000, CP 11086 (CAP). C’est à la division générale qu’il revient de faire la détermination, et comme le Tribunal ne relève pas d’erreur, il n’y a pas de raison de modifier la conclusion de la division générale. De plus, l’analyse de la division générale ne renferme aucun élément qui étaie l’argument de la demanderesse. Il est peu probable qu’un appel fondé sur ce moyen soit couronné de succès.

[16] La demanderesse fait valoir que lorsque la division générale a évalué ses tentatives d’atténuation, elle a mal énoncé le critère à appliquer pour l’atténuation, puisqu’elle a indiqué que le seuil à franchir consistait à chercher « très activement » à se faire soigner. Le Tribunal estime que la Division générale n’a pas fait erreur en faisant cette affirmation. En effet, cette affirmation reprend celle qui est énoncée dans la décision A.P. c. MRHDS (15 décembre 2009) CP 26308 (CAP), et de l’avis du Tribunal, cette affaire fait toujours jurisprudence. Un appel fondé sur ce moyen ne pourrait être couronné de succès.

[17] En ce qui concerne l’affirmation de la demanderesse selon laquelle la division générale aurait à tort rejeté la preuve subjective qu’elle a présentée au sujet de sa blessure au genou, le Tribunal n’est pas convaincu. Le médecin de famille de la demanderesse a bel et bien indiqué que cette dernière devrait subir une nouvelle évaluation à la suite de ses chirurgies au genou. Toutefois, aucune évaluation n’a été présentée à la division générale. La jurisprudence, notamment la décision Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248, traite de la nécessité de disposer d’une preuve médicale objective pour déterminer la gravité. Le membre de la division générale n’a pas fait erreur quand il a déterminé que l’absence d’une telle preuve faisait en sorte qu’il était incapable d’évaluer correctement des éléments cruciaux en ce qui concerne les interventions et les traitements médicaux de la demanderesse. La permission d’en appeler ne peut être accordée sur la foi de ce motif.

[18] La demanderesse a également fait valoir que la division générale avait mal interprété les efforts qu’elle a déployés pour retourner sur le marché du travail. Le Tribunal ne constate quant à lui aucune erreur à cet égard. Le 21 janvier 2013, la demanderesse occupait encore régulièrement un emploi à temps partiel. Le membre de la division générale a remarqué que des accommodements avaient été faits en fonction des restrictions de travail de la demanderesse. La question n’était pas de savoir si la demanderesse trouvait les tâches sans intérêt. Ce qu’il fallait évaluer, c’est si elle était toujours en mesure de détenir régulièrement un emploi véritablement rémunérateur. Le Tribunal n’est pas convaincu que le membre de la division générale a commis une erreur dans son évaluation de la capacité de travailler que la demanderesse avait toujours.

[19] Enfin, en ce qui concerne l’argument de la demanderesse selon lequel le membre de la division a erré lorsqu’il a estimé qu’il était [traduction] « troublant »  qu’elle n’ait pas consulté de spécialiste de la douleur ainsi que lorsqu’il a tiré ses conclusions sur sa capacité de conduire jusqu’à London, le Tribunal rejette l’interprétation qui est faite des déclarations du membre. Il est peut-être préférable que les membres n’expriment pas leur opinion personnelle au sujet des témoignages. Cependant, comme la demanderesse a bel et bien indiqué, dans son témoignage, qu’elle avait été dirigée vers une clinique de gestion de la douleur, comme elle a conduit jusqu’à London pour aller consulter son médecin de famille et comme elle affirme que le degré de douleur qu’elle ressent est très élevé, le commentaire du membre de la division générale est compréhensible. Le Tribunal estime que ce commentaire ne donne pas lieu à un quelconque type d’erreur. Il convient de souligner que les observations de la demanderesse indiquaient qu’elle n’avait pas été dirigée vers une clinique de gestion de la douleur, mais le membre de la division générale a indiqué que la demanderesse avait mentionné dans son témoignage que son médecin de famille lui avait bel et bien fait une telle recommandation.

Conclusion

[20] La demanderesse a fait valoir que la division générale avait commis de nombreuses erreurs de droit, des erreurs de fait et des erreurs sur une question mixte de fait et de droit. Par l’entremise de son avocat, elle a présenté un certain nombre d’arguments qui, selon elle, étayent sa demande. Pour les raisons susmentionnées, le Tribunal n’est pas convaincu que la demanderesse a soulevé une cause défendable. De plus, le Tribunal conclut que bon nombre des arguments soulevés par la demanderesse témoignent simplement de son mécontentement à l’égard de l’issue de l’audience devant la division générale. Le présent Tribunal n’est pas en position de soupeser à nouveau la preuve et de parvenir à des conclusions de droit différentes de celles rendues par la division générale. Par conséquent, le Tribunal n’accordera pas la permission visée par la demande.

[21] La permission d’en appeler est refusée.

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