Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] Le demandeur présente une demande de permission d’en appeler de la décision que la division générale a rendue le 13 avril 2015. La division générale a déterminé que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC), étant donné qu’elle en est arrivée à la conclusion qu’il ne souffrait pas d’une invalidité grave et prolongée avant ou durant avril 2009, soit le mois avant lequel une pension de retraite devenait payable.

[2] S. B., une technicienne juridique, a déposé une lettre datée du 25 mai 2015 auprès du Tribunal de la sécurité sociale, laquelle lettre confirmait que son client, le demandeur, n’avait pu bénéficier d’une audience pour présenter son appel. Elle a demandé qu’on lui explique pourquoi aucune date d’audience n’avait été communiquée au demandeur. Elle a indiqué qu’un appel serait déposé pour cette raison‑là. Le 2 juin 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a demandé à l’avocate quand une demande de permission d’en appeler et des observations officielles seraient déposées.

[3] Le demandeur a rempli une demande de permission d’en appeler auprès de la division d’appel. Sa représentante a déposé cette demande le 17 juin 2015. Le demandeur a affirmé qu’on l’avait privé de la possibilité de présenter sa cause lors d’une audience en personne aux côtés de ses représentantes, alors qu’une telle audience devait avoir lieu en mai 2012 (et avait été ajournée afin de permettre au demandeur d’engager un avocat), et même s’il avait dû par ailleurs attendre un certain temps pour qu’une deuxième audience soit tenue après que la première eut été ajournée à sa demande. Pour obtenir gain de cause, le demandeur doit démontrer que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[4] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Contexte et historique des procédures

[5] Le demandeur a présenté une demande de prestations d’invalidité aux termes du RPC le 20 avril 2010. Cette demande a été remplie et signée par sa représentante, soit sa fille, « S. N. B. », dont l’adresse est le 100, X, bureau X, X (Ontario) [document GT1, pages 25 à 28].

[6] Le 24 septembre 2010, l’intimé a rejeté la demande de pension d’invalidité faite par le demandeur aux termes du RPC. L’intimé a noté que le demandeur touchait une pension de retraite en vertu du RPC depuis mai 2009. Il a indiqué au demandeur que le Régime de pensions du Canada ne permet pas à une personne de recevoir une pension de retraite anticipée et des prestations d’invalidité en même temps. Il lui a aussi mentionné qu’il aurait fallu que son état de santé l’empêche d’occuper quelque emploi que ce soit au plus tard en avril, soit le mois qui survenait avant le début du versement de la pension de retraite anticipée du RPC. Après avoir examiné l’information et les documents se trouvant dans le dossier, l’intimé en est arrivé à la conclusion qu’il n’y avait pas assez de renseignements pour démontrer que les contraintes du demandeur l’empêchent d’accomplir certains types de travaux (document GT1, pages 12 à 14).

[7] Le 13 décembre 2010, le demandeur a demandé une révision de la décision de l’intimé. Dans une décision en révision datée du 1er avril 2011, l’intimé a rejeté la demande de pension d’invalidité du demandeur. Cette fois-là, l’intimé a mentionné qu’il ne considérait pas que le demandeur souffrait d’une invalidité grave et prolongée au sens du Régime de pensions du Canada (document GT1, pages 21 et 23).

[8] Le 12 mai 2011, la représentante du demandeur a interjeté appel de la décision sur le réexamen de l’intimé. Elle souhaitait aussi bénéficier d’une procédure d’appel anticipée. La lettre a été rédigée sur du papier à en-tête de N.K. B. Legal Serivces [sic], un cabinet situé au 100, X, bureau X, X (Ontario). La représentante a signé la lettre en tant que « N. (S.) B. » (document GT1, pages 5 et 6).

[9] Le 23 novembre 2011, N. B., du cabinet NK B. Legal Serivces [sic], a écrit au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision pour lui communiquer un changement d’adresse. La nouvelle adresse entrée en vigueur le 30 novembre 2011 serait le 2800, X, bureau X, X (Ontario). La représentante a signé la lettre en tant que « N. (S.) B. » (document GT1, page 149).

[10] Le 21 décembre 2011, le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision a confirmé qu’une audience devant un tribunal de révision du Régime de pensions du Canada était prévue pour le 16 mai 2012.

[11] Au début de 2012, la représentante du demandeur a préparé un mémoire dans lequel elle a énoncé ses observations. Elle a signé ce mémoire en tant que « S. N. B. » (document GT1, page 118).

[12] Le 16 mai 2012, une audience a eu lieu devant un tribunal de révision du Régime de pensions du Canada. Mais ce tribunal a ajourné l’audience pour le motif que le demandeur venait apparemment tout juste d’engager un nouvel avocat. Le dossier d’ajournement révèle que le demandeur avait indiqué au Tribunal de révision que son nouvel avocat avait besoin de temps pour préparer l’audience et pour obtenir les documents manquants (document GT1, page 96).

[13] Il n’existe pas d’information consignée concernant la question de savoir si le demandeur a fourni le nom et les coordonnées de son nouvel avocat à l’audience devant le Tribunal de révision le 16 mai 2012.

[14] Le 1er avril 2013, l’appel a été renvoyé au Tribunal de la sécurité sociale du Canada.

[15] Le 1er avril 2014, le Tribunal de la sécurité sociale a écrit à N. B., de N.K. B. Legal Services, au 2800, X, bureau X, X (Ontario), pour l’informer du détail des prochaines étapes du processus d’appel. Le Tribunal de la sécurité sociale n’a pas envoyé d’exemplaire de sa lettre du 1er avril 2014 directement au demandeur. Il était indiqué dans cette lettre que les parties pourraient continuer de déposer de nouveaux documents ou observations jusqu’à ce qu’elles reçoivent un avis contraire à ce sujet.

[16] L’appel a été confié à un membre de la division générale en juillet 2014.

[17] Le membre de la division générale a examiné les documents déposés et a décidé de fonder sa décision sur ces documents. Les raisons pour lesquelles il a procédé de la sorte sont exposées dans la lettre datée du 4 septembre 2014. L’avis se lit comme suit :

[Traduction] Après avoir examiné tous les documents déposés par les parties dans le cadre de l’appel susmentionné, le membre du Tribunal a l’intention de rendre une décision fondée sur les documents et observations déposés, et ce, pour les raisons suivantes :

  • Il n’y a pas d’éléments de preuve contradictoires dans le dossier d’audience;
  • Il ne semble pas y avoir d’incohérences entre les renseignements présentés;
  • Il n’y a pas de problème de crédibilité;
  • Aucun autre élément de preuve n’est requis pour rendre une décision;
  • Le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit que l’on doit procéder de la façon la plus informelle et la plus rapide possible, tel que le permettent les circonstances, le respect de l’équité et la justice naturelle.

Période de dépôt

Les parties ont jusqu’au 7 octobre 2014 pour déposer des documents ou des observations supplémentaires. Un exemplaire de tout nouveau document reçu par le Tribunal sera fourni aux autres parties, et les parties auront la possibilité d’y répondre.

Période de réponse

La période de dépôt est suivie d’une période de réponse. Les parties auront jusqu’au 7 novembre 2014 pour répondre à tout document déposé durant la période de dépôt.

[18] La lettre datée du 4 septembre 2014 était adressée et a été livrée à l’intimé et à N. B., de NK B. Legal Services, au 2800, X, bureau X, X (Ontario). Cette lettre ne semble pas avoir été livrée directement au demandeur.

[19] La division générale a jugé l’affaire en s’appuyant sur les documents déposés. La division générale a rendu une décision le 13 avril 2015. Le 14 avril 2015, la décision a été envoyée au demandeur, à N. B. et à l’intimé.

[20] Ni l’une ni l’autre des parties n’a déposé d’autres documents entre le 4 septembre 2014 et le 14 avril 2015.

[21] Le 25 mai 2015, S. B., du cabinet d’avocats C. B., situé au 450, X, bureau X, à X (Ontario), a écrit au Tribunal de la sécurité sociale pour accuser réception de la lettre datée du 14 avril 2015. Elle a confirmé que son client n’avait pas eu la possibilité de présenter sa cause lors d’une audience et qu’ils en appelleraient de la décision pour cette raison-là. Elle a aussi écrit ce qui suit : [traduction] « J’ai fait un suivi à plusieurs reprises pour demander la tenue d’une audience et la seule réponse que j’ai reçue, c’est la lettre susmentionnée que vous m’avez envoyée pour rejeter la demande de mon client [sic] ». Elle a demandé qu’on lui explique pourquoi aucune date d’audience n’avait été communiquée à son client. Le Tribunal de la sécurité sociale a accusé réception de la lettre datée du 25 mai 2015 en envoyant une lettre à l’attention du demandeur à S. B. au 450, X, bureau X, X (Ontario), et à l’intimé.

[22] La lettre datée du 25 mai 2015 semble constituer la première communication que S. B., de C. B., a eue avec le Tribunal de la sécurité sociale. Hormis les observations verbales présentées par le demandeur à l’audience devant le Tribunal de révision le 16 mai 2012, rien dans le dossier du Tribunal de la sécurité sociale n’indique que N. B., de N.K. B. Legal Services, au 2800, X, bureau X, X (Ontario), avait cessé d’agir pour le compte du demandeur, ou que S. B., de C. B., l’avait déjà représenté, avant l’envoi de la lettre datée du 25 mai 2015.

[23] Mon examen du dossier du Tribunal de la sécurité sociale ne contient aucune mention d’une quelconque correspondance ou communication du demandeur, de N. B., de N.K. B. Legal Services, au 2800, X, bureau X, X (Ontario), ou de S. B., de C. B., qui aurait eu lieu entre le 16 mai 2012 et le 25 mai 2015.

[24] Le dossier de la demande de permission d’en appeler a été confié à un membre de la division d’appel. Le 2 juin 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a écrit à S. B., de C. B., pour l’aviser que la demande de permission d’en appeler devait être faite dans la forme et de la manière prescrites.

[25] Le 3 juin 2015, S. B., de C. B., a écrit à nouveau au Tribunal de la sécurité sociale pour lui demander une réponse à sa lettre du 25 mai 2015.

[26] Le 11 juin 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a envoyé un courriel à S. B., de C. B., en réponse à la demande de renseignements sur la forme de l’audience qui aurait lieu devant la division générale. Le Tribunal de la sécurité sociale a joint à ce courriel un exemplaire de la lettre datée du 4 septembre 2014, dans laquelle la division générale avait indiqué qu’elle rendrait une décision fondée sur les documents déposés auprès le Tribunal de la sécurité sociale. Le Tribunal de la sécurité sociale a fait mention de cette lettre à S. B. Il lui a rappelé que la demande de permission d’en appeler devait être faite dans la forme et de la manière prescrites.

[27] S. B., de C. B., a tout de suite répondu au Tribunal de la sécurité sociale par courriel. Elle lui a écrit ce qui suit :

[Traduction] La lettre qui a été renvoyée en 2014 et que vous avez jointe a été envoyée à la mauvaise adresse. Je n’ai jamais habité à cette adresse-là et je ne comprends donc pas pourquoi la lettre y a été envoyée (ce qui explique que je ne l’aie pas reçue).

[28] S. B., de C. B., a confirmé que son adresse était le 450, X, bureau X, X (Ontario). Elle n’a par ailleurs aucunement traité du contenu principal de la lettre datée du 4 septembre 2014.

[29] Le 16 juin 2015, S. B., de C. B., a écrit au Tribunal de la sécurité sociale. Elle a joint à cette correspondance un exemplaire d’une demande de permission d’en appeler remplie par son client. Elle a indiqué que l’original de la demande serait envoyé par la poste. Le Tribunal de la sécurité sociale a ensuite reçu cet original le 18 juin 2015.

[30] Dans la demande de permission d’en appeler, le demandeur a écrit à la main les prénoms de ses représentantes, soit « N. / D. », ainsi que leurs noms de famille, soit « B. / C. », toutes deux de la « C. B. Professional Corporation » au 450, X, bureau X, X (Ontario).

[31] Malgré les observations verbales faites par le demandeur devant le Tribunal de révision le 16 mai 2012, selon laquelle son nouvel avocat allait obtenir d’autres documents, ni lui ni sa représentante S. B. n’ont déposé d’autres documents ou dossiers à quelque moment que ce soit.

Observations

[32] Le demandeur et son avocat affirment que la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle dans la mesure où elle l’a privé de la possibilité de présenter sa cause lors d’une audience en personne.

Analyse

[33] Certains moyens défendables pouvant faire en sorte que l’appel ait du succès sont requis pour que la permission d’en appeler soit accordée : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (C.F.). La Cour d’appel fédérale a jugé qu’avoir une cause défendable en droit équivaut à déterminer si un appel a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Fancy c. Canada (Procureur général) 2010 CAF 63.

[34] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit que les moyens d’appel se limitent à ce qui suit :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[35] Avant d’accorder la permission d’en appeler, je dois être convaincue que les motifs de l’appel relèvent de l’un des moyens d’appel et que l’appel a une chance raisonnable de succès.

a) Forme d’audience

[36] Dans sa lettre du 25 mai 2015, S. B. affirme que le demandeur [traduction] « n’a pas eu la possibilité de présenter sa cause lors d’une audience. »  Dans la demande de permission d’en appeler, le demandeur avance qu’on ne lui a pas donné la possibilité de présenter sa cause lors d’une audience en personne aux côtés de ses représentantes. Ces observations soulèvent deux questions : 1) le demandeur a-t-il eu l’occasion de présenter sa cause lors de quelque audience que ce soit; et 2) avait-il droit à une audience en personne devant la division générale?

[37] L’article 28 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit ce qui suit :

Une fois que toutes les parties ont déposé l’avis selon lequel elles n’ont pas de documents ou d’observations à déposer ou à l’expiration de la période applicable prévue à l’article 27, selon le premier de ces événements à survenir, la section de la sécurité du revenu doit sans délai :

  1. (a) soit rendre sa décision en se fondant sur les documents et observations déposés;
  2. (b) soit, si elle estime qu’elle doit entendre davantage les parties, leur faire parvenir un avis d’audience.

[38] Les mots « entendre davantage les parties » figurant à l’alinéa 28b) donnent à penser que même si la division générale rend une décision au moyen du dossier écrit, cela sera considéré comme une forme d’audience.

[39] Si la division générale détermine qu’il faut entendre davantage les parties, l’article 21 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale l’habilite à tenir des audiences au moyen de questions et de réponses écrites, de conférences téléphoniques ou d’autres procédés de télécommunications, ou en demandant aux parties de comparaître en personne. Si la division générale tient une audience sous l’une des formes envisagées dans la loi, on ne pourra pas dire que le demandeur a été privé de toute possibilité de présenter sa cause lors d’une audience.

[40] S. B. avance que le demandeur a été privé d’une audience en personne, mais elle n’allègue pas ni ne mentionne que le demandeur avait droit à une telle audience ou qu’il n’a pas eu droit à une audience équitable.

[41] Le demandeur avait-il droit à une audience en personne devant la division générale? Aucun droit à une audience en personne n’est prévu dans la loi. Toute ordonnance relative à la forme de l’audience est une ordonnance discrétionnaire relevant de la compétence de la division générale. Il n’y a aucun doute que la division générale est habilitée à rendre ces types de décisions.

[42] La Cour d’appel fédérale a récemment confirmé qu’une ordonnance discrétionnaire ne peut être annulée que si l’appelant prouve que le preneur de décisions a commis une erreur manifeste et dominante : Imperial Manufacturing Group Inc. et Home Depot du Canada Inc. c. Decor Grates Incorporated 2015 CAF 100; Horseman c. Twinn, fonctionnaire électoral de la Horse Lake First Nation 2015 CAF 122; et Budlakoti v. Canada (Citizenship and Immigration) 2015 FCA 139.

[43] Dans Budlakoti, la Cour d’appel fédérale cite la décision Sa Majesté la Reine c. South Yukon Forest Corporation, 2012 CAF 165 (CanLII), 431 N.R. 286, dans laquelle le juge d’appel J.A. définit une erreur manifeste et dominante comme étant une norme élevée et exigeante :

Par erreur « manifeste », on entend une erreur évidente, et par erreur « dominante », une erreur qui touche directement à l’issue de l’affaire. Lorsque l’on invoque une erreur manifeste et dominante, on ne peut se contenter de tirer sur les feuilles et les branches et laisser l’arbre debout. On doit faire tomber l’arbre tout entier.

[44] Le membre de la division générale a examiné des possibilités et a sélectionné la forme de l’audience. Il a tenu compte de plusieurs facteurs avant de décider d’entendre l’affaire au moyen de questions et réponses écrites.

[45] S. B. n’a pas affirmé que la division générale avait commis des erreurs manifestes ou dominantes dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire et je ne vois rien a priori dans le dossier qui m’indiquerait que de telles erreurs ont été commises. Je ne suis pas convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès pour le motif que le demandeur n’a pu présenter sa cause lors d’une audience en personne.

b) Avis d’audience

[46] Bien que ni le demandeur ni sa représentante n’en aient parlé, la question de savoir si la lettre datée du 4 septembre 2013 a été signifiée audit demandeur ou s’il avait été informé de son existence avant que la décision de la division générale ne soit rendue pourrait être déterminante étant donné que le Tribunal de la sécurité sociale a envoyé cette lettre à « N. B. », de NK B. Legal Services, au 2800, X, bureau X, X (Ontario). N. B., une technicienne juridique, est la fille du demandeur. Le Tribunal de la sécurité sociale n’a pas envoyé d’exemplaire de la lettre datée du 4 septembre 2014 au demandeur.

[47] Comme S. B., de C. B., ne semble avoir jamais indiqué au Tribunal de la sécurité sociale que le demandeur avait retenu ses services pour qu’elle le représente (avant que la demande de permission d’en appeler soit déposée), le Tribunal de la sécurité sociale ne lui avait donc évidemment pas envoyé d’exemplaire de la lettre datée du 4 septembre 2014 à son adresse, soit le 450, X, bureau X, X Ontario).

[48] La division générale a déterminé qu’il y avait suffisamment de renseignements pour rendre une décision fondée sur les documents et les observations versés au dossier. Même si la division générale a finalement procédé au moyen de questions et réponses écrites (étant donné qu’il n’était pas nécessaire que toutes les parties comparaissent en personne), la lettre datée du 4 septembre 2014 fait aussi état d’une période de dépôt correspondant au 7 octobre 2014. Les parties avaient jusqu’à cette date-là pour déposer tout document ou toute observation supplémentaire.

[49] Si le demandeur et, peut-être, sa représentante n’étaient pas au courant de l’existence de la lettre datée du 4 septembre 2014, le demandeur a-t-il été de ce fait privé de la possibilité de déposer des documents additionnels? Il a assurément eu amplement le temps et l’occasion de déposer d’autres documents ou observations. Trois années s’étaient écoulées entre l’audience tenue devant le Tribunal de révision en mai 2012 et la date à laquelle la division générale avait rendu sa décision. Ni le demandeur ni sa ou ses représentantes n’ont déposé de document pendant ces trois années-là. Non seulement aucun document ni aucune observation n’ont été déposés pendant cette période-là, mais aucune communication ni aucune correspondance n’ont été non plus reçues de la part du demandeur ou de sa ou ses représentantes.

[50] Mais il ne faut pas oublier, quoi qu’il en soit, que la lettre datée du 4 septembre 2014 aurait pu servir de rappel ou de déclencheur au demandeur ou à sa représentante et les inciter à obtenir des documents et à les déposer avant le 7 octobre 2014.

[51] Il est révélateur de constater que même si S. B. s’est fait transmettre un exemplaire de la lettre datée du 4 septembre 2014 par le Tribunal de la sécurité sociale le 11 juin 2015, elle n’a soulevé aucune objection selon laquelle son client aurait été privé de la possibilité de déposer des documents ou des observations, ou voulant qu’elle ou le demandeur ait aimé déposer d’autres documents ou observations. Malgré l’absence d’observations sur ces questions, il se pourrait fort bien que le demandeur n’ait pas été avisé de l’existence de la lettre datée du 4 septembre 2014 ou du fait qu’il y avait une date limite de dépôt. Cela donne lieu à une cause défendable et je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès sur cette question-là.

[52] Même si j’ai accordé la permission demandée, je me sens obligée de faire les observations suivantes :

  1. (i) Premièrement, et curieusement, la signature de S. N. B. (la fille/technicienne juridique dont l’ancienne adresse était le 100, X, bureau X, à X en Ontario) qui figure sur la demande de prestations d’invalidité (document GT1, page 28) ressemble de manière frappante à la signature de S. B., de C. B., au 450, X, bureau X, X (Ontario) [par exemple, les documents AD1-1 et AD1A, page 1); et
  2. (ii) Deuxièmement, le répertoire des avocats et des techniciens juridiques du Barreau du Haut-Canada ne fait mention d’aucune personne répondant au nom de « S. B. » ou « S. N. B. ». Une personne dénommée « N. K. B. » y est répertoriée à titre de technicienne juridique travaillant au cabinet C. B. Professional Corporation, dont l’établissement d’affaires est situé au 450, X, bureau X, X (Ontario). Je note que les initiales de [traduction] « N. K. » sont les mêmes que celles figurant dans la dénomination du cabinet d’avocats, à savoir « NK B. Legal Services ».

Appel

[53] Les parties voudront peut-être examiner la question suivante en appel : au regard du seul motif en vertu duquel la permission a été accordée, les principes de la justice naturelle ont-ils été violés? Le cas échéant, quels seraient la norme d’examen applicable et les recours éventuels appropriés?

[54] J’invite le demandeur et sa représentante à se pencher aussi sur la question suivante :

  1. (i) Le demandeur a-t-il reçu la lettre datée du 4 septembre 2014 qui provenait du Tribunal de la sécurité sociale ou a-t-il été informé de son existence par l’entremise de sa fille ou de sa ou ses représentantes? Si tel est le cas, quand l’a-t-il reçue ou a-t-il autrement appris que le membre de la division générale projetait de juger l’affaire au moyen du dossier en s’appuyant sur les documents déposés auprès du Tribunal de la sécurité sociale?
  2. (ii) Si la réponse à la première question est « non », comment le résultat du processus aurait-il été influencé par le fait que le demandeur n’avait pas reçu la lettre ou qu’il n’avait pas été informé autrement de la date limite de dépôt (telle qu’établie par le Tribunal de la sécurité sociale dans la lettre datée du 4 septembre 2014), étant donné que la division générale a examiné l’affaire en s’appuyant sur les documents déposés?
  3. (iii) Est-ce que N. (S.) B. / S. N. B., de NK B. Legal Services (dont l’ancienne adresse était le 100, X, bureau X, X (Ontario), cette adresse étant devenue, en date du 30 novembre 2011, le 2800, X, bureau X, à X, en Ontario) est la même personne que S. B. / N. B. / N. K. B., de C. B. Professional Corporation, au 450, X, bureau X, X (Ontario), comme la documentation le donne à penser?
  4. (iv) Sur quelle preuve s’appuie S. B. / N. B. / N. K. B., de C. B. Professional Corporation, au 450, X, bureau X, X (Ontario), pour affirmer qu’elle a communiqué ou correspondu avec le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision et le Tribunal de la sécurité sociale entre le 16 mai 2012 et le 14 avril 2015?   Le demandeur ou sa représentante devrait fournir des exemplaires de toute preuve, communication ou correspondance établie ou effectuée entre ces dates à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale.
  5. (v) L’audience devant le Tribunal de révision avait été ajournée afin de permettre au nouvel avocat du demandeur d’obtenir des documents additionnels. Quels dossiers ou documents additionnels ont été demandés (et reçus) à l’appui de la demande de pension d’invalidité du demandeur après le 16 mai 2012?
  6. (vi) Si le demandeur ou sa représentante ont reçu des dossiers ou documents additionnels après le 16 mai 2012, ont-ils fait des efforts pour les déposer auprès du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision ou du Tribunal de la sécurité sociale? Si oui, quand?  Le demandeur ou sa représentante devrait fournir à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale des preuves démontrant qu’ils ont fait de tels efforts.
  7. (vii) Après le 16 mai 2012, le demandeur ou sa ou ses représentantes) ont-ils communiqué ou correspondu avec l’intimé, ou lui ont-ils envoyé un exemplaire de tout document, y compris de tout document où étaient consignées des observations? Le demandeur ou sa représentante devrait fournir des exemplaires de tout document justificatif à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale.

[55] J’invite les parties, enfin, à fournir des observations écrites relativement à la forme d’audience, et à expliquer pourquoi l’appel devant la division d’appel devrait être instruit autrement qu’au moyen de questions et réponses écrites, sous réserve de toute autre observation que les parties pourraient vouloir présenter, y compris toute réponse à la présente décision relative à une permission d’en appeler.

[56] Je dois insister sur le fait que la procédure d’appel ne constitue pas une audience de novo. Ce que j’entends par là, c’est que je ne vais pas recevoir de dépositions de la part de témoins ni entendre aucun témoin, et je n’examinerai pas non plus aucune des questions de fond présentées à la division générale en ce qui concerne la demande de pension d’invalidité déposée par le demandeur.

Conclusion

[57] La demande est accueillie.

[58] La présente décision sur la demande de permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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