Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

O. D., l’appelante

Aurelio Acquaviva, l’avocat de l’appelante

Mary Martino, observateur du bureau de l’avocat de l’appelante

L. G., la mère de l’appelante (témoin)

Introduction

[1] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) de l’appelante le 28 juin 2010. L’intimé a rejeté la demande initialement et après révision. L’appelante a interjeté appel de la décision de révision auprès du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR) et son appel a été transféré au Tribunal de la sécurité sociale (le Tribunal) en avril 2013.

[2] Le présent appel a été instruit par téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. l’information au dossier, y compris la nature de l’information manquante et la nécessité d’obtenir des clarifications;
  2. le fait que l’appelante est représentée;
  3. le fait que le matériel nécessaire à une vidéoconférence est disponible dans la région où réside l’appelanteNote de bas de page 1;
  4. L’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent.

Droit applicable

[3] L’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité économique de 2012 prévoit que tout appel déposé auprès du BCTR avant le 1er avril 2013 et qui n’a pas été instruit par le BCTR est considéré comme ayant été déposé auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[4] L’alinéa 44(1)b) du Régime de pensions du Canada (la Loi) énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne touche pas une pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[5] Le calcul de la PMA est important puisqu’une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la fin de sa PMA ou avant cette date.

[6] Selon l’alinéa 42(2)a) de la Loi, une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une personne est considérée comme étant atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] La date de la PMA n’est pas contestée puisque les parties conviennent que cette période a pris fin le 31 décembre 2010, ce qu’a également conclu le Tribunal.

[8] Dans la présente affaire, le Tribunal doit déterminer s’il est plus probable qu’improbable que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date de la fin de sa PMA ou avant cette date.

Preuve

Documents

[9] L’appelante est née en X et a terminé sa 12e année. Elle a fréquenté un collège et obtenu un diplôme d’adjointe juridique.

[10] Dans son Questionnaire relatif aux prestations d’invalidité du RPC daté du 21 mai 2010, l’appelante indique qu’elle a cessé de travailler le 12 septembre 2008 comme représentante du service à la clientèle chez Benefits Plan Administrators Ltd (BPA). Elle avait commencé à y travailler le 4 février 2008. Elle signale qu’elle s’est blessée à l’œil droit au travail, qu’elle a subi une chirurgie, qu’elle est retournée au travail, où il y avait des travaux de construction, et qu’elle a eu une grave réaction allergique à la poussière, aux parfums et à la peinture. Elle a été mise en congé de maladie et a souffert d’anxiété et de stress. Elle a indiqué que son employeur chez BPA lui avait fait faire en partie le même type de travail, même après son opération. Elle a déclaré que la poussière était [traduction] « intolérable » et qu’il y avait énormément de toxines à son retour au travail. Elle dit qu’elle a demandé des mesures d’adaptation, mais que l’employeur l’a congédiée sans motif. Elle a déclaré qu’elle avait cessé de travailler en raison de la gravité de sa maladie attribuable à l’environnement, à la poussière en suspension dans l’air, aux produits chimiques, aux peintures toxiques et aux parfums, qui affectaient son système respiratoire et lui causaient un resserrement de la gorge. Elle a également décrit une grave allergie aux produits chimiques toxiques, aux peintures en aérosol et à la poussière, qui provoquent de l’asthme, ainsi que de graves allergies alimentaires aux arachides, aux noix et au poisson. Sa maladie provoque aussi des éruptions cutanées sévères pour lesquelles elle prend du Benadryl, qui cause des étourdissements et de la somnolence tout au long de la journée. Elle prend également du Gravol, qui rend les conditions de travail dangereuses. Elle a indiqué qu’elle ne peut pas soulever plus de 20 lb (9 kg) en raison du syndrome du canal carpien à la main droite. Son époux l’aide à faire l’entretien ménager. Elle éprouve parfois des problèmes de mémoire. Elle a du mal à se concentrer dans tout environnement où elle ne peut pas respirer. Elle prend occasionnellement du lorazépam pour l’aider à dormir. On lui a prescrit du lorazépam (deux fois par semaine, le soir, au besoin), du Benadryl deux à trois fois par semaine lorsqu’elle se trouve dans un environnement de bureau et du Flovent/Ventolin, au besoin. Elle a déclaré que depuis octobre 2007 elle a arrêté de faire du sport compte tenu des conditions environnementales, car elle pourrait perdre connaissance. L’appelante signale qu’elle a reçu des prestations régulières d’assurance-emploi entre le 9 novembre 2008 et le mois de septembre 2009.

[11] Dans le Questionnaire de mai 2010, l’appelante a confirmé que son médecin lui avait dit qu’elle pourrait retourner au travail. Elle a précisé la période où elle pouvait le faire comme étant [traduction] « du temps partiel indéterminé », mais a aussi fourni une date de mai 2010. En outre, elle a indiqué qu’elle comptait se mettre à la recherche d’un emploi ultérieurement, notant qu’elle souhaitait [traduction] « travailler à la maison si possible ».

[12] Selon l’appelante, elle a occupé les emplois suivants :

  • Du 7 avril 2004 au 16 décembre 2004 comme cuisinière à temps partiel chez Chicago.
  • Du 5 décembre 2005 au 27 avril 2006 comme adjointe chez Upper Canada Teacher.
  • Du 25 janvier 2007 au 16 novembre 2007 comme agente du service à la clientèle chez BBH Ontario Ltd.

[13] D’après la correspondance datée du 22 juillet 2014 soumise par l’avocat de l’appelante, cette dernière souhaitait préciser qu’elle ne pouvait plus travailler en raison de son état de santé depuis le 12 septembre 2008. Elle a ajouté qu’elle avait d’autres problèmes de santé : une douleur intense au genou qui aurait nécessité une intervention chirurgicale, des problèmes au genou, une douleur dorsale associée à une douleur au nerf sciatique irradiant le long de sa jambe, des maux de tête et des étourdissements, avec des crises d’anxiété et des palpitations cardiaques. Elle ne peut pas marcher ni se tenir debout plus de 20 minutes. Elle avait une capacité d’extension limitée, ne pouvant se plier qu’au-dessus des genoux, et a subi une opération au genou le 8 août 2014. Elle avait besoin d’aide pour ses besoins personnels. Sa famille effectuait toutes les tâches de nettoyage ardues. Son problème oculaire, pour lequel elle a subi une intervention chirurgicale, était sensible. Elle souffrait de troubles de la mémoire et devait tout écrire. Elle ne pouvait conduire que localement. Elle a consulté un psychologue, M. Mancini, pour des palpitations cardiaques et des crises d’anxiété, un spécialiste en orthopédie, le Dr Cameron, qui allait opérer son genou, et le Dr Basile, un neurologue, à Sunnybrook. Elle a déjà été hospitalisée à Sunnybrook pour une opération au genou en septembre 2013.

[14] Selon l’avocat de l’appelante, celle-ci souffrait quotidiennement de diverses allergies environnementales avec des effets secondaires, dont des pertes de conscience, des troubles respiratoires, des problèmes d’équilibre, des étourdissements, de la fatigue, des crises d’anxiété et des évanouissements. Elle souffrait également de névralgie sciatique. Elle ne pouvait pas dormir et prenait des somnifères. Elle avait un grave problème au genou, qui aurait nécessité une deuxième opération le 28 août 2014. Elle souffrait aussi de dépression, d’anxiété, de crises d’anxiété et de problèmes émotionnels pour lesquels elle a dû consulter M. Mancini, psychologue.

[15] Dans le rapport médical du RPC daté du 7 mai 2010, le Dr Brown, médecin de famille de l’appelante, a diagnostiqué des allergies environnementales, un état d’anxiété et de panique et une ménorragie. Il a indiqué qu’elle éprouvait de plus en plus de problèmes liés aux allergies environnementales qui provoquaient des symptômes qu’elle était par la suite incapable de gérer en milieu de travail, ce qui la rendait inapte au travail [traduction] « à l’heure actuelle ». Il a déclaré que l’appelante avait des allergies environnementales et alimentaires. Elle ressentait aussi du stress du fait de sa réaction allergique qui provoquait un état d’anxiété et de panique. Elle a eu beaucoup de symptômes d’asthme et de rhinite en 2009 et 2010. Elle a récemment souffert d’urticaire. Il a indiqué qu’elle avait consulté un spécialiste de l’environnement, et qu’on lui avait prescrit un EpiPen, du Ventolin, du Flovent et du Benadryl.

[16] Le 23 octobre 2007, le Dr Langer, pédiatrie, a signalé que l’appelante fait de l’urticaire lorsqu’elle mange des noix et des fruits de mer.

[17] Dans un rapport daté du 6 novembre 2007, le Dr Grad, consultant en allergènes, a déclaré qu’il était convaincu que l’appelante a une allergie alimentaire qui lui cause de l’urticaire, même si ses tests cutanés étaient non concluants. Lors de nouveaux tests, elle a réagi aux noix et à d’autres aliments comme le chocolat, les fruits de mer, le poivre, l’ail et la moutarde. Elle devait éviter les aliments qui provoquaient des symptômes et devait être traitée au moyen d’antihistaminiques.

[18] Un examen fonctionnel respiratoire du 22 novembre 2007 était essentiellement normal.

[19] Dans un rapport du 10 novembre 2008 à la compagnie d’assurance-invalidité de l’appelante, le Dr Brown a indiqué que le diagnostic de l’appelante était en réaction à [traduction] « des allergènes/polluants/irritants en milieu de travail et un kyste dans le coin inférieur gauche de la paupière causé par la poussière en milieu de travail. » Il a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

En ce qui a trait aux limitations, ses symptômes sont liés directement aux polluants en milieu de travail et, compte tenu de la combinaison des symptômes susmentionnés, elle est incapable de se trouver dans ce milieu de travail. Il y a une situation de stress en milieu de travail. J’ai recommandé à la patiente de retourner dans un environnement propre et non stressant.

[20] Le Dr Brown a signalé que l’appelante attendait les résultats des examens fonctionnels respiratoires et qu’elle serait dirigée vers un spécialiste de l’environnement. Il a suggéré d’éviter les environnements de travail pollués ou stressants et de faire retirer son kyste à la paupière. Il ajouté ce qui suit [traduction] « En ce qui concerne le pronostic, je suggère un retour dans un environnement de travail propre, sec, exempt de stress et de parfum, où il n’y a pas de travaux d’installation de cloisons sèches, de poussière et de moisissures. »

[21] Un examen fonctionnel respiratoire du 20 novembre 2008 indiquait un volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) normal et un ratio VEMS/CVF limite. Il demeurait essentiellement inchangé par rapport à un examen fonctionnel respiratoire précédent datant d’octobre 2007.

[22] Dans un rapport du 23 décembre 2008, le Dr Grad a indiqué qu’il avait vu l’appelante pour de nouveaux tests d’allergie. Il n’a pu trouver aucune allergie alimentaire, mais a mentionné ce qui suit [traduction] «  Nous savons qu’elle en a et elle sera donc réévaluée l’année prochaine. »

[23] Dans un rapport du 30 décembre 2008, le Dr Langer a indiqué qu’il avait vu l’appelante. Celle-ci avait des antécédents de toux récurrents, en particulier en raison d’une aggravation des symptômes durant les travaux de construction au travail. Il a signalé qu’elle avait de légères difficultés respiratoires et une intolérance alimentaire et que certains aliments lui causaient de l’urticaire. Le plan de traitement consistait à éviter les aliments qui provoquaient des symptômes et d’avoir sur elle un EpiPen.

[24] Dans un rapport du 22 janvier 2009, le Dr Grad a confirmé que les nouveaux tests d’allergies n’avaient révélé aucune allergie alimentaire importante. Il a cependant confirmé que l’appelante était allergique au pollen, à la poussière et aux animaux de compagnie et signalé qu’elle devait continuer à éviter les aliments qui provoquent des symptômes.

[25] Dans un rapport du 26 janvier 2009, le Dr Brown a envoyé une lettre à la compagnie d’assurance-invalidité de l’appelante. Il a déclaré que les analyses de sang montraient clairement que l’appelante souffrait de graves allergies et que la poussière était l’un de ses allergènes importants. Il a indiqué ce qui suit [traduction] « Il est également clair qu’étant donné que son lieu de travail était en construction et « poussiéreux », dégageant des odeurs de peinture, etc., cet endroit serait très néfaste pour cette patiente. À part la poussière, mentionnons que les odeurs, les parfums, etc., sur les lieux travail causent des symptômes importants. » Il a ajouté ce qui suit :

[Traduction]

Les symptômes en milieu de travail étaient graves, récurrents et intolérables quotidiennement. Des symptômes dans les voies respiratoires inférieures et supérieures, des lésions kystiques oculaires, des maux de tête causés par une inflammation des sinus, une douleur aux sinus, des éternuements, des larmoiements, une toux et un essoufflement étaient tous présents et récurrents quotidiennement et faisaient qu’il lui était impossible de continuer à y travailler. Elle était donc inapte au travail à cet endroit.

[26] Une note du 19 mars 2009 du Dr Brown indiquait ce qui suit [traduction] « La patiente peut maintenant travailler à temps partiel 20 heures par semaine en tenant compte de considérations environnementales – lieu exempt de parfum, de noix, de poisson et de poussière. »

[27] Le 10 mai 2010, le Dr Langer a déclaré qu’il avait vu la patiente en octobre 2007 pour des problèmes d’éruptions cutanées et d’urticaire récurrents causés par la consommation de noix et de poisson. Il a ajouté qu’il l’avait vue en décembre 2008 pour une toux qui s’était aggravée après des travaux de construction au travail. Il a indiqué que l’exercice provoque de l’essoufflement. Il lui a recommandé d’éviter les aliments qui causent des symptômes et d’utiliser du Flovent et du Ventolin. Il a noté que les résultats de ses examens fonctionnels respiratoires étaient normaux.

[28] D’après un rapport de consultation anesthésique du 14 mai 2010, l’appelante était allergique à la pénicilline, au latex et à divers aliments qui, selon elle, lui font enfler la gorge. L’auteur du rapport a écrit ce qui suit [traduction] « À part cela, la patiente est en bonne santé et n’a aucune limitation quant à sa capacité fonctionnelle. » Elle a subi une laparoscopie diagnostique pour une douleur pelvienne chronique.

[29] Selon une note de consultation du cabinet d’un allergologue datant du 23 juin 2010, les analyses de laboratoire de l’appelante au sujet des allergies alimentaires indiquaient des résultats négatifs des tests de dosage des IgE spécifiques pour certains aliments. Une provocation orale supervisée était recommandée.

[30] Une radiographie pulmonaire du 22 février 2011 était normale.

[31] Le 18 avril 2011, le Dr Vadas, directeur de la division Allergies et immunologie clinique à l’hôpital St. Michael’s, a vu l’appelante. Il a déclaré que ses antécédents suggéraient fortement une rhinite vasomotrice et des déclencheurs vasomoteurs typiques. Il a indiqué que ses symptômes des voies respiratoires inférieures étaient typiques du syndrome du larynx irritable ou d’une dysfonction des cordes vocales. Il l’a dirigée vers le Dr Anderson à la clinique des troubles de la voix.

[32] Le 21 octobre 2011, le Dr Vadas a vu l’appelante en suivi. Il a noté qu’elle avait consulté le Dr Anderson, lequel estimait qu’elle était atteinte du syndrome du larynx irritable. Il a déclaré qu’elle avait demandé une lettre à l’appui de prestations d’invalidité de longue durée. Il a signalé qu’il lui avait rappelé que ses examens récents ne démontraient aucune allergie. Il a également noté qu’elle souffrait d’une rhinite vasomotrice qui, selon lui, [traduction] « est une affection non allergique qui ne mène pas à l’invalidité ». Il a précisé que le syndrome du larynx irritable ne constitue pas une affection allergique, mais qu’elle est déclenchée par une exposition à des irritants.

[33] Le 11 janvier 2012, Mme Merrick, orthophoniste, a signalé que l’appelante avait depuis cinq ans des antécédents de symptômes correspondant au syndrome du larynx irritable, car elle présentait un essoufflement, un resserrement de la gorge, une toux et une dysphonie en réaction à des déclencheurs liés aux odeurs. Elle avait d’autres symptômes qui ne correspondaient pas au syndrome du larynx irritable, notamment de l’urticaire, des maux de tête et des étourdissements en réaction à des irritants liés aux odeurs et à certains aliments. Selon Mme Merrick, ses symptômes semblaient davantage correspondre à une réaction allergique (urticaire). Mme Merrick croyait que l’appelante présentait un élément du syndrome du larynx irritable et a recommandé des séances de thérapie axées sur des stratégies comportementales pour l’aider à contrôler certains de ses symptômes de gorge.

[34] Le 10 décembre 2012, le Dr Brown a écrit à l’avocat de l’appelante. Il a déclaré que le diagnostic de l’appelante était [traduction] « plutôt mixte ». Elle souffrait d’allergies importantes : une rhinite allergique et de l’asthme liés à de multiples allergies environnementales, dont la poussière, et aussi d’un possible syndrome du larynx irritable, qui semble s’être développé en réaction à des irritants liés aux odeurs. Lorsqu’elle est exposée à de fortes odeurs, elle a des maux de tête, des étourdissements et la sensation que sa gorge se resserre suivie d’une toux et de la difficulté à parler. Elle a certaines difficultés respiratoires et fait de l’urticaire. Le Dr Brown a indiqué ce qui suit :

[Traduction]

Le lieu de travail (de l’appelante) semble jouer un rôle important dans l’aggravation et l’intensité croissante de ce problème. Il a été noté que, lorsque les problèmes ont commencé en 2008, son lieu de travail était en construction et qu’il y avait beaucoup de poussière et d’odeurs liées aux émanations de peinture à l’endroit où elle travaillait. Cela était très néfaste pour elle et semble avoir créé ce cycle d’allergies environnementales très important.

La patiente est maintenant très sensible aux allergènes, principalement ceux liés aux odeurs, aux parfums, etc., ainsi qu’à la poussière. Il lui est très difficile de trouver du travail dans tout environnement normal, car elle devrait travailler dans un environnement très fermé, où la poussière et les parfums sont étroitement contrôlés.

[35] Le 15 octobre 2013, le Dr Basile, neurologue, a vu l’appelante pour des douleurs au cou et au bas du dos accompagnées de symptômes radiculaires dans la jambe gauche. Il a soulevé la possibilité d’une radiculopathie cervicale ou lombo-sacrée secondaire à un accident de la route récent. Il a noté qu’elle avait subi récemment une opération au genou gauche – une ostéotomie le 5 septembre 2013. Il a indiqué qu’elle ne travaillait pas et qu’elle avait lancé une entreprise de confection de gâteaux à domicile quelques années plus tôt. Il a signalé que son problème actuel au cou et au bas du dos avait commencé il y a de nombreuses années. Toutefois, le 8 août 2013, l’appelante a été impliquée dans un accident de la route lorsqu’un camion gros porteur a percuté le côté de sa voiture. Depuis ce temps, elle se plaignait de douleurs de plus en plus fortes au cou et au bas du dos, mais aussi au bras et à la jambe gauches et de fourmillements. Il a noté qu’elle avait mentionné qu’elle ne pouvait pas marcher en raison de sa blessure récente au genou gauche et qu’elle marchait avec des béquilles. Il a également noté qu’elle avait des antécédents de maux de tête et indiqué ce qui suit [traduction] « Toutefois, ceux-ci étaient rares et ne la dérangeaient pas. Depuis l’accident, la patiente dit qu’elle a trois ou quatre maux de tête par semaine accompagnés de nausées… » Le Dr Basile a recommandé de la physiothérapie et de la massothérapie.

[36] Le 22 septembre 2014, l’avocat de l’appelante a présenté un rapport sur les antécédents médicaux de la patiente. Le traitement couvrait la période antérieure et postérieure à la PMA.

[37] Le 1er octobre 2014, l’avocat de l’appelante a présenté d’autres documents au Tribunal. Ils consistaient en un rapport psychologique daté du 16 août 2010 de M. Keeling, psychologue agréé, et en une déclaration sur les répercussions présentée par l’appelante et son époux.

[38] Selon M. Keeling, il a évalué l’appelante le 8 juin 2010. Il a noté qu’elle disait souffrir de graves réactions allergiques attribuables à son lieu de travail en juillet/août 2008 et qu’elle avait subi une chirurgie à l’œil droit en septembre 2008. Depuis ce temps, elle se plaignait d’une moins bonne vision et avait développé plusieurs problèmes psychologiques, comme une dépression modérée et une anxiété grave qui l’empêchaient de retourner à son niveau de fonctionnement antérieur et qui avaient entraîné des ajustements interpersonnels difficiles. Elle a signalé que son ancien employeur avait pris des mesures d’adaptation à l’égard de son allergie aux parfums et demandé à tous les employés de s’abstenir de porter du parfum. En mai 2008, elle a été avisée des travaux de rénovation dans l’immeuble. Compte tenu de son allergie à la poussière, elle a demandé à être déplacée. Au cours des rénovations de l’été 2008, sa demande a été refusée et son gestionnaire lui a suggéré de prendre du Benadryl pour ses allergies. Le médicament la rendait somnolente et nuisait à ses capacités cognitives. En raison de ses allergies, elle souffrait quotidiennement d’urticaire et de nausées. L’air rempli de poussière s’infiltrait dans son œil droit, causant une sensation de brûlure, de la rougeur et une vision floue. Elle a continué à travailler pendant une brève période parce qu’elle craignait de perdre son emploi. En septembre 2008, elle ne pouvait plus continuer à travailler, car son état s’était exacerbé à la suite d’une réaction allergique à l’utilisation d’aérosols au travail. Elle a subi une chirurgie à l’œil droit en septembre 2008, et des particules de mucus et de poussières ont été trouvées dans son œil, sources d’infection. Elle n’est pas retournée au travail après septembre 2008 compte tenu de ses symptômes d’allergie persistants. En mars 2009, elle souhaitait retourner au travail à condition que ses fonctions soient modifiées et a montré à l’employeur une liste des [traduction] « changements liés à la sensibilisation aux allergies » dont elle aurait besoin, mais ils n’ont pas été en mesure de répondre à ses demandes, comme celle de ne pas faire cuire de fruits de mer/crabes dans la cuisine. Elle a précisé qu’elle a été congédiée sans motif valable en mars 2009. Elle a signalé qu’elle était actuellement à la recherche d’un emploi, mais qu’elle se sentait découragée et stressée, car elle était incapable de trouver un lieu de travail qui répondrait à ses besoins. Elle a indiqué qu’elle ressentait de la détresse parce qu’on aurait pu [traduction] « facilement lui épargner » du stress si son employeur avait été disposé à répondre à ces simples demandes, comme l’envoyer à un autre étage. Elle a déclaré qu’elle croit maintenant que son corps est plus « vulnérable » et plus sensible aux allergènes depuis qu’elle a été exposée à un environnement poussiéreux.

[39] Durant l’examen psychologique effectué par M. Keeling, l’appelante a décrit qu’elle était accablée et frustrée par la perte de son emploi. Elle se sentait inutile et avait désespérément besoin de trouver un emploi. Elle se sentait aussi épuisée et manquait de motivation pour faire ses tâches ménagères. Elle a signalé qu’elle n’avait aucune tolérance, qu’elle perdait facilement patience, qu’elle pleurait et qu’elle se sentait découragée. Elle a aussi décrit des symptômes d’anxiété. Elle a indiqué qu’elle était actuellement à la recherche d’un emploi, mais qu’elle se sentait découragée et stressée, car elle était incapable de trouver un lieu de travail qui répondrait à ses besoins. Elle a expliqué qu’elle était découragée parce qu’elle avait tenté de rester une travailleuse active à son ancien lieu de travail, mais qu’elle était incapable de le faire en raison de ses réactions physiques. Elle croyait qu’on aurait pu lui épargner de la détresse si son employeur avait été disposé à répondre à sa simple demande (comme l’envoyer à un autre étage). Elle estimait que son corps était plus vulnérable et plus sensible aux allergènes depuis qu’elle avait été exposée à un environnement poussiéreux. Elle a dit qu’elle se sentait fatiguée la plupart du temps, qu’elle avait un sommeil perturbé et un sentiment d’anxiété généralisée et des ruminations.

[40] Selon M. Keeling, les tests psychologiques indiquaient une détresse émotionnelle cliniquement importante. Les résultats des examens étaient considérés comme étant une mesure valide et fiable du niveau de fonctionnement psychologique actuel de l’appelante. Dans l’inventaire d’anxiété de Beck, son profil correspondait aux niveaux d’anxiété graves se répercutant sur son fonctionnement physique et mental. Elle a signalé qu’elle était modérément incommodée par des engourdissements ou des fourmillements dans la main droite, qu’elle était incapable de se détendre, qu’elle craignait que le pire n’arrive, qu’elle avait des étourdissements ou des vertiges, qu’elle était terrifiée et nerveuse avec un tremblement des mains, qu’elle avait peur de perdre le contrôle et de mourir et enfin qu’elle était faible et craintive. À l’inventaire d’anxiété de Beck – II, elle a obtenu une cote moyenne de dépression. Elle dit ressentir le fort sentiment d’être punie, constater des changements modérés dans ses habitudes de sommeil et sa fatigue, ainsi qu’une tristesse, un pessimisme et une baisse de pression faibles. Sur l’échelle P3, qui recense les patients qui souffrent d’une déstresse émotionnelle associée principalement à des plaintes de douleur et fournit de l’information sur la fonction sur trois échelles cliniques (la dépression, l’anxiété et la somatisation), l’appelante a obtenu un score moyen d’anxiété et de dépression en lien avec la douleur. Cela tendrait à indiquer qu’elle ressent souvent une fatigue chronique, de la tristesse, de l’apathie, des troubles de l’appétit et du sommeil associés à de la douleur, à des sentiments intenses, à de l’impatience et à de l’irritabilité.

[41] M. Keeling a conclu que depuis qu’elle avait été exposée à des allergènes au travail durant les travaux de rénovation dans l’immeuble en juillet/août 2008, l’appelante se plaint d’une vision floue, d’irritabilité, d’anhédonie, de fatigue, d’anxiété et de dépression. Elle avait des sautes d’humeur et éprouvait des sentiments de peur, de colère, de découragement, de tristesse et d’irritabilité et était incapable de trouver un travail en raison de ses limitations et de ses allergies. Elle était constamment stressée, anxieuse, triste, tendue et irritable, a dû abandonner la plupart de ses activités habituelles et passait le plus clair de son temps à s’inquiéter de son avenir professionnel. Des tests psychologiques indiquaient une détresse émotionnelle cliniquement importante. M. Keeling a diagnostiqué un trouble anxieux. À l’axe  IV, il a déclaré ce qui suit [traduction] « Incapacité d’occuper un emploi. Exposition à un environnement de travail physique stressant. » Il a décrit de graves allergies environnementales et déterminé que son évaluation globale du fonctionnement (EGF) était de 55. Il a indiqué que, sur le plan du diagnostic, l’appelante ressentait de l’anxiété et du découragement depuis qu’elle avait perdu son emploi en mars 2009. Les lésions oculaires avaient causé une détresse émotionnelle. Il a indiqué que depuis l’incident, elle n’avait pas été en mesure de travailler parce qu’elle n’avait pas réussi à trouver un emploi au cours des deux dernières années. Son incapacité de travailler lui a fait ressentir du découragement, qui a conduit à une grave perte fonctionnelle. Il a écrit ce qui suit :

[Traduction]

Ce travail stressant a causé (à l’appelante) une détresse émotionnelle, et elle a éprouvé plusieurs symptômes de dépression et d’anxiété. Ces symptômes ne semblent pas exacerbés par un axe I ou un axe II préexistant. Il est clairement démontré qu’une anxiété et une dépression (de niveau léger) interfèrent avec son fonctionnement. Sa dépression et son anxiété de plus en plus profondes sont clairement secondaires au fait qu’elle n’est pas en mesure de travailler depuis septembre 2008. Sa capacité d’adaptation et son fonctionnement avant cet incident de travail semblent avoir été adéquats.

Depuis qu’elle a perdu son emploi, elle ressent une insécurité plus forte, ainsi que du désespoir à propos de son avenir et de son désengagement. Il est évident qu’elle (l’appelante) éprouve une grande détresse en raison de cet incident. Tout semble indiquer que la dépression et l’anxiété interfèrent avec son fonctionnement. Son anxiété de plus en plus profonde est clairement secondaire à l’incident en question.

[42] M. Keeling a recommandé de 15 à 20 séances de traitement psychologique pour lutter contre l’anhédonie et les sentiments de découragement, de colère et de frustration. Compte tenu du trouble psychologique cliniquement important de l’appelante, il a déclaré qu’un traitement psychologique serait nécessaire pour remédier aux séquelles psychologiques de son incident de travail de juillet 2008. Il a précisé que vu son niveau de réceptivité, d’engagement à se faire traiter et de son réseau de soutien social, son pronostic de traitement était vraisemblablement assez bon.

[43] Le 7 octobre 2014, le Dr Brown a signalé que l’appelante avait des problèmes persistants d’allergies environnementales plusieurs fois par semaine comportant des déclencheurs communs [traduction] « même au supermarché, où il y a des parfums et des eaux de toilette ». Il a noté des symptômes habituels d’étouffement et de difficulté à respirer. Elle prenait du Benadryl. Elle avait un EpiPen, qu’elle n’a pas eu à utiliser. Elle l’avait utilisé pour la dernière fois trois ans plus tôt en lien avec un aérosol. Selon le Dr Brown, elle était incapable de fonctionner après avoir pris 25 mg de Benadryl parce que cela la rendait somnolente. Elle ne pouvait pas travailler en raison de graves réactions au parfum. Elle était incapable de [traduction] « gérer l’entrevue » et d’exercer une occupation rémunératrice compte tenu de la diversité des allergènes.

Témoignage oral

[44] Elle est née au Canada.

[45] Elle est âgée de 46 ans.

[46] Elle a dit qu’elle avait commencé à travailler à 16 ans et avait arrêté à 41 ans en septembre 2008.

[47] Elle travaillait comme représentante du service à la clientèle chez Benefits Plan Administrators. Le lieu de travail était en construction. Comme la poussière s’infiltrait, elle a eu une grave réaction allergique et a dû subir une chirurgie à l’œil droit (kyste). Elle a aussi eu une réaction allergique à la peinture en aérosol. L’employeur n’a pas tenté de répondre à ses besoins.

[48] La réaction allergique, déclenchée par la poussière et les gens qui portaient du parfum et de l’eau de toilette, lui causait de l’urticaire et des problèmes respiratoires.

[49] Elle a commencé à avoir des réactions allergiques en 2007 lorsqu’elle travaillait à l’aéroport et qu’elle était exposée à des parfums et à des eaux de toilette. On lui a dit qu’elle avait un problème respiratoire.

[50] Elle souffre des mêmes allergies depuis 2010.

[51] Elle a vu M. Keeling en août 2010 pour une dépression attribuable à une réaction allergique chronique.

[52] Avant de développer une sensibilité à des facteurs environnementaux, elle sortait, participait à des activités familiales, allait au restaurant et était active avec les enfants. Elle ne peut pas le faire maintenant. Son environnement a changé radicalement.

[53] Elle a consulté son médecin de famille et de nombreux spécialistes. Le Dr Vadas lui a conseillé de parler à son médecin. Il a dit que son affection était grave et [traduction] « très rare ». Le Dr Brown, son médecin de famille, et le psychologue, qui savaient qu’elle souffrait d’anxiété et de dépression, lui ont dit de présenter une demande des prestations d’invalidité du RPC.

[54] Elle souffre également de problèmes au cou et aux dos. Toutefois, sa principale invalidité est de nature environnementale. Elle perd connaissance, souffre de somnolence, a des étourdissements, des maux d’estomac, des nausées et de l’urticaire lorsqu’elle a une crise.

[55] Ses médecins lui ont recommandé de prendre 25 à 50 mg de Benadryl, des comprimés de Tylenol ou d’Advil (600 mg) et de porter sur elle un EpiPen pour ses allergies alimentaires. Elle prend des antidépresseurs, du lorazépam, un médicament pour dégager ses sinus et du prednisone. Elle prenait ces médicaments en 2010. Elle continue à prendre les mêmes médicaments. Elle voit toujours des spécialistes à l’hôpital St. Michael’s.

[56] Ses médecins ne lui ont pas dit qu’elle peut travailler. Lorsqu’elle a postulé des emplois, elle a eu du mal à faire des entrevues parce des gens au lieu de travail portaient de l’eau de toilette ou du parfum. Ils disaient [traduction] « désolés, mais cette place n’est pas pour vous » et aussi qu’ils ne pouvaient pas donner suite à ses demandes et qu’elle représenterait un problème pour eux. Elle l’a fait savoir à ses médecins.

[57] Elle souffre quotidiennement en raison de son dos, de ses genoux et d’une douleur musculo-squelettique. Elle se sent également fatiguée et nauséeuse.

[58] Ses douleurs aux dos et aux genoux et ses douleurs musculaires ont commencé en 2010.

[59] Son état de santé a des répercussions sur sa famille et ses amis. Elle ne peut pas participer à des activités familiales. Ils ne vont pas s’empêcher de porter du parfum et de l’eau de toilette et ne comprennent pas vraiment ce qu’elle vit à moins qu’ils ne la voient faire une crise, comme un choc anaphylactique.

[60] Elle peut uniquement être dans un espace confiné comme une « bulle », où elle n’est exposée à aucun déclencheur.

[61] Son affection « met sa vie en danger » et ne peut être guérie. Elle s’évanouit et trouve très frustrant qu’une personne doive mourir avant que l’on comprenne sa situation.

[62] Elle n’a pas participé à l’audience de mai 2015 parce qu’elle avait été exposée à de l’eau de toilette la veille. L’ami de son fils s’est présenté à la porte, et elle l’a ouverte. Il portait une eau de toilette ou une lotion et se ne trouvait qu’à deux pieds d’elle. Quelques secondes plus tard, elle s’est évanouie. L’odeur était tellement forte qu’elle l’avait étouffée. Elle n’avait plus de Benadryl. Elle est allée à l’hôpital. Il ne faut que quelques minutes à son œsophage pour se fermer en présence d’un déclencheur.

[63] Elle est aussi très déprimée. Sa vie la rend très triste. Elle ne peut pas faire les choses qu’elle avait l’habitude de faire. À la demande de son avocat, l’appelante a lu des extraits du rapport psychologique d’août 2010 de M. Keeling, qui décrit les répercussions de son état de santé sur son état mental.

[64] Elle n’a pas décrit son état mental dans le Questionnaire. Personne ne lui a dit comment le remplir. Elle l’a rempli du mieux qu’elle le pouvait.

[65] Elle ne travaille pas actuellement. Elle a travaillé pour la dernière fois en 2008.

[66] Entre septembre 2008 et août 2010, elle a tenté de trouver un autre emploi. Elle est allée à des entrevues, dont certaines auxquelles elle n’a pu rester en raison des eaux de toilette dans l’environnement.

[67] Entre août 2010 et le 31 décembre 2010, elle n’a pas cherché d’emploi. Elle était déprimée et anxieuse, car on lui avait dit qu’elle représenterait un problème pour d’éventuels employeurs.

[68] Durant une journée normale, elle se réveille, prépare le petit-déjeuner et prend ses médicaments qui la rendent somnolente. Sa mère lui apporte son aide.

[69] Elle a un époux et trois enfants.

[70] Sa mère fait les tâches ménagères. Son fils tond le gazon et s’occupe du déneigement.

[71] Elle n’a jamais exploité une entreprise de confection de gâteaux et de décoration à domicile. Elle allait à un magasin acheter des aliments spéciaux pour ses allergies alimentaires. Le fournisseur ne vend pas directement au public et lui a dit d’obtenir un permis principal d’entreprise pour pouvoir faire des achats. Elle a expliqué ses allergies et son intention de cuisiner exclusivement pour elle-même. Le fournisseur lui a dit de communiquer avec l’Agence du revenu du Canada (ARC) pour expliquer sa situation. Elle l’a fait, a expliqué ses allergies, et l’ARC lui a signalé qu’elle n’avait pas à demander un numéro de TPS parce qu’elle ne tirait pas profit de cette activité et qu’elle achetait les aliments pour son propre usage. Elle n’a pas enregistré un numéro de TPS ou d’entreprise. Elle ne possédait qu’un four alimenté au gaz (pas à convection). Elle n’a jamais vendu au public ou tiré de revenus de son entreprise enregistrée. Elle n’a jamais eu non plus de problèmes avec l’ARC en ce qui concerne sa déclaration de revenus. Ils n’ont pas indiqué qu’elle travaillait à son compte ou qu’elle tirait des revenus d’une entreprise.

[72] Elle a eu un accident de la route en 2013. Ses allergies environnementales n’ont aucune incidence sur son rétablissement après l’accident de la route. Sa principale affection incapacitante concerne ses allergies environnementales chroniques aux parfums, aux eaux de toilette et aux aérosols.

[73] Elle demeure invalide depuis 2010 même si elle s’est remise de l’accident de la route.

[74] Elle a présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC en raison de sa maladie environnementale. Son affection est très grave. Sa demande a été rejetée parce que son invalidité n’a pas été prise au sérieux. Elle doit prendre des médicaments. Son affection ne disparaîtra pas. Elle est exposée à des déclencheurs dans les magasins/allées et doit porter un masque. Elle ne peut pas continuer à travailler, quel que soit l’environnement de travail. Elle doit être placée dans une pièce où on lui fournit des mesures d’adaptation. Un tel emploi n’existe pas. Même les hôpitaux peuvent uniquement mettre une affiche sur laquelle on demande aux gens de s’abstenir de porter du parfum, mais ne peuvent pas garantir que les gens le feront. Son système immunitaire est très faible. Elle aimerait pouvoir prendre une pilule pour guérir. Elle est aussi très déprimée. Son état de santé a des répercussions sur sa famille.

[75] Le Tribunal a confirmé auprès de l’appelante qu’elle avait lu le rapport de M. Keeling et qu’elle en acceptait le contenu.

[76] Le Tribunal avait quelques questions à poser à l’appelante au sujet de la divergence apparente entre l’information qu’elle avait fournie dans son Questionnaire, où elle a indiqué qu’elle avait subi une chirurgie oculaire et qu’elle était retournée au travail, et le rapport de M. Keeling d’août 2010, dans lequel il a indiqué qu’elle avait subi une chirurgie oculaire en septembre 2008 et qu’elle n’était jamais retournée au travail.

[77] Selon l’appelante, elle est retournée au travail après la chirurgie pendant un ou deux jours, et l’employeur lui a dit qu’il ne pourrait pas répondre à ses demandes.

[78] Elle a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi entre novembre 2008 et septembre 2009. Elle ne souscrit pas à l’affirmation faite par son avocat dans son observation (GT2-1, selon laquelle elle ne pouvait pas travailler depuis septembre 2008. L’avocat a rappelé au Tribunal qu’entre 2008 et 2010, l’appelante cherchait du travail.

[79] Le Tribunal a rappelé à l’appelante qu’elle avait déclaré dans son Questionnaire qu’elle pourrait commencer à chercher du travail en date de mai 2010, y compris à travailler à domicile si possible, et il lui aussi demandé si elle avait acquis un permis d’entreprise en mai 2010 pour cette raison. Elle a réitéré qu’elle avait acquis le permis d’entreprise uniquement pour acheter des produits d’un fournisseur et qu’elle n’avait pas vendu de pâtisseries au public.

[80] Elle a déclaré que les problèmes liés à sa maladie environnementale avaient commencé lorsqu’elle travaillait à l’aéroport, en 2007. Elle avait alors été exposée à des parfums, à des eaux de toilette, à des aérosols, etc.

[81] Elle n’a jamais déposé une plainte auprès du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario contre son ancien employeur, BPA, pour avoir fait preuve de discrimination envers elle en raison de son invalidité et pour ne pas avoir pris de mesures d’adaptation à son endroit. Elle n’a jamais poursuivi non plus BPA pour son congédiement injustifié. Lorsqu’ils l’ont congédiée, ils n’ont jamais rien inscrit dans son dossier et ont simplement indiqué qu’ils ne pouvaient pas répondre à ses demandes. Elle n’occupait pas un poste syndiqué.

[82] Le Tribunal a rappelé à l’appelante que son avocat avait signalé dans ses observations qu’elle avait consulté un psychologue, M. Mancini, et lui a demandé quand elle avait commencé à le voir. Au début, elle ne s’en souvenait pas, puis s’est ensuite souvenue de l’avoir consulté entre janvier et juillet 2014. Elle n’a pas eu à payer les consultations avec M. Mancini. Les services étaient couverts par l’assurance-santé de l’Ontario, sur la recommandation du médecin de famille. Elle a cessé de voir M. Mancini après son opération. L’avocat a confirmé qu’aucun rapport de M. Mancini n’avait été déposé en preuve.

[83] Le Tribunal a questionné l’appelante sur la pièce GT10-4, le rapport du Dr Basile, neurologue, qui a indiqué dans les antécédents sociaux que l’appelante avait lancé une entreprise de confection de gâteaux à domicile il y a quelques années. L’appelante affirme qu’elle lui avait dit qu’elle cuisinait pour elle-même à domicile, qu’elle avait enregistré une entreprise à son nom pour pouvoir aller chez un fournisseur. Elle croit qu’il l’a mal comprise.

[84] Le Tribunal a demandé à l’appelante si, au moment où elle cherchait un emploi entre septembre 2009 et août 2010, elle travaillait à domicile. Elle a déclaré qu’elle avait passé de nombreuses entrevues, qu’elle avait demandé si elle pouvait travailler de chez elle et indiqué qu’elle avait un ordinateur à la maison. Les intervieweurs disaient qu’ils n’avaient pas d’emplois qui permettaient de travailler à domicile. L’appelante a expliqué qu’elle n’est pas une experte en assurances contre les accidents qui peut travailler de la maison. Le Tribunal lui a demandé si elle aurait pu travailler de chez elle si on le lui avait offert. Elle a indiqué qu’elle ne croyait pas qu’elle pourrait le faire, précisant qu’elle devrait quand même aller au bureau. Appelée à dire si elle pourrait faire ce type de travail si elle n’était pas tenue d’aller au bureau de l’employeur, par exemple pour accomplir du travail transmis par ordinateur, elle a déclaré qu’elle ne s’y connaît pas bien en informatique.

[85] Le Tribunal a demandé à l’appelante si elle avait suivi les 15 à 20 séances de traitement que M. Keeling avait recommandées. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas suivi les séances avec M. Keeling, car elle aurait dû en assumer elle-même les coûts. Elle a attendu d’être dirigée vers un autre spécialiste, c’est-à-dire M. Mancini, dont les services étaient couverts par le régime d’assurance-santé de l’Ontario.

[86] En décembre 2010, elle vivait avec son époux et ses trois enfants, âgés respectivement de 19, 14 et 13 ans.

[87] En décembre 2010, sa mère et son fis préparaient les repas. Ses médicaments la fatiguaient, lui causaient des maux d’estomac ainsi que des effets secondaires. Sa mère s’occupait de la cuisine, du ménage, de la vaisselle, de la lessive et de l’aspirateur.

[88] Son époux et son fils faisaient l’épicerie. Elle pouvait occasionnellement aller faire exécuter ses ordonnances étant donné qu’elle devait présenter une pièce d’identité. Elle souscrivait à l’observation de son avocat, selon laquelle elle allait occasionnellement faire l’épicerie, mais devait faire attention aux allées qu’elle empruntait en raison des odeurs dégagées par les aliments ou les produits de nettoyage.

[89] En décembre 2010, elle ne conduisait pas et ne conduit pas non plus actuellement. Le Tribunal a demandé à l’appelante de commenter l’observation de son avocat, dans laquelle il a indiqué qu’elle conduit occasionnellement en se faisant accompagner. Elle a déclaré que c’était exact. Elle conduisait par exemple pour aller chercher ses médicaments avec quelqu’un à ses côtés.

[90] En décembre 2010, elle n’a pas assisté à des rencontres entre les parents et les enseignants pour ses filles. Son époux y est allé.

[91] Elle n’emmenait pas ses enfants à des centres communautaires, à des rendez-vous ou à des parcs. Son époux les y emmenait.

[92] Elle renouvelle son permis de conduire en allant à un petit bureau du ministère des Transports situé à X.

[93] Lorsqu’elle se rend chez le médecin/dentiste, ceux-ci sont au courant de ses problèmes et la mettent dans une petite zone d’attente isolée. Lorsqu’elle entre dans le bureau, elle porte un masque.

[94] Elle va acheter des chaussures/vêtements dans de petits magasins situés dans la région de X et porte un masque.

[95] La dernière fois qu’elle est allée à l’église, c’était probablement en 2010. Une fois elle a assisté à un service religieux, a senti des odeurs d’eau de toilette et est sortie.

[96] Son époux s’occupe des transactions bancaires.

[97] Elle ne peut pas aller au restaurant en raison de ses graves allergies.

[98] Le Tribunal a demandé à l’appelante de clarifier les circonstances survenues à la première audience d’appel ajournée, où elle a senti une forte odeur de produits de nettoyage dans la salle de toilettes du hall de l’hôtel et a eu une réaction indésirable. Le Tribunal a rappelé à l’appelante que lorsqu’elle était ensuite entrée dans la salle d’audience, elle avait demandé au membre et à son avocat si quelqu’un portait de l’eau de toilette et son avocat avait indiqué qu’il en avait mis ce matin-là. Le Tribunal a demandé à l’appelante si sa réaction indésirable était attribuable à l’odeur des produits de nettoyage dans la salle de toilettes, à l’eau de toilette de son avocat ou à un mélange des deux. Elle a déclaré que c’était attribuable à un mélange des deux. Elle a ajouté qu’il y avait une forte odeur toxique dans la salle de toilettes (elle portait un masque en y entrant) et noté qu’elle n’avait jamais rien connu de tel auparavant. Elle a déclaré qu’elle pensait que quelqu’un l’avait fait intentionnellement. Elle a dit que son avocat portait une lotion après-rasage qu’elle pouvait sentir même s’il l’avait appliquée beaucoup plus tôt ce matin-là.

[99] Le Tribunal a signalé à l’appelante qu’avant le début de l’audience, le membre se rappelait l’avoir vue assise aux côtés de son avocat dans le hall de l’hôtel, à l’extérieur de la salle d’audience, et qu’elle ne semblait avoir aucun type de réaction à ce moment-là et il lui a demandé de fournir une explication. Elle a déclaré qu’elle se trouvait à quelques pieds de lui. C’est après avoir pénétré dans la salle de toilettes qu’elle a eu une réaction. Si elle n’avait pas pris de Benadryl, elle aurait dû se rendre à l’hôpital. Après être entrée dans la salle d’audience, elle a senti la lotion après-rasage que son avocat portait et à laquelle elle a aussi eu une réaction. Elle a confirmé que, comme elle était assise à quelques pieds de lui dans le hall de l’hôtel, la lotion après-rasage n’avait pas eu d’effets négatifs sur elle. Toutefois, après avoir senti le produit de nettoyage dans la salle de toilettes, puis la lotion après-rasage dans la salle d’audience, cela avait eu des effets négatifs sur elle.

[100] La mère de l’appelante a témoigné. Une grande partie de son témoignage était en italien et il appert que l’avocat de l’appelante traduisait ce qu’elle disait. Le Tribunal a accordé moins de poids à son témoignage, car il n’a pas été traduit par un interprète agréé impartial.

[101] Elle est la mère de l’appelante.

[102] Elle connaît l’état de santé de l’appelante. Elle sait qu’elle est malade. Elle l’est depuis 2010. Elle s’occupe de l’appelante depuis ce temps. Elle s’occupe de tout, y compris du ménage, et espère qu’un jour elle ira mieux.

[103] Elle fait la cuisine et le ménage. Elle s’occupe de tout, car l’appelante est malade. Elle a commencé à l’aider en 2010. La maladie de l’appelante a eu des répercussions sur elle et la famille. Ils souffrent tous du fait de l’invalidité de l’appelante. L’appelante ne peut pas participer aux réunions de famille, aux anniversaires ou à tout autre événement important.

[104] Elle ne croit pas que l’appelante puisse retourner au travail. Depuis 2010, elle n’a constaté aucun changement chez l’appelante.

[105] L’appelante ne peut pas passer Noël avec la famille.

Observations

[106] L’appelante fait valoir qu’elle est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Ses allergies sont si fortes que tout type d’odeur déclenche une réaction allergique qui resserre sa gorge au point qu’elle ne peut plus respirer.
  2. Elle ne peut pas retourner dans un environnement de travail où il y a constamment des odeurs différentes.
  3. Personne ne l’embauchera. Aucun employeur n’acceptera ses absences constantes et ses problèmes de santé. Il est évident qu’elle serait un fardeau et une gêne pour tout employeur.
  4. Elle a été forcée d’arrêter de travailler en raison de son état de santé en 2008.
  5. Son invalidité l’empêche de travailler et a des répercussions sur sa vie quotidienne.
  6. À l’audience d’octobre 2014, elle a eu une réaction allergique aux odeurs dans la salle de toilettes. Les effets ont été si forts qu’elle ne s’est pas rétablie suffisamment pour poursuivre l’audience. Il s’agit d’une affection environnementale et invalidante déclenchée par n’importe quel irritant.
  7. Son affection s’est manifestée en 2008 lorsque son employeur a effectué des rénovations au bureau. Il y a avait de la poussière, des odeurs, des aérosols, de la peinture et d’autres irritants, et cela a déclenché son affection. Elle a demandé à être déplacée ailleurs dans l’immeuble. Cela ne s’est pas fait. Elle était malade et s’est absentée du travail. Son employeur l’a congédiée parce qu’elle n’était plus fiable, productive et en santé. Elle a tenté de trouver du travail auprès d’autres employeurs, mais n’en a trouvé aucun qui pouvait l’aider en lui offrant un environnement clos ou en lui garantissant qu’il n’y aurait aucune odeur ni aucun irritant dans le milieu de travail.
  8. Sa situation a un caractère prolongé. Elle ne pourra détenir aucune occupation rémunératrice. Elle souffre de graves allergies environnementales sous forme de rhinite allergique et d’asthme, qui provoquent des maux de tête, des étourdissements, de l’urticaire, des problèmes de sinus, des maux d’estomac et de la toux. Elle souffre aussi de rhinorrhée et de congestion nasale aggravées par une exposition à de fortes émanations, à des aliments épicés et à des irritants. Elle est sujette à un resserrement soudain de la gorge.
  9. Elle souffre également de dépression (rapport de M. Keeling). Son EGF est de 55.
  10. Son profil pharmaceutique démontre qu’elle ingère de fortes doses de divers médicaments ayant différents effets secondaires. En outre, elle doit consulter divers spécialistes.
  11. Elle est totalement invalide au point de ne pouvoir exercer aucune tâche, notamment socialiser, assister à des réunions de famille, aller au supermarché local.
  12. Le dossier médical confirme qu’elle est atteinte d’affections graves et prolongées depuis le 31 décembre 2010.
  13. Elle a besoin d’un environnement entièrement exempt de tout irritant. Il ne s’agit pas là d’un environnement normal que peut offrir n’importe quel employeur. Dans un [traduction] « contexte réaliste », un employeur ne l’embaucherait pas. Elle présente un risque pour l’employeur et un danger pour ses collègues. Elle ne peut pas fonctionner dans un « contexte réaliste ».
  14. L’avocat de l’appelante a présenté des observations préliminaires et des observations finales détaillées, que le Tribunal a examinées avec attention. Il a réitéré que l’appelante est atteinte d’une invalidité grave et prolongée depuis la date marquant la fin de la PMA. Elle ne travaille pas depuis 2008. Elle ne peut occuper aucun emploi régulier compte tenu de son état de santé.
  15. Elle prend des médicaments (GT5-10) et a de nombreux problèmes de santé, comme le précise le dossier médical. Elle a aussi des limitations d’ordre médical. Elle souffre d’effets secondaires découlant de la prise de médicaments qui nuisent à sa capacité de conduire et d’effectuer des tâches ménagères, que sa mère et d’autres membres de la famille doivent faire.
  16. Les dossiers médicaux étayent l’existence d’une invalidité grave et prolongée. L’avocat a mis en lumière une série de rapports figurant dans le dossier médical.
  17. Son témoignage démontre qu’elle souffre depuis décembre 2010. Son état de santé a [traduction] « détruit sa vie » et celle de sa famille. Elle souffre d’allergies environnementales chroniques graves, qui ont empiré en 2008. En 2010, elle était complètement invalide. Elle a tenté de trouver du travail, mais n’a pu y parvenir. Elle est déprimée et ne se sent pas bien. Elle a un grave problème. Il n’y a pas d’emploi qu’elle peut faire de chez elle. Elle ne peut même pas s’acquitter des tâches domestiques. Elle passe sa vie confinée en tout temps à la maison. Elle a de nombreuses affections et limitations fonctionnelles et souffre de dépression. Son profil pharmaceutique démontre qu’elle prend beaucoup de médicaments. Son témoignage établit qu’elle est incapable d’occuper à nouveau quelque emploi que ce soit.
  18. La mère de l’appelante a déclaré qu’elle espérait que sa fille aille bien un jour. Ce n’est toutefois pas le cas. Les éléments de preuve médicale permettent de conclure qu’elle souffre d’une invalidité grave et prolongée.
  19. L’avocat a fait référence à la jurisprudence qui, selon lui, appuie l’appel de l’appelante.
  20. La preuve permet de conclure qu’elle n’avait aucun revenu provenant d’un travail autonome. Elle n’a eu aucun problème avec l’ARC lorsqu’elle n’a déclaré aucun revenu d’entreprise.
  21. L’arrêt Villani requiertl’adoption d’une approche « réaliste ». L’appelante a satisfait à cette norme de preuve. Elle est incapable de trouver un emploi dans un contexte réaliste. L’avocat embauche d’autres personnes. Quel employeur paierait une employée avec laquelle il ne peut pas parler à moins qu’il ne construise une cage autour d’elle? L’avocat aime porter de l’eau de toilette. Il ne pourrait pas en porter s’il avait une employée comme l’appelante. Quel employeur renoncerait à cela?

[107] L’intimé fait valoir que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Elle a déclaré dans sa demande que son médecin lui avait dit qu’elle pourrait retourner travailler à temps partiel et qu’elle comptait le faire en mai 2010. Elle a indiqué qu’elle n’avait fait aucune tentative pour trouver un autre emploi en raison de son état de santé. Elle a signalé qu’elle avait reçu des prestations régulières d’assurance-emploi entre novembre 2008 et septembre 2009.
  2. Dans son rapport de décembre 2008, le Dr Grad a indiqué qu’il ne pouvait constater aucune allergie alimentaire importante.
  3. Dans son rapport de janvier 2009, le médecin de famille a indiqué qu’elle souffrait d’une grave allergie à la poussière. Il a noté que son lieu de travail était en construction et poussiéreux, dégageant des odeurs de peinture. À part la poussière, il a déclaré que d’autres odeurs de parfums sur les lieux de travail provoquaient des symptômes. Il a jouté que ses symptômes (dans les voies respiratoires supérieures/inférieures, des lésions kystiques oculaires, des maux de tête causés par une inflammation des sinus, une douleur aux sinus, des éternuements, des larmoiements et un essoufflement étaient tous présents quotidiennement et la rendaient inapte au travail à cet endroit).
  4. L’examen fonctionnel respiratoire datant de novembre 2008 indiquait un VEMS normal. Le ratio VEMS/CVF était limite. Un test de provocation à la méthacholine effectué en novembre 2007 était négatif.
  5. Selon le médecin de famille, ses symptômes étaient directement liés aux polluants en milieu de travail. La combinaison de ses symptômes l’empêche de travailler dans « ce » milieu de travail (GT1-98).
  6. Des tests n’ont décelé aucune pathologie grave qui l’empêcherait d’effectuer un travail adapté à ses limitations dans un autre milieu de travail.
  7. Pour ce qui est de la pièce GT2 (rapportant une douleur intense au genou nécessitant une intervention chirurgicale, une névralgie sciatique, des maux de tête, des étourdissements, des crises d’anxiété et des palpitations cardiaques), on y signale qu’elle a subi une intervention au genou en 2013. Une autre intervention était nécessaire en août 2014, c’est-à-dire après la PMA. En outre, ni l’appelante ni son médecin de famille n’ont mentionné de problèmes ou de limitations ayant trait à son genou ou à sa douleur au dos lorsqu’elle a présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC.
  8. En ce qui a trait à la pièce GT5 (relevé des médicaments), cette information ne permet pas de conclure qu’elle était atteinte d’une invalidité grave qui l’empêcherait d’occuper tout type de travail en date de décembre 2010. Aucun autre élément de preuve n’a été reçu pour étayer dans quelque domaine que ce soit la présence de déficits ou de pathologies organiques graves en 2010 qui l’empêcheraient de travailler.
  9. Pour ce qui est du rapport de juin 2010 de M. Keeling, ce dernier n’a pas décrit de résultats d’examens sur l’état mental qui laissaient supposer une affection incapacitante grave. Il a indiqué que son anxiété découlait en grande partie de la perception d’un mauvais traitement et d’une incapacité d’obtenir des mesures d’adaptation de la part de son ancien employeur. Un traitement de psychothérapie (15 à 20 séances) a été recommandé. Jusqu’à maintenant, on ignore si elle a suivi un tel traitement. En outre, au moment où la demande a été présentée, ni l’appelante ni son médecin de famille n’ont décrit l’anxiété comme un facteur qu’il l’empêche de travailler. Il est intéressant de noter que M. Keeling a mentionné dans son rapport de juin 2010 qu’elle était actuellement à la recherche d’un emploi (le même mois où elle a présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC). Bien qu’elle ait subi une évaluation ponctuelle à la demande de son avocat, rien n’indique que son état de santé mentale était d’une gravité telle qu’il justifiait un aiguillage vers un psychiatre ou un traitement par un psychiatre.
  10. Elle a quitté son emploi en raison d’une intensification de ses symptômes allergiques liés à des travaux de construction et à une augmentation de la poussière sur les lieux de travail. Bien qu’elle soutienne avoir des réactions à certains produits alimentaires, des tests n’ont pas permis de le confirmer. De toute façon, le traitement consisterait à éviter ces aliments.
  11. Il a été révélé en 2013 qu’elle exploitait une entreprise de confection de gâteaux et de décoration à domicile depuis quelques années.
  12. Son principal symptôme d’exposition à des irritants est une congestion nasale, qu’un vaporisateur nasal soulage. Les antihistaminiques la rendent somnolente.
  13. Elle conduit quand elle va au supermarché et à des rendez-vous à diverses cliniques. Toutefois le Dr Brown a révélé en octobre 2014 qu’elle n’avait pas eu besoin de se rendre au service d’urgence depuis son exposition à la peinture en aérosol en 2008 et qu’elle n’a pas utilisé son EpiPen pour une réaction allergique aiguë depuis trois ans. Les éléments de preuve indiquent que son état n’a pas entraîné de limitations importantes de sa capacité de participer à des activités à l’extérieur de la maison.
  14. Elle a été blessée lors d’un accident de la route en août 2013, c’est-à-dire après la PMA.
  15. Elle est capable de conduire, de faire des courses et d’aller à divers rendez-vous sans ressentir de symptômes allergiques aigus depuis 2008.
  16. Elle a exploité une entreprise de confection de gâteaux et de décoration à domicile jusqu’à son accident en 2013.

Analyse

[108] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle avait une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2010 ou avant cette date.

Caractère grave

Ménorragie

[109] Le médecin de famille a indiqué la ménorragie comme étant l’une des affections de l’appelante, mais n’a fourni aucun rapport supplémentaire précisant la nature et la gravité de cette affection. Dans son Questionnaire, l’appelante n’a pas fait allusion à cette affection et n’a pas indiqué non plus qu’elle avait arrêté de travailler pour cette raison. Compte tenu des éléments de preuve, le Tribunal n’est pas convaincu que cette affection était grave à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date.

Syndrome du canal carpien

[110] Dans son Questionnaire, l’appelante a indiqué qu’elle était incapable de soulever plus de 20 lb (9 kg) en raison du syndrome du canal carpien à la main droite. Fait important, son médecin de famille n’a pas fait mention de cette affection. L’appelante avait déjà travaillé tout en étant atteinte de cette affection et signalé qu’elle était incapable de continuer à exercer son dernier emploi en raison des allergènes/polluants/irritants sur les lieux de travail. Le Tribunal n’est pas convaincu que cette affection était grave au sens de la Loi à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date.

Douleur au genou/douleur au dos/maux de tête

[111] Dans une communication fournie par son avocat, l’appelante a indiqué qu’elle a une douleur intense au genou qui aurait nécessité une intervention chirurgicale le 8 août 2014, une douleur dorsale associée à une douleur au nerf sciatique irradiant le long de sa jambe, des maux de tête et des étourdissements, avec des crises d’anxiété et des palpitations cardiaques. Selon son avocat, elle a été hospitalisée pour une opération au genou en septembre 2013. Elle ne peut pas marcher ni se tenir debout plus de 20 minutes et a une capacité limitée pour ce qui est de s’étirer et de se pencher. Son époux et ses enfants effectuent toutes les tâches de nettoyage ardues, et elle ne s’occupe que des travaux légers. Son œil, pour lequel elle a précédemment subi une opération, est sensible. Elle a aussi des problèmes de mémoire et ne conduit que localement. Elle consulte régulièrement un psychiatre, M. Mancini.

[112] Dans son Questionnaire de 2010, l’appelante n’a pas fait allusion à sa douleur au genou, au dos ou à ses maux de tête. Le Dr Brown n’y a pas fait allusion non plus dans le rapport médical du RPC de mai 2010. Toutefois, l’avocat de l’appelante a mentionné pour la première fois ces affections dans sa communication du 22 juillet 2014 (GT2-1), qu’il liait à la PMA.

[113] Le Tribunal a examiné les autres rapports médicaux que l’appelante a présentés par la suite afin de déterminer l’état de ces affections susmentionnées à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date.

[114] Fait à noter, le Dr Basile, neurologue, a vu l’appelante en octobre 2013, soit bien après la fin de la PMA, pour des douleurs au cou et au bas du dos accompagnées de symptômes radiculaires dans la jambe gauche. Bien qu’il ait signalé que son problème actuel au cou et au bas du dos avait commencé il y a de nombreuses années, il a indiqué qu’elle avait été impliquée dans un accident de la route en août 2013 et qu’elle se plaignait depuis de douleurs de plus en plus fortes au cou et au bas du dos, ainsi qu’au bras gauche. Il a également noté qu’elle avait des antécédents de maux de tête et indiqué ce qui suit [traduction] « Toutefois, ceux-ci étaient rares et ne la dérangeaient pas. Depuis l’accident, la patiente dit qu’elle a trois ou quatre maux de tête par semaine accompagnés de nausées. »

[115] À la lumière des éléments de preuve, le Tribunal n’est pas convaincu que les douleurs au cou et au bas du dos de l’appelante étaient gravement invalidantes au sens de la Loi à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date.

Anxiété/Dépression

[116] Dans son Questionnaire de mai 2010, l’appelante a indiqué qu’elle a du mal à se concentrer dans tout environnement où elle ne peut pas respirer. Elle a aussi indiqué qu’elle prend occasionnellement du lorazépam pour l’aider à dormir. Dans la section portant sur les médicaments, elle a précisé qu’elle prenait 1 mg de lorazépam deux fois par semaine, le soir, au besoin. Dans son rapport médical de mai 2010, le Dr Brown a décrit un état d’anxiété et de panique en tant qu’affection. Il a déclaré qu’elle ressentait du stress du fait de sa réaction allergique qui provoquait un état d’anxiété et de panique.

[117] Dans son rapport d’août 2010, M. Keeling, psychologue agréé, a diagnostiqué un trouble anxieux et déterminé que son EGF était de 55. À l’axe  IV, il a déclaré ce qui suit [traduction] « Incapacité d’occuper un emploi. Exposition à un environnement de travail physique stressant. Graves allergies environnementales. » Il a indiqué dans le corps du rapport que « tout semble indiquer qu’une anxiété et une dépression (de niveau léger) interfèrent avec son fonctionnement. »

[118] Bien que le rapport de M. Keeling constitue un élément de preuve médicale susceptible d’étayer une conclusion d’invalidité grave au sens de la Loi à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date, le Tribunal n’est pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que cette invalidité était prolongée à la date marquant la fin de la PMA et de façon continue par la suite.

[119] M. Keeling a recommandé 15 à 20 séances de traitement psychologique, mais l’appelante a déclaré qu’elle n’avait pas les moyens de payer M. Keeling pour le traitement. Elle a donc attendu avant d’être dirigée vers un autre spécialiste, M. Mancini, psychologue, qu’elle se souvient d’avoir vu en 2014. Selon l’appelante, elle a cessé de voir M. Mancini en 2014 après avoir subi une intervention chirurgicale. Elle n’a pas expliqué pourquoi elle n’avait pas repris le traitement après l’intervention et n’a jamais présenté un rapport de M. Mancini décrivant le résultat du traitement.

[120] Compte tenu de la déclaration de M. Keeling, selon laquelle vu le niveau de réceptivité (de l’appelante), d’engagement à se faire traiter et de son réseau de soutien social, son pronostic de traitement était vraisemblablement assez bon, le Tribunal n’est pas prêt à conclure que l’invalidité psychologique de l’appelante est prolongée, étant donné l’absence de tout rapport de M. Mancini confirmant le résultat du traitement en plus du fait que l’appelante n’a jamais repris le traitement après l’opération.

[121] Le Tribunal a aussi examiné la liste des médicaments de l’appelante (GT5-10). Bien qu’elle révèle une certaine prise de lorazépam en juin 2010, d’Ativan en janvier 2009, décembre 2008 et octobre 2008, et de venlafaxine en novembre 2008, elle ne révèle pas une utilisation continue d’antidépresseurs et d’anxiolytiques à la date marquant la fin de la PMA et de façon continue par la suite.

Allergies environnementales

[122] Le Tribunal a tenu compte du fait qu’après son congédiement, l’appelante a reçu des prestations régulières d’assurance-emploi entre novembre 2008 et septembre 2009. La réception de prestations régulières d’assurance-emploi aurait obligé la prestataire à être prête et disponible pour travailler et à être à la recherche d’un emploi. S’il est vrai que cela n’est pas déterminant pour ce qui est de la gravité de son invalidité à la fin de sa PMA, il n’en demeure pas moins que la réception de prestations régulières d’assurance-emploi mettrait en cause la crédibilité de l’appelante dans la mesure où elle affirme que son invalidité était grave durant la période en question. De toute façon, cela ne constitue pas un problème étant donné la position de l’appelante, selon laquelle elle n’était pas gravement invalide durant cette période et cherchait du travail entre novembre 2008 et août 2010.

[123] Le Tribunal accepte, en se fondant sur le témoignage de l’appelante et le poids du dossier médical, qu’elle était incapable de continuer à travailler à son dernier lieu de travail, où avaient lieu des travaux de construction et où elle était exposée à de fortes concentrations de poussière et d’émanations de peinture.

[124] Les éléments de preuve médicale permettent clairement de conclure à l’existence d’un lien entre l’exposition aux allergènes/polluants/irritants en milieu de travail et une réaction indésirable chez l’appelante. Par exemple, dans son rapport du 10 novembre 2008 à la compagnie d’assurance-invalidité de l’appelante, le Dr Brown a indiqué que le diagnostic de celle-ci était [traduction] « en réaction à des allergènes/polluants/irritants en milieu de travail et un kyste dans le coin inférieur gauche de la paupière causé par la poussière en milieu de travail. » Dans son rapport du 30 décembre 2008, le Dr Langer a décrit le problème/les antécédents de la façon suivante [traduction] « Toux récurrente en particulier en raison d’une aggravation des symptômes durant les travaux de construction au travail ». Dans son rapport du 26 janvier 2009, le Dr Brown a indiqué qu’il était évident que la poussière était l’un des allergènes importants de l’appelante et aussi qu’étant donné les travaux de construction qui rendaient son lieu de travail « poussiéreux », dégageant des odeurs de peinture, etc., cet endroit serait également très « néfaste » pour elle.

[125] Le Tribunal n’est pas convaincu, à la lumière des éléments de preuve, que le parfum, plutôt que de fortes concentrations de poussière et d’émanations de peinture, faisait partie des principaux déclencheurs qui rendaient l’appelante était inapte au travail à cet endroit. En réponse à la question « Pourquoi avez-vous cessé de travailler? » posée dans son Questionnaire, l’appelante a déclaré ce qui suit [traduction] « Je me suis blessée à l’œil droit au travail. J’ai subi une chirurgie. Je suis retournée au travail, où il y avait des travaux de construction. J’étais gravement allergique à la poussière, aux parfums (illisible), à la peinture dans ce bureau. J’ai été mise en congé de maladie et ai souffert de crises d’anxiété. » Dans une autre section du Questionnaire, elle a déclaré ce qui suit : [traduction] « La poussière était intolérable et il y avait énormément de toxines à mon retour au travail. » Dans son rapport de novembre 2008, le Dr Brown a diagnostiqué [traduction] « une réaction à des allergènes/polluants/irritants en milieu de travail et un kyste dans le coin inférieur gauche de la paupière causé par la poussière en milieu de travail. ». Dans son rapport du 26 janvier 2009, le Dr Brown a indiqué ce qui suit : [traduction] « Il est également clair qu’étant donné que son lieu de travail était en construction et “ poussiéreux ”, dégageant des odeurs de peinture, etc., cet endroit serait très néfaste pour cette patiente. À part la poussière, mentionnons que les odeurs, les parfums, etc., sur les lieux travail causent des symptômes importants. »

[126] Dans son rapport d’août 2010, M. Keeling a noté qu’avant les rénovations, l’employeur était disposé à prendre des mesures d’adaptation à l’égard de l’allergie aux parfums de l’appelante et avait demandé à tous les employés de s’abstenir de porter du parfum. Il a déclaré qu’avant le début des travaux de construction, l’appelante avait demandé à être déplacée en raison de son allergie à la poussière. Il dit que l’employeur a refusé de donner suite à sa demande en déclarant ce qui suit : [traduction] « Elle soutient que, comme il y avait toujours de la poussière dans l’air, au fil des semaines cette poussière s’est infiltrée dans son œil droit, causant une sensation de brûlure, de la rougeur et une vision floue. Elle ajoute que la poussière nuit à ses poumons. » M. Keeling a également indiqué que l’appelante souhaitait retourner au travail en mars 2009 à condition que ses fonctions soient modifiées. Elle a demandé de ne pas faire cuire de fruits de mer/crabes dans la cuisine. Il dit qu’elle affirme que [traduction] « même avant les travaux de rénovation/reconstruction, elle avait des difficultés liées à l’odeur de poisson dans la cuisine. »

[127] Compte tenu des éléments de preuve, le Tribunal n’est pas convaincu que cette exposition aux parfums était le déclencheur qui a mené l’appelante à souffrir de symptômes qui ont fini par causer son arrêt de travail. Il s’agissait surtout de poussière et d’émanations toxiques ou nocives attribuables aux travaux de construction. Bien que l’appelante ait éprouvé certains problèmes liés à la cuisson de fruits de mer et de crabes dans la cuisine, le Tribunal estime que ni ces aliments ni les parfums ne constituaient la raison pour laquelle elle avait fini par cesser de travailler. Cette conclusion ne signifie toutefois pas que le Tribunal a conclu que l’appelante n’est pas susceptible d’avoir une réaction indésirable si elle est exposée à des parfums ou à des odeurs liées à certains aliments qu’elle ne peut tolérer. La conclusion indique simplement qu’elle a en réalité quitté son emploi en septembre 2009, principalement en raison d’une exposition importante à la poussière et aux émanations toxiques dans une zone de construction.

[128] Il reste donc la question de savoir si l’appelante est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice dans tout autre milieu de travail.

[129] Tout d’abord, le Tribunal est convaincu que l’appelante est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice dans un milieu où elle est exposée à certains déclencheurs environnementaux comme la poussière ou les parfums ou encore à des odeurs liées à certains aliments, comme il est décrit dans le dossier médical.

[130] Le Tribunal estime qu’il est significatif qu’avant que le dernier employeur de l’appelante ait refusé sa demande de relocalisation après qu’elle eut été informée des rénovations à venir, elle travaillait à cet endroit depuis le 4 février 2008. D’après le rapport de M. Keeling, l’employeur [traduction] «  avait raisonnablement été à l’écoute en tentant de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de ses allergies » (GT6-3) avant le début des travaux de construction. Selon M. Keeling, dont le rapport a été lu et approuvé par l’appelante, l’employeur a refusé de répondre à la demande de l’appelante d’être relocalisée une fois que les travaux de construction commenceraient. L’appelante affirme que les travaux de rénovation avaient lieu à dix pieds (trois mètres) de son bureau et qu’elle se souvenait d’avoir vu du sable sur son bureau dès la première journée. M. Keeling indique que l’appelante a mentionné qu’elle souhaitait retourner au travail en mars 2009 à condition que ses fonctions soient modifiées : elle a notamment demandé de ne pas faire cuire de fruits de mer/crabes dans la cuisine. Elle a signalé qu’elle ressentait une grande détresse parce que son employeur n’était pas prêt à l’aider en ce qui concerne ses allergies. M. Keeling a écrit ce qui suit [traduction] « Elle croyait qu’on aurait pu facilement lui épargner du stress si son employeur avait été disposé à répondre à ces simples demandes, comme l’envoyer à un autre étage » (GT6-5).

[131] Le Tribunal est convaincu que l’appelante est capable de travailler dans un milieu de travail qui tient compte de ses allergies environnementales. Par exemple, son ancien lieu de travail qui, au vu des faits, avait « raisonnablement été à l’écoute » en tentant de prendre des mesures d’adaptation à l’égard de ses allergies, du moins jusqu’au début des travaux de construction, moment à partir duquel l’employeur a refusé de la relocaliser.

[132] La capacité résiduelle de l’appelante de travailler dans un milieu tenant compte de ses allergies environnementales est étayée par le fait qu’en mars 2009, elle souhaitait retourner au travail à condition que ses fonctions soient modifiées (GT6-4). Elle a aussi dit à M. Keeling que [traduction] « si son employeur avait été disposé à répondre à ces simples demandes (comme l’envoyer à un autre étage), on aurait pu facilement lui épargner du stress » (GT6-5).

[133] Le Tribunal accepte en outre le témoignage de l’appelante, exposé dans le rapport d’août 2010 de M. Keeling, voulant qu’elle ait passé de nombreuses entrevues pour trouver un autre emploi. M. Keeling a écrit ce qui suit : [traduction] « Elle (l’appelante) dit qu’au cours des deux dernières années, elle a passé de nombreuses entrevues, mais ajoute que tous ces employeurs disent qu’ils ne peuvent pas prendre de mesures d’adaptation à l’égard de ses allergies. » L’appelante a déclaré qu’elle avait éprouvé des problèmes lors de nombreuses entrevues parce des personnes portaient de l’eau de toilette ou du parfum, mais elle ne semble pas l’avoir dit à M. Keeling. Si elle l’a fait, il ne l’a pas mentionné dans son rapport par ailleurs exhaustif. De toute manière, l’appelante n’a pas déclaré qu’elle avait éprouvé des difficultés lors de chaque entrevue parce que des personnes portaient de l’eau de toilette ou du parfum. Elle a plutôt déclaré qu’aucun des employeurs éventuels ne pouvait prendre de mesures d’adaptation à son égard pour s’assurer que le lieu de travail serait exempt de tout irritant et de parfum.

[134] Le Tribunal est guidé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Canada (MDRH) c. Rice, 2002 CAF 47, dans lequel la Cour a déclaré que des facteurs socio-économiques comme les conditions du marché du travail ne sont pas pertinents dans une décision visant à déterminer si une personne est invalide et que ce qui est pertinent c’est l’existence de n’importe quelle occupation véritablement rémunératrice au regard de la situation personnelle du requérant, mais non la question de savoir si des emplois sont véritablement disponibles sur le marché du travail.

[135] Le fait que l’appelante a été incapable de trouver un travail adapté qui tient compte de ses limitations ne mène pas à la conclusion qu’elle était régulièrement incapable de détenir un tel travail s’il lui avait été offert.

[136] L’avocat de l’appelante a fait valoir que du point de vue du contexte « réaliste » énoncé dans Villani,aucun employeur n’embaucherait l’appelante ou ne prendrait de mesures d’adaptation à l’égard de son invalidité. Dans ses observations finales orales, il a noté qu’il aime porter de l’eau de toilette et des produits parfumés en aérosol et demandé, pour la forme, quel employeur renoncerait à cela ou interagirait avec l’appelante, qui devrait être isolée.

[137] L’importance de l’arrêt Villani c. Procureur général du Canada (2001), 205 D.L.R. (4e) 58 C.A.F. n’échappe pas au Tribunal. Le juge d’appel Isaac a déclaré que le sous-alinéa 42(2)a)(i) devrait faire l’objet d’une interprétation généreuse et que l’exigence concernant la gravité de l’invalidité devrait être appliquée dans un contexte « réaliste ». La Cour a clarifié ce point en ces termes : « À mon avis, il s’ensuit que les occupations hypothétiques qu’un décideur doit prendre en compte ne peuvent être dissociées de la situation particulière du requérant, par exemple son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de la vie (paragraphe 38). »

[138] Le Tribunal n’est pas convaincu que l’appelante est gravement invalide dans un contexte « réaliste ». Elle a déjà démontré la capacité d’occuper régulièrement un emploi dans un lieu de travail qui a pris des mesures d’adaptation à l’égard de son invalidité. Le Tribunal ne dispose d’aucun élément de preuve laissant croire qu’elle était était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date, qui la rendait régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice dans d’autres lieux de travail où l’on prendrait aussi des mesures d’adaptation à l’égard de son invalidité.

Travait indépendant

[139] Le Tribunal note que l’appelante a indiqué dans son Questionnaire de mai 2010 que son médecin lui avait dit qu’elle pourrait retourner travailler en mai 2010 et qu’elle comptait retourner au travail ou chercher du travail dans un avenir proche, à domicile si possible. Le Tribunal note aussi que l’appelante a enregistré une entreprise à son nom le 5 mai 2010 nommée Sweets Made Just 4 You. Elle a reçu un permis pour une entreprise à propriétaire unique délivré le 3 mai 2010. L’enregistrement du nom commercial était en vigueur pour la période du 3 mai 2010 au 2 mai 2015. L’intimé fait valoir que l’appelante exploitait une entreprise de confection de gâteau à domicile après la fin de la PMA. L’appelante le nie. Elle a déposé un affidavit non fait sous serment daté du 1er décembre 2014 (GT20-13), dans lequel elle déclare qu’elle a enregistré un nom d’entreprise pour acheter des produits de pâtisserie destinés à son usage personnel. Elle a fourni des copies de ses déclarations de revenus pour étayer le fait qu’elle n’avait pas touché de revenus d’une entreprise et dit ce qui suit [traduction] « Je jure solennellement que je n’achète aucun de mes produits de pâtisserie pour les revendre à quiconque et qu’ils me sont exclusivement destinés. » (GT20-13).

[140] Le Tribunal souscrit à l’observation de l’intimé, selon laquelle il y a lieu de se demander pourquoi une personne enregistrerait une entreprise pour cuisiner pour elle-même dans sa propre demeure. L’appelante a déclaré que le fournisseur de produits de pâtisserie ne faisait pas de vente au détail au public et qu’il exigeait qu’elle obtienne un permis principal d’entreprise pour pouvoir lui vendre des produits. L’explication de l’appelante n’est pas totalement invraisemblable et n’a pas été contestée par l’intimé à l’audience. Le Tribunal reconnaît que rien ne prouve que l’appelante ait tiré des revenus de son entreprise enregistrée. Compte tenu des éléments de preuve, le Tribunal ne peut conclure, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante exploitait une entreprise de confection de gâteaux à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date, qui établissait une capacité de travail.

Activités de la vie quotidienne

[141] Le Tribunal n’est pas convaincu que les limitations de l’appelante dans la collectivité ou sur le plan des activités quotidiennes traduisent une invalidité grave au sens de la Loi à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date et de façon continue par la suite.

[142] L’appelante a témoigné au sujet de ses capacités fonctionnelles à l’audience. Sa mère a fourni un témoignage corroborant.

[143] Dans les observations de l’appelante que le Tribunal a reçues estampillées du 20 janvier 2015 (GT-20), l’avocat de l’appelante a déclaré qu’elle conduit localement environ une fois par semaine, voire moins souvent que cela. Elle conduit aussi environ une demi-heure par jour pour aller à des rendez-vous médicaux et en revenir. Elle est accompagnée par un membre de la famille pour aller au supermarché et fait attention à ne pas emprunter d’allées où se trouvent des détergents ou des aliments qui dégagent des odeurs ou qui contiennent des matières irritantes.

[144] L’appelante a déclaré qu’elle achète des vêtements/chaussures localement et qu’elle se rend au petit bureau local du ministère des Transports pour renouveler son permis.

[145] Le Tribunal n’est pas convaincu que l’appelante est strictement confinée ou recluse à la maison, ce qui la rendrait gravement invalide au sens de la Loi. Elle peut aller faire l’épicerie ou se rendre dans d’autres lieux de la collectivité, bien qu’avec précaution, notamment en portant un masque et en évitant certaines allées au supermarché, et elle peut conduire.

Audiences précédemment ajournées

[146] L’appelante a déclaré qu’elle était tombée malade avant la première audition prévue de son appel après avoir été exposée à des émanations toxiques dans la salle de toilettes de l’hôtel de l’immeuble où l’audience avait lieu. Elle a indiqué qu’il s’agissait de la plus forte odeur qu’elle avait jamais sentie dans des toilettes publiques et se demandait si cela avait été intentionnel ou non. Elle a aussi confirmé que lorsqu’elle était entrée dans la salle d’audience, elle avait senti un parfum, que son avocat admettait avoir mis plus tôt ce matin-là.

[147] Le Tribunal a eu l’occasion d’observer la réaction de l’appelante et ne conteste pas sa véracité. Manifestement, si l’appelante est exposée à une très forte odeur, comme elle dit l’avoir été dans la salle de toilettes de l’hôtel, elle aura une réaction indésirable. Toutefois, elle a également indiqué que la lotion après-rasage de son avocat ne l’avait pas dérangée lorsqu’elle était assise près de lui à l’extérieur de la salle d’audience avant le début de l’audience (même si elle n’était pas assise aussi près de lui que dans la salle d’audience). Ce n’est qu’après avoir été sensibilisée à l’odeur dans la salle de toilettes qu’elle a été incommodée par sa lotion après-rasage.

[148] Compte tenu des éléments de preuve, le Tribunal n’est pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante aurait été empêchée de poursuivre l’audience si elle n’avait pas été exposée à la forte odeur de produits de nettoyage dans la salle de toilettes de l’hôtel, qu’elle décrit elle-même comme étant l’une des plus fortes odeurs auxquelles elle a été exposée dans des toilettes publiques.

[149] Le Tribunal a également tenu compte du témoignage oral de l’appelante et de l’explication écrite des circonstances ayant entraîné le deuxième ajournement de son appel. L’appelante a expliqué que la veille de la date prévue de retour à son audience, un des amis de son fils est venu à la maison et portait de l’eau de toilette. Elle a un eu réaction indésirable et a dû se rendre à l’hôpital. Elle a présenté des rapports médicaux de l’hôpital qui corroboraient son témoignage.

[150] Là encore, le Tribunal ne met pas en doute que si l’appelante est exposée à une forte odeur d’eau de toilette ou de parfum, elle peut avoir une réaction indésirable, comme celle qu’elle a eue la veille de l’audience de mai 2015. De plus, le tribunal est convaincu que si l’appelante était exposée à des eaux de toilette ou à des parfums au travail, cela pourrait déclencher des réactions indésirables et la rendrait inapte au travail à cet endroit.

[151] Le Tribunal trouve curieux que, hormis son exposition à la poussière et aux aérosols au travail en 2008, qui a nécessité une opération en raison d’un kyste à l’œil, le dossier médical soit dépourvu de rapports continus faisant état de visites à l’urgence attribuables à une exposition à des déclencheurs, à part le rapport d’hôpital de mai 2015. Malgré le témoignage de l’appelante, voulant qu’elle sorte dans la collectivité pour acheter des chaussures et des vêtements, faire l’épicerie (bien qu’avec précaution) et conduire, elle n’a pas eu de réactions graves comme celles qu’elle avait eues en 2015, soit presque quatre ans et demi après la fin de la PMA. Le Tribunal note également qu’elle a déclaré qu’elle avait passé de nombreuses entrevues avec d’éventuels employeurs entre septembre 2008 et août 2010. Elle a déclaré que certains de ces employeurs portaient du parfum ou de l’eau de toilette et qu’elle n’a pas pu poursuivre certaines entrevues, mais n’a pu décrire aucun incident où elle a eu une réaction indésirable comme celle qu’elle avait eue en mai 2015, y compris de devoir aller à l’hôpital.

[152] En conclusion, le Tribunal n’est pas convaincu que les circonstances ayant entraîné l’ajournement des deux audiences précédentes révélaient une invalidité grave au sens de la Loi à la date marquant la fin de la PMA dans le contexte d’un lieu de travail où l’on prendrait des mesures d’adaptation à l’égard de l’invalidité de l’appelante.

Travail à la maison

[153] Enfin, si le Tribunal a commis une erreur en estimant que l’appelante n’était pas gravement invalide au sens de la Loi à la date marquant la fin de la PMA ou avant cette date parce qu’elle ne pouvait pas continuer à travailler dans l’environnement concurrentiel d’un milieu de travail où l’on aurait pris des mesures d’adaptation à l’égard de son invalidité tant qu’elles n’imposaient pas de contraintes excessives, le Tribunal estime que l’appelante a conservé la capacité résiduelle de travailler à la maison.

[154] Pour être admissible aux prestations du RPC, une personne doit démontrer qu’elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice, y compris un travail saisonnier, un travail à temps plein ou à temps partiel ainsi que son emploi antérieur. L’appelante a terminé sa 12e année, fréquenté un collège et obtenu un diplôme d’adjointe juridique. Elle a travaillé comme représentante du service à la clientèle.

[155] En présence de preuves selon lesquelles la personne est capable de travailler, celle-ci doit démontrer que ses efforts pour trouver et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son état de santé (Inclima c. Canada (P.G.), 2003 CAF 117).

[156] Bien que l’appelante ait indiqué qu’elle était incapable de trouver un emploi à domicile, le Tribunal est convaincu qu’elle avait la capacité résiduelle de travailler à domicile, où elle ne serait pas exposée à des irritants ou à des émanations nocives et pourrait raisonnablement contrôler son environnement. Dans l’économie d’aujourd’hui, il existe de nombreux emplois qui se font à domicile, où l’employé a besoin d’un téléphone ou d’un ordinateur pour travailler et n’est pas tenu d’aller régulièrement au bureau principal de l’employeur.

[157] La question dont le Tribunal est saisi est de savoir si l’appelante possédait une capacité résiduelle de détenir régulièrement un tel emploi et si elle avait réussi à en trouver un. Elle n’a présenté aucun élément de preuve pouvant convaincre le Tribunal qu’elle ne pourrait obtenir ni conserver un tel emploi en raison de son état de santé.

Caractère prolongé

[158] Puisque le Tribunal a conclu que l’invalidité n’est pas grave, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur le critère d’invalidité prolongée.

Conclusion

[159] L’appel est rejeté.

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