Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Comparutions

  • Appelant : R. D.
  • Avocat de l’appelant : Eric Katzman
  • Avocate de l’intimé : Renée Darisse

Introduction

[1] L’appelant a présenté une demande de pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada. Il dit être devenu invalide en raison de l’ostéoarthrite, d’une diverticulite, d’une colite, du syndrome du côlon irritable, de l’apnée du sommeil et d’une dépression. L’intimé a rejeté sa demande aux étapes de l’examen initial et de la révision. L’appelant a interjeté appel auprès du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. Le 1er avril 2013, l’appel a été transféré à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le Tribunal). Le 29 décembre 2014, la division générale a conclu qu’une pension d’invalidité n’était pas payable en vertu du Régime de pensions du Canada.

[2] L’appelant a présenté une demande de permission d’appeler de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal, et cette permission a été accordée le 9 mars 2015. La permission d’en appeler a été accordée aux motifs que la division générale pouvait avoir commis une erreur en ne considérant pas de façon appropriée la preuve concernant les capacités fonctionnelles de l’appelant, et qu’elle pouvait avoir commis une erreur en ne considérant pas l’explication fournie par ce dernier pour ne pas avoir cherché un autre emploi.

[3] C’est le mode d’audience par comparution en personne qui a été choisi, après l’examen des facteurs suivants :

  1. a) la complexité des questions en litige;
  2. b) le fait que la crédibilité des parties ne figurerait pas au nombre des questions principales;
  3. c) le fait que l’appelant ou les autres parties étaient représentés;
  4. d) le fait qu’il n’y a pas d’installations de vidéoconférence disponibles dans la région où réside l’appelant;
  5. e) la nature des arguments et des observations des deux parties dans cette affaire.

Les parties ont soulevé un certain nombre de questions préliminaires, qui sont abordées immédiatement ci-dessous.

Questions préliminaires

Présentation de nouveaux éléments de preuve en appel

[4] L’avocat de l’appelant a soumis dix rapports médicaux au Tribunal après que la division générale ait rendu sa décision. L’intimé a allégué que, puisque ces documents n’étaient pas rattachés aux moyens d’appel à partir desquels la permission d’en appeler a été accordée, ils étaient inadmissibles dans le cadre d’un appel. L’avocate de l’intimé fondait son argument sur le libellé des articles 58, 59 et 66 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.   Elle a aussi affirmé que, selon la décision de la Cour fédérale Alves c. Canada (Procureur général) 2014 CF 1100, la production de nouveaux éléments de preuve n’est plus un motif d’appel, et que par conséquent, à moins que ces éléments de preuve appuient un moyen d’appel énoncé dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, ils sont inadmissibles.

[5] L’avocat de l’appelant, par contre, a allégué que les nouveaux éléments de preuve devraient être admis vu qu’il s’agissait d’un appel. Il a aussi affirmé qu’il fallait faire une distinction entre l’affaire dont je suis saisie et l’affaire Alves puisque cette dernière concernait une demande de contrôle judiciaire, et non un appel devant un tribunal comme c’est le cas en l’espèce. Il a ajouté que les faits dans l’affaire Alves étaient tout à fait différents de ceux qui ont été portés à mon attention.

[6] Je suis convaincue que ce qui figure dans la décision Alves, à savoir que la production de nouveaux éléments de preuve n’est pas un motif d’appel selon la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, est correct. C’est la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la Loi) qui régit le fonctionnement du Tribunal. L’article 58 de la Loi énonce les seuls moyens d’appel pouvant être pris en considération. Un appel interjeté devant la division d’appel du Tribunal n’est pas une nouvelle audience sur le bien‑fondé de la demande de pension d’invalidité, puisque les seuls moyens d’appel qui peuvent être pris en considération sont ceux énoncés à l’article 58 de la Loi (voir F.D. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social AD‑13‑200; M.C. c. Ministre de l’Emploi et du Développement social AD‑13‑47). La Loi prévoit aussi, à l’article 66, une procédure qui permet d’annuler ou de modifier une décision rendue par le Tribunal lorsque des faits nouveaux et essentiels sont présentés. Par conséquent, de nouveaux éléments de preuve ne sont pas admis en appel, à moins qu’ils se rattachent à l’un des moyens d’appel énoncés à l’article 58 de la Loi (par exemple, la preuve d’un manquement à la justice naturelle ou de partialité du décideur).

[7] Dans la présente affaire, l’appelant a soumis d’autres rapports médicaux pour appuyer l’allégation qu’il est invalide au sens du Régime de pensions du Canada. Ces éléments de preuve ne se rapportent à aucun des moyens d’appel prévu dans la Loi. Ils ne sont donc pas pertinents dans l’instance dont je suis saisie. Ils sont inadmissibles et n’ont pas été pris en considération pour rendre une décision dans l’affaire.

Témoignage à l’audience d’appel

[8] L’avocat de l’appelant comptait aussi faire témoigner ce dernier à l’audience d’appel. Il a affirmé que la loi n’imposait pas de limites particulières à la capacité de la division d’appel d’entendre des témoignages. Selon lui, la division d’appel était davantage en mesure d’évaluer la preuve que la division générale, parce que l’audience d’appel était tenue par comparution en personne des parties alors que l’audience de la division générale se faisait par téléphone, que la division d’appel prévoyait plus de temps pour l’instruction de l’appel, et que les membres de la division d’appel étaient plus expérimentés que les membres de la division générale. Il a aussi avancé qu’il était illogique de ne pas fournir toute l’information à la division d’appel puisque cela entraverait sa capacité de trancher.

[9] L’avocate de l’intimé s’est appuyée sur son argumentation concernant la production de nouveaux éléments de preuve documentaire dans cette affaire.

[10] La division d’appel du Tribunal s’est récemment penchée sur la question du témoignage d’un demandeur à une audience d’appel dans les décisions F.D. et M.C. Ma collègue a examiné en détail le droit applicable à cette question. Je ne suis pas tenue d’appliquer ces décisions, mais je les trouve fort convaincantes puisqu’elles portent directement sur la question dont je suis saisie. Selon ces décisions, de nouveaux éléments de preuve oraux et écrits n’étaient pas admissibles lors de l’instruction d’un appel puisque la loi restreint les moyens d’appel qui peuvent être pris en considération et circonscrit donc aussi la nature de l’appel. De plus, les correctifs permis dans le cas d’un appel se limitent à ceux qui sont présentés à l’article 59 de la Loi, ce qui montre aussi la nature plus restreinte du présent appel.

[11] Par ailleurs, l’avocat de l’appelant a déclaré que les membres de la division d’appel avaient plus d’expertise et d’ancienneté que les membres de la division générale, mais n’a présenté aucun autre élément qui me permettrait de conclure que c’est le cas. Les membres des deux divisions du Tribunal doivent posséder les mêmes qualifications selon la législation. Dans les deux cas, ils ont été nommés lorsque le Tribunal est entré en fonction en avril 2013 ou par la suite. Les membres qui ont le plus d’ancienneté comptent un peu plus de deux ans d’expérience au sein du Tribunal. Dans ce contexte, je ne vois pas comment on pourrait considérer que les membres d’une division se situent au-dessus des membres de l’autre division du point de vue de l’expertise.

[12] Le membre du Tribunal décide du mode d’audience à utiliser et du temps à prévoir pour chaque audience. Il s’agit d’une décision discrétionnaire prise selon les circonstances de l’espèce. L’appelant n’a pas allégué que ce pouvoir discrétionnaire avait été exercé de manière inappropriée, que le choix de l’audience téléphonique avait nui à sa capacité d’exposer sa cause, ou qu’il avait manqué de temps pour le faire.

[13] Pour ces raisons, je suis convaincue que le témoignage oral proposé constituait un nouvel élément de preuve, comme les nouveaux documents. Par conséquent, pour les motifs énoncés ci-dessus, je n’ai pas permis à l’appelant de témoigner lors de l’instruction de l’appel.

Mode d’audience

[14] L’avocat de l’appelant a aussi avancé qu’il faudrait tenir une nouvelle audience pour cet appel. Il a affirmé que le but du RPC et de la Loi était de verser des prestations aux personnes incapables de travailler. On ne favorise pas l’atteinte de ce but si on voit dans le texte législatif des restrictions ou une ambigüité qui imposerait des limites pour l’appel. De telles limites auraient dû être établies dans la législation.

[15] L’avocat s’est appuyé sur l’arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] 1 RCS 27, de la Cour suprême du Canada, qui a établi que toute loi conférant des avantages doit être interprétée de façon large et libérale, toute ambigüité des textes devant se résoudre en faveur du demandeur. Il a allégué que l’affaire dont j’étais saisie était plus importante que l’affaire Rizzo qu’avait tranchée la Cour. L’affaire Rizzo portait sur le droit des employés à un préavis de licenciement en cas de faillite de leur employeur. Un demandeur dans cette affaire avait travaillé pendant une trentaine d’années et des cotisations au RPC avaient été déduites de sa paie pendant tout ce temps. Le fait de limiter sa capacité d’accéder maintenant aux avantages auxquels il avait contribué serait contraire à une interprétation large et libérale de la loi.

[16] L’avocate de l’intimé a déclaré que cet appel était régi par les articles 58 et 59 de la Loi. L’article 58 établit les seuls moyens d’appel qui peuvent être pris en considération. Cela délimite la forme de l’appel, de sorte qu’il s’apparente à un contrôle judiciaire et non à une nouvelle audience. L’avocate a fondé son argumentation sur la décision rendue par la Cour fédérale dans l’affaire Alves.

[17] L’avocate de l’intimé a ajouté que les dispositions sur l’appel contenues dans la Loi reflétaient la structure d’appel devant le Bureau du Juge-arbitre qui se trouvait dans la Loi sur l’assurance‑emploi avant la création du Tribunal. Elle a déclaré que de nombreuses décisions rendues en vertu des dispositions pertinentes de la Loi sur l’assurance-emploi avaient établi clairement que l’appel était de l’ordre du contrôle judiciaire, et qu’il ne s’agissait pas d’une nouvelle audience.

[18] L’avocate de l’intimé a aussi allégué que, même si la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social ne précisait pas qu’un appel devant la division d’appel ne correspondait pas à une nouvelle audience, la décision d’accorder la permission d’en appeler délimitait l’appel en établissant clairement les moyens d’appel pour lesquels la permission avait été accordée et les moyens n’ayant pas permis d’accorder la permission parce qu’ils ne présentaient aucune chance raisonnable de succès en appel.

[19] Enfin, l’avocate de l’intimé a affirmé que si l’affaire était instruite comme s’il s’agissait d’une nouvelle audience, cela causerait un préjudice, puisqu’elle voudrait convoquer un témoin expert pour appuyer sa position en appel.

[20] L’arrêt Rizzo examinait la façon dont il fallait interpréter la loi lorsque son libellé comportait des ambigüités. L’avocat de l’appelant a conclu à juste titre que, si une loi est ambigüe, l’ambigüité doit être réglée en faveur du demandeur. Toutefois, dans cette affaire, l’avocat n’a pas relevé d’ambigüité dans le libellé du RPC ni de la Loi.

[21] En fait, j’estime que les articles 58 et 59 de la Loi sont clairs. Seuls certains moyens d’appel doivent être pris en considération, et aucun appel n’est autorisé à moins qu’un moyen d’appel présente une chance raisonnable de succès. Aucune des parties n’a laissé entendre que les correctifs que la division d’appel pouvait apporter après avoir instruit un appel étaient ambigus.

[22] Dans les affaires F.D. et M.C. mentionnées plus haut, le Tribunal a effectué un examen détaillé de manière à déterminer si une audience d’appel tenue en vertu de la Loi était un appel de novo. Ces décisions concluaient clairement qu’une audience devant la division d’appel ne doit pas être une nouvelle audience. Comme je l’ai dit plus haut, je trouve ces décisions convaincantes. J’estime aussi, comme l’avocate de l’intimé, que le libellé des dispositions législatives et la décision Alves appuient cette conclusion.

Norme de contrôle

[23] L’avocat de l’appelant a avancé que la norme de contrôle à appliquer à la décision de la division générale était la norme de la décision correcte pour les questions de fait, les questions mixtes de fait et de droit, et les questions de droit. Il a déclaré qu’il s’agissait d’une question d’interprétation de la loi, et s’est de nouveau appuyé sur l’arrêt Rizzo. Il a affirmé que, d’après le sens ordinaire du texte de la loi pertinente, rien n’autorisait la division d’appel à accepter la décision de la division générale lorsqu’elle avait été rendue à partir de moins d’éléments de preuve. Il a aussi allégué que, puisque l’utilisation de la norme de la décision correcte serait dans l’intérêt d’un demandeur, cette norme devrait être appliquée aux décisions de la division générale.

[24] Enfin, l’avocat de l’appelant a fait valoir que, d’après l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, l’application de la norme de la décision raisonnable ne résisterait pas à une contestation devant la Cour fédérale, selon le principe d’équité.

[25] L’avocate de l’intimé a reconnu que, à la date de l’instruction de cette affaire, aucune décision de la Cour fédérale ni de la Cour d’appel fédérale ne portait sur la norme de contrôle à appliquer pour la révision d’une décision de la division générale. Elle a toutefois allégué que l’application de la norme de la décision correcte à des questions de fait ou à des questions mixtes de fait et de droit serait contraire à la nature du présent appel. Elle a aussi fait valoir que la division générale est le juge des faits. Dans ce contexte, elle ne rend pas de décisions en disposant de moins de renseignements que la division d’appel.

[26] L’avocate de l’intimé a fait référence expressément au libellé de l’article 58 de la Loi, qui permet à la division d’appel d’intervenir relativement à des questions de droit, que l’erreur de la division générale ressorte ou non à la lecture du dossier, et d’intervenir relativement à des questions de fait seulement si la division générale a commis l’erreur de façon abusive ou arbitraire, ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Selon l’avocate, cette formulation indique clairement qu’une norme de contrôle différente doit être appliquée aux questions de droit (décision correcte) et aux questions de fait (décision raisonnable).

[27] L’arrêt de principe applicable est l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9. Dans cet arrêt, la Cour suprême du Canada a conclu que, lors du contrôle d’une décision concernant des questions de fait, des questions mixtes de fait et de droit, ou des questions de droit se rapportant à la loi constitutive du tribunal, la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, c’est-à-dire qu’il faut déterminer si la décision du tribunal fait partie des issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. La norme de la décision correcte doit être appliquée aux questions de compétence et aux autres questions de droit.

[28]  Il est vrai qu’aucune cour ne s’est encore penchée sur la norme de contrôle à appliquer en particulier à un appel interjeté devant la division d’appel du Tribunal à l’encontre d’une décision de la division générale. Toutefois, dans les arrêts Atkinson c. Canada (Procureur général), 2014 CAF 187 et Kiraly c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 66, la Cour d’appel fédérale a examiné des demandes de contrôle judiciaire visant des décisions de la division d’appel à la suite d’un appel devant un tribunal de révision qui a été remplacé par la division générale. Dans les arrêts Atkinson et Kiraly, la Cour a accepté les normes de contrôle énoncées dans l’arrêt Dunsmuir.

[29] L’avocat de l’appelant n’a pu s’appuyer sur aucune source à l’exception de l’arrêt Rizzo lorsqu’il a été invité à étayer l’allégation qu’il faudrait appliquer la norme de la décision correcte. L’arrêt Rizzo examinait l’interprétation d’une loi conférant des avantages, et non la norme de contrôle à appliquer dans le cadre d’un appel. Je rejette donc cet argument.

[30] J’accepte l’argument de l’avocate de l’intimé selon lequel le choix de la norme de contrôle est lié à la nature de l’appel dont je suis saisie selon le libellé de l’article 58 de la Loi. Selon le sens ordinaire de l’article 58, la division d’appel doit intervenir lorsqu’une erreur de droit a été commise, que cette erreur ressorte ou non à la lecture du dossier. Cela indique qu’une moins grande déférence est due à la division générale en ce qui concerne les erreurs de droit. Par contre, la division d’appel doit intervenir relativement aux erreurs de fait seulement lorsque la division générale les a commises de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Cela laisse entendre qu’il faut accorder plus de déférence aux affaires comportant des questions de fait, ce qui indique que la norme de la décision raisonnable devrait s’appliquer.

[31] Je n’ai pas été convaincue par l’argument de l’appelant selon lequel les principes d’équité exigent l’application de la norme de la décision correcte, quel que soit le moyen d’appel. En fait, l’arrêt Dunsmuir laisse entendre que la norme de la décision correcte ne s’applique même pas pour toutes les erreurs de droit. Puisqu’aucune erreur de droit ne m’a été présentée dans cette affaire, je n’ai pas à trancher la question.

[32] Dans cette affaire, la permission d’en appeler a été accordée pour deux motifs, soit que la division générale pouvait avoir commis une erreur en ne tenant pas compte d’éléments de preuve concernant la capacité de fonctionner de l’appelant, et qu’elle pouvait avoir commis une erreur en ne tenant pas compte d’une explication fournie par l’appelant pour ne pas avoir cherché un autre emploi. Ces moyens d’appel sont des questions de fait. La norme de contrôle applicable est donc la norme de la décision raisonnable.

Analyse du bien-fondé de l'appel

[33] Dans les observations concernant le bien‑fondé de l’appel, l’avocat de l’appelant a résumé la preuve médicale présentée à la division générale. Il a été établi que l’appelant avait un certain nombre de limitations physiques avant la fin de sa période minimale d’admissibilité (la date limite où un demandeur doit être déclaré invalide pour pouvoir toucher une pension d’invalidité du RPC), et qu’il souffrait d’une dépression. Ces problèmes ne se sont pas réglés en dépit de médicaments, d’une perte de poids et d’autres formes de traitement. L’avocat a allégué qu’aucun élément de preuve médicale ne montrait que l’appelant pouvait travailler à la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité. Il a aussi affirmé que l’appelant ne pouvait pas être un travailleur fiable ou prévisible, et que même s’il pouvait travailler pendant quelques heures ici et là, cela n’équivaudrait pas à une occupation véritablement rémunératrice.

[34] Ces arguments peuvent être convaincants, mais ils ne se rapportent à aucun des moyens d’appel. Ils ne permettent pas à l’appelant de me persuader que la division générale a commis une erreur dans l’examen de ses capacités fonctionnelles ou d’une explication pour ne pas avoir cherché un autre emploi. L’appel ne peut être accueilli sur le fondement de ces arguments.

[35] L’avocat de l’appelant a aussi allégué que la division générale avait commis une erreur en présumant que l’appelant serait capable d’occuper un autre emploi sédentaire alors qu’aucun élément de preuve ne le montrait. D’après l’avocat, cette erreur a été aggravée par le fait que la division générale n’avait tenu compte d’aucune explication fournie par l’appelant pour ne pas avoir cherché un autre emploi. J’ai écouté l’enregistrement de l’audience de la division générale. Dans son témoignage à cette audience, l’appelant n’a offert aucune explication pour ne pas avoir cherché un autre emploi. La division générale n’a donc pas commis d’erreur en ne tenant pas compte de cet élément. La division générale a écouté la preuve orale et l’a prise en considération, comme la preuve écrite. Elle a apprécié la preuve et a rendu une décision en se fondant sur le droit applicable et sur la preuve.

[36] Dans les observations écrites, l’avocat de l’appelant s’est appuyé sur la décision rendue par la Commission d’appel des pensions dans l’affaire M.C. c. MRHDS (10 octobre 2010, CP 26420), selon laquelle les requérants qui demandent une pension d’invalidité sont censés montrer qu’ils ont fait un effort significatif pour trouver un autre emploi adapté à leurs compétences et à leurs limitations, faute de quoi ils sont tenus de fournir une explication raisonnable sous peine d’être déclarés inadmissibles. Dans l’argumentation orale, toutefois, l’avocat a soutenu qu’il ne fallait pas se fonder sur cette décision puisqu’elle portait sur une affaire distincte de celle dont je suis saisie. L’avocat a fait valoir que l’appelant avait éprouvé des difficultés pendant longtemps dans son dernier emploi, et qu’il serait injuste de s’attendre à ce qu’il trouve un autre emploi sédentaire, faute de quoi il n’aurait pas droit à une pension d’invalidité du RPC.

[37] L’obligation de trouver un autre emploi n’advient que si le Tribunal est convaincu qu’il existe une capacité de travailler. Par conséquent, s’il est déterminé qu’une personne qui demande une pension d’invalidité du RPC n’a pas la capacité d’assumer une occupation véritablement rémunératrice, cette personne n’est pas tenue d’établir qu’elle ne pouvait pas obtenir ni conserver tout autre emploi en raison de son invalidité. Dans la présente affaire, la division générale a examiné la preuve et a conclu que l’appelant avait conservé une certaine capacité de travail. Elle a ensuite vérifié s’il avait présenté des éléments de preuve montrant qu’il ne pouvait pas obtenir ou conserver un emploi en raison de son invalidité, et a conclu que ce n’était pas le cas. La division générale n’a pas commis d’erreur sur ce plan.

[38] Je reconnais que le dernier emploi de l’appelant était sédentaire. Toutefois, on ne peut conclure automatiquement que, s’il a eu de la difficulté à assumer ses fonctions dans cet emploi, il ne serait pas capable d’occuper un autre emploi sédentaire ou de se recycler. Il existe une grande variété d’emplois sédentaires, et les exigences physiques et mentales qui s’y rattachent sont fort différentes. Étant donné l’absence d’une preuve que l’appelant avait tenté d’occuper un autre emploi, il n’était pas déraisonnable pour la division générale de conclure que l’appelant ne s’était pas acquitté de son obligation selon la loi d’établir qu’il ne pouvait pas obtenir ni conserver un emploi en raison de son invalidité.

[39] L’avocate de l’intimé a affirmé que la division générale n’avait pas déraisonnablement omis de tenir compte d’éléments de preuve concernant les capacités fonctionnelles de l’appelant, puisque la décision fait référence à la preuve soumise par l’appelant selon laquelle il avait travaillé alors qu’il était atteint du syndrome du côlon irritable et d’une diverticulite, et à des rapports médicaux abordant ses capacités fonctionnelles en 2014. L’avocat de l’appelant n’a pas répliqué à cet argument. La division générale a fait mention de ce témoignage de l’appelant. Il n’est pas nécessaire qu’une décision écrite mentionne chacun des éléments de preuve qui ont été présentés, puisque le décideur est présumé avoir examiné l’ensemble de la preuve (Simpson c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 82). Rien n’indique que cette présomption a été réfutée dans ce cas-ci.

[40] Enfin, l’intimé a fait valoir que l’appelant n’avait pas établi que la décision de la division générale était déraisonnable, et qu’il s’agissait d’une décision raisonnable, pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[41] J’ai examiné les arguments présentés par les parties verbalement et par écrit. Le fardeau de la preuve incombe à l’appelant dans cet appel. Ses arguments ne m’ont pas convaincue que la décision de la division générale est déraisonnable. La division générale a considéré la preuve médicale qui lui a été présentée. Elle a aussi tenu compte du témoignage de l’appelant. Elle a  tenu compte de son âge, de sa scolarité et d’autres caractéristiques personnelles. Elle a tenu compte de la preuve relative à ses capacités fonctionnelles.

Conclusion

[42] Pour ces motifs, je conclus que la décision de la division générale était raisonnable et peut se justifier au regard des faits et du droit. L’appel est rejeté.

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