Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] Le demandeur demande une permission d’en appeler de la décision de la division générale datée du 16 mars 2015. La division générale a déterminé que le demandeur n’était pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, après en être arrivée à la conclusion que son invalidité n’était pas « grave » en date de la fin de sa période minimale d’admissibilité, soit au 31 décembre 2009. Le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler le 10 juin 2015. Son avocat a fait de nombreuses observations.  Pour que la présente demande soit accueillie, je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Observations

[3] L’avocat du demandeur affirme que l’appel a une chance raisonnable de succès pour les raisons suivantes, à savoir que la division générale :

  1. (a) a omis de fournir les services d’un interprète, malgré le fait que le demandeur [traduction] « ne comprenait pas l’anglais »;
  2. (b) a omis de tenir compte des notes cliniques et des rapports médicaux établis durant la période allant de 2007 à 2009;
  3. (c) a mal interprété le contenu des rapports médicaux et mal compris les fondements pathologiques des troubles chroniques du demandeur causés par des facteurs de nature auto-immune;
  4. (d) a tenu compte de la colite ulcéreuse, mais a omis de prendre en considération les troubles secondaires et l’effet cumulatif de l’ensemble de ces problèmes de santé;
  5. (e) a été trompée par l’employeur du demandeur lorsque ce dernier lui a indiqué que ledit demandeur avait été capable de travailler jusqu’en 2013 alors qu’en fait, il souffrait d’une invalidité de longue durée depuis plusieurs années;
  6. (f) a erré en accordant du poids aux observations du ministre voulant que le demandeur avait fait peu de tentatives de retour au travail, sans tenir compte des efforts qu’il avait consentis à cette fin;
  7. (g) a erré en accordant trop de poids à l’opinion médicale du Dr Kreaden et en ne tenant aucunement compte des renseignements que contiennent les notes cliniques du médecin de famille.

[4] L’intimé n’a déposé aucune observation écrite.

Droit applicable

[5] Certains moyens défendables pouvant faire en sorte que l’appel ait du succès sont requis pour que la permission d’en appeler soit accordée :  Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (C.F.). La Cour d’appel fédérale a établi que des questions défendables en droit reviennent à établir si, sur le plan juridique, un appel a une chance raisonnable de succès :  Fancy c. Canada (Procureur général) 2010 CAF 63.

[6] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) établit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] Les moyens d’appel doivent recouper l’un de ceux énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS. En fin de compte, je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès avant d’accorder une permission d’en appeler.

Analyse

(a) Interprète

[8] L’avocat note que le demandeur est né à l’étranger et qu’il est venu au Canada en 1987. Le demandeur a étudié en tamoul, sa langue maternelle, jusqu’à la 10e année.  Il maîtrisait peu l’anglais après son arrivée au Canada.  L’avocat soutient que le demandeur a une faible connaissance de l’anglais.  L’audience devant la division générale s’est tenue sans le concours d’un interprète. L’avocat affirme que l’on aurait dû se rendre compte tout de suite que le demandeur avait une connaissance limitée de l’anglais lorsqu’on a comparé son témoignage au dossier documentaire, et que le membre de la division générale aurait dû vérifier s’il avait besoin des services d’un interprète.  L’avocat reconnaît que le demandeur n’a pas sollicité les services d’un interprète, mais il avance que la division générale a omis d’évaluer ce besoin. Il soutient que [traduction] « l’aide qu’un interprète aurait pu apporter [au demandeur] aurait été d’autant plus importante au regard du fait qu’il incombait au demandeur de convaincre le Tribunal. »

[9] L’avocat affirme que lorsque le demandeur a déclaré dans le cadre de son témoignage qu’il pourrait lever un poids d’environ 25 livres sur une distance de 200 à 300 mètres, qu’il pourrait marcher quatre à cinq kilomètres en une heure, qu’il ne pouvait rester assis debout durant plus d’une heure et qu’il pouvait rester debout pendant deux à trois heures, cela aurait dû [traduction] « souleve[r] de sérieux doutes à propos de sa compréhension des choses. »  De fait, le demandeur n’a pas fait cette déposition; son soi-disant témoignage à propos de ses diverses capacités ou contraintes fonctionnelles figurait plutôt dans les réponses qu’il a inscrites sur le questionnaire qui accompagnait sa demande de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

[10] Je ne crois vraiment pas que ces observations sur le témoignage du demandeur, comme citées par l’avocat, démontrent qu’il ne comprenait pas suffisamment l’anglais à l’audience.

[11] En l’espèce, le demandeur comptait sur les services d’un représentant légal avant la tenue de l’audience devant la division générale et aussi lors de cette audience. (L’avocat actuel du demandeur ne l’a pas représenté lors de l’audience devant la division générale.  Devant la division générale, le demandeur s’est fait représenter par un parajuriste autorisé, bien que ladite division générale l’ait erronément désigné comme représentant de façon générique.)

[12] En avril 2014, le représentant légal du demandeur a rempli un formulaire de renseignements en matière d’audience au nom dudit demandeur (document GT3).  Dans ce document, il a indiqué que le demandeur parle l’anglais suffisamment bien pour être en mesure de présenter son appel et de répondre à des questions dans cette langue durant l’audience.  Il aurait pu aussi préciser sur ce formulaire la ou les langues dans lesquelles le demandeur aurait été à l’aise de s’exprimer.

[13] Si le demandeur avait exigé les services d’un interprète, il aurait fallu que son représentant légal de l’époque ou lui-même en avise le Tribunal de la sécurité sociale ou la division générale et qu’il prenne des arrangements à cette fin, même si c’est seulement durant l’audience qu’il est devenu évident pour le demandeur ou son représentant légal que le recours à un interprète s’imposait.  Le fait qu’une personne est peut-être née à l’étranger, qu’elle est venue au Canada en tant que jeune adulte et qu’elle avait une connaissance relativement limitée de l’anglais n’implique pas nécessairement qu’elle n’a pas la capacité de comprendre cette langue et de témoigner dans ladite langue.  Le demandeur a consulté plusieurs professionnels de la santé et, pourtant, il n’est pas évident qu’il a eu besoin d’un interprète pour interagir avec eux. On a noté que sa femme l’avait accompagné durant une visite, mais il appert qu’il a aussi consulté ses médecins seul, sans l’aide d’un interprète.  Même si la plupart des rapports de consultation médicale sont relativement brefs, ils révèlent que le demandeur a été en mesure d’énumérer ses antécédents familiaux et médicaux de manière cohérente.  Et de fait, la division générale a déterminé que le demandeur avait la compétence nécessaire pour témoigner en anglais dans la mesure où il était capable de répondre directement à toute question qu’on lui posait.  Évidemment, le représentant légal du demandeur connaissait mieux en principe ledit demandeur que la division générale le connaissait elle-même, et si son client avait eu des lacunes linguistiques et que les services d’un interprète auraient donc été requis, il l’aurait mentionné.

[14] Compte tenu des moyens d’appel, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

(b) Dossiers médicaux pour la période 2007-2009

[15] La Cour fédérale d’appel a soutenu qu’un décideur n’était pas obligé d’énumérer les éléments de preuve qui lui ont été présentés dans la mesure où « il est présumé avoir examiné l’ensemble de la preuve » : Simpson c. Canada (Procureur général) 2012 CAF 82.  Quoi qu’il en soit, cette présomption peut être réfutée.

[16] Au paragraphe 10 de la section de sa décision consacrée à la preuve, la division générale indique qu’elle avait soigneusement examiné et pris en considération l’ensemble de la preuve médicale et écrite figurant dans le dossier d’audience.

[17] L’avocat laisse entendre que lorsque la division générale indique au paragraphe 42 de sa décision que [traduction] « des preuves médicales présentées au Tribunal datent de quelques années après [la période minimale d’admissibilité] de l’appelant et ne permettent pas de faire une évaluation rétrospective », elle se trouve à dire qu’elle a négligé de tenir compte de quelque élément que ce soit de la preuve médicale étant donné que cette preuve a été établie après la période minimale d’admissibilité.

[18] L’avocat soutient que la division générale a omis de tenir compte des notes cliniques et des rapports médicaux établis durant la période allant de 2007 à 2009 lorsqu’elle a évalué la gravité de l’invalidité du demandeur durant sa période minimale d’admissibilité et jusqu’à la fin de celle-ci.  En particulier, l’avocat affirme que la division générale n’a pas pris en considération les notes cliniques du médecin de famille qui avait consigné les problèmes de santé rapportés par le demandeur, ni les observations et conclusions de ce médecin qui portaient sur l’état de santé du demandeur durant la période minimale d’admissibilité ou à la fin de celle-ci.  L’avocat mentionne que ces dossiers cliniques se trouvent dans le dossier d’appel, [traduction] « à partir du [document] GT- 1 ».  (L’avocat n’a pas indiqué les pages, mais je note que les dossiers antérieurs à 2010 figurent aux pages 74 à 167.)

[19] Si l’avocat avait correctement cité la décision, il aurait déclaré que [traduction] « plusieurs des rapports médicaux présentés au Tribunal datent de quelques années après [la période minimale d’admissibilité] de l’appelant et ne permettent pas de faire une évaluation rétrospective. » (Passage mis en gras par mes soins)  Si cela avait été la seule déclaration faite par la division générale relativement au sujet des dossiers qu’elle a évalués, je n’aurais pas nécessairement déduit que cela signifiait que la division générale avait omis de tenir compte de l’ensemble de la preuve médicale qui lui avait été présentée, puisqu’on fait clairement allusion ici aux seuls rapports qui ne permettent pas en général de faire une évaluation rétrospective.

[20] Quoi qu’il en soit, lorsqu’elle a examiné la preuve lui ayant été présentée, la division générale a aussi écrit ce qui suit :

[Traduction] [Le rapport daté du 7 mars 2011 et qui provenait du gastroentérologue] est la seule preuve médicale qui renvoie à la date à laquelle l’appelant était admissible à une pension d’invalidité pour une dernière fois.  (Mis en gras par mes soins)

[21] Il est indiqué dans la décision de la division générale qu’aucun autre élément de preuve – hormis le rapport du 7 mars 2011 établi par le gastroentérologue – ne portait sur l’état de santé du demandeur durant sa période minimale d’admissibilité ou à la fin de celle-ci.

[22] Il se pourrait fort bien qu’au moment où la division générale a indiqué que le rapport du gastroentérologue daté du 7 mars 2011 constituait [traduction] « la seule preuve médicale », elle faisait allusion à des rapports médicaux. Or, même si à ce stade-ci, je n’ai pas encore consulté le dossier d’audience en profondeur (document GT1), je note qu’au moins trois rapports de consultation ont été préparés à peu près durant la période minimale d’admissibilité.  Ces rapports ont été établis par le gastroentérologue le 20 janvier, le 19 mars et le 27 août 2009 (pages 90, 77 et 74, respectivement).  Le gastroentérologue a aussi préparé une déclaration supplémentaire du médecin consultant en mai 2009 (pages GT1-75 et 76).  Je cite ces rapports afin, tout simplement, de démontrer qu’il y avait d’autres éléments de preuve médicaux à part le rapport daté du 7 mars 2011, lequel traite de l’état dans lequel se trouvait le demandeur durant ou avant sa période minimale d’admissibilité.

[23] Si la division générale citait la preuve médicale à proprement parler, et qu’elle s’intéressait surtout à la période minimale d’admissibilité, il aurait alors été aussi question, en plus des rapports médicaux que j’ai mentionnés, des résultats de tests de laboratoire obtenus en janvier 2009 (pages GT1-89 et 92) et en mars 2009 (pages GT1-81 et 82).

[24] Le fait que la division générale laisse entendre qu’il n’y avait pas d’élément de preuve ni de rapport médicaux qui traitaient de l’invalidité du demandeur durant sa période minimale d’admissibilité, hormis le rapport du gastroentérologue daté du 7 mars 2011, donne lieu à un moyen défendable quant à la question de savoir si la division générale a tenu compte de l’ensemble de la preuve médicale qui lui a été présenté.  Compte tenu de ce moyen d’appel, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

(c) Étiologie

[25] L’avocat affirme que la division générale a mal interprété le contenu des rapports médicaux et qu’elle a mal compris les fondements pathologiques des troubles chroniques du demandeur causés par des facteurs de nature auto-immune.  Il soutient que ce faisant, la division générale a erré en concluant que le demandeur n’avait pas commencé à souffrir d’arthrite dégénérative séronégative avant 2014. Il s’appuie sur les rapports médicaux du 14 août 2014 préparés par le Dr Amba, lesquels, selon lui, décrivent le lien auto-immun qui existe entre la colite ulcéreuse et l’arthrite dégénérative.  L’avocat laisse entendre que ce lien permet d’établir définitivement que le demandeur avait dû souffrir d’arthrite dégénérative auparavant, mais il n’a pas indiqué quand cela avait peut-être commencé.

[26] En fait, la division générale a reconnu qu’il existait un lien entre les deux maladies, mais elle a clairement statué que la présence d’une colite ulcéreuse n’avait pas entraîné l’apparition immédiate ou concurrente d’arthrite dégénérative.  Effectivement, il semble que la division générale a reconnu que le demandeur souffrait peut-être d’arthrite périphérique avant la période minimale d’admissibilité, mais elle a rejeté l’idée voulant qu’une symptomatologie quelconque liée à la maladie ait pu être grave ou qu’elle ait nécessairement pu le devenir. La division générale a écrit ce qui suit :

[Traduction] [44]  L’appelant se plaint aussi de douleurs articulaires, particulièrement aux épaules. Le Tribunal se fie au rapport du Dr Amba, un rhumatologue, et estime que l’appelant souffrait d’arthrite périphérique qui était liée à sa colite ulcéreuse (...) Malheureusement, la preuve concernant l’arthrite périphérique du demandeur a été présentée après le 31 décembre 2009 et ne faisait pas mention de l’état dans lequel l’appelant se trouvait à l’époque. Comme je m’appuie sur l’expertise du Dr Amba, qui jugeait que l’arthrite résultait de la gestion de la colite, le Tribunal en conclut que dans la mesure où la colite de l’appelant était sous contrôle de 2009 à 2011, il n’existait pas de problème d’arthrite grave à l’époque (...) (Mis en gras par mes soins)

[27] La première mention du rôle qu’un problème d’arthrite inflammatoire dans le genou droit a joué dans l’apparition d’une colite ulcéreuse figure dans le rapport de consultation du Dr Amba daté du 22 mars 2012.  Le demandeur avait eu des problèmes relativement à ses articulations, particulièrement au niveau de son genou droit, durant les deux années précédentes. Lorsqu’il a examiné le demandeur, le Dr Amba n’a pas découvert de marqueur d’arthrite positif ou séronégatif, même s’il a noté que les radiographies révélaient de l’arthrite dégénérative bilatérale antérieure ainsi que des changements précoces d’origine dégénérative dans ses chevilles.  Selon le diagnostic posé par le Dr Amba, le demandeur souffrait d’arthrite dégénérative et peut-être aussi d’arthrite inflammatoire séronégative liée à une colite ulcéreuse (page GT1-239).

[28] Si le demandeur a montré des signes ou s’est plaint de douleurs articulaires graves ou d’autres symptômes liés à de l’arthrite périphérique durant ou avant sa période minimale d’admissibilité, son l’avocat n’en a pas fait mention.  Je constate que le demandeur s’était fait radiographier les deux genoux en juin 2008, mais ces radiographies (qui ont révélé que l’état de ses genoux était normal) ne permettent pas d’établir la gravité de toute symptomatologie qu’il présentait peut-être à l’époque (page GT1-101).  Il se peut que l’arthrite périphérique fût sous-jacente durant la période déterminante, mais cette considération ne permet pas à elle seule d’établir que les symptômes étaient graves ou qu’on aurait pu présumer qu’ils l’étaient, et il est certain qu’aucun avis d’expert n’a été présenté à la division générale pour étayer toute observation de ce genre.

[29] Je ne suis pas convaincue que ce moyen donne lieu à une cause défendable ou que l’appel a une chance raisonnable de succès quant à cette question-là.

(d) Troubles secondaires et ensemble de la preuve

[30]  L’avocat avance que la division générale a tenu compte de la colite ulcéreuse du demandeur en tant que sa principale invalidité, mais qu’elle a omis de prendre en considération les troubles secondaires et l’effet cumulatif de ces problèmes de santé. Il affirme, en d’autres mots, que la division générale n’a pas tenu compte de l’ensemble de la preuve lorsqu’elle a évalué la gravité de l’invalidité du demandeur.  Il soutient aussi que le demandeur souffrait de nombreux troubles de santé (tendinite à la coiffe du rotateur, arthrite dégénérative, diabète, prostatite, tendinite bicéphale bilatérale, infection urinaire, abcès périanal, dépression, anxiété et insomnie), qui sont autant de troubles dont la division générale aurait dû prendre en compte.

[31] L’avocat affirme que la division générale a erré en concluant que les troubles du demandeur n’étaient pas graves, et ce, sans tenir compte des dossiers cliniques du médecin de famille, de la nature dégénérative et inflammatoire de ses troubles auto-immuns et de l’efficacité des traitements.

[32] Évidemment, certaines preuves documentaires ont dû être présentées à la division générale pour qu’elle puisse en tenir compte et les évaluer, le tout dans le contexte de la gravité de l’invalidité du demandeur.  Même s’il y avait des éléments de preuve relatifs à la tendinite aux épaules et à l’arthrite dégénérative ou périphérique, et bien que la division générale ait traité de ces problèmes à la page 12 de sa décision, d’emblée, je ne vois aucune opinion ou mention de nature médicale se rapportant à une prostatite, à une infection urinaire, à la dépression, à l’anxiété ou à l’insomnie dans les dossiers médicaux.

[33] Le Dr David Kreaden, un gastroentérologue, a noté qu’un abcès périanal était apparu chez le demandeur, mais que ce dernier avait subi une incision et un drainage d’urgence en septembre 2007, après quoi il ne semblait pas avoir eu de problèmes.  Le Dr Kreaden a aussi noté que le demandeur avait commencé à souffrir de diabète entraînant la dépendance aux stéroïdes, mais qu’en mars 2009, cela s’était réglé grâce à la régression de cette dépendance.

[34] Hormis la tendinite aux épaules et l’arthrite dégénérative, et à moins que l’avocat soit en mesure de démontrer que ces autres troubles de santé étaient présents durant ou vers la période minimale d’admissibilité, ou qu’ils sont apparus depuis, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès étant donné que la division générale a omis de tenir compte de l’ensemble de la preuve médicale.

(e) Déclaration de l’employeur

[35] L’avocat affirme que la déclaration de l’employeur datée du 4 mai 2013 a peut-être amené la division générale à croire erronément que le demandeur avait été capable de travailler jusqu’en 2013, alors qu’en fait, il avait touché des prestations d’invalidité de longue durée jusqu’en 2011, année lors de laquelle il avait été mis à pied de façon permanente.

[36] La preuve présentée à la division générale veut que l’employeur a déclaré que le demandeur recevait des prestations d’invalidité de longue durée depuis le 15 décembre 2007 et qu’il avait été mis à pied en janvier 2009.  Compte tenu de cela, il est évident que la division générale savait que le demandeur touchait des prestations d’invalidité de longue durée.  Je ne vois aucune mention dans la décision qui indiquerait que l’on pourrait considérer que la division générale avait été amenée par l’employeur à croire erronément que le demandeur avait peut-être travaillé ou avait été en mesure de le faire jusqu’en 2013.  Compte tenu des moyens d’appel, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

(f) Observations du ministre et efforts consentis pour retourner au travail

[37] L’avocat affirme que la division générale a erré quant au poids qu’elle a accordé aux observations du ministre.  Je ne dirais pas que c’est le poids accordé à ces observations qui est en cause, puisque les observations des parties ne sont pas considérées comme des éléments de preuve.  La division générale peut accepter ou rejeter les observations d’une partie, mais elle ne leur accorde aucun poids.

[38] Cela dit, je comprends que les observations de l’avocat constituent essentiellement des allégations selon lesquelles la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte des documents qui avaient été portés à sa connaissance.  En l’espèce, l’avocat soutient que la division générale a erré en concluant que le demandeur n’avait fourni aucune preuve pour démontrer qu’il cherchait du travail ou qu’il avait essayé de trouver un emploi qui lui convenait.  L’avocat a cité deux [traduction] « exemples » d’efforts faits par le demandeur pour recommencer à travailler.  Il désirait, entre autres, retourner au travail et il avait expliqué qu’il ne travaillait pas parce que son l’employeur ne lui avait pas offert d’horaire graduel. Cela justifie la réévaluation de la preuve, laquelle ne porte pas seulement sur une demande de permission d’en appeler, puisque les considérations relatives à une telle permission doivent nécessairement recouper les moyens énumérés au paragraphe 58(1) de la LMEDS. Quoi qu’il en soit, je n’aurais pas considéré qu’un désir de retourner au travail équivalait à des tentatives de trouver un emploi.

[39] Compte tenu des moyens d’appel, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

(g) Poids de la preuve

[40] L’avocat avance que la division générale a accordé trop d’importance à l’opinion médicale du Dr Kreaden et qu’elle n’a aucunement tenu compte des renseignements figurant dans les notes cliniques du médecin de famille.

[41] Comme cela concerne tout simplement le poids accordé au rapport, cette observation ne donne pas lieu à une cause défendable.  Dans Simpson, la Cour fédérale d’appel refuse d’intervenir dans le processus par lequel le décideur accorde du poids à la preuve et elle soutient à cet égard qu’à proprement parler, cela « relève du juge des faits. »

[42] Essentiellement, l’avocat demande que l’on réévalue la preuve présentée à la division générale.  Aux fins d’une demande de permission d’en appeler, je dois me borner à ne tenir compte que des moyens d’appel énoncés au paragraphe 58(1) de la LMEDS. De façon générale, ce paragraphe-là ne m’habilite pas à entreprendre la réévaluation d’une preuve qui a été présentée à la division générale.

[43] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès si ce moyen est invoqué.

Appel

[44] Les questions que les parties pourraient vouloir aborder en appel comprennent les suivantes :

  1. (i) Quel est le niveau de déférence qui doit être observé par la division d’appel à l’égard de la division générale?
  2. (ii) Compte tenu du moyen sur la foi duquel la permission d’en appeler a été accordée, la division générale a-t-elle rendu une décision fondée sur une conclusion de fait erronée qu’elle a tirée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance?
  3. (iii) Compte tenu du moyen sur la foi duquel la permission d’en appeler a été accordée, quelle est la norme de contrôle applicable et quelles mesures de redressement, le cas échéant, seraient appropriées?
  4. (iv) Si le demandeur démontre que la division générale a omis de traiter la preuve médicale fournie pour la période allant de 2007 à 2009 et qu’il établit que son invalidité était grave en date de la fin de sa période minimale d’admissibilité ou avant la fin de cette période, comment cela aurait-il préséance sur le paragraphe 43 de la décision, dans lequel la division générale en arrive à la conclusion que le demandeur n’était pas invalide à ce moment-là aux fins du Régime de pensions du Canada?

[45] J’invite les parties à faire aussi des observations au sujet du mode d’audience (l’audience devrait-elle être tenue par téléconférence, vidéoconférence ou tout autre moyen de télécommunication, ou en personne ou encore au moyen de questions et réponses écrites?).  Si une partie demande que l’audience soit tenue autrement qu’au moyen de questions et réponses, je l’invite à m’indiquer un délai provisoire qui s’appliquera à la transmission d’observations.

Conclusion

[46] La demande est accordée.

[47] La présente décision sur la demande de permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

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