Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] Ceci est une demande de prorogation du délai applicable au dépôt d’une demande de permission d’en appeler, dont l’objet est la décision de la division générale datée du 19 août 2014.

[2] La division générale a déterminé que la demanderesse n’était pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, après en être arrivée à la conclusion que son invalidité n’était pas « grave » en date de la fin de sa période minimale d’admissibilité, soit au 31 décembre 2011. La décision de la division générale a été postée à la demanderesse en août 2014 ou vers cette date, puis à nouveau le 25 février 2015.

[3] La demanderesse demande la permission d’en appeler de la décision de la division générale. Elle a déposé le formulaire de « demande de permission d’en appeler à la division d’appel » le 15 juin 2015.  Elle n’a pas indiqué quand elle a peut-être reçu la décision de la division générale, ni expliqué pourquoi son appel a peut-être été déposé tardivement ou pourquoi elle en appelait de cette décision, et sur quels moyens elle s’appuyait à cette fin.

[4] Si la demanderesse n’a pas fait sa demande de permission d’en appeler dans les 90 jours suivant le moment où la décision de la division générale lui a été communiquée, elle doit demander une prorogation de délai pour le dépôt de cette demande. Pour que celle-ci soit accueillie, la demanderesse doit me convaincre que sa demande de permission d’en appeler a été déposée dans les 90 jours suivant le moment où la décision de la division générale lui a été communiquée.  Ou, si la demande de permission d’en appeler a été déposée en retard, la demanderesse doit me convaincre soit d’exercer mon pouvoir discrétionnaire et de proroger le délai applicable au dépôt de la demande de permission d’en appeler, soit de la soustraire à l’obligation de se conformer aux exigences officielles en matière de dépôt prévues dans le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale. Deuxièmement, la demanderesse doit aussi me convaincre que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[5] Les questions qui me sont présentées sont donc les suivantes :

  1. (a) Quand la demanderesse a-t-elle reçu la décision de la division générale?
  2. (b) La demanderesse a-t-elle déposé sa demande de permission d’en appeler à temps, c’est-à-dire dans les 90 jours suivant le moment où la décision de la division générale lui a été communiquée?
  3. (c) Si la demanderesse a tardé à déposer sa demande de permission d’en appeler, la division d’appel devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire et proroger le délai applicable au dépôt de cette demande?
  4. (d) Si la demanderesse a tardé à déposer sa demande de permission d’en appeler et qu’elle ne peut se prévaloir d’une prorogation du délai s’appliquant au dépôt de cette demande, existe-t-il des circonstances spéciales en l’espèce qui justifieraient que je modifie les dispositions officielles relatives au dépôt ou que je soustraie la demanderesse à l’obligation de s’y conformer?
  5. (e) Si la demanderesse a déposé sa demande de permission d’en appeler à temps ou si elle a plutôt tardé à le faire et que je lui accorde une prorogation de délai, ou encore que je modifie les exigences officielles en matière de dépôt ou que j’exempte la demanderesse de s’y conformer, l’appel aura-t-il une chance raisonnable de succès?  Autrement dit, y a-t-il des moyens d’appel parmi ceux prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS) qui auraient une chance raisonnable de succès?

Contexte

[6] Il est nécessaire de décrire quelque peu le contexte de la procédure.

[7] La division générale a rendu sa décision le 19 août 2014.  Le Tribunal de la sécurité sociale a posté un exemplaire de la décision de la division générale aux parties le 21 août 2014.  Le Tribunal de la sécurité sociale a indiqué aux parties que si l’une d’entre elles souhaitait en appeler de cette décision, elle devait demander une permission à cette fin dans les 90 jours suivant la communication de cette décision, et que pour obtenir cette permission, elle devrait démontrer à la division d’appel qu’un ou plusieurs moyens d’appel existaient.

[8] Le 18 février 2015, la demanderesse a communiqué avec le Tribunal de la sécurité sociale afin de s’informer de l’état de l’appel qu’elle avait déposé auprès de la division générale.  Le Tribunal de la sécurité sociale lui a indiqué que la décision lui avait été postée le 21 août 2014.  À ce stade-ci, la demanderesse a indiqué qu’elle avait de nouvelles coordonnées et qu’elle n’avait donc pas reçu la décision de la division générale. La demanderesse aurait déménagé à un certain moment dans le passé, mais elle avait négligé d’informer le Tribunal de la sécurité sociale de ce changement d’adresse.  De fait, le dossier d’audience révèle que la correspondance envoyée à la demanderesse en décembre 2013 avait été retournée au Tribunal de la sécurité sociale et qu’elle portait la mention [traduction] « Déménagé ».

[9] Durant la téléconférence du 18 février 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a mentionné à la demanderesse que la division générale avait rejeté son appel.  La demanderesse a indiqué qu’elle envisagerait d’en appeler de cette décision et qu’entre-temps, elle télécopierait peut-être une demande en ce sens à la division d’appel, étant donné qu’elle serait partie du 18 mars au 29 mai 2015.

[10] Le 25 février 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a posté un exemplaire de la décision à la nouvelle adresse de la demanderesse.  Il était indiqué dans la lettre qui accompagnait ce document que si la demanderesse voulait en appeler de la décision, elle devait demander une permission à cette fin dans les 90 jours suivant la communication de cette décision, et que pour obtenir cette permission, elle devrait démontrer à la division d’appel qu’un ou plusieurs moyens d’appel existaient.

[11] Le 13 mars 2015, la demanderesse a présenté une lettre à la division générale.  On ne sait pas si cette lettre était censée constituer sa demande de permission d’en appeler auprès de la division d’appel, car la demanderesse n’y mentionnait pas expressément qu’elle voulait en appeler de la décision de la division générale. Elle y avait du reste indiqué qu’elle n’avait pas travaillé depuis qu’elle s’était fait opérer à la main gauche le 5 janvier 2010 et que jusque-là, elle n’avait pas été capable de transporter quoi que ce soit.

[12] Le Tribunal de la sécurité sociale a écrit à la demanderesse le 23 mars 2015 et lui a mentionné que la décision de la division générale était considérée comme définitive et que la division générale n’avait donc pas le pouvoir de réévaluer son appel.  Le Tribunal de la sécurité sociale a aussi indiqué à la demanderesse que si elle voulait, elle devait demander une permission à cette fin dans les 90 jours suivant le moment où cette décision lui avait été communiquée, et que pour obtenir cette permission, il faudrait qu’elle démontre qu’un ou plusieurs moyens d’appel s’appliquent à son cas. Comme la demanderesse était apparemment partie du 18 mars au 29 mai 2015, c’est seulement lors de son retour à la fin de mai 2015 qu’elle avait reçu, en principe, la lettre du Tribunal de la sécurité sociale datée du 23 mars 2015.

[13] Le 15 juin 2015, la demanderesse a déposé la demande de permission d’en appeler.

[14] Le 17 juin 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a écrit à la demanderesse afin de l’aviser que sa demande était incomplète et qu’il y manquait des renseignements devant obligatoirement être fournis. Le Tribunal de la sécurité sociale a indiqué qu’à ce titre, il considérait que sa demande n’avait pas encore été déposée et qu’il ne pourrait pas la traiter avant d’avoir reçu tous ces renseignements. Le Tribunal de la sécurité sociale a précisé qu’il fallait lui communiquer les motifs justifiant l’octroi d’une permission ainsi que tout énoncé de faits sur lequel la demanderesse fondait sa demande de permission d’en appeler, et qui avait été présenté à la division générale.  Le Tribunal de la sécurité sociale a mentionné à la demanderesse que s’il recevait tous les renseignements manquants au plus tard le 17 juillet 2015, il considérerait que la demande est complète et qu’elle avait été reçue le 15 juin 2015.

[15] Le 25 juin 2015, la demanderesse a communiqué avec le Tribunal de la sécurité sociale, car elle ne comprenait pas bien en quoi consistait l’énoncé de fait qu’on lui demandait de fournir.  Le 26 juin 2015, la demanderesse a communiqué à nouveau avec le Tribunal de la sécurité sociale. Cette fois-là, elle voulait savoir pourquoi le Tribunal de la sécurité sociale lui avait demandé de fournir des renseignements manquants. Le Tribunal de la sécurité sociale lui a conseillé de remplir le formulaire dans ses propres mots et du mieux qu’elle pouvait.

[16] Le 3 juillet 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a reçu la lettre de la demanderesse datée du 29 juin 2015. La demanderesse a confirmé qu’elle souhaitait en appeler de la décision.  Le 9 juillet 2015, le Tribunal de la sécurité sociale a confirmé qu’il considérait à partir de ce moment-là que la demande de permission d’en appeler était complète.

Observations

[17] Dans sa lettre datée du 29 juin 2015, la demanderesse a écrit ce qui suit :

[Traduction] Ceci est la lettre dont vous avez besoin pour présenter un appel au Tribunal.  Je suis très (...) de vous parler de cet appel au Tribunal. Je ne sais rien de cette histoire.  Seule l’Assurance Sun Life ici à Edmonton m’a parlé de cela, étant donné que je reçois une pension mensuelle de cette compagnie pour mon invalidité depuis janvier 2010.  Je travaille au Royal Alexandra Hospital ici à Edmonton (AB) aux services X. L’an prochain, j’aurai déjà 65 ans le X X.  J’espère que la Pension de la sécurité de la vieillesse me soutiendra.  (sic)

[18] L’intimé n’a déposé aucune observation écrite.

Analyse

[19] Certains moyens défendables pouvant faire en sorte que l’appel ait du succès sont requis pour que la permission d’en appeler soit accordée :  Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (C.F.). La Cour d’appel fédérale a établi que des questions défendables en droit reviennent à établir si, sur le plan juridique, un appel a une chance raisonnable de succès :  Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 A.C.F. 63.

[20] Le paragraphe 58(1) de le la LMEDS prévoit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

(a) Quand la décision de la division générale a-t-elle été communiquée à la demanderesse?

[21] Le Tribunal de la sécurité sociale a d’abord posté un exemplaire de la décision de la division générale aux parties le 21 août 2014.  La demanderesse n’a pas reçu la décision cette fois-là, car elle avait déménagé.  Le Tribunal de la sécurité sociale a renvoyé la décision le 25 février 2015.

[22] En vertu de l’alinéa 19(1)a) du Règlement, je tiens pour acquis que la décision de la division générale a été communiquée à la demanderesse 10 jours après avoir été mise à la poste le 25 février 2015.  Par conséquent et compte tenu du fait que le 10e jour tombait durant la fin de semaine et que de manière réaliste, il n’y aurait pas eu de livraison postale à ce moment-là, je considère que la décision a été communiquée à la demanderesse le 9 mars 2015.

(b) La demanderesse a-t-elle déposé sa demande de permission d’en appeler à temps?

[23] Aux termes de l’alinéa 57(1)b) de la LMEDS, la demanderesse disposait de 90 jours après la communication de la décision pour déposer sa demande de permission d’en appeler.  Je calcule qu’elle avait donc jusqu’au 7 juin 2015 pour présenter cette demande à la division d’appel.

[24] Je suis prête à statuer que subséquemment à la communication de la décision à la demanderesse, cette dernière a déposé une demande de permission d’en appeler le 13 mars 2015 en même temps que sa lettre datée du 6 mars 2015.  Je suis disposée à tirer cette conclusion étant donné que lors de la téléconférence à laquelle a participé le Tribunal de la sécurité sociale le 18 février 2015, la demanderesse avait indiqué qu’elle envisagerait de déposer une telle demande. Après cette téléconférence, le Tribunal de la sécurité sociale aurait dû s’attendre à recevoir une demande de permission d’en appeler de la part de la demanderesse avant le départ de cette dernière.  En raison de cette téléconférence, on aurait dû savoir que la lettre datée du 6 mars 2015 impliquait clairement que la demanderesse allait en appeler de la décision et qu’elle ne demandait pas à la division générale de rouvrir le dossier et de réviser sa décision. La demanderesse n’a pas laissé entendre qu’elle avait demandé à la division générale de rouvrir le dossier et de réviser sa décision.  De même, je ne crois pas qu’il soit nécessaire qu’une lettre contienne le mot [traduction] « appel » pour qu’elle signifie qu’une permission ou un appel est demandé, compte tenu de toutes les circonstances pertinentes.  Bref, j’estime que la demanderesse a déposé à temps sa demande de permission d’en appeler à la division d’appel.

[25] Le Tribunal de la sécurité sociale a déterminé que la lettre de la demanderesse datée du 6 mars 2015 ne pouvait être considérée comme une demande de permission d’en appeler. Pourtant, cette lettre ne diffère pas, pour l’essentiel, de la demande de permission d’en appeler à la division d’appel déposée le 15 juin 2015 (même si cette demande contient une déclaration signée), ni de la lettre datée du 29 juin 2015.  De fait, la lettre de la demanderesse datée du 6 mars 2015 contient plus de renseignements que la demande de permission d’en appeler ou la lettre datée du 29 juin 2015. Même si les moyens mentionnés dans la lettre de la demanderesse datée du 6 mars 2015 étaient, au mieux, peu concluants, ils étaient clairement énoncés et le Tribunal de la sécurité sociale aurait donc dû considérer que la demande de permission d’en appeler de la demanderesse était plus ou moins complète à ce moment-là (à ce détail près que ladite demanderesse avait omis de fournir une déclaration signée).

[26] C’est seulement dans sa lettre du 17 juin 2015 que le Tribunal de la sécurité sociale a laissé entendre pour la première fois que la demanderesse avait tardé à agir ou qu’elle aurait dû déposer sa demande de permission d’en appeler avant une certaine date pour que celle-ci soit considérée comme ayant été présentée [traduction] « à temps ».  J’estime que si le Tribunal de la sécurité sociale avait prévenu la demanderesse et que celle-ci avait su qu’elle devait communiquer tous les renseignements manquants avant une certaine date, elle aurait fourni ces renseignements, tout comme elle l’a fait lorsqu’elle a répondu à la lettre du 17 juin 2015.

[27] Même si la demande de permission d’en appeler a été déposée à temps, elle n’a pas été présentée selon la forme prévue au paragraphe 57(1) de la LMEDS et au paragraphe 40(1) du Règlement. L’alinéa 40(1)h) du Règlement exige que la demande de permission d’en appeler soit présentée selon la forme prévue par le Tribunal sur son site Web et qu’elle contienne, entre autres, une déclaration selon laquelle les renseignements fournis dans la demande sont, à la connaissance du demandeur, véridiques. La demanderesse n’a pas fourni de déclaration signée avant le 15 juin 2015.

[28] Deux options s’offrent à moi pour remédier à ce vice de procédure : soit j’exerce mon pouvoir discrétionnaire et je proroge le délai applicable au dépôt de la demande de permission d’en appeler; soit, si j’en arrive à la conclusion que des circonstances spéciales existent, je modifie les dispositions officielles en matière de dépôt ou je soustraie la demanderesse à l’obligation de s’y conformer.

[29] Dans L.N. c. M.E.D.S., (30 avril 2015) TSSDA-13-782, j’examine les dispositions de l’alinéa 3(1)b) du Règlement.Cet alinéa me permet de soustraire un demandeur à l’obligation de se conformer au paragraphe 57(1) de la LMEDS, à condition que je modifie les dispositions du Règlement.  En l’espèce, je pourrais modifier le paragraphe 40(1) du Règlement en éliminant l’exigence voulant que la demande de permission d’en appeler doive contenir une déclaration selon laquelle les renseignements fournis dans la demande sont, à la connaissance du demandeur, véridiques (en présumant que je reconnais que « des circonstances spéciales » existent).  Si je modifiais le paragraphe 40(1) du Règlement de cette façon-là, la demanderesse aurait satisfait les exigences qui découlent du paragraphe 57(1) de la LMEDS en date du 13 mars 2015, au moment où elle a déposé sa demande de permission d’en appeler, et la question de savoir si sa demande de permission d’en appeler avait été déposée en retard ne se poserait plus.  Bien que j’aie considéré qu’il y avait « des circonstances spéciales » dans L.N., j’en arrive finalement à la conclusion que l’existence de telles « circonstances spéciales » ne devrait être confirmée que dans des cas limités et que cela, en outre, ne devrait pas arriver presque systématiquement. La meilleure approche devrait consister à se demander s’il convient de proroger le délai applicable au dépôt d’une demande de permission aux termes du paragraphe 57(2) de la LMEDS.

(c) Si la demanderesse a tardé à déposer sa demande de permission d’en appeler, la division d’appel devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire et proroger le délai applicable au dépôt de cette demande?

[30] Le paragraphe 57(2) de la LMEDS habilite la division d’appel à proroger le délai d’un an au maximum à compter du jour où la décision a été communiquée au demandeur, la demande de permission d’en appeler pouvant être déposée durant cette période-là.

[31] Dans Canada (Ministre du Développement des Ressources Humaines) c. Gattellaro, 2005 CF 833, la Cour fédérale énonce les quatre critères que la division d’appel devrait considérer et évaluer lorsqu’elle doit trancher la question de savoir s’il y a lieu de proroger le délai de 90 jours accordé au demandeur pour déposer sa demande de permission d’en appeler, comme suit :

  1. (a) L’appelant a démontré une intention persistante de poursuivre le processus de demande ou d’appel
  2. (b) La cause est défendable
  3. (c) Le retard a été raisonnablement expliqué
  4. (d) La prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

[32] Dans l’arrêt Canada (procureur général) c. Larkman, 2012 FCA 204 (CanLII), la Cour d’appel fédérale statue que la considération primordiale veut que l’intérêt de la justice doive être servi, mais elle soutient aussi qu’il n’est pas nécessaire que les quatre questions relatives à l’exercice du pouvoir discrétionnaire d’accorder une prorogation de délai soient tranchées en faveur du demandeur.

[33] La demanderesse n’a complété sa demande de permission d’en appeler qu’environ une semaine après que 90 jours se furent écoulés après le moment où la décision de la division générale lui avait été communiquée.  Durant cette période, elle a indiqué verbalement qu’elle allait en appeler de la décision et elle a aussi déposé une lettre auprès de la division générale le 13 mars 2015.  Cela démontre qu’elle avait une intention persistante de poursuivre l’appel. Il y a une explication raisonnable qui permet de comprendre pourquoi elle n’a pas complété sa demande de permission d’en appeler, à savoir qu’elle était partie en vacances et que c’est seulement à son retour qu’elle a reçu la lettre du Tribunal de la sécurité sociale qui faisait mention des renseignements manquants.  La prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie. Compte tenu de ces considérations, l’intérêt de la justice exige que j’exerce mon pouvoir discrétionnaire et que j’accorde une prorogation de délai.  Je vais examiner la question de savoir si l’affaire qui nous occupe donne lieu à une cause défendable dans le contexte de la demande de permission.

d) L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

[34] Comme il est noté plus haut, le paragraphe 58(1) de la LMEDS énonce les moyens d’appel. Avant d’accorder la permission d’en appeler, je dois être convaincue que les motifs de l’appel relèvent de l’un des moyens d’appel et que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[35] La demanderesse n’a pas laissé entendre que la division générale avait omis d’observer un principe de justice naturelle ni qu’elle avait autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence pour en arriver à sa décision.  Le Tribunal estime que la demanderesse n’a recensé aucune erreur en droit que la division générale aurait commise ni aucune conclusion de fait erronée qu’elle aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance afin de rendre sa décision.  La demanderesse n’a cité aucun des moyens d’appel énumérés.

[36] Bien qu’un demandeur ne soit pas tenu de prouver les moyens d’appel aux fins de la demande de permission d’en appeler, il doit à tout le moins énoncer quelques détails concernant l’erreur ou le manquement commis par la division générale qui correspond aux moyens d’appel énoncés au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.  La demande est déficiente à cet égard et je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[37] Bien que le demandeur n’ait énoncé aucun moyen d’appel valable, le paragraphe 58(1) de la LMEDS habilite toutefois la division d’appel à établir si une erreur de droit a été commise, qu’elle ressorte ou non à la lecture du dossier. Cela dit, je ne vois pas, d’emblée, quelque erreur de droit qui aurait pu être commise par la division générale.

[38] J’aimerais toutefois faire une dernière observation. La division générale a écrit dans sa décision (au paragraphe 17) que la demanderesse avait été invitée à fournir des renseignements additionnels relativement à sa preuve médicale et aux cotisations qu’elle avait versées au Régime de pensions du Canada en 2012, et elle a noté que la demanderesse n’avait pas donné suite à ces demandes de renseignements.

[39] Il serait trompeur de laisser entendre que la demanderesse n’a pas tenu compte de la demande de renseignements du Tribunal de la sécurité sociale, étant donné que l’on pourrait déduire à juste titre qu’elle n’a pas reçu cette demande, puisqu’elle avait déménagé avant que le Tribunal la lui envoie par la poste.  Le Tribunal de la sécurité sociale n’avait pas les coordonnées de la demanderesse.  De fait, l’avis d’audience (questions et réponses écrites) qui était destiné à la demanderesse ne faisait mention d’aucune adresse où il aurait pu être signifié.  Si la perception selon laquelle la demanderesse n’avait pas répondu aux questions avait constitué le fondement de la décision de la division générale, j’aurais peut-être considéré que cela représentait une erreur de droit qui aurait pu donner lieu à une cause défendable.  Or je suis convaincue que cela n’était pas le fondement de cette décision.

Conclusion

[40] Comme les motifs d’appel fournis par la demanderesse ne recoupent aucun des moyens d’appel dont je dois tenir compte aux termes du paragraphe 58(1) de la LMEDS, je ne suis pas en mesure de conclure que l’appel a une chance raisonnable de succès et je rejette donc la demande de permission d’en appeler.

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