Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Introduction

[1] La demande de pension d’invalidité présentée par l’appelante en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) a été estampillée par l’intimé en date du 25 juin 2013 (GD2-28). L’intimé a refusé la demande initiale de l’appelante et celle-ci n’a pas présenté de demande de révision dans les 90 jours qui ont suivi la réception de la lettre l’informant du refus. Le 9 avril 2014, l’intimé a refusé la demande de l’appelante concernant la prorogation du délai de 90 jours accordé pour présenter une demande de révision.

[2] Le 4 juin 2014, l’appelante a déposé un avis d’appel auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal).

[3] Cet appel a été instruit sur la foi du dossier pour les raisons suivantes :

  1. Le membre a établi qu’une autre audience n’était pas nécessaire.
  2. Les questions en litige ne sont pas complexes.
  3. L’information au dossier est complète et ne nécessite aucune clarification.
  4. La crédibilité n’est pas un enjeu principal.
  5. Le mode d’audience est conforme à la disposition du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Droit applicable

[4] Conformément à l’article 81 du RPC, une personne bénéficie de 90 jours, après avoir été avisée du refus du ministre à l’égard d’une demande de pension d’invalidité, pour présenter une demande de révision de cette décision. Le ministre peut, avant ou après l’expiration du délai de 90 jours, décider d’accorder au requérant un délai plus long pour présenter une demande de révision en bonne et due forme.

[5] Le paragraphe 74.1(3) du Règlement sur le Régime de pensions du Canada (Règlement)énonce que le ministre peut autoriser la prolongation du délai de présentation de la demande de révision d’une décision s’il est convaincu, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et, d’autre part, que l’intéressé a manifesté l’intention constante de demander la révision.

[6] En vertu de l’article 82 du RPC, une partie qui se croit lésée par une décision du ministre relative au délai supplémentaire peut interjeter appel de la décision devant le Tribunal.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit déterminer si le ministre a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire quand il a refusé d’accorder à l’appelante une prolongation du délai pour présenter une demande de révision de la décision statuant de son inadmissibilité à pension d’invalidité.

Preuve

[8] Dans une lettre datée du 16 octobre 2013, l’intimé informait l’appelante du refus de sa demande de pension d’invalidité. L’appelante avait été avisée qu’elle disposait de 90 jours, après la date de réception de la lettre, pour présenter une demande de révision de la décision de l’intimé. Un numéro de téléphone a été fourni à l’appelante pour qu’elle puisse obtenir des renseignements concernant le refus de sa demande et son droit de présenter une demande de révision (GD2-25).

[9] Le 4 novembre 2013, l’appelante a transmis par télécopieur la lettre statuant du refus de sa demande au gestionnaire de La Great-West responsable de son dossier (GD1-9).

[10] Le 4 mars 2014, l’appelante a signé une déclaration et une entente de remboursement avec La Great-West, datées du 7 février 2014. À la troisième page de la déclaration, il est indiqué que l’appelante comprend qu’elle est tenue, en vertu de son régime collectif, de présenter une demande pour toute autre prestation d’invalidité à laquelle elle ou un membre de sa famille devient admissible ou reçoit en raison de son invalidité. L’appelante comprend également que La Great-West pourrait lui demander de présenter une nouvelle demande pour de telles prestations ou de porter en appel une décision statuant du refus d’une telle demande, si cela est jugé nécessaire (GD1-17).

[11] Le 10 mars 2014, l’intimé a reçu une lettre de l’appelante datée du 5 mars 2014. Dans cette lettre, l’appelante demandait la révision de la décision lui refusant l’admissibilité à une pension d’invalidité, et indiquait que La Great-West l’avait avisée la veille qu’elle devait porter en appel la décision. Elle y expliquait également qu’elle participait à un programme de réentraînement au travail et qu’elle souffrait beaucoup. Son médecin de famille l’avait recommandée à un spécialiste et elle avait passé une autre imagerie par résonnance magnétique; elle avait un rendez-vous pour subir une intervention chirurgicale au dos le 18 mars 2014 (GD2-18-21).

[12] Dans une lettre datée du 24 mars 2014, l’intimé a avisé l’appelante que sa demande de révision avait été présentée après l’expiration du délai de 90 jours dont elle bénéficiait. L’intimé l’a également informée qu’il pourrait autoriser une prolongation du délai de présentation de la demande de révision si elle lui fournissait une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation et si elle démontrait avoir manifesté l’intention constante de demander la révision (GD2-16).

[13] Le 31 mars 2014, l’intimé a reçu une lettre de l’appelante où celle-ci indiquait qu’elle croyait [traduction] « qu’un refus était un refus définitif » et qu’elle ne savait pas qu’elle pouvait refaire une demande avant d’en être informée par La Great-West le 5 mars 2014 (GD2-12).

[14] Le 7 avril 2014, le ministre a examiné l’explication fournie par l’appelante dans sa lettre datée du 5 mars 2013. Il a également évalué :

  1. si le délai de 90 jours avait véritablement expiré. Il a été établi que la demande de révision de l’appelante avait été reçue 135 jours après l’envoi de la lettre l’avisant de la décision du ministre. Une période de grâce de 10 jours a été accordée en date de l’expédition de la lettre;
  2. si l’appelante était atteinte d’un problème de santé l’ayant empêchée de présenter sa demande de révision dans le délai prescrit de 90 jours;
  3. si des circonstances atténuantes étaient entrées en jeu, comme un imprévu indépendant de la volonté de l’appelante;
  4. si l’appelante avait tenté de communiquer avec l’intimé avant l’expiration du délai 90 jours (GD2-9-10).

[15] Dans une lettre datée du 9 avril 2014, l’intimé a informé l’appelante de son refus de lui accorder une prolongation du délai pour présenter sa demande de révision après avoir pris en compte les raisons qu’elle avait fournies. L’appelante a été avisée qu’elle avait le droit de déposer un appel auprès de la section de la sécurité du revenu de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (GD2-7-8).

Observations

[16] L’appelante a fait valoir qu’on devrait lui accorder un plus long délai pour présenter sa demande de révision de la décision du ministre puisqu’elle n’était pas au courant que son assureur exigeait qu’elle porte en appel la décision initiale statuant de son inadmissibilité aux prestations d’invalidité du RPC.

[17] L’intimé affirme que l’appelante ne devrait pas bénéficier d’un plus long délai pour présenter sa demande de révision puisqu’elle n’a pas fourni d’explication raisonnable à l’appui de sa demande de prolongation et qu’elle n’a pas manifesté l’intention constante de demander la révision au cours du délai de 90 jours (GD2-16).

Analyse

[18] La décision du ministre de refuser ou de permettre une demande de révision tardive est considérée comme une décision discrétionnaire. Le ministre doit exercer son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire ou judicieuse (Canada (Procureur général) c. Uppal, 2008 CAF 388).

[19] Conformément à l’affaire Canada (Procureur général) c. Purcell, [1996] 1 RCF 644, le pouvoir discrétionnaire n’est pas exercé « judiciairement » si l'on parvient à établir que le décideur :

  • a agi de mauvaise foi;
  • a agi dans un but ou pour un motif irrégulier;
  • a pris en compte un facteur non pertinent;
  • a ignoré un facteur pertinent;
  • ou a agi de manière discriminatoire.

[20] Ainsi, le rôle du Tribunal n’est pas de déterminer si l’intimé a pris la bonne décision, mais plutôt de déterminer s’il a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire. Le fardeau de la preuve incombe à l’appelante, qui doit montrer que l’intimé n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire comme il se doit.

[21] En examinant le dossier, le Tribunal n’a trouvé aucune preuve montrant que l’intimé ait agi de mauvaise foi ou dans un but ou pour un motif irrégulier dans sa prise de décision. L’intimé avait informé l’appelante de son droit de présenter une demande de révision dans les 90 jours suivant le refus de sa demande initiale. La preuve confirme que l’appelante a présenté sa demande de révision après le délai de 90 jours. Une période de grâce de 10 jours ayant été accordée pour que la lettre postée soit reçue par l’appelante, on considère que cette dernière a reçu la lettre statuant du refus de sa demande le 26 octobre 2013. Selon le calcul de l’intimé, calcul exact, la demande de révision de l’appelante a été reçue 135 jours après la date à laquelle on considère qu’elle a reçu la lettre initiale l’informant du refus de sa demande. Le Tribunal est d’avis que l’intimé a procédé à un examen approfondi et méthodique du dossier de l’appelante et qu’il a eu raison d’établir que sa demande de révision avait été présentée après l’expiration du délai prescrit.

[22] De plus, l’intimé a, conformément au Règlement, informé l’appelante, dans les 14 jours suivant la réception de sa demande, de son droit de demander une prolongation du délai et des facteurs qui seront pris en compte lorsqu’il exercera son pouvoir discrétionnaire. Le Tribunal est d’avis que la réponse de l’intimé a été communiquée à l’appelante en temps opportun et que les informations fournies étaient claires et faciles à comprendre. Après avoir examiné la conduite de l’intimé envers l’appelante, le Tribunal conclut qu’il n’existe aucune preuve montrant qu’il ait agi de mauvaise foi ou de manière discriminatoire.

[23] Le Tribunal constate aussi que l’intimé n’a pas pris en compte de facteur non pertinent lorsqu’il a pris sa décision. Dans son examen, l’intimé a soulevé le propos de l’appelante dans sa lettre du 5 mars 2014 : [traduction] « Je croyais qu’il s’agissait d’une décision définitive. » L’analyse de l’intimé montre qu’il a pris en compte l’explication de l’appelante, mais qu’il ne l’a pas jugée raisonnable compte tenu des informations fournies à l’appelante dans la lettre de refus initiale. Celle-ci indiquait à l’appelante qu’elle disposait de 90 jours pour présenter une demande de révision de la décision du ministre, si elle souhaitant le faire.

[24] L’appelante a aussi déclaré que La Great-West, qui l’assure pour son invalidité, l’a informée qu’elle était tenue de présenter une demande de révision seulement après l’expiration du délai accordé pour ce faire. Le Tribunal constate que la déclaration et l’entente de remboursement datées du 7 février 2014 attestent de l’explication fournie par l’appelante. Selon le Tribunal, rien ne prouve que l’intimé n’ait pas accepté la raison de l’appelante; il a simplement considéré que les actions d’une tierce partie, en l’occurrence La Great-West, ne constituent pas un motif raisonnable pour accorder à l’appelante un plus long délai pour demander une révision.

[25] Dans sa demande pour obtenir une prolongation de délai, l’appelante a aussi informé l’intimé qu’elle allait subir une intervention chirurgicale au dos le 18 mars 2015. L’analyse menée par l’intimé montre que l’état de santé de l’appelante a été pris en compte dans sa décision relative à l’autorisation d’une prolongation; l’intimé a toutefois conclu qu’il ne s’agissait pas d’une explication raisonnable à son retard. Le Tribunal souligne que l’état de santé de l’appelante ne l’a pas empêchée de présenter une demande de révision le 5 mars 2015, après que La Great-West l’ait avisée de procéder ainsi.

[26] En plus de prendre en compte l’état de santé de l’appelante, l’intimé a évalué si un imprévu ou des circonstances atténuantes avaient pu empêcher l’appelante de présenter sa demande de révision ou de manifester son intention constante d’en faire la demande durant le délai prescrit. Les seules circonstances atténuantes au dossier étaient la chirurgie imminente de l’appelante et sa demande auprès de La Great-West. Le Tribunal n’a trouvé aucun autre facteur que l’intimé aurait ignoré ou dont il n’aurait pas tenu compte dans son évaluation de la demande de l’appelante pour l’obtention d’un délai supplémentaire afin de présenter une demande de révision.

[27] Pour évaluer l’intention constante de l’appelante de demander une révision, l’intimé a tenu compte du fait qu’elle n’a pas tenté de communiquer avec l’intimé avant que le délai de 90 jours soit échu. Le Tribunal note que l’intimé avait fourni à l’appelante, dans sa décision initiale, un numéro de téléphone qu’elle pouvait utiliser si elle avait des questions concernant son droit de demander la révision de la décision. L’affirmation de l’appelante, selon laquelle elle croyait que la décision initiale était définitive, peut expliquer pourquoi elle a transmis la lettre de la décision initiale à La Great-West et pourquoi elle n’a ni communiqué avec l’intimé ni présenté une demande de révision auprès de celui-ci. Selon le Tribunal, il a été pertinent de prendre en compte, pour évaluer l’intention constante de l’appelante de demander une révision, le fait qu’elle n’a pas tenté de joindre l’intimé après le refus de sa demande initiale. L’appelante a confirmé par écrit qu’elle n’avait pas l’intention de présenter une demande de révision avant que La Great-West l’avise de le faire. Une fois de plus, l’intimé a estimé que l’explication fournie par l’appelante ne constituait pas un motif suffisant pour exercer son pouvoir discrétionnaire en sa faveur.

Conclusion

[28] Après avoir revu toute la preuve au dossier, le Tribunal conclut que l’intimé a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière judiciaire.

[29] L’appel est rejeté.

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