Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] Le Tribunal accorde une prorogation du délai applicable au dépôt d’une demande de permission d’en appeler.

[2] La permission d’interjeter appel à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est refusée.

Introduction

[3] Le demandeur sollicite une permission d’en appeler (la demande) d’une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le Tribunal) rendue le 12 mars 2015.  Dans cette décision, la division générale a conclu que le demandeur ne répond pas au critère ouvrant droit au paiement d’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

[4] La demande a été déposée passablement en retard.  Elle est datée du 29 juin 2015 et selon l’estampille de date, elle a été reçue le 6 juillet 2015. Le demandeur n’a donc pas respecté le délai de 90 jours accordé pour le dépôt de la demande, tel que prévu à l’alinéa 57(1)b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (LMEDS). Et il n’a pas reconnu que la demande avait été déposée en retard.  Le Tribunal doit donc déterminer, dans un premier temps, s’il y a lieu d’accorder une prorogation du délai applicable au dépôt d’une demande de permission d’en appeler.  Pour les raisons exposées ci-après, le Tribunal décidé d’exercer son pouvoir discrétionnaire d’accorder une telle prorogation, tel qu’il lui est conféré par le paragraphe 57(2) de la LMEDS.

[5] Avant de décider d’accorder une prorogation de délai, le Tribunal a pris en considération et appliqué les facteurs énoncés dans GattellaroFootnote 1et commentés par la Cour fédérale d’appel dans Hogervorst.Footnote 2Dans cette dernière décision, la Cour fédérale d’appel énonce un cinquième critère s’ajoutant à ceux énumérés dans Gattellaro et elle le décrit comme suit : « Le critère est souple et doit être appliqué de manière à ce que justice soit rendue entre les parties, ce qui est le principal facteur à prendre en compte dans une demande de prorogation de délai. Cette souplesse comprend le fait d’attribuer un poids approprié à chacun des facteurs, suivant les circonstances de l’octroi de l’autorisation, et ce, même si l’un des quatre critères ordinaires n’est pas présent et s’il est nécessaire de satisfaire à un cinquième facteur, celui des faits de l’espèce. »  J’ai donc tenu compte des faits liés au présent cas, en sus des suivants :

  • La question de savoir si le demandeur a démontré une intention persistante de poursuivre le processus d’appel;
  • La question de savoir si l’affaire donne lieu à une cause défendable;
  • La question de savoir si le demandeur a fourni des explications raisonnables pour justifier le retard;
  • La question de savoir si l’intimé subirait un préjudice si le Tribunal prorogeait le délai applicable au dépôt de l’appel.

[6] J’estime quele demandeur n’a satisfait qu’un seul de ces quatre critères.  Le fait qu’il a déposé la demande pourrait signifier qu’il a démontré une intention persistante de poursuivre le processus d’appel. Cependant, il n’a pas fourni d’explications raisonnables pour justifier le retard dans le dépôt de sa demande.  De fait, il n’a pas reconnu que cette demande avait été déposée en retard. Quoi qu’il en soit, cela est probablement imputable au fait que le demandeur, qui n’avait pas de représentant, a mal compris les instructions qui figuraient sur le formulaire qu’il a utilisé pour déposer sa demande. Sur ce formulaire, on lui demandait d’indiquer s’il déposait sa demande plus de 90 jours après avoir reçu la décision en révision.  Il semble avoir utilisé le mauvais formulaire.  Le demandeur a mentionné qu’il a reçu la décision le 28 mars 2015; la demande semble avoir été envoyée par la poste ordinaire. J’estime donc que le demandeur est probablement en mesure de fournir des explications raisonnables pour justifier son retard.

[7] De plus, comme nous en sommes au premier stade du processus d’appel, je considère que l’octroi de la prorogation ne causerait qu’un préjudice négligeable à l’intimé.  C’est plutôt relativement à la question de savoir si l’affaire donne lieu à une cause défendable que j’ai certaines réserves. Le demandeur a affirmé que son état de santé actuel ne lui permettait pas de se servir de ses bras pour travailler et qu’il n’est pas non plus en mesure de suivre une nouvelle formation.  Il soutient que la division générale n’a pas tenu compte de sa mobilité réduite.  À mon avis, il n’y a qu’une seule façon de déterminer si le demandeur a une cause défendable et ce serait d’accueillir la demande de prorogation de délai, ce qui serait approprié au regard des circonstances liées à la présente demande, à savoir qu’un demandeur non représenté a utilisé le mauvais formulaire pour faire sa demande.

[8] Le Tribunal accorde une prorogation du délai applicable au dépôt de la demande.

Motifs de la demande

[9] Le demandeur s’est appuyé sur sa perception des faits, à savoir que la division générale n’a pas suffisamment tenu compte de ses troubles de santé ou a mal appliqué le droit en ce qui concerne sa capacité de s’initier à un autre travail en tant que fondement de sa demande ou de son appel. Sa position est énoncée dans la déclaration qui figure ci-dessous.  Je considère que cette déclaration soulève la question de savoir si la division générale a enfreint les dispositions des alinéas 58(1)b) et c) de la LMEDS.  Le demandeur a déclaré ce qui suit :

[Traduction] J’attends toujours de pouvoir consulter un chirurgien au sujet de mon épaule. J’attends depuis plusieurs années. J’ai aussi fait de la phisio (sic) pour traiter cette épaule, en vain. Je ne peux pas m’asseoir ni rester debout pour de longues périodes et je ne peux pas soulever mes bras pour travailler ou à d’autres fins connexes. Donc, selon vous, pour quel nouveau travail pourrais-je suivre de la formation? Ma mobilité et mon amplitude de mouvement régressent chaque jour. Vous n’avez pas tenu compte de cela. La dernière série de radiographies que j’ai subie remonte à six ans et je continue de constater que je suis de moins en moins capable d’accomplir des tâches quotidiennes.

Question en litige

[10] Après avoir décidé d’accorder une prorogation du délai applicable au dépôt de la demande, le Tribunal doit déterminer s’il y a lieu d’accueillir cette demande et la question à trancher est donc la suivante : l’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[11] La permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal constitue une étape préliminaire du processus d’appel devant la division d’appel.Footnote 3 Pour qu’elle accorde sa permission, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.Footnote 4 Dans Hogervorst ainsi que dans Fancy c. Canada (Procureur général) 2010 CAF 63, la Cour fédérale d’appel affirme qu’une chance raisonnable de succès équivaut à une cause défendable.

Analyse

[12] Pour accorder une permission d’en appeler, je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.  Cela signifie que je dois d’abord établir qu’au moins un motif de la demande se rapporte à un moyen d’appel qui aurait une chance raisonnable de succès si l’affaire était entendue dans le cadre d’une audience.  Pour les motifs suivants, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[13] Premièrement, bien que le demandeur soutienne que la division générale a erré en omettant de tenir compte de son état de santé actuel lorsqu’elle a rendu sa décision, j’estime que tel n’est pas le cas.

[14] La question que la division générale devait trancher était passablement claire : le demandeur souffrait-il d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée au sens de l’alinéa 42(2)a) à la fin de sa période minimale d’admissibilité ( PMA), qui est survenue le 31 décembre 2008, ou avant cette date-là?  J’estime que la division générale n’a pas erré lorsqu’elle a appliqué le droit aux faits.

[15] La dernière journée de travail du demandeur était le 23 décembre 2008. Il a déclaré qu’il avait cessé de travailler en raison de douleurs au dos causées par le [traduction] « déplacement d’un disque ».  Sept mois plus tard, le pronostic énoncé dans le rapport médical daté du 14 juillet 2009 révélait que les [traduction] « douleurs [qu’éprouvait le demandeur] au bas du dos étaient chroniques.  L’intensité de ces douleurs diminuera ou augmentera d’un jour à l’autre, selon le niveau d’activité [du demandeur]. Globalement, on peut prévoir que ce problème s’aggravera graduellement au fil du temps. » GT1-38

[16] Il est indiqué dans la décision qu’aux fins de l’examen de la question de savoir si l’invalidité mentale ou physique du demandeur était grave et prolongée, la membre de la division générale a tenu compte de toutes les conclusions énoncées dans les rapports médicaux qui lui ont été présentés. Elle a noté que seulement deux rapports médicaux avaient été établis avant la fin de la PMA.  L’un deux portait sur une radiographie effectuée en 2006 et l’autre avait été préparé à la suite d’une consultation avec un certain Dr Oxner. La membre de la division générale a aussi noté qu’il n’était pas indiqué dans ces rapports ni dans le rapport médical du RPC que le demandeur était généralement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.  Compte tenu de cela, je ne suis pas en mesure de statuer que la division générale n’a pas tenu compte d’éléments de preuve médicaux pertinents.

[17] De même, j’en arrive à la conclusion que la division générale n’a pas erré lorsqu’elle a appliqué le droit aux faits en ce qui concerne l’obligation qu’a le demandeur de chercher un autre emploi. Klabouch c. Canada (Développement social) 2008 CAF 33 : il est clairement établi dans cette décisionqu’il convient de se demander si la personne qui demande une pension d’invalidité du RPC a tenté de trouver un autre emploi lorsqu’on doit déterminer si l’invalidité de cette personne est grave.  L’obligation de chercher un autre emploi implique, en contrepartie, que les demandeurs devront fournir des explications raisonnables pour justifier tout manquement à cette obligation.  En d’autres mots, on s’attend habituellement à ce que les demandeurs épuisent toutes les possibilités de trouver un autre emploi.  Voir la décision M.C. c. M.S.D.  (8 juillet 2011) CP 26647 CAP, dans laquelle on en arrive à la conclusion que le demandeur souffrait de douleurs traitables, mais qu’il n’avait fait aucune tentative de recherche d’un nouvel emploi.

[18] Le demandeur ne nie pas qu’il n’a pas tenté de trouver un autre emploi. Il a expliqué à cet égard que ses douleurs au dos l’empêchaient d’accomplir quelque travail que ce soit, et que cela n’a pas changé. La membre de la division générale a rejeté cette explication pour le motif que la preuve médicale ne permet pas de démontrer que le demandeur souffrait d’une invalidité mentale ou physique grave et prolongée en date de la fin de sa PMA ou avant cette date-là.  J’en arrive à la conclusion que la décision de la division générale est raisonnable, puisqu’elle est transparente et intelligible au regard des faits et du droit.

Conclusion

[19] Le demandeur a soutenu que la division générale avait erré en ne tenant pas suffisamment compte de ses contraintes physiques, lesquelles persistent et ont empiré six ans après qu’il a arrêté de travailler.  Le Tribunal ne nie pas que les symptômes du demandeur ont empiré.  De fait, cela correspond au pronostic établi par son médecin de famille en juillet 2009.  Cela dit, il incombait à la division générale, en date de la fin de la PMA, qui survenait le 31 décembre 2008, de déterminer si les troubles mentaux ou physiques du demandeur étaient tels que l’on devait considérer qu’ils étaient graves et prolongés au sens du RPC.  La membre de la division générale a conclu que tel n’était pas le cas, et le Tribunal n’a pas été en mesure de trouver quelque erreur que ce soit dans ce verdict.  Par conséquent, le Tribunal n’est pas convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[20] Le critère lié à l’octroi d’une permission d’en appeler n’ayant pas été satisfait, la demande est rejetée.

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