Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est refusée.

Introduction

[2] Dans une décision rendue le 15 avril 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») a déterminé que la demanderesse ne satisfaisait pas aux critères d’admissibilité à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (le « RPC »). La demanderesse présente une demande de permission d’en appeler (la « Demande »).

Motifs de la demande

[3] La période minimale d’admissibilité (PMA) de la demanderesse a pris fin le 31 décembre 2013. L’avocat de la demanderesse plaide que cette dernière était atteinte d’une invalidité grave et prolongée avant cette date.

[4] Au nom de la demanderesse, son avocat soutient que la division générale a contrevenu au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS »)en ce qu’elle a commis un certain nombre d’erreurs de droit et fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées qu’elle a tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[5] Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[6] La demande de permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal est une étape préliminaire au dépôt d’un appel devant la division d’appel.Footnote 1 Pour accorder cette permission, la division d’appel doit être convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès.Footnote 2 Dans Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, ainsi que dans Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, la Cour d’appel fédérale a assimilé une chance raisonnable de succès à une cause défendable.

[7] Il n’y a que trois moyens sur lesquels un appelant peut interjeter un appel. Ces moyens, stipulés à l’article 58 de la Loi sur le MEDS, sont les suivants :

  1. 1) un manquement à la justice naturelle;
  2. 2) une erreur de droit commise par la division générale;
  3. 3) une décision que la division générale a fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.Footnote 3

Analyse

[8] Pour accorder la permission d’en appeler, le Tribunal doit déterminer, lorsque l’affaire doit être instruite par la tenue d’une audience, a) qu’au moins l’un des moyens invoqués à l’appui de la Demande se rattache à un moyen d’appel admissible et b) que ce moyen confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Pour les motifs exposés ci‑dessous, le Tribunal n’est pas convaincu que cet appel aurait une chance raisonnable de succès.

[9] L’avocat de la demanderesse allègue que la division générale a commis les erreurs de droit suivantes :

  1. a) La division générale a fait abstraction de l’opinion médicale du spécialiste et médecin de famille de la demanderesse sans expliquer pourquoi.
  2. b) La division générale n’a pas du tout abordé la capacité de travailler de la demanderesse, ce qui est une dimension essentielle du critère relatif à l’invalidité.
  3. c) La division générale n’a pas tenu compte du « contexte réaliste » dans sa détermination de la question de savoir si la demanderesse était admissible à des prestations d’invalidité.
  4. d) La division générale a commis une erreur en demandant à ce qu’une preuve médicale particulière soit produite au lieu de tenir compte de l’ensemble du fondement probatoire. (AD1-7)

[10] En outre, l’avocat de la demanderesse soutient que la division générale a mal interprété l’opinion du Dr Langlois et qu’à la lumière de sa mauvaise interprétation de l’opinion du Dr Langlois, elle a tiré des conclusions de fait erronées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] Le Tribunal a examiné la décision de la division générale dans le contexte des erreurs de droit alléguées. À l’issue de cet examen, le Tribunal n’est pas convaincu que, dans les circonstances propres à l’affaire de la demanderesse, l’une ou l’autre des allégations d’erreur de droit donne lieu à un moyen d’appel admissible qui conférerait une chance raisonnable de succès à l’appel. Le Tribunal en vient à cette conclusion pour les motifs exposés ci‑dessous.

[12] Il est clair que la division générale a fondé sa décision sur le défaut, par la demanderesse, de suivre le traitement médical qu’on lui avait prescrit, pour traiter tant ses problèmes de santé physique que ses problèmes de santé mentale. Le Tribunal a estimé que la demanderesse n’avait pas suivi le traitement médical qu’on lui avait prescrit, que ce traitement prescrit se rapportât à sa fibromyalgie, à sa dépression ou à son anxiété. En outre, la division générale a conclu que la demanderesse n’avait pas fourni d’explication raisonnable pour justifier son défaut de ne pas avoir suivi le traitement prescrit.

[13] La jurisprudence est claire sur ce point. Dans Bulger c. MDRH (18 mai 2000), CP 9164, la Commission d’appel des pensions (CAP) a clairement dit ceci :

[…] une personne qui désire obtenir une pension d’invalidité doit suivre ces recommandations [les traitements recommandés] ou, si elle s’y soustrait, […] elle doit convaincre la Commission qu’elle a eu raison de le faire.

[14] La Cour d’appel fédérale a confirmé ce principe en statuant, dans Lalonde c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 211, que « [l]e contexte « réaliste » suppose aussi que la Commission [la CAP] se demande si le refus de [la demanderesse] de suivre des traitements de physiothérapie est déraisonnable ou non, et quel impact ce refus peut avoir sur l’état d’incapacité de [la demanderesse], dans le cas où le refus est déraisonnable. » La Cour d’appel fédérale a ultérieurement maintenu la position que les demandeurs de pension d’invalidité du RPC ont la responsabilité personnelle de suivre les soins de santé qui leur sont recommandés.Footnote 4 Après avoir relaté les points saillants de la décision de la CAP rejetant l’appel, en partie au motif que l’appelante n’avait eu aucune raison de ne pas faire davantage d’exercice et d’activités physiques, comme ses médecins le lui avaient constamment conseillé,Footnote 5 la Cour d’appel fédérale a tiré la conclusion unanime suivante :

[4] Nous sommes d'avis que la Commission d'appel des pensions a eu raison de tirer les conclusions auxquelles elle est arrivée, compte tenu de la preuve dont elle disposait.

[15] En l’espèce, la division générale a déterminé que la demanderesse avait reçu des recommandations de soulagement de la douleur qui comprenaient des séances de counseling psychologique, séances qu’elle n’a pas suivies car elle était réticente à solliciter un traitement psychologique. La division générale n’a pas jugé raisonnable l’explication donnée par la demanderesse. La demanderesse n’avait pas non plus pris part au traitement cognitivo-comportemental qu’on lui avait recommandé. Qui plus est, la demanderesse, apparemment, n’a pas démontré la plus grande franchise dans le témoignage qu’elle a livré lorsqu’on lui a demandé si elle avait suivi le traitement cognitivo-comportemental qu’on lui avait offert. (GDEC, paras. 52-53)

[16] De la même façon, la division générale a estimé que la demanderesse n’avait pas fourni d’explication raisonnable à sa non-participation au plan de traitement recommandé, lequel comprenait des stratégies visant à traiter sa dépression et son anxiété. De plus, la division générale a estimé que, au vu d’une directive expresse pour que la demanderesse soit adressée à un programme financé par l’État, l’explication que la demanderesse avait fournie pour ne pas avoir participé à une physiothérapie au motif qu’elle n’avait pas d’assurance médicale était déraisonnable. La division générale a constaté que la demanderesse n’avait en fait pris part à aucun des traitements recommandés par le Dr Kolbe.

[17] Dans Lalonde, l’appelante avait refusé une physiothérapie. Ce refus a été jugé comme portant un coup fatal à l’appel. Dans l’affaire qui nous occupe, la demanderesse n’a pas participé à plusieurs traitements qu’on lui avait recommandés, et la division générale a jugé que la demanderesse n’avait pas fourni d’explication raisonnable à cette non-participation. À la lumière de la conclusion tirée dans l’arrêt Lalonde, de même qu’à la lumière du fait que la division générale a fondé sa décision sur le défaut de la demanderesse de suivre les traitements recommandés, le Tribunal ne relève aucune erreur dans la décision de la division générale selon laquelle la demanderesse ne s’est pas acquittée de la charge qui lui incombait d’établir qu’à la date de fin de sa PMA ou avant elle souffrait d’une invalidité grave et prolongée au sens du RPC. Le Tribunal conclut que, compte tenu des faits de l’espèce et de la jurisprudence, il était loisible à la division générale de rendre une décision en ce sens.

[18] Par conséquent, le Tribunal estime que les allégations d’erreur de droit soit ne sauraient être étayées, soit sont rendues théoriques par la conclusion de la division générale que la demanderesse n’a pas fait preuve de coopération quant aux soins de santé qu’on lui recommandait.

[19] Pour ce qui est de l’observation selon laquelle la division générale a commis une erreur de fait eu égard à l’opinion du Dr Langlois, le Tribunal estime que c’est effectivement le cas. L’avocat de la demanderesse a plaidé que la division générale avait mal interprété l’opinion du Dr Langlois concernant la façon dont les symptômes d’une discopathie dégénérative doivent être interprétés. La déclaration offensante se trouve dans la conclusion de la division générale selon laquelle [traduction] « Est implicite, dans ce commentaire, le fait que la discopathie dégénérative n’est pas grave en soi. » De l’avis du Tribunal, lorsque le Dr Langlois affirme que [traduction] « [...] l’erreur courante consiste à présumer que des déficiences légères ou modérées se rattachent nécessairement à des symptômes légers ou modérés […] », ce qu’il veut réellement dire c’est que la présence d’une discopathie légère ou modérée peut être la source d’un grave syndrome de la douleur chronique. Ainsi, le Tribunal considère que c’était une erreur, de la part de la division générale, que de tirer la conclusion que la discopathie dégénérative de la demanderesse n’était pas grave.

[20] Nonobstant sa constatation que la division générale a commis une erreur dans son interprétation de l’opinion du Dr Langlois, le Tribunal n’est pas convaincu que cette erreur soit importante au point de rendre imprudente l’intégralité de la décision. La division générale disposait d’autres éléments de preuve à la lumière desquels elle aurait pu en arriver à la même conclusion, en l’occurrence les rapports médicaux des Drs Hinton et Kolbe. Ces rapports sont mentionnés aux paragraphes 37 à 40 de la décision. Par conséquent, la permission ne sera pas accordée sur ce motif.

Conclusion

[21] En se prononçant sur cette demande de permission, le Tribunal devait déterminer si les motifs invoqués par la demanderesse à l’appui de sa demande de permission relèvent de l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibles, puis évaluer la possibilité d’un succès en appel. Tout en considérant que les motifs d’appel invoqués par la demanderesse se rattachent aux moyens d’appel prévus aux alinéas 58(1)b) et c) de la Loi sur le MEDS, le Tribunal, pour les motifs exposés ci‑dessus, n’est pas convaincu que, si la permission d’en appeler était accordée, l’appel aurait une chance raisonnable de succès.

[22] La Demande est rejetée.

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