Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Décision

[1] La permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada est refusée.

Introduction

[2] Dans une décision rendue le 11 mai 2015, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») a déterminé que la demanderesse ne satisfaisait pas aux critères d’admissibilité à une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada (le « RPC »). La demanderesse présente une demande de permission d’en appeler (la « Demande ») de cette décision.

Moyens invoqués à l’appui de la demande

[3] Au nom de sa cliente, l’avocat de la demanderesse plaide que la division générale a commis, dans son évaluation et son appréciation des documents médicaux, un certain nombre d’erreurs soulevant les trois moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS »). L’avocat soutient aussi que la division générale n’a pas tenu compte de l’effet cumulatif que les affections de la demanderesse ont eu sur elle.

Question en litige

[4] Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable

[5] La demande de permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal est une étape préliminaire au dépôt d’un appel devant la division d’appel.Note de bas de page 1 Pour accorder cette permission, la division d’appel doit être convaincue que l’appel aurait une chance raisonnable de succès.Note de bas de page 2 Dans Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, ainsi que dans Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63, la Cour d’appel fédérale a assimilé une chance raisonnable de succès à une cause défendable.

[6] Il n’y a que trois moyens sur lesquels un appelant peut interjeter un appel. Ces moyens, énoncés à l’article 58 de la Loi sur le MEDS, sont les suivants :

  1. 1) un manquement à la justice naturelle;
  2. 2) une erreur de droit commise par la division générale;
  3. 3) une décision que la division générale a fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.Note de bas de page 3

Analyse

[7] Pour accorder la permission d’en appeler, le Tribunal doit déterminer, lorsque l’instruction de l’affaire appelle la tenue d’une audience, a) qu’au moins l’un des moyens invoqués à l’appui de la Demande se rattache à un moyen d’appel admissible et b) que ce moyen invoqué confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Pour les motifs exposés ci‑dessous, le Tribunal n’est pas convaincu que cet appel aurait une chance raisonnable de succès.

[8] L’avocat de la demanderesse affirme, de façon générale, que la division générale [traduction] « n’a pas suffisamment tenu compte des documents médicaux relatifs à la nature et à l’ampleur des multiples blessures et invalidités de Mme N. B. et a omis d’apprécier l’impact que toutes ces blessures ont eu. »

[9] Plus précisément, l’avocat soutient que le membre de la division générale, qu’il appelle le « délégué », a mal interprété le rapport du Dr Clifford, le physiatre, lorsque le membre a déclaré que le rapport en question concluait, au chapitre de la capacité de la demanderesse de trouver et de détenir une occupation véritablement rémunératrice, qu’ [traduction] « il n’y avait pas d’incapacité importante à accomplir les tâches essentielles qu’elle exécutait dans le cadre de son emploi avant son accident de voiture. »

[10] L’avocat soutient qu’il s’agit là d’une [traduction] « erreur de fait susceptible d’appel » au motif que [traduction] « le rapport de physiatrie [du Dr Clifford] ne fait que comparer l’état de santé de Mme N. B. avant son accident à son état après l’accident. Le Dr Clifford n’a pas voulu émettre d’opinion quant à savoir si Mme N. B. pourrait ou devrait avoir été capable de conserver ses activités d’avant l’accident de voiture. De la même façon, le Dr Clifford n’a pas voulu commenter la question de savoir si les blessures que Mme N. B. avait avant son accident de voiture se seraient aggravées ou auraient pu s’accentuer au point de limiter son fonctionnement et ses activités. »

[11] En fait, le Dr Clifford a bel et bien commenté la capacité de la demanderesse d’accomplir les tâches essentielles de son emploi. Le rapport posait la question suivante : [traduction] « à la suite de l’accident, la personne assurée souffre‑t‑elle d’une incapacité importante à accomplir les tâches essentielles de son emploi? » En réponse à cela, le Dr Clifford a déclaré [traduction] « il n’y aurait pas de contre-indication médicale à une reprise de toutes les activités (y compris les activités effectuées au travail) qui étaient appropriées pour elle avant l’accident de voiture répertorié. Par conséquent, la réponse à cette question est non. » (GT1-117) Dans le contexte de cette réponse, le Tribunal estime que la position de la demanderesse n’est pas étayée et que l’argument de l’avocat ne soulève pas de moyen d’appel qui conférerait une chance raisonnable de succès à l’appel.

[12] L’avocat de la demanderesse affirme aussi que, du fait que le membre de la division générale n’a pas fait de commentaire sur la crédibilité de la demanderesse, il a omis d’apprécier l’ensemble des documents dont il était saisi, commettant ainsi une erreur de droit. Le Tribunal rejette cet argument. De l’avis du Tribunal, le simple fait que la division générale n’ait pas expressément fait de commentaire sur la crédibilité de la demanderesse ne saurait faire inévitablement conclure à un manquement de la part de la division générale dans son appréciation de l’ensemble de ce témoignage de la demanderesse. Le Tribunal estime que la demanderesse n’a pas soulevé de cause défendable sur ce point.

Erreurs mixtes de fait et de droit

[13] L’avocat soutient que la division générale a commis les erreurs mixtes de fait et de droit suivantes, en l’occurrence que la division générale :

  1. 1. n’a pas correctement tenu compte ou traité de la façon dont les limitations fonctionnelles de la demanderesse l’empêcheraient d’exercer ne serait‑ce qu’un emploi sédentaire;
  2. 2. a omis d’appliquer le critère du contexte réaliste prescrit par les arrêts BungayNote de bas de page 4 et VillaniNote de bas de page 5. L’avocat de la demanderesse soutient que la division générale aurait dû se demander si, de façon cumulative, les problèmes psychologiques, neurologiques, physiques et de médication de la demanderesse la rendaient incapable de travailler.

[14] L’avocat de la demanderesse soutient que la division générale n’a pas correctement tenu compte ou traité de la façon dont les limitations fonctionnelles de la demanderesse l’empêcheraient d’occuper ne serait‑ce qu’un emploi sédentaire.

Erreurs de droit

[15] L’avocat de la demanderesse allègue que la division générale a commis les erreurs de droit suivantes :

  1. a) La division générale n’a pas tenu compte des explications raisonnables fournies quant à l’incapacité de la demanderesse de se chercher du travail, pas plus que le membre n’a précisé qu’il existait des exceptions à l’exigence de se chercher un nouvel emploi. L’avocat soutient que, en ne suivant pas Klabouch pour ce qui est de déterminer la gravité des affections de la demanderesse, la division générale a centré son attention sur le diagnostic des affections de la demanderesse plutôt que sur sa capacité de travailler : Klabouch c. Canada (Développement social), 2008 CAF 33, par. 14.
  2. b) L’avocat de la demanderesse plaide aussi que la division générale a omis d’appliquer le nouveau critère relatif à la détention d’une occupation « véritablement rémunératrice ». Le Tribunal estime que cet argument ne soulève pas de moyen d’appel qui conférerait une chance raisonnable de succès à l’appel. De l’avis du Tribunal, l’avocat de la demanderesse, en faisant cette allégation, cherche à faire appliquer rétroactivement une disposition législative qui ne renferme pas une telle réserve. Le nouveau Règlement sur le Régime de pensions du Canada (le « Règlement »)Note de bas de page 6 s’applique aux demandes de pension d’invalidité au titre du RPC présentées après le 29 mai 2014. La demande de prestations d’invalidité au titre du RPC présentée par la demanderesse est antérieure à l’entrée en vigueur du Règlement et, manifestement, ne s’applique pas à la demanderesse.

[16] L’avocat de la demanderesse allègue aussi que la division générale a commis un manquement à la justice naturelle. Il fait cette observation sur le fondement de l’absence susmentionnée d’une conclusion relative à la crédibilité de la demanderesse. L’avocat estime que cette omission de la part de la division générale prive automatiquement la demanderesse d’une audience équitable. Il soutient que si la division générale avait bel et bien évalué la crédibilité de la demanderesse, elle se serait trouvée dans l’obligation d’inclure son évaluation de cette crédibilité dans la décision écrite. S’il est vrai que tous les appelants sont en droit d’obtenir une audition équitable, le Tribunal ne parvient pas à comprendre la position de l’avocat sur ce point. De l’avis du Tribunal, l’absence d’un commentaire sur la crédibilité d’un appelant ne saurait faire inexorablement conclure à une absence d’audition du témoignage de l’appelant par la division générale.

[17] Même après un examen sommaire de la décision de la division générale, on constaterait que la demanderesse a obtenu une audience équitable. Que ce qui constitue une audience équitable varie selon les circonstances de l’espèce a été très clairement précisé dans l’arrêt BakerNote de bas de page 7, où la Cour suprême du Canada a déclaré que « [l’] existence de l’obligation d’équité, toutefois, ne détermine pas quelles exigences s’appliqueront dans des circonstances données. […] la notion d’équité procédurale est éminemment variable et son contenu est tributaire du contexte particulier de chaque cas. »

[18] Dans la présente affaire, la demanderesse a été avisée de l’heure, de la date et du lieu de l’audience. Elle et son représentant légal ont assisté à l’audience. La demanderesse a livré témoignage en son nom propre, témoignage que la division générale a mentionné aux paragraphes 9 à 18 de sa décision. On ne peut nullement affirmer que la demanderesse n’a pas eu la possibilité d’être entendue ou de présenter sa preuve et ses arguments à la division générale, autant d’éléments qui constituent une audience équitable. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que cet argument ne soulève pas de moyen d’appel qui conférerait une chance raisonnable de succès à l’appel.

Conclusion

[19] Pour trancher la Demande, le Tribunal devait déterminer si les motifs invoqués par la demanderesse à l’appui de sa demande de permission d’en appeler se rattachaient à l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibles, puis évaluer la possibilité d’un gain de cause en appel. Bien que le Tribunal conclue que la demanderesse a allégué des manquements faisant intervenir tous les moyens d’appel prévus par la Loi sur le MEDS, pour les motifs exposés plus haut, le Tribunal n’est pas convaincu que, si une permission d’en appeler était accordée, l’appel aurait une chance raisonnable de succès.

[20] La Demande est rejetée.

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