Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Introduction

[1] La demanderesse a affirmé qu’elle était invalide en raison d’une multitude de problèmes de santé physique et mentale, dont un trouble cardiaque congénital, la maladie de Grave, des blessures subies à la suite d’un accident d’automobile, la dépression, l’anxiété et le syndrome de stress post-traumatique. L’intimé a rejeté sa demande initialement et après révision. La demanderesse a interjeté appel de la décision en révision devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision. En application de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable, l’appel a été transféré à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») le 1er avril 2013. La division générale a tenu audience par vidéoconférence et, le 22 juin 2015, a rejeté l’appel.

[2] La demanderesse a présenté une demande de permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal (la « Demande »). Elle a affirmé que la division générale avait fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées et avait commis des erreurs de droit.

[3] L’intimé n’a pas déposé d’observations.

Analyse

[4] Pour qu’une permission d’en appeler soit accordée, il faut que la demande soulève un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] A.C.F. no 1252 (CF). Par ailleurs, la Cour d’appel fédérale a statué que la question de savoir si une cause est défendable en droit revient à se demander si le défendeur a une chance raisonnable de succès sur le plan juridique : Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, 2007 CAF 41, et Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

[5] C’est la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS ») qui régit le fonctionnement du Tribunal. L’article 58 de cette loi énonce les seuls moyens d’appel qui peuvent être pris en considération pour que la permission d’en appeler d’une décision de la division générale puisse être accordée (cette disposition est reproduite en annexe de la présente décision). Il me faut donc déterminer si la demanderesse a invoqué un moyen d’appel prévu à l’article 58 de la Loi sur le MEDS pouvant conférer à l’appel une chance raisonnable de succès.

[6] La demanderesse a d’abord soutenu que la division générale avait fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées, tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. La demanderesse a affirmé que, dans sa décision, la division générale avait ainsi erré lorsqu’elle a conclu que la demanderesse n’avait pas démontré que sa capacité avait sensiblement changé depuis le temps où elle travaillait à temps plein. Dans sa décision, la division générale a inclus un résumé complet de la preuve écrite et orale dont elle était saisie. La division générale a apprécié cette preuve pour en arriver à sa décision, et le fondement probatoire sur lequel elle s’est appuyée pour rendre sa décision a été énoncé. Je ne suis pas convaincue que cette conclusion de fait était une conclusion erronée que la division générale aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Ce moyen d’appel ne confère pas de chance raisonnable de succès à l’appel.

[7] La demanderesse a aussi allégué que la division générale avait commis une erreur de fait en concluant qu’elle n’avait pas raisonnablement suivi d’options de traitement et a cité un arrêt de la Cour d’appel fédérale à l’appui de cet argument. La demanderesse a fait observer à juste titre que la Cour d’appel fédérale, dans Lalonde c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 211, a déterminé que le décideur doit se poser la question de savoir si le refus d’un demandeur de pension d’invalidité de suivre un traitement est déraisonnable. Dans la présente affaire, la division générale a précisé les traitements qui ont été recommandés à la demanderesse et ceux qu’elle n’a pas suivis, notamment la poursuite de la médication, la participation à des séances de counseling, un traitement EMDR (thérapie de désensibilisation et retraitement par mouvements oculaires) et le fait qu’elle ait pris par deux fois son congé de l’hôpital contre l’avis de son médecin. La division générale a aussi tenu compte des explications que la demanderesse a fournies de son comportement. Je ne suis pas convaincue que la division générale ait tiré une quelconque conclusion de fait de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Ce moyen d’appel ne confère pas de chance raisonnable de succès à l’appel.

[8] De la même façon, la demanderesse a affirmé que la question de savoir si un refus de recevoir des traitements médicaux était raisonnable doit être examinée dans le contexte des circonstances du demandeur (Bulger c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 18 mai 2000, CP 9164). La division générale a tenu compte des raisons invoquées par la demanderesse pour n’avoir pas suivi des recommandations lorsqu’on lui en avait fait, a vérifié si les options de traitement proposées étaient offertes dans la localité de la demanderesse et a aussi tenu compte du délai d’attente pour accéder à un psychiatre. Je ne suis pas convaincue que la division générale n’ait pas tenue compte des circonstances de la demanderesse lorsqu’elle a déterminé qu’elle n’avait pas raisonnablement suivi les recommandations de traitement. Ce moyen d’appel ne confère pas de chance raisonnable de succès à l’appel.

[9] La demanderesse a en outre soutenu que la division générale avait commis une erreur lorsqu’elle avait déclaré que la demanderesse n’avait pas fourni de mises à jour émanant du Dr Chawla après son premier rendez‑vous avec lui, en novembre 2013. Les notes de ce médecin ont été déposées au Tribunal. La décision de la division générale fait mention de ces notes ainsi que des rendez‑vous subséquents que la demanderesse a eus avec le Dr Chawla. Ainsi, la décision renfermait une erreur quant à la question de savoir si des renseignements à jour avaient été fournis : je ne suis pas convaincue, néanmoins, que la division générale ait commis cette erreur de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. La décision de la division générale n’était pas fondée sur cette erreur. Cet argument ne constitue pas un moyen d’appel pouvant conférer une chance raisonnable de succès à l’appel.

[10] La demanderesse a aussi résumé, à l’audience, la preuve dont la division générale était saisie et a argué qu’en raison de ses limitations physiques elle ne pouvait occuper un emploi sédentaire. Cet argument ne constitue pas un moyen d’appel prévu par la Loi sur le MEDS.

[11] Finalement, la demanderesse a soutenu que la division générale, dans sa décision, avait commis une erreur de droit en ce qu’elle n’avait pas évalué son invalidité à la lumière des facteurs établis dans l’arrêt Villani c. Canada (Procureur général), 2001 CAF 248. Dans cet arrêt, la Cour d’appel a clairement déclaré que de ne pas faire cela constitue une erreur de droit. En l’espèce, la division générale, dans sa décision, n’a pas fait mention de l’arrêt Villani et n’a pas tenu compte de l’âge, du niveau d’instruction, des aptitudes linguistiques, des antécédents de travail et de l’expérience de la vie de la demanderesse. Ce moyen d’appel signale une erreur de droit et pourrait conférer une chance raisonnable de succès à l’appel.

Conclusion

[12] La Demande est accueillie au motif que la demanderesse a présenté un moyen d’appel pouvant conférer une chance raisonnable de succès à l’appel.

[13] Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond du litige.

Annexe

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social

58. (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

58. (2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

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