Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Motifs et décision

Comparutions

  • Appelante : A. B.
  • Témoin et appui : A. D.

Introduction

[1] L’intimé a estampillé la demande de pension d’invalidité présentée par l’appelante en vertu du Régime de pensions du Canada (RPC) le 9 avril 2013. L’intimé a rejeté cette demande initialement et après révision. L’appelante a porté la décision découlant de la révision en appel devant le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (BCTR) le 5 mars 2014, et cet appel a été transféré au Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal) en avril 2013.

[2] L’audience relative à l’appel a été tenue en personne pour les raisons suivantes :

  1. Plus d’une partie devait assister à l’audience.
  2. Le mode d’audience est celui qui permet le mieux à plusieurs personnes de participer.
  3. Les questions en litige sont complexes.
  4. Il manque de l’information au dossier ou il est nécessaire d’obtenir des précisions.
  5. Le mode d’audience est le plus approprié pour clarifier des éléments de preuve contradictoires.

Droit applicable

[3] Conformément à l’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable de 2012, les appels déposés devant le BCTR avant le 1er avril 2013 et qui n’ont pas été instruits par le BCTR sont considérés comme ayant été déposés auprès de la division générale du Tribunal.

[4] L’alinéa 44(1)b) du RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui :

  1. a) n’a pas atteint l’âge de 65 ans;
  2. b) ne reçoit pas une pension de retraite du RPC;
  3. c) est invalide;
  4. d) a versé des cotisations valides au RPC pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA).

[5] Le calcul de la PMA est important, car une personne doit établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au moment où sa PMA a pris fin ou avant cette date.

[6] Aux termes de l’alinéa 42(2)a) du RPC, pour être invalide, une personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée. Une invalidité n’est grave que si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider de la PMA de l’appelante, car celle-ci a déclaré qu’elle n’était pas en mesure de confirmer qu’elle était d’accord avec l’observation de l’intimé concernant la PMA. Le Tribunal doit également déterminer s’il est plus probable que le contrait que l’appelante souffrait d’une invalidité grave et prolongée à la date de fin de la PMA ou avant cette date. En se fondant sur un examen des cotisations de l’appelante, le Tribunal estime que la date de fin de la PMA est le 31 décembre 2014.

Preuve

[8]  Dans le questionnaire du RPC dont la date estampillée est le 9 avril 2013 et qui a été rempli par l’appelante, celle-ci déclare que son emploi le plus récent était à titre de conductrice d’autobus scolaire et qu’elle a cessé de travailler le 21 avril 2012 en raison d’une blessure à l’œil. Son emploi précédent était à titre de secrétaire de bureau en 2007 pendant environ sept mois. La date de naissance de l’appelante est le 2 février 1974; par conséquent, l’appelante était âgée de 39 ans au moment où elle a présenté sa demande de prestations d’invalidité.

[9] Il était inscrit que l’appelante avait une douzième année. Elle a déclaré que la maladie ou les déficiences qui l’empêchent de travailler étaient une blessure à un œil causée par une cloueuse. Elle a déclaré qu’elle avait subi trois chirurgies à l’œil, mais qu’elle ne voyait plus de son œil blessé, ce qui nuit à la concentration. Un autre problème de santé était qu’elle souffrait d’un problème de thyroïde. Elle a également déclaré qu’elle ne dormait pas bien et qu’elle était capable de conduire une voiture à raison de 10 minutes à la fois. Elle a également affirmé avoir besoin de l’aider relativement aux tâches ménagères. Aucun médicament n’a été énuméré.

[10] L’appelante a été traitée par un certain nombre de professionnels de la santé, et plusieurs rapports médicaux ont été présentés par l’appelante. Le Tribunal a lu et examiné l’ensemble de ces rapports. Cependant, les renvois dans la présente décision concerneront seulement les rapports pertinents.

[11] Selon un rapport médical du RPC daté du 9 avril 2013 et rédigé par le Dr Basati, médecin de famille de l’appelante, le diagnostic était une blessure par pénétration à l’œil gauche. Le Dr Basati a souligné que l’appelante avait été admise à l’hôpital en août 2012 pour un traitement chirurgical à l’œil. Il a déclaré qu’elle était incapable de voir de l’œil gauche et qu’elle percevait légèrement la lumière au mieux, mais qu’il n’y avait aucune acuité visuelle. L’appelante a recours à des services d’ophtalmologie pour un suivi de cet œil, mais il a souligné qu’elle a subi une chirurgie et que son œil ne s’est pas amélioré et qu’il n’y a aucune chance qu’elle retrouve la vue de l’œil gauche. Son pronostic était réservé, et il n’était pas prévu que l’état de l’œil gauche s’améliore.

[12] Selon un rapport daté du 9 août 2013 rempli par l’Hôpital ophtalmologique Dr‑Sohan‑Singh, l’appelante a subi une chirurgie au vitré de l’œil gauche. Au cours de sa dernière visite le 7 septembre 2013, l’acuité visuelle de son œil gauche demeurait à l’échelle de la perception de la lumière et d’un trouble de la projection avec un décollement total de la rétine et une déchirure géante de la rétine. Aucune autre intervention n’a été envisagée à ce stade, et il a été conseillé à l’appelante d’avoir un suivi au Canada à son retour au pays.

[13] Selon un rapport médical sommaire rempli le 9 août 2012 par l’Hôpital ophtalmologique Dr‑Sohan‑Singh au sujet de l’œil gauche de l’appelante, la dernière visite de l’appelante a eu lieu le 8 août 2012. L’acuité visuelle de l’appelante demeure à l’échelle de la perception de la lumière et d’un trouble de la projection avec un décollement inférieur de la rétine et d’une papille optique pâle avec de l’huile de silicone in situ. Aucune autre intervention n’a été envisagée à ce stade, et il a été conseillé à l’appelante d’avoir un suivi au Canada.

[14] Selon un rapport daté du 24 avril 2012 et rédigé par le Dr Anand, l’appelante a été vue la première journée après l’opération visant à retirer un corps étranger de son oeil gauche. D’un point de vue oculaire, le pronostic est très réservé en raison d’une blessure aussi grave. L’appelante a déclaré qu’elle souhaitait aller en aide pour consulter un ophtalmologiste dans ce pays.

Témoignage

[15] L’appelante a déclaré qu’elle travaillait comme conductrice d’autobus. À l’heure actuelle, elle n’a pas beaucoup d’occupations et elle ne fait aucune activité. Elle a affirmé avoir peut-être perdu sa confiance. Elle a également déclaré qu’elle se sentait fière d’être conductrice d’autobus en raison du prestige et du fait que les enfants la connaissaient. Elle a affirmé qu’elle était très sociable avant l’accident. Elle ne peut accomplir aucun travail à l’heure actuelle. Elle devient très fatiguée. Elle a déclaré que son œil droit devient parfois ensanglanté, mais qu’elle ne veut pas consulter le médecin à cet égard. Elle a affirmé avoir subi des chirurgies à l’œil en Inde en 2012 et en 2013. Alors qu’elle se trouvait en Inde, elle a consulté des médecins en homéopathie pour voir s’ils pourraient l’aider relativement à son œil gauche. À l’heure actuelle, elle ne voit rien de l’œil gauche. Elle prend des gouttes homéopathiques pour son œil gauche et des larmes naturelles également.

[16] En juillet 2015, le Dr Toussi lui a prescrit du co-escitalopram (médicament servant à traiter la dépression et le trouble d’anxiété généralisé) étant donné qu’elle souffre maintenant de crises de panique. Elle souffre parfois de crises de panique au milieu de la nuit et elle a eu deux ou trois crises de panique. En février et en avril cette année, il y a eu des moments où elle est tombée dans un état d’inconscience au cours d’une crise de panique.

[17] Le Dr Toussi a prescrit à l’appelante du Synthroid pour son problème de thyroïde. Celui-ci est sous contrôle à l’aide de médicaments.

[18] L’appelante a déclaré que la vision dans son œil droit est parfois floue et qu’elle a été dirigée vers un optométriste par son médecin de famille. Son médecin de famille a déclaré que la vision floue pourrait être un effet secondaire de l’utilisation constante de l’œil droit. L’appelante a signalé qu’elle ressent parfois une pression à l’œil droit et qu’elle souffre de maux de tête et de douleurs au cou. Elle n’a pas encore consulté l’optométriste parce qu’elle craint le diagnostic.

[19] L’appelante a déclaré avoir terminé sa douzième année en Inde en 1994. Elle n’a reçu aucune formation depuis. Elle a obtenu son permis de conduire vers 1999 ou 2000 et elle est toujours capable de conduire. Elle estime la conduite stressante, car il est difficile de voir d’un seul œil et qu’elle doit complètement tourner la tête afin de voir en direction gauche. Elle a déclaré avoir été impliquée dans un accident de voiture en 2013 dans le stationnement.

[20] L’appelante a déclaré avoir un fils de 17 ans à la maison. Il est assez indépendant, mais elle lui fait la cuisine. Elle a affirmé que les tâches ménagères lui causent du stress. Son médecin l’a dirigée vers un psychiatre, mais elle ne voulait pas consulter un psychiatre.

[21] L’appelante a également répondu aux questions du Tribunal. Lorsqu’il lui a été demandé si elle a tenté d’occuper un autre emploi, l’appelante a répondu par la négative. Elle n’a aucun jugement relativement à la perception de la profondeur pour placer des objets près ou loin d’elle. Elle a souligné qu’elle a parfois raté des marches lorsqu’elle descendait les escaliers et qu’elle a de la difficulté à verser du thé parce qu’elle ne sait pas où se situe la tasse. Lorsqu’il lui a été demandé si elle a tenté de faire du bénévolat, l’appelante a répondu par la négative. Lorsqu’il lui a été demandé si elle a tenté de composer avec sa vision d’un seul œil par d’autres moyens, comme l’ergothérapie, l’appelante a répondu par la négative. Elle a déclaré être très embarrassée.

[22] La sœur de l’appelante, Mme A. D., a déclaré que sa famille et elle étaient inquiètes au sujet de l’appelante. Celle-ci est maintenant embarrassée et elle ne veut plus quitter son domicile. Elle dépend maintenant de sa famille élargie pour obtenir de l’aide.

Observations

[23] L’appelante a soutenu qu’elle est admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. Elle souffre encore de maux de tête, et son médecin lui prescrit encore des analgésiques.
  2. L’intimé a déclaré qu’elle peut conduire, mais elle ne peut pas le faire pendant une longue période.
  3. Si elle accomplit une tâche ménagère, elle se fatigue et elle a besoin de repos.
  4. Elle se sent déprimée lorsqu’elle sort à l’extérieur parce que les personnes regardent attentivement son œil, ce qui la rend mal à l’aise.
  5. Elle se sent déprimée parce qu’elle a perdu son emploi qu’elle aimait.
  6. Elle s’est rendue en Inde pour retrouver la vue et elle a utilisé tout son argent pour couvrir les opérations et les frais parce qu’elle veut une vie normale.
  7. On ne peut plus rien faire pour améliorer la vision de son œil.

[24] L’intimé a fait valoir que l’appelante n’est pas admissible à une pension d’invalidité pour les raisons suivantes :

  1. L’appelante fonde son invalidité sur une blessure à l’œil. Elle a cessé de travailler comme conductrice d’autobus en avril 2012 en raison de cette blessure. La preuve médicale ne démontre pas une déficience qui l’aurait empêchée d’occuper un emploi adapté à sa capacité en décembre 2014 et depuis ce moment-là.
  2. Même si elle n’est pas capable de retourner occuper son ancien poste, un autre emploi n’est pas une possibilité à écarter.
  3. Il était raisonnable de s’attendre à ce que l’appelante possède des compétences transférables et qu’elle soit capable d’occuper un autre type de fonctions ou de participer à des séances de recyclage ou de formation en cours d’emploi étant donné son âge, son niveau d’instruction et de son expérience professionnelle.
  4. L’appelante n’a pas établi une invalidité grave et prolongée au sens du RPC.

Analyse

[25] L’appelante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle avait une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2014 ou avant cette date.

Grave

[26] La gravité de l’invalidité doit être évaluée dans un contexte réaliste (Villani c. Canada (P.G.), 2001 CAF 248). Cela signifie que, pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, le Tribunal doit tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau de scolarité, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[27] Cependant, cela ne signifie pas que quiconque éprouve des problèmes de santé et des difficultés à trouver et à conserver un emploi a droit à une pension d’invalidité. Les requérants sont tenus de démontrer qu’ils souffrent d’une invalidité grave et prolongée qui les rend incapables de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Une preuve médicale sera toujours nécessaire, de même qu’une preuve des efforts déployés pour se trouver un emploi et de l’existence des possibilités d’emploi.

[28] L’appelante a subi une blessure à l’œil gauche en 2012 qui a entraîné la perte de la vue depuis cet œil. She has had three surgeries but none have restored her vision. En 2012, selon le rapport de l’Hôpital Sohan-Singh, aucune intervention n’a été faite, et il a été recommandé qu’elle soit suivie au Canada. Le rapport médical le plus récent est daté du 9 avril 2013 et il a été produit par le Dr Basati, qui déclare que le pronostic est réservé en ce qui concerne l’œil gauche. Il n’a pas déclaré qu’il y avait des limitations fonctionnelles qui nuiraient à la capacité de travailler de l’appelante, autre que le fait qu’elle ne voit pas de l’œil gauche.

[29] Cependant, le Tribunal estime que l’appelante n’a présenté aucune preuve médicale démontrant une invalidité grave, ce qui est exigé (Klabouch c. Ministre du Développement social, 2008 CAF 33; Wilganowski c. Canada, 2002 CAF 373; et Ministre du Développement des ressources humaines c. Angheloni, 2003 CAF 140). Selon la preuve résumée ci-dessus, le Tribunal estime qu’aucun des médecins de l’appelante ne l’a jugée incapable de travailler. La seule limitation fonctionnelle était la perte de la vue de l’œil gauche.

[30] La preuve que l’appelante a fourni des efforts sérieux pour améliorer sa situation constitue l’un des éléments essentiels pour qu’elle soit admissible à des prestations d’invalidité. Cette exigence s’applique à l’égard de l’obligation de chercher à obtenir un traitement et à l’égard du fardeau qui incombe à tous les requérants d’établir qu’ils ont fait des efforts raisonnables et réalistes pour trouver un emploi et le conserver, tout en prenant en considération les caractéristiques personnelles dont il est question dans l’affaire Villani et son employabilité : A.P. c MHRSD (15 décembre 2009) CP 26308 (CAP).

[31] Bien que l’appelante ait déclaré avoir une vision floue de l’oeil droit, son médecin l’a dirigée vers un optométriste, mais elle ne l’a pas encore consulté. De plus, l’appelante a affirmé qu’elle a eu deux ou trois crises de panique, qu’elle est déprimée et que son médecin lui a prescrit des médicaments et l’a dirigée vers un psychiatre. Jusqu’à présent, l’appelante n’a pas consulté un psychiatre. Aucun rapport médical n’a été produit pour démontrer que l’un de ces troubles comporte des limitations fonctionnelles.

[32] En se fondant sur ce qui a été mentionné précédemment, le Tribunal estime que l’appelante n’a pas cherché à obtenir tous les traitements médicaux raisonnables ou elle ne les a pas suivis.

[33] Le Tribunal estime que l’appelante conserve une capacité fonctionnelle malgré sa limitation visuelle. Elle possède une douzième année ainsi qu’une expérience professionnelle à titre de conductrice d’autobus et de secrétaire de bureau. Elle est seulement âgée de 41 ans et elle a la capacité de se recycler. Les facteurs socioéconomiques, comme les conditions du marché du travail, ne sont pas pertinents au moment de déterminer si une personne est invalide au sens du RPC (Canada (MDRH) c. Rice, 2002 CAF 47).

[34] Lorsqu’il y a des preuves d’aptitude au travail, une personne doit montrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été vains en raison de son état de santé (Inclima c. Canada [P.G.], 2003 CAF 117).

[35] L’appelante a déclaré qu’elle n’a pas tenté de trouver tout autre emploi depuis sa blessure. Sur ce fondement, le Tribunal estime que l’appelante n’a pas déployé d’efforts pour obtenir un autre emploi.

[36] Après examen de l’ensemble de la preuve présentée par l’appelante, y compris son témoignage, le Tribunal n’est pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante souffre d’une invalidité grave au sens du RPC.

Prolongée

[37] Étant donné la conclusion selon laquelle l’appelante ne souffre pas d’une invalidité grave, il n’est pas nécessaire de rendre une décision sur le caractère prolongé de l’invalidité.

Conclusion

[38] L’appel est rejeté.

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